1Pour échapper à l’avancée terrible du nouveau coronavirus (Covid-19), qualifié de pandémie par l’organisation mondiale de la santé (OMS), le gouvernement algérien a pris la décision de fermer les institutions d’enseignement et de formation à partir du lundi 12 mars 2020. Suite à cette décision, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (MESRS) a lancé le système de l’enseignement à distance permettant aux enseignants d’organiser des cours d’enseignement à distance. Cette décision a amené aussi les acteurs du système éducatif à redéfinir leurs pratiques. Alors, afin d’assurer la continuité pédagogique, de nombreuses initiatives ont vu le jour. Dans ce contexte éclaté et transformé, plusieurs interrogations se posent : l’université algérienne dispose-t-elle des dispositifs d’enseignement à distance ? Les enseignants et les apprenants ont-ils été formés et préparés pour faire face à cette nouvelle situation imprévisible ? Quelles sont les perceptions de la continuité pédagogique des enseignants participants à la formation à distance en contexte de la Covid-19 ?
2Inspirée de cette situation vécue récemment, notre recherche porte particulièrement sur la continuité pédagogique (CP) à l’ère de la Covid-19, plus précisément la perception des enseignants participants à la formation à distance sur la CP. Nous nous sommes posé les questions suivantes : Dans quelles conditions s’est déroulée la CP à l’université Mohamed Khider de Biskra (UMKB) en contexte du confinement ? Comment était la mise en place des modalités d’enseignement à distance ? Comment les enseignants ont-ils tenté d’assurer la CP avec leurs étudiants ? A quels obstacles ont-ils été confrontés lors de cette première expérience ? Nous nous limitons à la formation universitaire, chose que nous connaissons le mieux. Afin d’apporter des réponses à la problématique, nous avons reformulé nos hypothèses de la manière suivante :
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La CP se passerait dans des conditions favorables ;
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Le matériel pédagogique mis à la disposition des étudiants permettrait de bien enseigner et de maintenir les interactions enseignant/étudiant et étudiant/étudiant ;
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Les interactions maintenues entre l’enseignant et les étudiants dans le cadre de l’E/A à distance permettraient de maintenir la CP ;
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La CP ne pourrait pas se dérouler sans difficultés.
3Afin de vérifier nos hypothèses, une enquête de perception a été menée auprès des enseignants de l’UMKB. L’objectif visé est d’avoir un état des lieux des perceptions des enseignants universitaires après plusieurs semaines d’enseignement à distance. Il s’agit de présenter et discuter leurs ressentis dans l’usage de cette nouvelle technologie en contexte de confinement. Ainsi nous souhaitons déterminer l’attitude positive ou négative qu’ils manifestent à l’égard de la CP. Notre recherche consiste à mesurer les niveaux de perception et à identifier les conditions de déroulement de la continuité des enseignants, son vécu, les pratiques d’enseignement, les principaux obstacles liés à la CP ainsi que les impacts du confinement sur les étudiants. Elle se repose sur l’exploitation statistique des données.
4L’intérêt de notre travail peut être perçu sous les dimensions scientifique, institutionnelle et scientifique. Sur le plan scientifique, les connaissances ne sont pas figées mais se complètent et se perpétuent à travers de nouvelles recherches. C’est dans cette perspective que s’inscrit notre étude. A travers laquelle, nous avons choisi de mener l’étude de cas de l’UMKB afin de répondre aux questionnements de la CP et la formation à distance. D’un point de vue méthodologique, notre travail scientifique pourrait servir à la fois de tremplin et de boussole aux recherches ultérieures. Sur le plan social et institutionnel, notre travail de recherche pourrait contribuer à la promotion de la formation à distance d’une part. D’autre part les résultats obtenus pourraient contribuer au développement durable de l’institution et la société à la fois.
5Venant dans la lignée des travaux effectués par nous-même récemment, la particularité de notre recherche est d’avoir une première vue de l’état des lieux de l’enseignement à distance via l’expérience vécue par les enseignants. En effet, dans notre article précédent, nous avons questionné le « Regard des étudiants algériens sur la formation à distance à l’ère de la Covid-19 ». Nous avons essayé de mieux cerner la réalité de l’enseignement à distance, tout en le mettant en regard avec les obstacles rencontrés et suggestions d’améliorations demandées par les apprenants . Dans cette perspective, l’épidémie de Covid-19 a déjà fait couler beaucoup d’encre : articles de presse, publications scientifiques... Elle a aussi inspiré nombre d’articles et de travaux portant sur des thématiques aussi diverses notamment les différents aspects de la formation à distance à l’ère de la Covid-19. Nous citons la recherche qui a été menée récemment par une équipe de chercheurs algériens du CREAD auprès de 2000 enseignants, sous le titre « Université et enseignants face au covid-19 : L’épreuve de l’enseignement à distance en Algérie ». Elle vise à apprécier la nature et les modalités de comportements des enseignants, l’usage des nouvelles technologies de communication et d’information pour assurer un enseignement à distance. Les résultats ont montré que les conditions techniques et environnementales de travail étaient globalement acceptables. Les enseignants découvrent ce type d’enseignement pour la première fois et ont signalés deux difficultés : l’absence de contact avec les apprenants et la qualité de la connexion d’internent.
