1La formation continue des enseignants est une question récurrente au sein de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO). Dans la perspective d’éduquer efficacement un grand nombre à l’orée de 2015, les Etats membres ont adhéré à l’agenda « école nouvelle d’ici 2030 » (UNESCO 2018, p. 24). Ils ont produit des programmes nationaux visant à pallier les carences des systèmes éducatifs déjà fragilisés par des soucis structurels. L’essentiel des recommandations porte sur la prise en compte des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) dans les enseignements et d’outiller les enseignants dans la maîtrise des contenus numériques. Néanmoins, ces initiatives, bien que louables, doivent être envisagées avec un minimum de précaution, notamment en ce qui concerne les différences de niveau de maîtrise de tels outils par les enseignants. Il s’agit bien d’un changement de paradigme auquel les encadreurs des élèves doivent être préparés à l’avance, afin de mieux maintenir le lien pédagogique. Tel changement est vécu différemment par chaque enseignant et le contexte de la crise sanitaire a amplifié les difficultés. En effet, plusieurs structures universitaires ont adopté des stratégies innovantes afin de maintenir un apprentissage à distance, ce qui suscite une foule d’interrogations quant à la pertinence de telles solutions dans des contextes précaires. Par exemple, comment sur le terrain, les enseignants se « débrouillent-ils » ? Quelles stratégies mettent-ils en place ? Quelles astuces sont véritablement efficaces ?
2La pandémie de la Covid-19 nous a mis, en tant qu’enseignants-chercheurs en position isolée. Début 2020, nous avons tous et toutes dû nous transformer en parties prenantes “en ligne” et nous avons eu la tâche importante d’innover et de changer notre approche à l’enseignement, à l’apprentissage et à la recherche, des composantes clés de notre profession. Certes, les technologies de l’information et de la communication, et surtout celles employées dans l’éducation (TICE), existaient déjà et leur utilisation était en hausse, mais leur utilité a redoublé en temps pandémique. Pour faire face à l’isolement dû aux mesures sanitaires prises dans tous les pays de la planète, il fallait trouver une solution : rester en contact avec des collègues partout en Afrique et même au-delà. Début 2020, quelques collègues ont donc mis sur pied un environnement de partage, une plateforme où nous pouvions nous parler en tant que professionnels. Voilà comment est née TICE Afrique qui a des participants de plusieurs pays africains et européens, entre autres le Gabon, la RDC, le Cameroun, l’Espagne, Eswatini, le Mali, le Sénégal, le Bénin, etc.
3La pandémie de COVID-19 a accéléré l’introduction des TIC dans les milieux éducatifs et les lieux de travail. Ce qui a considérablement modifié la façon de travailler, de collaborer et d’apprendre. Une multitude d’outils ont été créés ou améliorés, donnant la possibilité aux utilisateurs de communiquer, coopérer, s’informer et se former. En effet, comme signalé plus haut, les mesures de distanciation sociale prises en début 2020, le passage à l’enseignement totalement ou partiellement à distance et l’impossibilité de mener des travaux scientifiques de groupes en présentiel ont conduit les membres de TICE Afrique de s’organiser par WhatsApp. D’après le sondage de l’agence web à Strasbourg, WhatsApp est le deuxième réseau mondial de communication avec plus de deux milliards d’utilisateurs actifs dans le monde. Ce réseau s’est donc imposé à nous par sa disponibilité sur les téléphones portables aujourd’hui à moindre coûts et par la facilité d’utilisation du réseau. Pour les membres du groupe TICE Afrique, WhatsApp est une bonne alternative pour les échanges en groupe de textes et supports divers en plus des appels vocaux possibles.
4Étant donné que l’intégration des TICE en Afrique passe par les enseignants, il semblait indiqué de réunir virtuellement ceux-ci afin qu’ils soient instruits à la diffusion de la technologie à travers la connaissance ou par exemple la maîtrise des outils du web (Coulibaly, 2014). C’est pour répondre à ces attentes et mutualiser les pratiques que le groupe TICE Afrique a été mis en place. Aujourd’hui, le groupe compte plus de 100 membres répartis sur le continent africain et en dehors, communiquant de façon synchrone et asynchrone. Il s’agit principalement de :
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Enseignants du supérieur ;
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Enseignants du secondaire ;
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Chercheurs dans divers domaines ;
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Doctorants ;
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Inspecteurs de l’éducation ;
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Informaticiens ;
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Cadres de l’administration ;
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Partenaires sociaux.
