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Les paroissiens de Saint-Pierre du Queyroix de Limoges et la communauté des prêtres

des liens jusque dans la mort au XIVe siècle
The parishioners of Saint-Pierre du Queyroix in Limoges and the community of priests: links even in death in the 14th century
Anne Massoni

Resumos

L’église Saint-Pierre du Queyroix de Limoges abrite depuis au moins le Moyen Âge central la plus grande et la plus respectable paroisse de la ville. Située à deux pas de l’abbaye Saint-Martial, au sein du quartier appelé le Château – distinct de la Cité -, elle accueille la vie religieuse et sacramentelle des familles environnantes, parmi lesquelles se distinguent des bourgeois, riches et influents. Il est donc parfaitement naturel qu’ils aient recours au clergé de cette paroisse pour assurer la prise en charge de leur mémoire après leur mort. Or, la paroisse est également le siège d’une communauté de prêtres, sorte de proto-chapitre, très bien structuré aux XIVe et XVe siècles qui fut la bénéficiaire de dons pour le salut de l’âme de la part des membres de ces familles. Les archives conservées aux Archives départementales de la Haute-Vienne en série G permettent ainsi d’analyser les relations tissées entre laïcs et clercs à cette époque et de mettre en lumière plusieurs figures de paroissiennes.

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Notas da redacção

Data recepção do artigo / Received for publication: 28 de Fevereiro de 2024

Data aceitação do artigo / Accepted in revised form: 17 de Setembro de 2024

Texto integral

  • 1 L’histoire de la ville de Limoges au Moyen Âge est en profond renouvellement ces dernières années, (...)
  • 2 Parmi les testaments les plus exhaustifs sur les institutions religieuses de la ville, on peut cite (...)

1Au XIVe siècle, Limoges est une ville très dynamique du point de vue économique1. Ancienne ville romaine de grande ampleur, elle a la particularité d’être une localité double avec deux pôles, chacun ceinturé de remparts depuis le début de l’époque médiévale. Le moins étendu est celui qui s’organise dans la Cité autour de la cathédrale Saint-Étienne et le plus grand est le Château, à partir de l’abbaye de Saint-Martial, ancienne collégiale devenue monastère bénédictin à partir de 848. À la fin du Moyen Âge, l’équipement religieux de Limoges est dense : outre la cathédrale et l’abbaye, on y compte trois autres monastères bénédictins (La Règle, Saint-Martin et Saint-Augustin), un hôpital devenu ensuite prieuré de chanoines réguliers (Saint-Gérald), quatre couvents mendiants (mineurs, prêcheurs, carmes et augustins) mais aussi onze autres églises dont les deux du Château, Saint-Pierre du Queyroix et Saint-Michel des Lions2. Cependant, la ville n’abrite pas de collégiale urbaine d’importance : il n’y a qu’une petite église canoniale, Saint-André, devenue régulière au XIIe siècle, non loin de la cathédrale.

  • 3 L’historiographie existante ne permet pas de fournir une carte précise des limites paroissiales. Si (...)
  • 4 Louis Guibert fait état de 130 testaments dépouillés, toutes origines confondues, pour Limoges entr (...)
  • 5 Le droit coutumier de Limoges n’aborde pas directement la question du nombre des témoins présents a (...)
  • 6 Jean Tricard dresse un portrait assez catastrophiste de l’impact de la guerre de Cent Ans sur le Li (...)

2Queyroix signifie carrefour en occitan car l’église Saint-Pierre est placée entre deux enceintes, celle du XIe siècle qui enserre l’abbaye et celle du XIIIe siècle, sur l’axe principal du Château, ancien decumanus romain. Elle constitue le centre d’une paroisse qui est, de loin, la plus importante de la ville par son emprise territoriale3 et par le dynamisme économique de son quartier, alors que la Cité est plutôt la ville des clercs. L’église est desservie par un curé mais aussi par une communauté de prêtres séculiers, présentée plus longuement dans le développement. Celle-ci a laissé un fonds d’archives très riche, dont un corpus de plus d’une centaine de testaments pour la période médiévale4, auquel il faut ajouter de nombreux actes de gestion du patrimoine, ainsi que des documents de nature plus liturgique mais malheureusement, point d’obituaire. Cet article repose sur le dépouillement de 23 testaments nuncupatifs c’est-à-dire oraux et dictés en présence de témoins le plus souvent à l’article de la mort du testateur5, de 25 extraits de testaments contenant des clausules c’est-à-dire d’extraits généralement demandés par l’institution bénéficiaire des legs, de 16 actes faisant mention d’une fondation pro anima et d’un inventaire après décès, documents tous datés entre 1275 ‒ le plus ancien testament conservé dans cette série ‒ et 1402. Ces bornes chronologiques permettent d’envisager un long XIVe siècle, marqué en Limousin comme ailleurs par des événements de diverses natures dont les testaments laissent filtrer quelques éléments6. Cette documentation permet d’interroger le rôle d’encadrement religieux joué par un corps de clercs séculiers, placé à la frontière entre clergé paroissial et clergé communautaire, qui a les moyens de répondre aux demandes des fidèles par le nombre de ses membres et qui est encore plus proche de ceux-ci qu’un chapitre collégial grâce à son fort ancrage paroissial. Elle autorise également l’étude des spécificités de la préparation de la mort par une population urbaine habitant le midi du royaume de France, à travers ses préoccupations et ses dévotions, même si la médiation imposée par le recours au notaire n’est pas propice à l’expression de l’individualité. Le propos s’articulera en trois temps : qui sont les hommes et les femmes qui testent au XIVe siècle en faveur de Saint-Pierre ? Que peut-on savoir des prêtres auxquels ils font appel ? Enfin, quelles sont les modalités de l’encadrement de la mort et quels sont les liens que cela révèle au quotidien entre les laïcs et leur clergé paroissial ?

Les testateurs et testatrices attachés à Saint-Pierre du Queyroix

  • 7 Cela n’empêche pas un bourgeois de la Cité, Jean Julien, de léguer en décembre 1353 aux prêtres de (...)
  • 8 Comme à Marseille, la pratique du testament s’est démocratisée au XIVe siècle, toutes les couches d (...)
  • 9 Acte scellé par lui le 4 mai 1385 par lequel Valérie, veuve de Martial Lo Breto (Le Breton), reconn (...)
  • 10 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.
  • 11 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 et 10.

3Les testateurs du XIVe siècle sont pour l’essentiel des paroissiens de Saint-Pierre. Ils habitent pour beaucoup d’entre eux les quartiers proches de l’église, Boucherie et Manigne. Ce sont surtout des artisans et des marchands, dont plusieurs ont le titre de bourgeois de Limoges. La formulation de leur qualité est toujours “bourgeois du Château” pour bien les distinguer des bourgeois de la Cité7. Ils exercent les professions que l’on attend dans une ville importante à cette époque, sans spécialisation particulière, dans le domaine de l’alimentation, du textile, des biens de consommation, du commerce : des bouchers, boulangers, drapiers, tondeurs de draps, pelletiers, couturiers, tapissiers, corroyeurs, ceinturiers, cordonniers, balanciers, chandeliers, forgerons, orfèvres, argentiers, merciers, marchands et même manouvriers. Les testaments constituent d’ailleurs l’un des meilleurs observatoires de la variété des conditions au Château. Ces personnages sont bien sûr distingués par des niveaux de fortune différents, les métiers du textile et du métal étant les plus rémunérateurs, mais d’autres catégories plus modestes, comme les manouvriers, ont aussi accès aux fondations8. L’autre grande catégorie est constituée par le monde des gens de loi, des clercs de l’écriture, notaires, clercs jurisperiti. Ainsi, Aymeric Raymond a été notaire à Tours puis vient à Limoges où il est clerc commissaire du sceau du bailliage de Limoges. On le retrouve collationnant et scellant plusieurs actes dans le corpus9 : il teste en août 1395 et compte dans ses exécuteurs le curé Jean de Taffris en poste à Saint-Pierre depuis au moins 1370, un Martial Bardin bachelier en lois, probable frère de son épouse Jeanne Bardine, et Jacques Fornier, licencié en lois10. Ces familles sont liées entre elles ; en témoigne l’entrecroisement des fonctions au sein des testaments : Étienne Ruaud, drapier et fils de Suzanne Charrieyras qui teste en août 1366 est témoin du testament de Jeanne Quercin, veuve de Pierre Auzelet, bourgeois du Château, mère de feu Jean et grand-mère de Pierre, le 19 avril 1370 mais aussi d’Agnès Marteau, veuve de Martial Audoin des Taules également bourgeois, et mère de feu Jean et Guionne, en juin 1373, les deux fois en compagnie de Martial Quercin, fils de feu Jean Quercin11.