6Au niveau international, nous mentionnons une étude intitulée « Comment les enseignants assurent la CP et évaluent en contexte de pandémie ? » Les résultats ont révélé de nombreuses contraintes qui empêchent les enseignants d’assurer la CP malgré la volonté manifestée.. L’étude montre aussi que les enseignants tentent d’adapter et de diversifier les démarches et les dispositifs mais se sentent pris par le piège de la réalité du terrain. Dans une autre recherche qui s’intéresse à la « Situation d’apprentissage et perception de la CP pendant la crise », les auteurs ont d’abord, dans un premier article, questionné la notion de « continuité pédagogique » et traité son impact sur l’activité enseignante en contexte de la Covid-19. Ils ont évoqué la perte de repères de lieu, de temps et d’action caractérisant un cours « traditionnel » réalisé avec un groupe d’apprenants dans une classe pendant un temps déterminé. Dans un deuxième article, ils se basent sur une enquête auprès des apprenants pour mesurer leur perception de l’apprentissage après le confinement et la mise en œuvre de la CP. Les résultats montrent que certains dispositifs pédagogiques à distance sont aperçus comme favorisant plus l’apprentissage que d’autres et considérés comme étant ceux qui permettent le mieux le maintien du lien avec les enseignants et les autres apprenants du groupe .
7Venant alors dans la lignée des recherches mentionnées ci-dessus, notre recherche s’intéresse à la perception de la CP à travers l’expérience vécue par les enseignants-chercheurs algériens. Nous signalons que l’enseignement à distance pour tous les cycles universitaires et toutes les spécialités a été mené par l’Université de Formation Continue (UFC) dès 2019. Cinq diplômes de master ont été lancés en 2017 par l’UFC. Bien que l’enseignement à distance existe en Algérie depuis 2003, l’exploitation et l’intégration des TIC sont encore loin d’atteindre les objectifs visés, par manque d’équipements adéquats et manque de personnel qualifié . Dans ce qui suit, nous allons définir le cadre contextuel de notre recherche ; puis nous aborderons le cadre conceptuel démontrant les principes qui détermine l’efficacité de la CP. Ensuite, nous présenterons la méthodologie et l’échantillon utilisés. Ces derniers seront suivis par l’analyse des données de l’enquête afin de mesurer les niveaux de perception et d’identifier les obstacles rencontrés par les enseignants. Enfin, nous discuterons les résultats et les perspectives de changement.
8La CP est la notion centrale de cette étude. Que signifie cette dernière ? Quelle relation entretient-elle avec la crise sanitaire de la Covid-19 ? Comment a-t-elle émergé puis dominé l’ensemble des questions éducatives lors du confinement que nous venons de connaitre ?
9Il importe de dire que tout enseignement-apprentissage s’appuie sur la présence des apprenants et des enseignants dans des établissements de formation. Cette présence s’organise en heures de cours en salle dont le contact direct enseignants/apprenants est crucial pour garantir un enseignement efficace répondant aux besoins pédagogiques réels. Mais quand ce contact physique dans une même salle devient extrêmement dangereux et que les décideurs politiques imposent le confinement de la population, il faut bien chercher d’autres issues pour poursuivre les enseignements. C’est dans ce contexte qu’est apparue l’expression de « continuité pédagogique ». Elle est née suite à l’impossibilité d’assurer des cours en présentiel du fait des risque de contamination. Elle préserve à distance le contact pédagogique entre enseignants et apprenants.
10En effet, la pandémie de Covid-19 a imposé un confinement général dans de nombreux pays. Cette situation a désorganisé le vécu des enseignants et mis à mal les procédures des établissements. Elle a donné naissance à de nouvelles pratiques, particulièrement un enseignement hybride, mêlant cours en présentiel et cours à distance. Ainsi les pays développés disposant d’une logistique numérique ont adopté des solutions urgentes sous forme d’enseignement à distance et de télétravail afin de permettre aux personnes de travailler à domicile pour assurer une CP. Cette mobilisation internationale pour la CP est le fruit d’une décision collective mondiale pour fermer les institutions d’enseignement temporairement, le 26 mars 2020, dans le but de contenir la propagande de la pandémie. Ainsi selon l’ :
Pour 87,1 % des élèves impactés par ces fermetures dans le monde, leurs parents, leurs enseignants, leurs chefs d’établissements et tous ceux qui s’intéressent aux questions d’éducation, le numérique est plus que jamais un espace d’expression et de créativité, un espace à investir pour repenser notre rapport à nous-mêmes, aux autres, et au monde, un espace de conquête où les savoirs et les connaissances sont disponibles stimulant l’esprit humain et sa capacité d’innover pour servir la recherche scientifique et nos biens communs.
11Alors sur le plan international et afin d’assurer la CP, plus de 165 pays se sont mobilisés pour fournir des ressources numériques aux enseignants. Les deux partenaires enseignant et apprenant se sont trouvés en situation de rupture pédagogique pour des délais indéterminés. Il en résulte donc une certaine inégalité des chances dans l’accès au savoir. A l’instar de beaucoup de pays et par mesure de précaution de la propagation de la pandémie, le 22 mars 2020, l’Algérie a décidé la fermeture partielle ou totale de la majorité des établissements administratifs, des institutions scolaires et universitaires ainsi que certaines activités économiques et de services. De sa part, le 2 avril, le MESRS a adressé une directive aux dirigeants des écoles supérieures et des universités leur ordonnant de dispenser les cours en ligne pour assurer la CP. C’est dans ce contexte que nous nous sommes intéressée à la CP en Algérie. Nous voulons comprendre la réalité de cette CP. Notre recherche se focalise alors sur la perception des enseignants vis-à-vis de cette première expérience après avoir vécu ce type d’enseignement.