Il faut noter que le groupe TICE Afrique utilise aussi la plateforme YouTube ainsi que Google drive pour le stockage de ses fichiers (https://www.youtube.com/channel/UCfTWf6pAGgQpWXAnVRwD5cA). Celui-ci permet de diffuser en direct les capsules formatives et les communications faites par ses membres. Récemment, l’équipe a créé un mur padlet, sur lequel plusieurs expériences testées sont partagées de façon dynamique. En substance, le groupe TICE Afrique offre l’occasion à ses membres de se performer à portée de bras, de diffuser et de débattre des productions des pairs.
5La question de la formation des enseignants se pose avec acuité au sein des pays membres de l’UNESCO (2011, p. 18) pour lesquels, tel qu’annoncé plus haut, des problèmes de suivi professionnel sont notés. C’est ce qui justifie, au sein de cet organisme, des recommandations visant à soutenir les compétences des formateurs, notamment, en leur permettant de développer leurs compétences numériques. Des recommandations ont été instruites à cet effet et des ouvrages ont été commis dans cette logique. Il est en quelque sort exigé de la part de l’enseignant que ce dernier soit d’une part apte à formaliser les instructions ministérielles relatives à l’intégration des TIC dans ses cours, mais également qu’il soit capable d’élaborer des projets innovants pour les élèves. Or, selon quelques expériences de nos collègues au sein de TICE Afrique, peu d’enseignants savent véritablement tirer profit de leurs outils informatiques dans le cadre pédagogique. Il se pose ici la question de la formation de ces personnes à la maitrise de l’outil numérique, mais également celle de sa remise en question (Moussavou, 2017, p. 313 ; Tounkara, 2020, p. 5), quand on sait que les travaux de Karsenti et ses collègues ont mis en lumière des interrogations relatives à l’impératif de considérer les TIC comme LA solution des questions éducatives (Karsenti, Coulibaly, Depover, Fauguet, Garry, Komis, Moukkadam, Ngoy Bitambile, Petrovici, Quang Thuan et Russbach, 2014 ; Karsenti, Garry, Benziane, NGoy-Fiama, et Baudot, 2012 ; Karsenti, Garry, N’Goy Fiama et Baudot, 2011 ; Garry, Karsenti, Benziane et Baudot, 2008). Ainsi, comment soutenir une meilleure formation continue en temps de crise par exemple ? Comment, au sein de TICE Afrique, parvenons-nous à compléter nos formations ? De telles préoccupations seront d’abord précisées dans le cadre conceptuel.
6Il est possible d’associer la notion de complément de formation des enseignants avec celle de mise en commun des expériences du numérique au sens où cette forme de mutualisation est pressentie comme une alternative à la formation de ces derniers en présentiel. Il devient alors pertinent de se référer à un modèle de l’économie du partage, en sciences politiques, bien que nous soyons dans le domaine éducatif. En effet, pour Demailly et Novel (2014), l’économie du partage est en plein essor et l’une des modalités conduisant à une meilleure durabilité constitue la mutualisation. Il s’agit d’une pratique collaborative, mise en place en contexte, permettant d’optimiser l’usage des biens, en les partageant. Pour les auteurs, l’économie du partage offre des espoirs environnementaux au sens où les produits partagés « peuvent assurer un même niveau de service tout en réduisant la production de biens et donc les prélèvements de ressources et les déchets qui y sont associés » (Demailly et Novel, 2014, p. 7). Les ménages économiseraient jusqu’à 7 % du budget et 20 % des déchets. Ces espoirs sont soutenus par le développement des plateformes numériques de partage, de prêt ou de don, alors que leurs conditions de réalisation ainsi que leur qualité demeurent problématiques au regard de la diversité des lieux, des objectifs visés et des besoins exprimés. De plus, il est peu certain que l’impact environnemental présagé soit minime relativement à la vitesse élevée de consommation des biens divers. D’une certaine façon, c’est la durabilité environnementale qui s’en trouve compromise, d’où l’intérêt de préciser les enjeux sous-jacents à une telle option. Autrement dit, la révolution numérique n’a pas seulement réinventé l’économie du partage en termes de revente, de don ou de troc, elle a surtout, par temps de Covid-19, amplifié les échanges d’informations sur ces modalités, offrant ainsi plus de choix et plus de critères de décision aux partenaires du partage. Ainsi, compléter la formation des enseignants vise la réalisation d’un espoir plus global, au-delà d’une simple « mise en commun » au sein de TICE Afrique.