  • 12 En 1348, le prêtre de Saint-Pierre, Jean Alsandre, possède 6 muids de vin des vignes de Limoges, da (...)
  • 13 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 (testament en août, codicille en septembre 1360 (...)

4Ils exercent donc des professions urbaines, ce qui ne les empêche pas d’être largement possessionnés, en terres et en vignes en ville12 et dans les faubourgs installés entre les deux entités urbaines : ainsi, maître Pierre Boyol, clerc marié, issu d’une grande famille bourgeoise implantée dès le XIIIe siècle et donnant des consuls au Château, fils de Pierre, déjà clerc du château, frère de Martial et de Bernard Boyol, époux de Jeanne Jouffrene ‒ qui lui apporta 44 marcs d’argent en dot et qui peut être alors enceinte au moment du testament en août 1360, ce qui fait penser que le couple est encore jeune ‒, est largement possessionné dans Limoges vers les fossés au pied du rempart du Château, avec un treuil ou pressoir sis devant la place Saint-Gérald, un jardin derrière avec tout son équipement et un solar où est bâti un four. Mais il possède aussi une autre ”lèze“ (bande de terre cultivable) située au-dessous du cimetière de Saint-Michel de Pistorie, c’est-à-dire aux deux pas de la Cité, plus une vigne au territoire de Saint-Cessateur, paroisse suburbaine au sud-est de la ville13.

  • 14 Archives départementales de la Haute-Vienne, D 422 ; 15 G 6 ; 25 H 372 ; H sup Limoges B 337.

5Sur 65 testateurs, on compte 15 femmes (surtout des veuves), ce qui fait un peu plus de 20 % du total avec des personnalités intéressantes et des parcours de vie reconstitués dans les testaments quand elles sont âgées : Guilhelma, veuve de Pierre Geoffroi, corroyeur, possède une maison située dans la “ville du Pont-Saint-Martial" en février 130614. Elle est mère de trois garçons, Pierre Geoffroi qui est clerc et probablement aumônier de Saint-Martial dès 1333, et deux Jean, dont un est dit le Jeune, tous deux mariés, le premier à une fille de Jourdain Pinheta, bourgeois du Château dont la famille est bien ancrée dans la paroisse, le second à la fille d’un apothicaire du Château. Elle fait en tout 75 livres et 117 sous de don (quand on sait qu’elle fut dotée de 40 livres) qu’elle destine particulièrement aux membres féminins de sa famille. Ainsi, elle lègue 10 l. à la fille de Jean l’Aîné, ainsi que le lit nuptial pour la marier mais aussi un lit garni, un surcot bleu, deux coffres et un vignoble au Château à une autre petite-fille qui n’est pas encore mariée et a perdu ses deux parents, dont la fille de Guilhelma. À sa fille Catherine, déjà dotée, elle laisse une tunique verte. Revenue veuve dans sa paroisse sise sur les rives de la Vienne, elle souhaite une inhumation dans le cimetière de Saint-Pierre où elle a habité rue Vieille-Monnaie avec son époux, prévoit 15 l. pour payer les frais d’enterrement et elle demande un anniversaire pour ses parents qui sont enterrés dans celui de Saint-Symphorien du Pont, sa paroisse d’origine, dont aura soin l’héritier ou l’héritière qui aura la maison du Pont-Saint-Martial. Le fait pour elle d’appartenir à cinq confréries dont deux situées à Saint-Pierre, celles de Sainte-Catherine et des défunts du Queyroix, est un argument fort pour mesurer l’attachement qu’elle porte à ce lieu. Elle lègue à chacune 3 sous de monnaie de Limoges.

  • 15 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.
  • 16 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 ; 3 H 299.
  • 17 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8. Il est l’oncle d’un Guillaume qu’il fait son h (...)
  • 18 Voir note 5.

6Une minorité de testateurs ne sont pas paroissiens de Saint-Pierre mais choisit tout de même le clergé de cette église comme bénéficiaire de leurs dons. Cela montre encore que l’élection d’un lieu d’inhumation reste un choix libre. Le cas le plus fréquent de testateurs non paroissiens est représenté par des clercs dont la carrière les a emmenés loin du Château, voire loin de Limoges, mais qui sont probablement originaires de là et qui manifestent leur attachement à la paroisse par des fondations à l’article de la mort : ainsi avant 1275, Hélie de Savène, vicaire de l’Église de Limoges et archiprêtre d’Aubusson, dont les deux parents sont ensevelis au cimetière de Saint-Pierre et qui souhaite les y rejoindre15 ; Martial Marteau, chanoine de Limoges (mais dont toute la famille habite le Château et qui y achète une maison en 1313), qui fonde avant 1339 à Saint-Pierre une vicairie à l’autel de Sainte-Marie avec diacre et sous-diacre16, et même, Bernard de Nexon (village au sud de Limoges), qui appartient probablement à la famille de bourgeois du Château attestée dès 1235. Devenu archidiacre d’Anvers à Cambrai et clerc de la chambre apostolique en Avignon, il lègue 200 florins à Saint-Pierre d’après une clausule extraite en juin 136117. Le testament de Suzanne Charrieyras de 1366 nous apprend que les exécuteurs de Bernard firent construire un tombeau récent dans l’église, par ailleurs convoité par la testatrice18.

  • 19 Voir note 10.
  • 20 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6 ; GUIBERT, Louis – La famille limousine d’autre (...)
  • 21 Rien de commun effectivement avec les constatations faites à propos des testateurs marseillais sur (...)
  • 22 Les Dominicains ont obtenu de l’archevêque de Bourges au XIIIe siècle le privilège de pouvoir inhum (...)
  • 23 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10 et 7.
  • 24 Voir la note 21.

7On constate avec ces exemples que le polycentrisme religieux existe bien sûr à Limoges, laissant aux fidèles le choix de la destination de leurs bienfaits. Les deux concurrences les plus importantes pour le clergé de Saint-Pierre sont, d’après les testaments complets, les confréries (une dizaine citée) installées surtout dans la même église mais aussi dans la chapelle de la Courtine, à deux pas de l’abbaye Saint-Martial, puis l’abbaye Saint-Martial mais plutôt pour la société des prêtres séculiers qui y siège que pour la communauté monastique, enfin les mendiants franciscains et dominicains. Ainsi Aymeric Raymond fonde en 1395 un anniversaire annuel, ainsi que chaque lundi une messe des morts et chaque samedi une messe de la Vierge, avec inscription à l’obituaire de Saint-Pierre mais si les prêtres du lieu refusent, il lègue tout à Saint-Martial19 ; Pierre Raynaud, fils de Jean et Audoyne, dans le milieu des drapiers, est encore sans descendant en octobre 136220. Il rend à sa mère sa dot de 250 livres ainsi qu’une rente achetée sur celle de Cécile, sa grand-mère maternelle défunte. Il est largement possessionné avec une maison située devant le cimetière de Saint-Pierre qu’il lègue à la communauté des prêtres du lieu, et une autre maison qu’il donne aux consuls du Château après la mort de sa mère, pour que ces derniers y tiennent commerce ou exercent l’office du consulat en y tenant les assemblées publiques. Son aisance financière lui permet de fonder des anniversaires auprès des prêtres séculiers de Saint-Pierre et de Saint-Martial, ou encore chez les Mineurs pour son père et ses deux frères décédés, mais il veut être inhumé au cimetière de Saint-Martial. En aucun cas, l’influence des mendiants n’écrase tous les autres lieux, comme en Provence ou dans le Comtat Venaissin21. En mai 1275, Pierre Marteau veut être inhumé chez les Prêcheurs22, où est déjà sa grand-mère, et où deux de ses frères ont fait profession, mais il veut quand même des funérailles à Saint-Pierre puis chez les Dominicains et fait des legs pieux à la confrérie des Pauvres à vêtir ainsi qu’à deux communautés de moniales23. Et Pétronille Lo Tellier prévoit 35 l. pour Saint-Pierre, les Mineurs, trois confréries, mais aussi ‒ legs charitable relativement rare dans la documentation consultée ‒, les pauvres de Saint-Gérald qui seront présents à son enterrement, ainsi que ceux d’un hôpital placé à côté de l’église Saint-Maurice et elle pense même à tous les prisonniers du Château et de la Cité24.

La communauté des prêtres de Saint-Pierre du Queyroix

  • 25 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.