12Nous avons déjà mentionné que le concept clé de notre étude est celui de la CP. Que signifie cette dernière ? En prime abord, il s’agit d’une expression composée de deux mots. Selon le dictionnaire de l’Académie française, le mot de continuité est dérivé de l’adjectif continu qui signifie le fait de ne pas s’interrompre dans le temps ou dans l’espace. Quant au mot pédagogique, il qualifie ce qui a trait à la pédagogie, ce qui a trait à l’instruction des apprenants, aux méthodes, aux programmes. De manière générale, tout ce qui est conforme aux exigences de la pédagogie. L’expression de continuité pédagogique renvoie au maintien de la pédagogie dans un espace et un temps pédagogiques continuels. En cas d’éloignement des apprenants ou la fermeture des établissements, la CP permet de maintenir un lien pédagogique régulier entre l’enseignant et l’apprenant afin d’acquérir de nouveaux savoirs dans un cadre institutionnel. La continuité pédagogique est donc la continuité des apprentissages. Elle a pour but de s’assurer que l’apprenant poursuit des activités et réalise des travaux lui permettant de progresser dans ses apprentissages, de maintenir les acquis déjà développés et de s’approprier des compétences et des concepts nouveaux lorsque les modalités d’apprentissage en ligne le permettent. Les travaux demandés s’inscrivent dans la prolongation de ce qui s’est fait en salle de classe et préparent au retour dans l’établissement. L’objectif de la CP est de permettre aux enseignants de maintenir le lien, au quotidien, avec les personnes déjà engagées dans un parcours de formation ou d’apprentissage et d’empêcher ainsi les ruptures de parcours.
13Dans une étude récente, Wagnon propose une chronologie de cette notion en temps de pandémie pour comprendre ce que nous révèle la CP de nous-mêmes, de notre conception actuelle de l’éducation et des rapports entre institution, professeurs, apprenants et parents . L’auteur a tenté de répondre à plusieurs questions : Comment cette notion est-elle devenue incontournable dès l’annonce de la fermeture des institutions en mars 2020 ? Que révèle la CP de la vision de l’éducation et de la société ? Que nous apprend-elle de nous-mêmes, de notre représentation actuelle de l’éducation et rapports entre établissements, professeurs et apprenants ? . L’expression de continuité pédagogique a passé d’un vocabulaire professionnel évoquant avant la pandémie les questions très techniques de l’agencement des cycles scolaires et des rapports entre le premier et le deuxième degré à un terme générique utilisé par l’ensemble des acteurs de l’éducation après mars 2020. Selon la même recherche, la CP est apparue comme porteuse de plusieurs mythes qu’il faut expliciter. .
14D’abord le mythe de l’enseignement à distance : Ce dispositif doit être un outil permettant aux enseignants de maintenir un lien régulier entre les apprenants et leurs enseignants. Meirieu prévoit que, face à l’impréparation visible du ministère, cette continuité va porter intégralement sur les épaules des enseignants qui devront utiliser leurs propres outils numériques sans aucune aide de l’employeur . Réellement, même si les services de la tutelle ont mis en ligne des outils pour les enseignants, cet enseignement a été marqué par un sentiment d’abandon chez les enseignants et une augmentation d’activités pour les parents, avec en parallèle du côté de la tutelle, une injonction répétée dans les médias à maintenir des liens avec les apprenants et leurs parents .
15Puis le mythe de « l’école à la maison » qui chamboule le lien des parents et l’éducation. Cette idée est un non-sens puisque l’école était un espace spécifique et, comme l’a souligné Meirieu, une « institution faite pour apprendre, mais pour apprendre ensemble ». L’école est bien depuis toujours l’univers des apprentissages avec une organisation particulière et un enseignement non pas individualisé mais collectif : « faire la classe, c’est articuler le commun et le singulier » . Le confinement a donc modifié les fonctions « traditionnelles » des acteurs de l’éducation : l’enseignant à l’école et les parents à la maison. Dans cette situation nouvelle, les parents jouent un rôle nouveau celui d’enseignants en plus d’être parents.
16Enfin, le mythe du tournant numérique qui est apparu une illusion. Les plateformes sont des outils existants. Néanmoins l’idée d’un tournant numérique dans l’enseignement par un apprentissage construit et réfléchi du numérique reste un mythe et la période vécue a prouvé la carence du service public d’éducation. Encore une fois, les enseignants se sont trouvés confrontés, seuls, avec leurs propres outils numériques personnels, à gérer cette urgence d’un passage à un enseignement dématérialisé et même sans formation pour la plupart.