7La mise en commun des expériences du numérique au sein de TICE Afrique implique des échanges interactifs. Or, dans le domaine de l’enseignement et apprentissage, il est possible de se référer à une perspective théorique socioconstructiviste, à l’instar de cette vulgarisée par l’épistémologue Fourez et ses collègues (Fourez, 2003, p. 9), en épistémologie des sciences. Le point de vue soutenu est celui d’une construction sociale des connaissances et celui de la conceptualisation des processus sous la forme de ressources partagées et volontairement verbalisées si l’occasion se présente (Fourez, 2007, p. 260). Autrement dit, chaque acteur de la situation d’éducation est d’abord producteur de connaissances mises en commun par le biais d’interactions qui conduisent à se représenter le monde qui nous entoure. C’est ainsi que chaque adhérent de TICE Afrique est considéré comme un acteur actif et réflexif au sens où la dynamique du groupe crée une atmosphère propice au partage d’expériences, bien que chaque personne y adhère selon ses objectifs et que, comme nous l’avons montré en précisant le rôle social des savoirs endogènes (Moussavou, 2020, p. 134), les connaissances produites conduisent à envisager une forme de pouvoir au même titre que les savoirs dits scientifiques (Fourez, Englebert-Lecomte et Mathy, 2007, p. 102). Néanmoins, la mise en commun constitue un véritable processus de formation dans la mesure où certains membres ont reconnu bénéficier de soutien et d’aide professionnelle. Ce faisant, ils sont capables de verbaliser leurs expériences, ce qui justifie l’option de leur donner la parole. Ainsi, au sein de TICE Afrique, comment complète-t-on les formations continues des enseignants ?
8En cohérence avec le cadre conceptuel et la problématique formulée, l’approche méthodologique adoptée relève d’une préoccupation compréhensive et se contente d’un échantillon représentatif qualitatif, se prêtant mieux à une analyse interprétative qualitative thématique du contenu (Savoie-Zajc et Karsenti, 2004, p. 110, 112). Nous avons adressé des demandes individuelles à six (6) membres de TICE Afrique, sollicitant de leur part une contribution volontaire à une recherche. Ces derniers ont accepté au terme d’une semaine et nous leur avons adressé un canevas d’entretien comportant des questions ouvertes sur cinq (5) thèmes dont les critères sont formulés dans le tableau ci-après :
Tableau 1 : illustration du canevas d’entretien
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Sous-thème
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Suggestions à préciser
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Le numérique et moi
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J’interviens actuellement (précisez la fonction professionnelle ou les tâches réalisées) :
Mon expérience du numérique date de (précisez le moment, l’époque, etc. ) :
Comment j’utilise le numérique (précisez les compétences développées) :
J’y suis arrivé (e) toute seule (comment ? expliquez) :
Qu’est-ce que cela m’a apporté sur le plan personnel ? (précisez) :
Qu’est-ce que cela m’a apporté sur le plan professionnel ? (précisez) :
En quoi cela est-il un problème pour moi ?