8La communauté des prêtres séculiers de Saint-Pierre (presbiteri communitatis seu societatis ecclesie Sancti Petri de Quadruvio castri Lemovicensis) n’est pas la seule à exister au Château puisque plusieurs autres sont attestées, notamment à Saint-Michel des Lions et à Saint-Martial. D’ailleurs, il arrive qu’un testateur fasse plusieurs fondations auprès d’elles, comme Jean Audoyn en mai 1327 qui fonde un anniversaire à célébrer un jour par semaine par les prêtres de Saint-Pierre, de Saint-Michel, du monastère de Saint-Martial, mais aussi des Arènes hors du Château, et une messe annuelle au jour de son obit dans la chapelle de la Courtine25.

  • 26 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 68.

9La communauté de Saint-Pierre est attestée depuis au moins 1239-124026 et elle compte un nombre variable de membres. On ne dispose pas de listes complètes pour le XIIIe siècle mais on peut en suivre les évolutions au XIVe, en constatant la saignée qu’a représentée la Peste noire pour ces clercs:

Date

Nombre de prêtres

1307

22

1322

17

1329

21

1330

20

1336

20

1344

15

1351

9

1353

11

1362

9

1365

10

1373

13

1382

12

1385

12

1436

13

  • 27 Il semble que les prêtres communalistes de Saint-Pierre soient particulièrement nombreux en compara (...)
  • 28 Les deux bayles sont P. de Merchato et B. Symonis déjà en 1239-1240, et le syndic apparaît en 1475, (...)
  • 29 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 39.
  • 30 Le partage de leurs revenus devait se faire sur le principe de l’égalité, comme dans beaucoup d’aut (...)
  • 31 Voir note 12.
  • 32 Voir note 5.
  • 33 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 27 (1313), 15 G 62 (1322), 15 G 6 (1336).
  • 34 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.
  • 35 En 1428, la cour de l’official de Limoges se tient dans cette chapelle car les chanoines se sont ré (...)
  • 36 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 77 et 106.
  • 37 TABBAGH, Vincent – ”Portraits de chanoines en banquiers : les chapitres cathédraux de Paris et de R (...)
  • 38 Il semble que les prêtres filleuls des communautés limousines habitaient pour beaucoup dans leur fa (...)

10La communauté ne retrouve le chiffre de 28 membres qu’en 149727. Ces clercs se comportent comme un chapitre, sans en avoir le statut juridique dans la mesure où ils ne disposent pas d’un bénéfice. D’ailleurs, ils n’ont pas de supérieur comme un doyen ou un prévôt, et ne sont gérés que par deux bayles (bajuli) en place déjà depuis le XIIIe siècle, puis un syndic au XIVe siècle représenté par un procureur28. En revanche, tout est fait pour les confondre avec des chanoines, ce qui explique en grande partie leur succès, ce statut proche leur conférant une particulière dignité dans les rangs du clergé. Ils ne se disent pas chanoines mais presbiteri (ils le sont tous) et même consocii en 132929, ce qui insiste sur la fraternité du groupe, comme dans les termes communitas et societas (plusieurs d’entre eux font des prêtres de la communauté leurs héritiers universels)30. Ils disposent d’une aumusse, couvre-chef typique du chanoine séculier, puisque Jean Alsandre, prêtre de la communauté attesté de 1307 à 1344, et qui doit mourir de la peste en 1348 en a une dans son inventaire après décès31. De même, Richard Lo Borcier, attesté de 1351 à 1365 donne en novembre de cette année à un pauvre prêtre à choisir par ses exécuteurs ‒ et futur membre de la communauté ? ‒ son bréviaire, sa meilleure robe parmi les siennes, son aumusse et son meilleur surplis32. Surtout, ils se disent assemblées à l’heure du chapitre en 1313 et 1322 (congregatis in simul hora capitulandi / congregati in capituli hora capitulandi, prout est moris inter eos) et la cloche sonne avant le chapitre en 133633. En 1330, on apprend qu’ils sont réunis dans la chapelle du Civoire qui flanque l’église au sud et qui est depuis devenue un ossuaire (congregatis in civorio, ubi per tractatibus et negotiis communitatis et societatis ipsorum consueverunt congregari)34, il s’agit de la chapelle du cimetière sise derrière le chevet de l’église, ce qui associe d’emblée les prêtres à leurs principales fonctions35. Quant à leur mode de vie, il est mal connu, ils ont une maison probablement commune attestée en 1301 puis 1304 et 130836, qui comporte une chambre à l’étage où se fait l’inventaire après décès de Jean Alsandre, qui est aussi curé d’Uzurat, au nord de Limoges. Il n’est pas sûr que Jean ait habité également là, peut-être seulement quand il officiait à Saint-Pierre, car il possédait trois maisons contiguës à côté de la fontaine d’Eygoulène, soit à deux pas de l’église Saint-Michel des Lions. Sa garde-robe à sa mort en 1348 est assez remarquable : trois vêtements de tissu de Damas dont un avec une capuche fourrée d’écureuil ainsi qu’un surcot en drap de Narbonne fourré de vieille fourrure, des vêtements liturgiques : outre son aumusse, une chasuble avec étole et manipule, deux surplis ainsi qu’un bréviaire et peut-être un évangéliaire. Le mobilier est assez classique mais ce qui indique le niveau de fortune du personnage est un volume important de lettres, de notes sur parchemin retrouvées dans ses coffres qui sont des reconnaissances de dettes pour argent ou blé prêtés par Jean depuis au moins 1326 ; en cela aussi, la communauté se comporte comme un chapitre, instance essentielle du prêt à intérêt dans le monde urbain en acquérant des rentes rachetables, progressivement autorisées par le droit canon37. Il est certain qu’en 1365, Richard Lo Borcier habite en son hôtel où une servante le soigne. La vie commune s’en tient donc peut-être aux assemblées régulières et aux repas pris en commun. Par ailleurs, nous avons vu que la communauté était bénéficiaire de plusieurs legs de maisons particulières, probablement relouées38.

  • 39 Déjà au XIe siècle, le chroniqueur Adémar de Chabannes raconte que l’évêque Géraud (1014-1022) est (...)
  • 40 Ces considérations démographiques, associées au succès rencontré par la fondation funéraire personn (...)
  • 41 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.

11Ce proto-chapitre ne deviendra jamais chapitre, et il est totalement toléré par l’évêque de Limoges dans la mesure où cette église existe depuis au moins l’époque carolingienne et constitue l’un des lieux où l’évêque fait station lors de sa joyeuse entrée39. Avant-poste épiscopal, face à Saint-Martial, ayant probablement abrité une ancienne communauté canoniale éteinte au Moyen Âge central, l’église a accueilli les rangs de plus en plus nombreux d’un clergé pléthorique à partir du XIIIe siècle40. Il arrive d’ailleurs que le curé de Saint-Pierre soit chanoine à la cathédrale, tel en 1307 maître Jean de Gensanis41 mais on ne sait s’il fait partie de la communauté.

  • 42 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10 (1395), 15 G 27 (1436).
  • 43 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 104, 15 G 6.
  • 44 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 104, 15 G 6, 15 G 77, 15 G 106.
  • 45 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6, 15 G 62.
  • 46 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 40, 15 G 62, 15 G 6, 15 G 27.
  • 47 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 27, 15 G 7, 15 G 25, 15 G 9, 15 G 47.
  • 48 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 124, 15 G 6, 15 G 9, 15 G 21, 15 G 10.

12Une question se pose : sont-ils des prêtres filleuls, qui doivent être originaires de la paroisse comme c’est le cas en Limousin et en Auvergne, à la fin du Moyen Âge ? Il semble que non, même si Pierre Laveros, prêtre de la communauté attesté de 1365 à 1385, qui veut être inhumé au cimetière devant le civoire de l’église Saint-Pierre, fait en juillet 1395 un legs à son filleul, Pierre Brugerii, qu’on retrouve dans la communauté en mai 143642.. Il y a peut-être, quelquefois, transmission de parrain à filleul. En tout cas, certains prêtres restent en charge très longtemps : Guillaume de Solignac est prêtre de 1284 à 133643, Jean Fabri de la Porte de Bancléger est prêtre et bayle de la communauté attesté entre 1293 et 130744, Gérald Muza de 1307 à 133045, Guillaume Porret de 1311 à 134446, Guillaume de Paris de 1344 à 138647, Jean Negraud de 1351 à 138548, ce qui explique aussi les liens avec les paroissiens, sans compter leurs origines sociales : d’après les listes dont on dispose, loin d’être exhaustives, au XIIIe siècle, ils sont issus non pas de l’aristocratie (à la différence du chapitre cathédral) mais de la bourgeoisie du Château. Quelques indices montrent un recrutement aussi parmi des marchands plus modestes dont les bouchers au début du XIVe siècle. Jusqu’à 1340 environ, quand on dispose de listes plus complètes, l’on note une forte proportion de noms de familles de la bourgeoisie, deux tiers en 1307, plus ou moins la moitié ensuite, peut-être "casés” là dans le contexte économique difficile du XIVe siècle. À partir de 1340, les prêtres qui sont issus de ce milieu se font rares, ce n’est clairement plus un enjeu à ce moment-là pour les familles de l’élite bourgeoise, celle d’une bourgeoisie qui, plus fermée, se fixe au XIVe siècle, et cela dénote un recrutement général plus modeste, avec une paupérisation voire une prolétarisation de cette communauté.