17En fin de cette étude, l’auteur confirme que le confinement a montré que l’école possédait encore un rôle central dans nos sociétés, qu’elle pourrait même être perçue comme le premier soubassement de la société. Ce temps a mis en exergue l’importance des rapports entre enseignants, parents et apprenants. Le fameux triangle pédagogique, enseignants, savoirs et apprenants, s’est trouvé modifié par le confinement . L’expression La CP dessine-t-elle un nouveau rôle pour chacun des acteurs éducatifs ? S’agit-il d’une parenthèse ou d’une nouvelle dynamique ?
18Pour ce qui est de la CP à l’université algérienne, cette dernière a vécu la période de confinement de manière très particulière et inédite. Elle est entrée dans un système d’enseignement à distance qui aboutit à une nouvelle façon d’enseigner, à l’expérimentation de nouveaux outils pour accompagner les apprenants dans leurs apprentissages, en tenant compte tout particulièrement des plus fragiles et des plus défavorisés. Selon le , en matière de capacités institutionnelles, le réseau universitaire contient 112 institutions de l’enseignement supérieur répartis sur 58 wilayas : 54 Universités, 09 Centres Universitaires, 37 Écoles Nationales Supérieures, 12 Écoles Supérieures Normales. L’ensemble des institutions universitaires est organisé et réparti en trois régions : 12 Universités, 07 Centres Universitaires, 08 Écoles Nationales Supérieures, 03 Écoles Supérieures Normales et 01 Institut National à l’Ouest ; 18 Universités, 27 Écoles Nationales Supérieures et Écoles Supérieures Normales au Centre ; et 22 Universités, 02 Centres Universitaires, 06 Écoles Nationales Supérieures, 05 Écoles Supérieures Normales à l’Est. . En matière de capacités humaines, le réseau universitaire compte actuellement un effectif de 58093 enseignants-chercheurs, 61277 enseignants permanents et plus de 1700000 étudiants . L’université algérienne dispose d’une offre dense de formations universitaires de trois cycles (L =2789, M =3742, D =2032) ( ; .
19Ces potentialités institutionnelles et humaines nous poussent à s’interroger sur la réalité de la CP à l’université algérienne. A-t-elle adopté le e-learning afin de faire face à cette situation ? En Algérie, l’université frères Mentouri Constantine1 (UFMC1) s’est engagée, depuis 2012, dans une innovation techno-pédagogique en mettant en place la formation aux « TICE et pratiques pédagogiques » . Sa tâche consiste à assurer un enseignement hybride, afin de répondre aux exigences de la société algérienne à l’ère du numérique. L’encadrement est pris en charge par des compétences algériennes : concepteurs, formateurs, gestionnaires, tuteurs, ingénieurs, techniciens, corps administratif . L’objectif principal est d’accompagner, durant six mois, les enseignants nouvellement recrutés pour une qualification de concepteurs-pédagogues de l’enseignement à distance.
20Dans la même perspective, l’UMKB compte 1386 enseignants pour 30567 étudiants inscrits dans différentes facultés. Afin de renforcer les compétences pédagogiques et didactiques, administratives et relationnelles des enseignants universitaires, une cellule d’accompagnement, d’assistance et de suivi a été installée depuis 2016 à l’UMKB. Cette cellule s’articule autour de deux axes de travail permettant aux enseignants concernés par cette formation de recevoir les enseignements, recommandations et conseils en présentiel pour ceux habitant Biskra et via des sessions en vidéoconférence, soit en distanciel, pour ceux résidant à M’sila, Batna, Constantine, Alger et ailleurs. .
21Visant à armer les enseignants de solides compétences en gestion administrative, en méthodes d’enseignements et en capacités à la communication et à l’échange avec les collègues et les étudiants et à bonifier l’exercice d’enseignant universitaire, cette formation n’est pas facultative . Cette formation est sanctionnée par une attestation qui renforce le dossier de confirmation et de promotion des enseignants auxquels il est demandé une attestation de formation en pédagogie, une autre en TIC et à l’enseignement à distance confié au professeur BELHANI de l’UFMC et une troisième attestation de niveau de B2 en langues étrangères (MOUSSAOUI, 2020). Depuis 2019, l’UMKB s’est lancée dans cette expérience destinée à l’accompagnement des enseignants pour la mise en ligne des cours sur la plateforme Moodle dans le but de faciliter le passage à la formation à distance (FAD). Mise en œuvre en 2017/2018, la plateforme Moodle de l’université de Biskra, a enregistré une importante évolution d’exploitation de la part des enseignants. L’UMKB a donc une expérience récente mais considérable concernant la FAD qui a permis aux enseignants d’assurer la continuité des apprentissages.
22Selon Francine Cicurel, il existe trois procédés pour collecter des informations sur l’action : l’observation de l’extérieur, les « verbalisations de l’acteur à propos de son agir » (entretiens et questionnaires) et le fait d’accéder à l’agir indirectement à travers les documents d’accompagnement, les journaux de bord, les instructions, etc. . Nous avons opté pour le deuxième procédé dans la présente recherche, une étude empirique par questionnaire quantitatif destiné aux enseignants universitaires. C’est une enquête de perception qui consiste à rassembler un ensemble d’éléments d’identification des enseignants et leur regard vis-à-vis de la CP. L’enquête a été menée auprès d’un échantillon de 56 enseignants inscrits à l’UMKB. La représentativité a été assurée par la méthode des quotas : sexe, grade…
23Le questionnaire a été mis en ligne au mois de mai 2021, pendant environ un mois. Nous avons obtenu 56 réponses. Structuré en six sections, le questionnaire nous a permis d’aborder les aspects suivants : 1) Profils des répondants, 2) Informations sur le déroulement de la CP, 3) Perception générale de la CP 4) Perception des pratiques enseignantes 5) Principaux obstacles à la CP et 6) Impacts positifs et perspectives d’amélioration et/ou changement. Conçu de manière à ne pas paraitre long et subdivisé en treize questions, le questionnaire comporte à la fois des questions fermées et des questions qui laissent un espace à des échelles de satisfaction et prévoit à la fin un espace pour la personnalisation des réponses d’une question ouverte.