Autres :
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Mon matériel essentiel
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Ordinateur de bureau (à la maison et partagé ou non avec d’autres personnes ?) :
Ordinateur portable (que dire de ses performances ? exemple qualité du processeur, qualité multimédia) :
Mes logiciels les plus utiles (expliquez caractéristiques et intérêt) :
Mes plateformes (quelles caractéristiques ? avantages et inconvénients ?) :
Mes écouteurs (qualité et rôle) :
Mon téléphone androïde (qualité et utilité) :
Autres :
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Les contraintes du numérique dans mon cas
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Quelle exigence d’une maîtrise (élevée /moyenne /faible) de l’outil informatique ? (précisez) :
Quelle maîtrise des programmes et logiciels ? (expliquez) :
S’inscrire à une formation en ligne et/ ou à distance (précisez) :
Une connexion internet haut débit ? (précisez) :
Disponibilité ? (expliquez) :
Il faut du temps ? (précisez) :
Autres :
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TICE Afrique et moi : les enjeux
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J’ai rejoint le groupe (date) en répondant à une annonce / ou non (précisez le moyen) :
Quelles sont les activités du groupe ? (précisez) :
En quoi consiste mon intervention ? (précisez) :
Quel est mon intérêt dans ce groupe ? (précisez) :
De quelle façon je m’implique ? (faible/forte/moyenne) (précisez le domaine) :
Quels sont les enjeux (jusqu’à ce jour) d’un tel groupe ? (expliquez) :
Quels sont les avantages de ce groupe ? (expliquez) :
Quelles sont les difficultés de suivre toutes les activités dans ce groupe ? (précisez) :
Quel est le rôle joué par TICE Afrique dans l’auto-formation ? (précisez) :
Quel est le rôle joué par TICE Afrique dans la formation par les pairs (précisez) :
Quelle vocation peut-on lier à ce groupe ? (précisez) :
Autres :
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Les limites du numérique
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Quelles limites ? (expliquez) :
Autres :
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Les réponses formulées ont été compilées dans un fichier Word afin d’être analysées de façon qualitative. Nous avons appliqué une codification anonyme, attribuant à chaque participant au hasard une syllabe, tel que présenté dans le tableau ci-après :
Tableau 2 : données des participants
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Participants
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Degré d’enseignement
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Pays
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1
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(BLA), homme
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Supérieur
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Mali
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2
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(DLA), homme
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Supérieur
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RDC
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3
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(TRA), homme
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Secondaire
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Sénégal
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4
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(PRA), femme
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Supérieur
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Espagne
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5
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(VLA), homme
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Supérieur
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Côte d’Ivoire
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6
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(FRA), homme
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Secondaire
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Mali
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Nous avons regroupé tous les discours du même thème dans un même fichier et nous leur avons appliqué une analyse thématique de contenu, en recherchant, tel que suggéré par Blanchet et Gotman (2007, p. 93), des significations.
9Ce faisant, nous avons d’abord utilisé une grille d’analyse de ce qui est dit (Savoie-Zajc, 2004, p. 140), en recherchant dans la formulation des élocutions, le sens apparent. Ensuite nous avons utilisé une autre grille, portant sur la façon dont le discours est construit afin de le qualifier à partir de la lecture. La lecture nous a permis de construire des catégories descriptives dont nous ne présentons que deux (2) groupes, pertinents pour comprendre de quelle façon les enseignants complètent leurs formations, notamment en étant intéressés, s’impliquant au mieux dans les activités du groupe, déclinant les avantages et les risques ou encore les difficultés.
Tableau 3 : quelques catégories construites
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Participants
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Catégories
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Intérêt, implication et limites
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Enjeux
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10Les questions ouvertes formulées ont permis de concevoir le groupe TICE Afrique comme un environnement de formation complémentaire au sens où les adhérents y échangent des expériences et des stratégies innovantes, susceptibles d’être réinvesties dans chaque profession. Les discours des personnes contributives sont riches d’énonciations à cet effet. Pour des raisons pratiques, nous avons restreint les résultats à deux groupes de catégories, celui de l’intérêt, implication et limites et celui des enjeux.
11Tous les participants ont envisagé le groupe TICE Afrique comme un contexte propice à un enrichissement des formations initiales et continues ainsi que lieu de perfectionnement. Par son implication, DLA témoigne d’avoir tiré profit des expériences partagées pour améliorer les enquêtes menées auprès de ses clients. Il mentionne aussi des avantages à d’autres égards. De plus, ses enseignements deviennent plus efficaces car il applique dans ses enseignements les stratégies partagées au sein du groupe :
Le numérique me sert pour le travail de traduction, pour les évaluations de la qualité, de l’institution, l’enseignement, le traitement des données. L’intérêt ce sont les applications directes à l’enseignement. Sur le plan professionnel, cela m’a apporté la facilité dans les enquêtes, la satisfaction des clients et l’efficacité dans l’enseignement. Cela me sert de formation continue et une mise à jour des connaissances. Mais c’est source de dépenses énormes et les caprices de la connexion, il faut chaque fois être connecté à Internet (DLA).
Cet avis est partagé par PRA :
Je travaille sur la compétence numérique en Afrique et c’est une vraie chance pour moi de pouvoir partager cet espace avec des collègues de nombreux pays. Cela correspond assez bien à ma manière de voir les processus : essai/erreur/solution et on apprend en faisant. La mutualisation d’expériences, le partage sous différents types d’échanges synchrone et asynchrone, tout le monde a quelque chose à apporter (PRA).