  • 49 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 124 (1352), 15 G 8 (1365), 15 G 8 (1366).
  • 50 Voir note 9.

13Les testaments des prêtres de la communauté montrent néanmoins leurs liens pérennes avec certains personnages de la paroisse : Richard Lo Borcier déjà cité, fait en 1365 de Jean Bordet, corroyeur du château, son héritier universel et ses exécuteurs sont ce Jean, un Pierre Botin, bourgeois et drapier, et un prêtre de la communauté, maître Étienne Galochier, auquel il lègue son livre dit Sanctorum notat, attesté prêtre de la communauté entre 1352 et 136649. Et il cite aussi Marguerite comme légataire, laquelle habite avec Pierre deu Reysses (clerc juré et commissaire qui dresse l’inventaire après décès de Jean Alsandre en 1348 devant l’official de la Cour de Limoges). On peut aussi citer Suzanne Charrieyras, déjà entrevue, qui choisit Étienne Galocher comme témoin de son testament et l’un de ses légataires ; il devra distribuer aux prêtres de la communauté 60 sous de rente pour sa fondation. Enfin, en 138550, Valérie Lo Breto cède sa maison aux prêtres à condition pour eux de l’accueillir dans la maison de la société "devers la cour des consuls du Château“, dans une chambre avec cuisine contiguë. La communauté suscite donc des auto-traditions de laïcs comparables à celles que l’on rencontre au profit de maisons religieuses, ce qui repose aussi concrètement la question du mode d’habitation des prêtres de la communauté, pour être en mesure d’accueillir des femmes laïques.

La prise en charge de la mort des testateurs

  • 51 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6. La sépulture familiale, si elle existe, doit ê (...)
  • 52 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.
  • 53 Avant 1335, Hélie Ameilh, bourgeois, est père d’Hélie et de Nicolas, clerc jurisperitus, ainsi que (...)
  • 54 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 122.

14La première fonction demandée aux prêtres est d’assurer l’enterrement du défunt et les cérémonies associées. En cela, ils viennent en renfort de la charge du curé. Il faut noter que sont ainsi mentionnés beaucoup de testateurs qui veulent une inhumation dans un endroit particulier, soit au cimetière (16 sur 65), soit (mais moins souvent) dans l’église. Plaisance Boyol, veuve de Jean Boyol, mère de trois fils et de trois filles, veut ainsi être inhumée en mars 1304 dans la "tombe aus Boyols”, avec son défunt mari51 ; Aymeric Ouzeu veut être inhumé avec ses parents Philippe et Léonarde des Moulins, en novembre 1352 au cimetière dans le tombeau familial52. Quant aux tombeaux de l’église, on peut imaginer qu’ils prennent place dans les chapelles, ou tout au moins près d’un autel qui sert souvent de repère : celui des Ameilh53 n’est pas loin de l’autel Saint-Jacques. Il est évident que l’inhumation dans l’église est ainsi moins anonyme qu’au cimetière et davantage pensée dans un lien dynastique. La présence d’un tombeau familial à Saint-Pierre a pu faire penser que tous les membres de la famille devaient y reposer. S’élève ainsi un conflit réglé en octobre 1341 entre le curé de Saint-Pierre et les frères mineurs à propos d’une petite fille inhumée par ordre du premier dans le tombeau des Marteau, ses ancêtres maternels, alors que son père et son grand-père, Pierre et Gui Julien, avaient expressément choisi la chapelle des Mineurs où ils avaient fondé leur tombeau. Il est décidé que le corps de Pétronille resterait un an à Saint-Pierre puis serait transféré au couvent54.

  • 55 Qui apparaît effectivement entre 1330 et 1365, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6 (...)
  • 56 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.
  • 57 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 9.

15Il est fréquent que les femmes précisent ce que deviendra le drap mortuaire recouvrant leur cercueil : Suzanne Charrieyras s’offrira un drap d’or placé sur son corps le jour de son décès (d’une valeur de 10 florins d’or) et prévoit que cela servira à faire une capsa (chape) pour compléter un habit sacerdotal servant à desservir l’office divin à Saint-Pierre. En 1395, Jean de Gouzon, notaire, demande simplement un drap noir de grosse laine avec une croix rouge cousue dessus avant d’être inhumé dans le tombeau où a été enterré Jean Chrétien, prêtre de la communauté55, et pour le luminaire, 40 torches de cire comme celles qui brûlent tous les jours devant le Saint-Sacrement, près de l’autel majeur pendant la messe de la paroisse56. Les prêtres sont aussi très sollicités pour réciter les anniversaires et célébrer les messes pour les testateurs. Le schéma le plus classique est toujours le même, tel celui demandé par Douce Vialeyrencha qui en août 1372 fonde deux anniversaires, l’un le jour de son décès, l’autre pour le salut de l’âme de feu son fils Ymbert et de tous les défunts, le jour du décès dudit Ymbert, avec une absoute, chaque dimanche, après la procession sur son tombeau et celui de ses parents ; de même, le lundi une procession et une absoute dans le cimetière pour son âme et celle des fidèles défunts57.

  • 58 C’est la conclusion à laquelle parvient également M.-C. Marandet pour le Toulousain, à la différenc (...)

16Certains testateurs plus riches font des fondations très importantes : Richard Lo Borcier, prêtre de la communauté déjà rencontré, fonde 400 messes pour son âme et celle de ses parents en 1365, dont 200 pour les fidèles défunts, 100 offices de la Vierge, 100 autres du Saint-Sépulcre, et 40 psaumes à la suite. Il veut que le célébrant de la messe à Saint-Pierre s’en charge chaque dimanche pendant un an après son décès, avec absoute sur le tombeau, pour lui et dame Jeanne Botine dont on se demande qui elle est pour lui, peut-être sa mère ou sa grand-mère ; Jean de Gouzon fonde 100 messes en 1395, dans un délai d’un an à compter de sa mort, et chaque prêtre célébrant aura 10 deniers. Ces cas restent néanmoins isolés et ne permettent pas de conclure que les Limousins du XIVe siècle partagent la piété flamboyante d’autres fidèles de la même époque58.

  • 59 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.

17Vu la lourdeur de la charge des fondations accumulées, les testateurs prévoient cependant des garde-fous : Jean de Gouzon charge le curé de Saint-Pierre de surveiller la célébration de son anniversaire annuel, avec vigile, messe et absoute sur son tombeau, et lui donne le pouvoir de retirer aux prêtres célébrants leurs 20 sous de rente jusqu’à ce que cela s’arrange. En mai 1387, Jean Brun veut un anniversaire avec vigile et messe, absoute générale sur le tombeau, chaque année, le samedi après l’Ascension et un anniversaire le jour de son décès, mais si les prêtres négligent cela, les rentes iront aux bayles de la confrérie des Pauvres à vêtir59. Là encore, les testateurs savent utiliser tous les ressorts des institutions religieuses à leur service.

  • 60 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 118.

18À force de fondation, on comprend effectivement que les prêtres aient eu du mal à s’y retrouver. C’est entre autres pour pallier ces difficultés que l’un d’eux a rédigé en 152560 un memorandum qui met à plat le fonctionnement de certaines célébrations d’anniversaires ‒ qui ne datent que du XVe siècle mais ce type de document existait peut-être plus tôt ‒ : il y a dans la communauté deux prêtres désignés comme hebdomadiers pour un temps donné, le grand et le petit. Le premier se charge de six semaines de célébrations continues, le petit de trois semaines. Et la rotation entre les prêtres se fait le lundi. Le memorandum procède ensuite jour par jour, récapitule combien de messes sont à célébrer (par exemple, dix le lundi, sept le mercredi, sept le jeudi), où (à l’autel paroissial, aux autels de Saint-Nicolas, de la Sainte-Croix, de Saint-Jacques, de Sainte-Marguerite, etc.) avec souvent mention de la tombe du testateur toute proche, pour qui et comment ‒ à voix haute ou voix basse, messe de la Vierge ou messe des défunts. Il est précisé que, le dimanche, la messe à l’autel secondaire doit commencer à l’offertoire de la messe paroissiale célébrée au grand autel. Et, on l’aura remarqué, l’absoute sur la sépulture est très fréquente après la messe. Le livret mentionne aussi que des personnes de la famille du défunt peuvent être présentes pendant la célébration ; si c’est le cas, il faut que le prêtre se retourne vers elles après l’offertoire. D’ailleurs, la messe commémorative est sonnée par la cloche, dite matitutinale, celle qui sonne la messe du petit matin, probablement autant pour le personnel ecclésiastique que pour la famille.