24Notre échantillon est issu de l’UMKB. Il est constitué de 56 enseignants, dont 71.24 % sont de sexe féminin et 28.76 sont de sexe masculin. Les personnes interrogées représentent les différentes disciplines et spécialités enseignées à l’UMKB ainsi que les trois catégories de grades : maitre-assistant (A et B), maitre de conférences (A et B) et professeur. En effet, les données collectées démontrent que les enseignants de la Faculté des Lettres et des Langues sont surreprésentés parmi les personnes interrogées, car ils représentent 48.3 % des répondants au questionnaire. Les enseignants de l’Institut des Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives sont représentés de manière légère (18.5 %) ; tandis que les enseignants des autres facultés sont sous-représentés : Faculté des Sciences et de la Technologie 9.6 % ; Faculté des Sciences Économiques Commerciales et des Sciences de Gestion, Faculté des Sciences, Faculté des Sciences Exactes et des Sciences de la Nature et de la Vie et Faculté de Droits et des Sciences Politiques avec un taux de pourcentage égal à 5.3 % et en dernière position la Faculté de Sciences Humaines et Sociales qui enregistre 2.4 %. Ainsi nous pouvons affirmer que l’enquête nous a permis d’obtenir l’avis d’un échantillon représentatif du public visé.
25En ce qui concerne le profil des participants à l’enquête, il met en évidence le fait que les enseignants ayant le grade maitre de conférences (M.C.) sont majoritaires. Ils représentent 53.9 % des personnes interrogés (dont 30.8 % pour les M.C.B. et 23.1 % pour ceux des M.C.A.). Les maitres assistants sont considérablement représentés parmi les répondants (38.5 %) dont 23.1 % pour les M.A.A. et 15.4 % pour ceux des M.A.B. Concernant les professeurs, ils sont très peu représentés avec un taux de pourcentage égal à 7.7 %. Il en résulte alors que les participants sont assez représentatifs des différents grades proposés à l’université.
26L’analyse descriptive des données a été orientée dans quatre angles : les conditions du déroulement des enseignements, la perception de la CP, les pratiques enseignantes, les contraintes liées à la CP et les impacts du confinement sur les apprenants. Ainsi les constats qui se dégagent de cette enquête sont présentés sous forme schématique dans les lignes suivantes.
27Presque la totalité des participants aux cours à distance en période de confinement déclarent n’avoir pas été formé aux TIC et pratiques pédagogiques. Pour 84.6 % des enseignants interrogés, l’enseignement en ligne est une première expérience, ils viennent de faire leurs premiers pas dans l’enseignement en ligne. De ce fait, ils sont capables de jauger ce nouvel environnement, qui se distingue grandement l’enseignement en présentiel. En outre, 91.7 % n’ont jamais piloté une formation à distance avant le confinement. Ces résultats obtenus prouvent que le point de la formation des enseignants est clairement insatisfaisant pour la majorité des participants. Cela relève que la formation à distance n’était pas préparée. Les enseignants se sont trouvés confrontés, seuls, avec leurs outils numériques personnels, et surtout sans formation à gérer cette urgence d’un passage obligé à un enseignement numérique. Les chercheurs révèlent que le manque de maîtrise de l’outil informatique par les enseignants représente un véritable frein à l’intégration active de la FAD dans la formation des étudiants à l’université . Or, la FAD à l’aide des TIC devient une exigence accrue notamment en période de pandémie. Les TIC impactent profondément l’éducation et la société. Elles n’offrent pas seulement des outils pouvant améliorer l’E/A, mais elles transforment largement la société, l’éducation et le savoir.
28Il importe de rappeler que l’exploitation des ressources pédagogiques numériques, que ce soit en mode à distance ou en présentiel, demande des technologies et des moyens allant d’un simple outil à un dispositif complexe de machines combinées, des ressources multimédias et des plateformes collaboratives. L’enseignement à distance à l’aide des ressources numériques dépend en grande partie des objectifs visés, des capacités des partenaires aussi bien les enseignants que les apprenants et du contexte dans lequel il se déroule. La présentation graphique ci-dessous illustre la fréquence d’usage des logiciels numériques des enseignants. Elle témoigne d’un écart remarquable entre différents éléments.
Graphique 1 : Perception des logiciels numériques exploités
Source : Faite par l’auteure à partir des données de l’enquête
29Nous constatons que 92.03 % des participants utilisent particulièrement la plateforme Moodle, 76.70 % utilisent les emails et 69.20 % utilisent le réseau social Facebook. L’utilisation du logiciel Zoom représente 15.40 %, tandis que les logiciels suivants sont peu utilisés ou peut être peu connus : Meet, Google Hangouts et Skype avec une fréquence de 7.70 % chacun. Nous signalons que le reste des applications (Microsoft teams et Classrom) n’est pas utilisé. Nous déduisons, d’après ces résultats obtenus, que le choix des logiciels fait par les enseignants est très limité malgré la diversité des ressources numériques qui existent sur le net. En outre, nous constatons que la plateforme Moodle, le Facebook et l’email sont les outils les plus exploités par notre public, ce sont des outils facilitateurs dans ce genre de situations mais ne remplacent pas l’enseignant.
30Nous avons proposé aux enseignants une grille d’évaluation du niveau de perception dans le questionnaire afin de mesurer leur regard vis-à-vis de la CP. Ainsi par un système graduel de satisfaction, les enseignants pouvaient évaluer les aspects ayant liens avec la CP : d’accord, ni d’accord ni en désaccord, pas d’accord. En cette période de pandémie, les situations professionnelles et personnelles peuvent provoquer chez les enseignants des sentiments tels que le stress, l’inquiétude… ce qui peut influencer leur rentabilité. Dans cette première rubrique, nous avons donc consacré 5 questions à la CP. Les résultats obtenus mettent en exergue des déclarations qui optent pour les différentes valeurs comme l’illustre ci-dessous la figure n° 2.
Graphique 2 : Perception de la continuité pédagogique
Source : Faite par l’auteure à partir des données de l’enquête
31Le premier point à évaluer par les participants est le vécu de la CP. Nous remarquons que les niveaux de satisfaction sont très disparates. 38.45 % se déclarent d’accord contre 23.07 % des enseignants qui ne sont pas d’accord et 38.45 % sans avis. Puis, nous constatons une différence très importante entre les enseignants en matière de stress perçu. Les résultats montrent que 84.61 % des enseignants apparaissent significativement plus stressés que le reste des enseignants significativement moins stressés (7.69 %). Ensuite, 76.92 % des enseignants en cette période de confinement ont l’impression que leur charge de travail a augmenté. Tandis que pour une minorité, elle est significativement plus basse (7.69 %). En outre, l’évaluation est ressentie comme un souci. Plus que la moitié des enseignants (53.84 %) redoutent l’évaluation à distance et voient qu’elle est subjective. Enfin le dernier point à évaluer par les enquêtés vise à quel point les enseignants ont réussi leur mission. Sur l’effectif total de ceux qui ont participé au questionnaire, plus que la moitié se déclare ne pas d’accord (53.84 %), 23.07 % se disent pas d’accord et le même pourcentage (23.07 %) n’étant pas sûr.
32De manière générale, les enseignants ont exprimé leurs ressentis sur la CP. Il apparaît clairement que cette dernière n’est pas facile à vivre pour certains enseignants. Ces nouvelles conditions de travail peuvent créer de l’anxiété et du stress, un sentiment d’incompétence numérique, des remises en question et de la frustration. Mais les enseignants ont fait preuve de réactivité et de créativité afin de poursuivre les apprentissages à distance, dans un contexte inédit les amenant à s’approprier de nouveaux outils (Capitanescu Bennetti, A., & Connac, S., 2020). Nous imaginons que ce passage forcé et en urgence à de nouvelles pratiques d’enseignement n’est facile à vivre pour personne.
33Dans cette rubrique, nous avons questionné les enseignants sur leurs pratiques. Il ne s’agit évidemment pas de juger leur travail car ils ont tous œuvré avec leurs propres moyens pour maintenir une CP. Mais notre objectif est d’identifier certains éléments statistiques descriptifs qui aident à mieux comprendre la façon dont les pratiques apprenantes sont perçues par les enseignants. Il s’agit bien de deux catégories de pratiques pédagogiques enseignantes : le dispositif pédagogique mis à la disposition des apprenants et les modalités d’interaction. Nous avons cherché de voir si chaque catégorie favorisait l’apprentissage, mais aussi pouvait maintenir la CP. Nous avons distingué 7 types d’interactions possibles pour maintenir la continuité pédagogique :
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Les cours durant lesquels il est possible de voir et entendre l’enseignant « cours vidéo en direct » ;
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L’interaction avec les étudiants se fait seulement en audio « cours audio en direct » ;
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Les forums de discussions « en direct » avec l’enseignant via la plateforme Moodle. Ces forums permettent à l’enseignant de discuter en direct avec les étudiants dans le cadre du cours ;
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Les interactions pour répondre aux préoccupations des apprenants en mode différé « Échanges d’e-mails avec les étudiants » ;
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Les interactions à travers les réseaux sociaux ;
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Les interactions entre pairs » Travaux de groupe » ;
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Les interactions via les discussions « Groupes de discussions » (WhatsApp, Messenger…).
Nous avons interrogé les enseignants d’évaluer si chaque type d’interaction leur permettait de poursuivre l’enseignement et d’assurer une relation avec la formation. La présentation graphique ci-dessous illustre de manière fidèle les différentes interactions utilisées lors de la CP.