  • 61 Il faudrait étudier plus précisément les dévotions individuelles qui peuvent apparaître au travers (...)
  • 62 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6. Faut-il lire dans les prévisions du père pour (...)
  • 63 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.
  • 64 Son frère est Martial Marteau, chanoine à la cathédrale et archidiacre de la Marche, tout en étant (...)
  • 65 Dans le Toulousain, l’association de la lumière des chandelles avec le Saint-Sacrement est égalemen (...)
  • 66 Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°2-3v et LEMAITRE, Jean-Loup; VIELLIARD, Fra (...)
  • 67 ARDANT, Maurice – Saint-Pierre-du-Queyroix de Limoges, notice historique et descriptive sur cette é (...)
  • 68 Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°42.
  • 69 Les dates de première attestation montrent que l’initiative prise par Jean Marteau s’inscrit dans u (...)
  • 70 À Colmar où la fête est célébrée pour la première fois par les chanoines de la collégiale Saint-Mar (...)
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  • 72 C’est le cas aussi en Provence, STOUFF, Louis – ”Les Provençaux et la mort dans les testaments (XII (...)
  • 73 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 11 ; GUIBERT, Louis - La famille limousine d’autr (...)

19Cependant, la première fonction de la communauté des prêtres est de chanter les heures à l’église et quelques paroissiens profitent de cette compétence du collège pour demander la célébration de dévotions particulières après leur mort. Cela constitue des demandes spirituelles plus originales au milieu d’un tableau très classique61. N’en retenons qu’un exemple dans la famille des Marteau, présente sur des décennies au Château. On a déjà parlé de Pierre Marteau qui, en 1275, partait à Compostelle, laissant cinq fils et quatre filles, et dont deux frères étaient dominicains62. Deux générations plus tard en juin 133063, un Jean Marteau, drapier qui habite rue Manigne et souhaite être inhumé à Saint-Pierre, fait rédiger un acte de fondation remarquable. Sa famille a encore donné plusieurs membres à l’Église64 et il n’est pas impossible que sa sensibilité religieuse soit de ce fait plus affûtée. Il illustre sa dévotion particulière au Corps du Christ, en fondant une solennisation de la fête prise en charge par les prêtres de la communauté, chaque année, le jeudi après l’octave de Pentecôte. La dévotion au Corps du Christ à Limoges au XIIIe siècle est sensible par l’existence d’une ou plusieurs confréries dites des Chandelles et du Pavillon dès 121465. La confrérie du Pavillon est unie à celle des Chandelles, à Saint-Pierre du Queyroix, en 1388 car elles ont le même but : celui de porter la communion aux moribonds, mais aussi aux malades, notamment aux trois fêtes d’obligation que sont Pâques, Noël et Pentecôte. Mais il semble qu’il s’agisse plutôt de la prise en charge du sacrement de l’extrême-onction avec port du Saint-Sacrement protégé par un dais que d’un culte rendu à l’Eucharistie66. Plus proche d’une association de dévotion, une confrérie dite du Saint-Sacrement aurait été fondée dès 123567 à l’église Saint-Pierre mais cela semble trop précoce par rapport à l’institution du jour de la Fête-Dieu en 1264 par Urbain IV. En revanche, il est certain que la confrérie dite du Sacrifice existe en 1295 car elle est citée à cette date dans l’acte d’union de 138868, sans que l’on sache quel rôle est le sien. Les études portant sur la célébration de la Fête-Dieu qui portent notamment sur Liège, lieu de sa naissance, l’Allemagne, l’Espagne et la Provence69, ont montré que l’essor de la fête date surtout du XIVe siècle après que Jean XXII l’eut incluse dans les Clémentines en 1317, en introduisant l’usage d’une procession en plein air, ce que ne prévoyait pas la bulle Transiturus de hoc mundo d’Urbain IV. Les itinéraires pris par ces processions correspondent souvent au territoire de la paroisse, sauf quand ils sont organisés par les autorités communales, ce qui n’est pas le cas à Limoges. En effet, l’initiative semble prise par ce particulier qui veut, dès la veille de la fête, la célébration des vêpres et des complies, avec quatre chantres pris parmi les communalistes de Saint-Pierre, en chapes et en bourdon, dont deux avec des encensoirs pour commencer à entonner les psaumes. Puis le jour même70, Jean énumère la célébration par eux des sept heures du jour : les matines avec huit des prêtres en chapes dont quatre chantres pour entonner les chants et diriger les autres, puis prime et tierce. Intervient alors en fin de matinée la procession qui a la particularité d’honorer particulièrement le fondateur : tous iront en chapes par la ville avec les autres clercs désireux d’honorer le Saint-Sacrement, et quand ils seront parvenus à la partie montante de la rue Manigne, ils s’arrêteront devant la maison de Jean et diront l’antienne Inter natis mulierum ou celle qu’ils voudront. Après être rentrés à Saint-Pierre, ils célébreront la messe solennelle puis les offices de sexte, none, vêpres et complies. Jean prévoit bien sûr des distributions pour les présents à chaque heure. Et le lendemain est ajoutée la cérémonie proprement mémorielle pour la famille Marteau : les mêmes prêtres (dont huit en chapes pour dire le De Profundis) devront célébrer une messe des défunts avec diacre et sous diacre après la sonnerie des cloches, et l’anniversaire de Jean, sur son tombeau à l’autel de Saint-Nicolas. Ce dernier demande enfin une recordatio chaque dimanche. En échange du don, les prêtres inscriront son nom sur le liber commemorationum, où ils inscrivent les noms des bienfaiteurs c’est-à-dire l’obituaire perdu. Cette "privatisation” de la procession dont on ne sait si elle reprend le dais pour protéger l’hostie dans l’ostensoir, appartient au registre de l’évergétisme puisqu’in fine, toute la communauté en profite. Il ne semble pas que la procession donne alors lieu aux réjouissances et aux jeux théâtraux qui feront son succès aux XVe et XVIe siècles71. Cette pratique est reprise dans le cadre de cérémonies funéraires qui valorisent la procession au détriment des autres gestes72 : en 1389, Adémar de Solignac, bourgeois du Château, souhaite ainsi qu’à la fête de la Nativité de la Vierge le 8 septembre, les prêtres de Saint-Pierre qui sortent de l’église en procession avec une statue de Notre-Dame s’arrêtent devant la maison paternelle pour chanter une antienne mariale73.

20La paroisse de Saint-Pierre du Queyroix fut donc au XIVe siècle à Limoges un lieu important de l’encadrement de la mort pour la population la plus dynamique et la plus riche de la ville. Les testaments, malgré leur forme convenue, permettent d’avoir un aperçu de la vie des paroissiens et des paroissiennes, dont plusieurs sont aussi de condition plus modeste. Il ressort de cette documentation, et notamment des clausules que les prêtres de Saint-Pierre ont fait consciencieusement dresser quand ils ne disposaient pas du testament dans son entier, une image constante des liens intenses tissés entre eux et les fidèles, pendant plusieurs siècles. Moins prestigieuse qu’un chapitre collégial, cette communauté n’en assurait pas moins une liturgie dense, le plus souvent fidèle aux vœux des moribonds et il n’est pas rare que l’un ou l’autre de ces prêtres soit aussi choisi par le testateur ou la testatrice comme exécuteur testamentaire, ce qui témoigne de la grande confiance que l’un ou l’une faisait à l’autre. On aura noté combien cette société cléricale est également docile pour exécuter des cérémonies voulues par tel ou tel notable, plus élaborées que les commémorations habituelles, notamment ici dans le cadre de la Fête-Dieu. Cela revèle enfin la porosité des univers entre clercs et laïcs pour que ces marchands soient si précis dans le détail des éléments d’une fête dont ils sont les promoteurs et dont « leurs » prêtres sont les exécutants. Cette étude a montré combien le sujet des relations entre clergé paroissial et fidèles, consolidées pour la mémoire des morts, était riche. Pour en faire état de manière plus complète et ajouter la petite pierre limousine aux synthèses sur la spiritualité des citadins dans le cadre paroissial, il faudrait une investigation des sources d’une tout autre ampleur.