Graphique 3 : Perception des types d’interactions utilisés
Source : Élaborée par la chercheure à partir des données de l’enquête
34D’après ces résultats, nous pouvons dire que les personnes interrogées utilisent principalement les échanges d’emails (84.60 %) (L’échange d’e-mail est pratique et nécessaire) et les échanges à travers les réseaux sociaux (69.60 %). Nous constatons que les cours vidéo « en direct » sont très peu utilisés peut-être peu connus (15.40 %) et même les cours audios « en direct » (7.70 %). Nous remarquons que les interactions entre pairs sont sous-représentées, et les travaux de groupe enregistrent (15.40 %) et les forums de discussions direct entre pairs (7.70 %). Notons qu’il est impossible de maintenir des travaux de groupe en période de crise à part en ligne. D’après ces résultats, nous déduisons que les interactions étudiant/étudiant sont très limitées. Or cette relation est très importante dans la formation à distance, comme stratégie elle peut remplacer le tuteur. Dans un deuxième lieu, nous avons interrogé les répondants si chaque type d’interaction permettait de maintenir un rapport avec la formation et de poursuivre l’apprentissage. La figure ci-après illustre fidèlement les résultats obtenus.
Graphique 4 : Perception des types d’interactions et maintien du contact
Source : Élaborée par la chercheure à partir des données de l’enquête
Il se dégage de ces résultats que les interactions qui maintiennent le contact sont les échanges d’emails (92.30 %) et les échanges vis les réseaux sociaux (84.60 %).
Graphique 5 : Perception du matériel pédagogique mis à disposition des étudiants
Source : Faite par l’auteure à partir des données de l’enquête
35Au vu des résultats du graphique n° 5, nous constatons que 76.90 % des enseignants, pour maintenir la continuité pédagogique, préfèrent utiliser des slides et 46.20 % des enseignants choisissent des documents complémentaires ou des ressources d’aide. Peu d’enseignants (15.40 %) utilisent des vidéos dans lesquelles l’enseignant enregistre son écran et le travail qu’il mène. Et que l’utilisation des slides animés avec la voix de l’enseignant et les vidéos dans lesquelles l’enseignant apparait ne représentent que 7.70 %. Les répondants semblent avoir du mal à travailler avec ces supports ou ne maitrisent pas la nouvelle technologie. Nous avons cherché également à savoir si l’usage de ces dispositifs a permis aux enseignants de bien enseigner et de maintenir le contact. D’après les déclarations, nous constatons que les documents complémentaires (46.20 %) et les slides (76.90 %) sont vus comme des dispositifs qui assurent le mieux le maintien des interactions (enseignant/apprenants et entre pairs) et qui favorisent le plus l’apprentissage.
Graphique 6 : Perception du matériel pédagogique et maintien du contact
Source : Élaborée par la chercheure à partir des données de l’enquête
Nous soulignons que ces types de dispositifs sans explications ne favorisent pas la motivation et l’apprentissage sur le long terme. Ils doivent être accompagnés d’illustrations, d’exemples concrets et d’explications animées et données par l’enseignant.
36Après la perception des pratiques enseignantes, cette partie du questionnaire permet d’identifier les principales contraintes liées à la CP. Les résultats obtenus sont fidèlement décrits par la représentation graphique ci-après
Graphique 7 : Répartition des enseignants selon les contraintes rencontrées
Source : Élaborée par la chercheure à partir des données de l’enquête
37Au vu des résultats obtenus, les trois contraintes les plus rencontrées par le public visé sont les contraintes pédagogiques (76.92 %), les contraintes techniques (76.92 %) et les contraintes socioaffectives (61.53 %). De même nous constatons que 46.15 % des enquêtés ont des contraintes organisationnelles. Il est à noter que les contraintes techniques sont liées surtout aux manques de compétences et à la fracture numérique. Enseignants et étudiants manquent de compétences numériques, une nécessité ayant déjà été soulignée par qui justifie l’urgence de former aux compétences numériques et médiatiques. Car le manque de compétences numériques influence considérablement l’acte d’enseigner et/ou apprendre en ligne. Nous insistons sur le développement des compétences numériques dans les formations initiales et continue. Nous pouvons ajouter à cela la fracture numérique qui entrave également le bon déroulement de la CP. En effet, il est impossible de donner à tous les étudiants le même suivi alors que certains n’ont même pas l’accès à l’outil informatique ou à internet. Nous précisons que malgré ces points négatifs, les enseignants ont découvert le potentiel numérique d’outils faciles à utiliser comme les réseaux sociaux surtout Facebook ou encore les visioconférences. Nombreuses sont les contraintes pédagogiques, nous citons la gestion des grands groupes, le manque de moyens pour motiver les apprenants et surtout l’absence du feedback : une faille qui impacte aussi bien les enseignants (l’absence de feedback continu rend très difficile l’adoption des tâches d’apprentissage) que les apprenants (l’absence de feedback tend à démotiver les apprenants). Notons aussi la difficulté d’interaction : il est impossible d’assurer une participation massive des étudiants aux nouvelles activités d’enseignement, les difficultés pour réaliser les travaux de fin de cycle et les mémoires de fin d’études…
38En troisième position viennent les contraintes socioaffectives. Elles sont liées au lien social et contact enseignant/étudiant. En effet, l’université n’est pas un lieu uniquement d’apprentissage et la crise sanitaire a permis de réaffirmer ce rôle social de l’école. En effet, en cette période de pandémie, l’enseignant doit être un accompagnateur à la fois empathique et vigilant, et manifester une e-présence . Malgré ces obstacles, nous soulignons la solidarité entre les enseignants et le partage de ressources rendu possible notamment grâce aux plateformes et aux réseaux sociaux. A cet effet, la solidarité avait d’ailleurs déjà été retenue comme l’un des aspects positifs de cette crise. En plus des contraintes techniques, pédagogiques et socioaffectives, les enseignants avaient des contraintes organisationnelles. Ils avaient du mal à s’organiser et à gérer le temps car la mise en place en urgence de dispositifs d’apprentissage à distance qui nécessite beaucoup de temps a créé une surcharge de travail chez les enseignants.