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Bibliografia

Sources

Sources manuscrites

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, 1 G 1 fol. 97, 139, 176-177, 212.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 4, 6, 7, 8, 9, 10, 15, 17, 25, 27, 39, 40, 47, 49, 62, 68, 77, 104, 106, 108, 118, 122.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, 3 H 299.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, 2 EE non classé, boîte 97.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 13, volume III, folios 1-56, ici fol. 1.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°2-3v.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°42.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, D 422.

Limoges, Archives départementales de la Haute-Vienne, 25 H 372.

H sup Limoges B 337.

Sources imprimées

CHABANNES, Adémar de – Chronique. Trad. Y. Chauvin et G. Pon, Turnhout: Brepols, 2003, livre III, chap. 18.

LEGROS, Abbé Martial – ”Mélanges ou recueil de pièces justificatives pour servir à l’histoire du diocèse de Limoges et de la province du Limousin ” (tome 1). –Provient des manuscrits de l'abbé Legros. Limoges, 1778-1787.

Études

ARDANT, Maurice – Saint-Pierre-du-Queyroix de Limoges, notice historique et descriptive sur cette église. Limoges: Ardant frères, 1851.

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CARON, Bertrand – Les coutumes du château de Limoges. Élaboration d’un droit urbain en pays de langue d’oc (XIIIe-XVe siècles). Paris: École nationale des Chartes, 2010.Thèse de l’École nationale des Chartes.

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DEBUS KEHR, Monique – ”La Fête-Dieu à Colmar à la fin du Moyen Âge”. Revue d’Alsace [En ligne], 141 (2015), mis en ligne le 01 octobre 2018, consulté le 09 octobre 2023. URL: http://journals.openedition.org/alsace/2364 ; DOI : https://doi.org/10.4000/alsace.2364.

GUIBERT, Louis – "Anciens statuts du diocèse de Limoges (XIIIe, XIVe et XVe siècles)”. Bulletin historique et philologique du Comité des travaux historiques et scientifiques, (1888), p. 263-272.

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SCHNEIDER, Thomas – Fortune, pouvoir, spiritualité : profils de familles patriciennes du Château de Limoges, 1450-1560. Limoges: Université de Limoges, 2016. Mémoire de Maîtrise.

STOUFF, Louis – “Les Provençaux et la mort dans les testaments (XIIIe-XVe siècle)”. In BIGET, Jean-Louis, et. al. (eds.) – La mort et l’au-delà en France méridionale (XIIIe-XVe siècle). Toulouse: Privat, 1998.

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TARBOCHEZ, Gaëlle – ”Les communautés de prêtres séculiers en France à la fin du Moyen Âge”. Les associations de prêtres en France du Moyen Âge à l’époque contemporaine, Revue d’histoire de l’Église de France, 93/230, (2007).

TRICARD, Jean – Les campagnes limousines du XIVe au XVIe siècle. Originalité et limites d’une reconstruction rurale. Paris: Publications de la Sorbonne, 1996.

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Notas

1 L’histoire de la ville de Limoges au Moyen Âge est en profond renouvellement ces dernières années, notamment grâce à des travaux universitaires au premier rang desquels il faut citer SCHNEIDER, Thomas – Fortune, pouvoir, spiritualité : profils de familles patriciennes du Château de Limoges, 1450-1560. Limoges: Université de Limoges, 2016, p. 229. Mémoire de Maîtrise. L’auteur écrit actuellement une thèse de doctorat sur Une ville et son élite dans l’Aquitaine médiévale : le Château de Limoges et sa bona gens, de l’émergence à la soumission politique, 1088-1276. Qu’il soit vivement remercié pour la relecture attentive qu’il a faite de ce texte et les ajouts qu’il y a portés. En attendant la publication de ces travaux, on doit renvoyer aux synthèses classiques, sur la situation du Château : BARRIÈRE, Bernadette – "La primauté du château dans l’affirmation des communautés urbaines (XIIIe siècle)”. In PÉROUAS, Louis (dir.) – Histoire de Limoges. Toulouse: Privat, 1989 (Univers de la France), pp. 83-103 ; sur les testaments des bourgeois, GUIBERT, Louis – La famille limousine d’autrefois d’après les testaments et la coutume. Limoges: Vve Ducourtieux/Leblanc, 1883; LOUIS, Sara – La spiritualité des laïcs dans le diocèse de Limoges, principalement d’après leurs testaments, 1220-1520. Poitiers: Université de Poitiers, 1979. Thèse de 3e cycle.

2 Parmi les testaments les plus exhaustifs sur les institutions religieuses de la ville, on peut citer celui de Guillaume de Marcilhac, chanoine de la collégiale du Dorat dans le diocèse de Limoges, qui teste en juin 1394 en faveur des prêtres de Saint-Pierre qu’il fait ses héritiers universels, et comprend dans ses légataires l’évêque de Limoges, l’”édifice” (la fabrique) de la cathédrale, les hôpitaux de Saint-Martial et de Saint-Gérald, les quatre couvents mendiants de la ville, deux confréries et son chapitre du Dorat, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.

3 L’historiographie existante ne permet pas de fournir une carte précise des limites paroissiales. Si l’on se fie aux documents de l’époque moderne, on peut préciser que le territoire urbain de la paroisse Saint-Pierre (il y a aussi quelques villages) s’étend dans l’enceinte du Château du XIIIe siècle, dans toute sa partie sud en deçà du decumanus, sauf le quartier Lansecot, jusqu’à la chapelle Saint-Aurélien.

4 Louis Guibert fait état de 130 testaments dépouillés, toutes origines confondues, pour Limoges entre 1223 et 1465, cf. GUIBERT, Louis – La famille limousine d’autrefois d’après les testaments et la coutume, p. 5.

5 Le droit coutumier de Limoges n’aborde pas directement la question du nombre des témoins présents au moment de la rédaction d’un testament ni celle de l’institution d’héritier, cf. CARON, Bertrand - Les coutumes du château de Limoges. Élaboration d’un droit urbain en pays de langue d’oc (XIIIe-XVe siècles). Paris: École nationale des Chartes, 2010, p. 146. Thèse de l’École nationale des Chartes. Cependant, plusieurs testaments du XIVe siècle font état de sept témoins comme le veut le droit romain : celui de Bernard Marteau, bourgeois, en octobre 1357, tous les témoins étant habitants du Château ; celui de Richard Lo Borcier, prêtre de la communauté de Saint-Pierre, en novembre 1365, avec quatre témoins laïcs, deux confrères prêtres de la paroisse et un clerc. Le testament d’une femme, Suzanne Charrieyras, veuve d’un drapier du Château, en août 1366, n’en compte que trois dont un prêtre de la communauté, mais celui de Guillaume d’Aixe, boucher au Château, en mars 1367, cite huit témoins, dont un couturier, un cordonnier et deux orfèvres, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7 (1357), 15 G 8 (1365, 1366, 1367). Par ailleurs, la structure de ces testaments, qui suit un formulaire rigoureux, est très similaire d’un texte à l’autre et reprend la description donnée pour les testaments toulousains, cf. MARANDET, Marie-Claude - Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, 1300-1450. Perpignan: Presses universitaires de Perpignan, 1998, p. 46.

6 Jean Tricard dresse un portrait assez catastrophiste de l’impact de la guerre de Cent Ans sur le Limousin, notamment entre 1350 et 1390 mais son étude porte surtout sur les campagnes et non sur Limoges, cf. TRICARD, Jean – Les campagnes limousines du XIVe au XVIe siècle. Originalité et limites d’une reconstruction rurale. Paris: Publications de la Sorbonne, 1996, pp. 11, p. 27-28. Ses autres travaux s’intéressent au XVe siècle. Les testaments étudiés ici montrent un impact non négligeable du premier épisode de peste en 1348 et surtout d’une résurgence en 1361-1362 mais les populations urbaines protégées par les remparts sont bien moins vulnérables que les ruraux face aux événements militaires dont il n’est jamais question dans cette documentation.

7 Cela n’empêche pas un bourgeois de la Cité, Jean Julien, de léguer en décembre 1353 aux prêtres de Saint-Pierre, le cens qu’il possède sur une maison au Château appartenant à l’un des leurs, Jean Alsandre mort en 1348, qui leur est ensuite revenue, à charge pour eux de célébrer un anniversaire pour lui et sa mère, Bonne, le 22 mars, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 17. Cette famille Julien s’installe définitivement dans le Château après le sac de la Cité en 1370.

8 Comme à Marseille, la pratique du testament s’est démocratisée au XIVe siècle, toutes les couches de la population testant à partir de 1270-1280, cf. STOUFF, Louis – “Les Provençaux et la mort dans les testaments (XIIIe-XVe siècle)”. In BIGET, Jean-Louis, et. al. (eds.) – La mort et l’au-delà en France méridionale (XIIIe-XVe siècle). Toulouse: Privat, 1998 (Cahiers de Fanjeaux, n°33), pp. 199-221. Il en est de même dans le Toulousain, où les testateurs appartiennent, comme à Limoges, à toutes les catégories du commerce et de l’artisanat : secteur textile, cuirs et peaux, travail des métaux, alimentation, artisanat d’art, cf. MARANDET, Marie-Claude – Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, p. 95.

9 Acte scellé par lui le 4 mai 1385 par lequel Valérie, veuve de Martial Lo Breto (Le Breton), reconnaît que dans son testament, son feu mari a légué dix ans plus tôt à la communauté des prêtres de Saint-Pierre, leur maison, rue inter fabros à Manigne, après la mort de la veuve ; testament rédigé par lui pour Jean Brun, fils d’un corroyeur du Château en date du 3 mai 1387 et clausule extraite le 9 novembre 1389, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 9 et 10.

10 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.

11 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 et 10.

12 En 1348, le prêtre de Saint-Pierre, Jean Alsandre, possède 6 muids de vin des vignes de Limoges, dans les tonneaux de sa cave, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.

13 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 (testament en août, codicille en septembre 1360).

14 Archives départementales de la Haute-Vienne, D 422 ; 15 G 6 ; 25 H 372 ; H sup Limoges B 337.

15 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.

16 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8 ; 3 H 299.

17 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 8. Il est l’oncle d’un Guillaume qu’il fait son héritier et d’une Suzanne qui est peut-être Suzanne Charrieyras, déjà évoquée. Son testament est daté du 13 octobre 1353, Archives départementales de la Haute-Vienne, 2 EE non classé, boîte 97.

18 Voir note 5.

19 Voir note 10.

20 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6 ; GUIBERT, Louis – La famille limousine d’autrefois d’après les testaments et la coutume, p. 14.

21 Rien de commun effectivement avec les constatations faites à propos des testateurs marseillais sur la dévotion marquée par l’évangélisme mendiant autour de saint Louis d’Anjou, Hugues de Digne et sa sœur Douceline, et le poids des couvents franciscains, mais reposant sur un corpus bien plus étendu que le nôtre (553 actes testamentaires ordonnés par 279 femmes et 255 hommes entre 1248 et 1350), MICHAUD, Francine – "De père en fils ? Sensibilité spirituelle à travers les testaments marseillais, 1248-1350“. In BARRALIS, Christine; MARCHAL, Corinne; WAGNER, Anne – Le testament spirituel, du Moyen-Âge à l’époque moderne. Legs, salut de l’âme, miroir des vertus chrétiennes. Metz: Centre de recherche universitaire lorrain d’histoire, 2013, pp. 21-33, p. 22. En revanche, plusieurs traits sont communs avec Limoges : les Marseillais sont enterrés là où est leur famille, quitte à faire beaucoup de dons à d’autres églises, les parents prennent des décisions très contraignantes pour l’avenir de leurs jeunes enfants, les dévotions sont mariales et christologiques avec notamment la célébration de la Fête-Dieu, MICHAUD, Francine – "De père en fils ? Sensibilité spirituelle à travers les testaments marseillais, 1248-1350“, pp. 23-24, pp. 26-29.

22 Les Dominicains ont obtenu de l’archevêque de Bourges au XIIIe siècle le privilège de pouvoir inhumer dans leur cimetière toute personne qui le souhaiterait, cf. BARRIÈRE, Bernadette – "La primauté du château dans l’affirmation des communautés urbaines (XIIIe siècle)”, In PÉROUAS, Louis (dir.) – Histoire de Limoges. Toulouse: Privat, 1989, p. 101. Les Franciscains ont dû obtenir le même droit puisque Pétronille, veuve de Colin Lo Tellier qui teste en 1338, fait état du fait que son époux est inhumé dans le cimetière du couvent et souhaite l’y rejoindre, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.

23 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10 et 7.

24 Voir la note 21.

25 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.

26 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 68.

27 Il semble que les prêtres communalistes de Saint-Pierre soient particulièrement nombreux en comparaison d’autres sociétés. À Sainte-Feyre, les prêtres sont 9 entre 1401 et 1450, 19 entre 1450 et 1500, 8 après 1551, cf. MANISSADJIAN, Henri – ”La communauté des prêtres de l’église de Sainte-Feyre (Creuse)”. Cahiers d’histoire, 2 (1957), p. 227-242, 233-234 ; Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 4 fol. 49.

28 Les deux bayles sont P. de Merchato et B. Symonis déjà en 1239-1240, et le syndic apparaît en 1475, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 68 et 108.

29 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 39.

30 Le partage de leurs revenus devait se faire sur le principe de l’égalité, comme dans beaucoup d’autres sociétés en Anjou, en Bourgogne, en Limousin. La propriété d’archives, de sceau, de cloche à la manière des chapitres collégiaux existe aussi largement ailleurs, TARBOCHEZ, Gaëlle - ”Les communautés de prêtres séculiers en France à la fin du Moyen Âge”. Les associations de prêtres en France du Moyen Âge à l’époque contemporaine, RHEF, 93/230, (2007), pp. 229-248, p. 236, p. 245.

31 Voir note 12.

32 Voir note 5.

33 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 27 (1313), 15 G 62 (1322), 15 G 6 (1336).

34 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.

35 En 1428, la cour de l’official de Limoges se tient dans cette chapelle car les chanoines se sont réfugiés dans le Château après la destruction des murailles de la Cité en 1370 par le Prince de Galles, cf. GUIBERT, Louis – "Anciens statuts du diocèse de Limoges (XIIIe, XIVe et XVe siècles)”. Bulletin historique et philologique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1888, pp. 263-272, p. 271.

36 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 77 et 106.

37 TABBAGH, Vincent – ”Portraits de chanoines en banquiers : les chapitres cathédraux de Paris et de Rouen à la fin du Moyen Âge”. Gens d’Église, gens de pouvoir (France, XIIIe-XVe siècle), Dijon: Éditions universitaires de Dijon, 2006, pp. 187-204. Le volume des sommes prêtées par les chanoines parisiens et rouennais est évidemment sans commune mesure avec ce qui doit se pratiquer à Saint-Pierre, néanmoins l’esprit est le même : les chanoines sont solidaires des membres de leur milieu d’origine auxquels ils permettent d’investir dans l’économie locale.

38 Il semble que les prêtres filleuls des communautés limousines habitaient pour beaucoup dans leur famille d’origine, il est impossible de le confirmer ici. La commensalité, quelquefois quotidienne, semble être un trait caractéristique de ces sociétés là où elles ont été étudiées par TARBOCHEZ, Gabrielle – ”Les communautés de prêtres séculiers en France à la fin du Moyen Âge”, pp. 246-247.

39 Déjà au XIe siècle, le chroniqueur Adémar de Chabannes raconte que l’évêque Géraud (1014-1022) est conduit à l’église du Queyroix par les moines de Saint-Martial après sa consécration épiscopale, et qu’il y reçoit l’Évangile dont il lit un extrait au peuple présent. Le même Adémar mentionne l’existence de l’église du Queyroix en 848, CHABANNES, Adémar de - Chronique. Trad. Y. Chauvin et G. Pon, Turnhout: Brepols, 2003, livre III, chap. 18, p. 216 et chap. 49, pp. 262-263.

40 Ces considérations démographiques, associées au succès rencontré par la fondation funéraire personnalisée, semblent être la raison de l’apparition de ces sociétés, le plus précocement dans le Massif central, cf. TARBOCHEZ, Gabrielle – ”Les communautés de prêtres séculiers en France à la fin du Moyen Âge”, p. 232.

41 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.

42 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10 (1395), 15 G 27 (1436).

43 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 104, 15 G 6.

44 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 104, 15 G 6, 15 G 77, 15 G 106.

45 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6, 15 G 62.

46 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 40, 15 G 62, 15 G 6, 15 G 27.

47 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 27, 15 G 7, 15 G 25, 15 G 9, 15 G 47.

48 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 124, 15 G 6, 15 G 9, 15 G 21, 15 G 10.

49 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 124 (1352), 15 G 8 (1365), 15 G 8 (1366).

50 Voir note 9.

51 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6. La sépulture familiale, si elle existe, doit être préférée au cimetière paroissial, sauf pour les femmes mariées qui, en Toulousain comme à Limoges, y rejoignent leur époux, cf. MARANDET, Marie-Claude – Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, pp. 132-134.

52 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7.

53 Avant 1335, Hélie Ameilh, bourgeois, est père d’Hélie et de Nicolas, clerc jurisperitus, ainsi que grand-père d’Hélie junior ; en 1336, Jean Ameilh, drapier, est père de Pierre, il appartient peut-être à une autre branche, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 7, 15 G 8.