39A la fin du questionnaire, nous avons choisi une question ouverte. Elle a pour objectif de permettre aux répondants d’exprimer les impacts du confinement sur les étudiants. Plusieurs éléments proposés par les enseignants semblent intéressants et consisteraient des enrichissements apportés par cette pandémie. Les effets bénéfiques les plus citées sont synthétisées ci-après : un gain de compétences dans le domaine informatique et numérique (84.6), un gain en autonomie des élèves (38.5 %), la quantité de travail personnel fourni (15.4 %), la collaboration entre les étudiants (30.8 %) et la réduction des inégalités entre les apprenants (23.1 %).
40Les résultats obtenus nous ont permis de relever des informations importantes. A prime abord, les conditions techniques et environnementales du déroulement de la CP sont favorables. Aussi la grande majorité des enseignants ne sont pas formés aux pratiques pédagogiques numériques et n’ont pas assuré une formation en ligne auparavant. En outre, le choix des ressources numériques est très limité par rapport à la diversité des outils numériques qui existent. De telles insuffisances n’ont pas stoppé les enseignants de poursuivre les enseignements et de garder le contact pédagogique avec leurs apprenants. Néanmoins, ces conditions peuvent être améliorées (Owusu-Fordjour, C. Koomson, C. K. & Hanson, D., 2020). De nombreuses informations sont récoltées tant au niveau des pratiques pédagogiques, du vécu de la CP, des contraintes rencontrés ainsi que les enrichissements apportés par le confinement. Ainsi nous avons constaté que cette situation n’était pas facile à vivre et à gérer par certains, qu’elle a engendré du stress chez eux, qu’elle a impacté l’enseignement et l’évaluation. D’après les mêmes résultats, nous avons remarqué que les interactions enseignant/étudiant et étudiant/étudiant sont très limitées. Le lien se fait principalement à travers les échanges via les réseaux sociaux et les échanges d’emails. En outre, cette première expérience d’enseignement en ligne a causé de nombreuses difficultés pédagogiques, techniques, organisationnelles et socioaffectives. Les difficultés déclarées par les répondants sont liées à la fracture et compétence numérique, à la planification, à la gestion de la CP, à la gestion du temps… Dans ce cas, nous rappelons l’importance de la présence de l’enseignant et de son accompagnement en salle de classe, et la collaboration entre pairs (Owusu-Fordjour, C. Koomson, C. K. & Hanson, D., 2020). Bref, bien que cette étude s’intéresse à la perception de la CP, plusieurs effets bénéfiques sur les apprenants ont été déclarés par les participants à cette enquête. Les axes principaux d’enrichissements apportés par le confinement sont la collaboration entre les pairs, l’autonomie des apprenants, la qualité du travail personnel fourni et l’acquisition de compétences numériques. Pour faire face à ce genre de situation, la formation aux nouvelles pratiques éducatives numériques devient une exigence. Cette formation permet aux enseignants et aux apprenants de découvrir les différentes ressources pédagogiques innovantes.
41Sous le titre de « La continuité pédagogique de la formation à distance en contexte pandémique », cette recherche a eu pour objectif de tester le regard des enseignants vis-à-vis la CP en Algérie. Elle a essayé de mieux connaitre le déroulement de la CP en période de confinement ainsi que les principaux obstacles rencontrés par les enseignants et les effets positifs apportés par cette période de confinement sur les apprenants. L’analyse descriptive des propos déclarés par les enseignants a révélé des constatations intéressantes. Même si cette pandémie a exposé et expose encore la profession à de nombreuses incertitudes, les structures de formation à l’université algérienne ont fait face et ont su mobiliser les ressources dont elles disposaient. Un vrai défi a été relevé pour passer, certes un peu brutalement, à l’ère numérique sans pour autant réduire la qualité pédagogique. Bien évidemment le passage à un enseignement à distance nécessite le développement des compétences numériques et l’acquisition de nouvelles compétences transversales chez les enseignants et les apprenants à l’ère de numérique. Car le numérique n’a pas le pouvoir à lui seul de transformer la forme scolaire (Cuban, 1992 ; Bruillard & Baron, 2006 ; Cerisier, 2015). Malgré le fait que les enseignants ont dû apprendre à « affronter les incertitudes » (Morin, 1999) et à adapter leur environnement de travail en fonction des nouvelles contraintes (Hamon & Genevois, 2017). Finalement en termes de perspectives, ce travail demande néanmoins à être approfondi, il peut s’élargir pour traiter d’autres aspects de la CP. Face à ce nouveau contexte, nouvelles compétences, nouveau rapport au métier ; autant de questions qui devront être traitées de manière urgente durant et après cette période de pandémie.
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