54 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 122.

55 Qui apparaît effectivement entre 1330 et 1365, Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6 et 25.

56 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.

57 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 9.

58 C’est la conclusion à laquelle parvient également M.-C. Marandet pour le Toulousain, à la différence des études portant sur le Comtat par J. Chiffoleau, cf. BARRALIS, Christine; MARCHAL, Corinne; WAGNER, Anne – Le testament spirituel, du Moyen-Âge à l’époque moderne. Legs, salut de l’âme, miroir des vertus chrétiennes, pp. 7-19, p. 14.

59 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 10.

60 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 118.

61 Il faudrait étudier plus précisément les dévotions individuelles qui peuvent apparaître au travers de ces testaments qui viendraient compléter les dévotions rendues de manière collective à saint Jacques, saint Loup, et surtout saint Martial, PÉROUAS, Louis – ”Regards historiques sur le mouvement confrérial en Limousin“. Annales du Midi, 117/249 (2005), pp. 75-83, p. 76. Plusieurs d’entre eux contiennent la formule stéréotypée d’une recommandation de l’âme à Dieu, à la Vierge et au ”collège des citoyens des cieux“ (collegio civium superiorum) qui donne lieu, certes pour le cas exceptionnel de Louis d’Orléans à une orchestration d’une incroyable subtilité dans les offices prévus dans son testament, vénérant les saints de la cour de Paradis. Chacun y projette sa réalité, semble-t-il, cf. LAMY, Marielle – "Images, sons et lumières. La mise en scène de la cour céleste dans le testament du duc d’Orléans (1403)“. In BARRALIS, Christine; MARCHAL, Corinne; WAGNER, Anne – Le testament spirituel, du Moyen-Âge à l’époque moderne. Legs, salut de l’âme, miroir des vertus chrétiennes, pp. 155-176. M.-Cl. Marandet voit dans cette référence au paradis céleste une assurance face à la mort, loin de la terreur qu’elle inspirerait aux fidèles du Moyen Âge finissant, cf. MARANDET, Marie-Claude – Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, p. 128. À Limoges, saint Martial par ailleurs très vénéré sur le lieu de son tombeau à deux pas de l’église Saint-Pierre, n’est pas spécialement invoqué dans les testaments étudiés.

62 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6. Faut-il lire dans les prévisions du père pour ses enfants l’expression d’une piété particulièrement développée ? Trois des cinq fils doivent devenir moines ou religieux dont Pierre le dernier né, trois filles de même ; seule Bonne reçoit à titre de dot pour sa part ou fraireschia, 60 livres, une robe et un lit, suivant la coutume de Limoges. Et leur mère, Auzana, doit veiller à cela sous peine de réduire les legs prévus. On y voit en tout cas la très forte autorité du paterfamilias non seulement sur les filles mais aussi sur les fils non émancipés à Limoges à la fin du XIIIe siècle, cf. GUIBERT, Louis - La famille limousine d’autrefois d’après les testaments et la coutume, pp. 148-150.

63 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 6.

64 Son frère est Martial Marteau, chanoine à la cathédrale et archidiacre de la Marche, tout en étant garde du sceau du bailliage de Limoges. Martial et Jean figurent souvent ensemble dans le cartulaire de l’évêché pour l’hommage qu’ils rendent à l’évêque de plusieurs seigneuries qu’ils possèdent en commun, entre 1316 et 1327, Archives départementales de la Haute-Vienne, 1 G 1 fol. 97, 139, 176-177, 212. Martial fonde un obit à la cathédrale ainsi qu’une vicairie mais aussi un anniversaire à Saint-Pierre ainsi qu’une vicairie à l’autel de Sainte-Marie, voir note 16 et 3 G 799.

65 Dans le Toulousain, l’association de la lumière des chandelles avec le Saint-Sacrement est également fréquente ; de même le terme de pabalhone est-il employé pour désigner le drap sous lequel on le porte. En 1366, une sentence arbitrale de l’archevêque de Toulouse organise la procession de la Fête-Dieu par les confrères du Corps du Christ des églises Saint-Étienne et du Taur, en association avec le chapitre de la cathédrale, cf. MARANDET, Marie-Claude – Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, pp. 250-251. Il est possible que la popularité de la confrérie devenue du Sacrifice du Très Saint Corps du Christ au XIVe siècle, mentionnée dans les testaments de Richard Lo Borcier, Pierre Laveros et Suzanne Charrieyras qui la dit : « que fit et tenetur per burgenses castri lemovicensis », soit redevable au geste de Jean Marteau.

66 Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°2-3v et LEMAITRE, Jean-Loup; VIELLIARD, Françoise – ”La liève de la confrérie des Premières chandelles à Limoges (1388)“. Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, 129 (2001), pp. 45-113.

67 ARDANT, Maurice – Saint-Pierre-du-Queyroix de Limoges, notice historique et descriptive sur cette église. Limoges: Ardant frères, 1851, p. 62. Il s’appuie vraisemblablement sur le rappel de cette date de création qui est fait dans le livre de comptes de la confrérie du Saint-Sacrement de l’église Saint-Pierre, écrit en 1551, copié par l’abbé Legros en 1787, cf. MARTIAL LEGROS, Abbé – ”Mélanges ou recueil de pièces justificatives pour servir à l’histoire du diocèse de Limoges et de la province du Limousin ”, connus sous le nom de ”Mélanges manuscrits”, Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 13, volume III, folios 1-56, ici fol. 1.

68 Archives départementales de la Haute-Vienne, I SEM 96 f°42.

69 Les dates de première attestation montrent que l’initiative prise par Jean Marteau s’inscrit dans une chronologie européenne : 1319 à Barcelone, 1320 à Gérone, 1336 à Milan, cf. COULET, Noël – ”Processions et jeux de la Fête-Dieu en Occident (XIVe-XVe siècle)”. In BÉRIOU, Nicole; CASEAU, Béatrice; RIGAUX, Dominique (éds.) – Pratiques de l’eucharistie dans les Églises d’Orient et d’Occident (Antiquité et Moyen Âge), vol. I : L’institution, Paris: Institut d’Études Augustiniennes, 2009 (Collection des Études Augustiniennes, Série Moyen Âge et Temps Modernes - 45), pp. 497-518, p. 498.

70 À Colmar où la fête est célébrée pour la première fois par les chanoines de la collégiale Saint-Martin en 1309, le tracé de la procession suit les rues de la paroisse desservie par les chanoines, avec arrêt devant les autres établissements religieux, dont cinq couvents mendiants. L’ostensoir est porté par un clerc de la collégiale qui bénit la foule avec lui, toutes les heures et plusieurs messes sont également célébrées. La fête est supprimée en 1575 à cause de la Réforme, alors qu’elle était célébrée avec beaucoup de faste et avait donné lieu à la tenue d’une foire. L’autrice souligne combien les confréries de métier y étaient actives, DEBUS KEHR, Monique – ”La Fête-Dieu à Colmar à la fin du Moyen Âge”. Revue d’Alsace [En ligne], 141 |2015, mis en ligne le 01 octobre 2018, consulté le 09 octobre 2023. URL : http://journals.openedition.org/alsace/2364 ; DOI : https://doi.org/10.4000/alsace.2364.

71 DEBUS KEHR, Monique – ”La Fête-Dieu à Colmar à la fin du Moyen Âge”, pp. 504-505 sur les premières occurrences du dais placé sur le Saint-Sacrement, à Toulouse en 1362 ; DEBUS KEHR, Monique – ”La Fête-Dieu à Colmar à la fin du Moyen Âge”, pp. 509-518, sur la dimension festive de la procession.

72 C’est le cas aussi en Provence, STOUFF, Louis – ”Les Provençaux et la mort dans les testaments (XIIIe-XVe siècle)”, p. 204.

73 Archives départementales de la Haute-Vienne, 15 G 11 ; GUIBERT, Louis - La famille limousine d’autrefois d’après les testaments et la coutume, p. 9.

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Para citar este artigo

Referência eletrónica

Anne Massoni, «Les paroissiens de Saint-Pierre du Queyroix de Limoges et la communauté des prêtres»Medievalista [Online], 37 | 2025, posto online no dia 01 janeiro 2025, consultado o 17 julho 2025. URL: http://journals.openedition.org/medievalista/9204; DOI: https://doi.org/10.4000/134b7

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Autor

Anne Massoni

Université de Limoges, Laboratoire Criham. Centre de recherches interdisciplinaires en histoire, histoire de l'art et musicologie, F-86073 Poitiers, France. anne.massoni@unilim.fr . https://orcid.org/0000-0002-1690-9804

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