BLA travaille dans un établissement supérieur au Mali. Son implication vise surtout la création d’un réseau international de communication. Par ailleurs, c’est sur le plan personnel qu’il y trouve son compte, si l’on peut dire :
Je suis stagiaire et formateur et l’enjeu est de créer un réseau de professionnels internationaux en vue d’un approfondissement. Les avantages sont les échanges professionnels, les échanges de documents et d’expériences, ce qui contribue à une satisfaction morale car on bénéficie d’une reconnaissance et des sollicitations des collègues (BLA).
Du point de vue de VLA, cet espace est propice aux apprentissages et au partage. Il s’inscrit dans une logique de perfectionnement au sens où, tel qu’il le mentionne, son implication lui accorde une formation gracieuse :
La plateforme offre beaucoup de facilités à travers l’exploitation de supports et à travers les projections, entre autres. Le rapprochement entre spécialistes sous forme de réseau, le partage et l’enrichissement mutuel, entre autres sont des avantages. La mise en relation de spécialistes permet le contournement de l’aspect pécuniaire de la formation, si celle-ci s’inscrivait dans un contexte autre que le nôtre. La formation est gracieuse (VLA).
Toutefois, bien que ces praticiens réflexifs se soient prononcés sur ce premier groupe de catégories, certains d’entre eux ont donné leur avis sur des enjeux.
12Parmi les enjeux verbalisés, nous avons retenus les enjeux professionnels et les enjeux socio-affectifs. En effet, à l’unanimité, l’accès à internet haut débit constitue un enjeu majeur. De même, l’implication dépend des disponibilités et du niveau de maîtrise de l’outil numérique. VLA dénonce le fait que les horaires de rencontre en ligne ne lui conviennent pas au sens où ses activités professionnelles sont programmées aux mêmes moments. Par exemple, selon BLA, l’évocation des avantages réfère à une satisfaction morale et personnelle.
13Selon DLA, « Qu’est-ce que cela m’a apporté sur le plan personnel ? Une ouverture sur le numérique ». Quant à TRA, c’est son autoformation qui constitue un enjeu à son implication au groupe, compte tenu des contraintes liées à l’accès à internet haut débit « Des interruptions permanentes », souligne-t-il. Sur le plan socio affectif, si cette initiative permet de soutenir effectivement les formations à distance, la maîtrise des nouveaux outils numériques constitue un véritable défi. Quand PRA se prononce sur sa façon de travailler et de l’intérêt du groupe, elle évoque un certain dynamisme et une source de motivation crées par les interactions du groupe de partage. Elle ajoute qu’il s’agit d’« une autre manière qui se complète pour notre processus » et que disposer des conditions adéquates constitue un enjeu majeur « nous avons beaucoup de chance dans ma région ».
14Initialement, il était question de préciser les éléments de complément de formation des enseignants en Afrique, dans le contexte de la crise sanitaire. Cette formulation a été valorisée par le cadre conceptuel ayant permis de clarifier le concept de complément de formation et le rattacher ainsi à une conception plus alternative, celle du socioconstructivisme. Elle est en cohérence avec le cadre de l’étude réalisée, celui d’un échange synchrone et asynchrone des pratiques, des ressources et d’expériences du numérique, par des personnes motivées, engagées et actives non seulement dans la verbalisation de leurs pratiques, mais également dans l’entraide. Ainsi, la préoccupation de décliner comment ces praticiens complètent leurs formations a été envisagée de façon compréhensive et une perspective critique interprétative a permis d’obtenir des données empiriques qualitatives. Leur analyse qualitative de contenu thématique a permis de construire des catégories, en fonction des thématiques de départ. Les résultats obtenus sont en conformité avec la logique de recherche en éducation, soulignée par Blanchet et Gotman (2007, p. 93) et Savoie-Zajc (2004, p. 140). Néanmoins, le fait d’avoir compilé les enjeux épistémologiques, les enjeux de formation et ceux d’accessibilité sous la tutelle des enjeux professionnels, ne permet pas de préciser la diversité des points de vue à cet effet, ce qui n’entame en rien la qualité des résultats, si l’on tient compte des enjeux socio-affectifs signalés.
15En définitive, l’article visait la description de la façon dont quelques enseignants en contexte africain envisagent de compléter leur formation en cas de crise sanitaire. Nous avons inscrit notre contribution dans une logique d’ensemble du développement durable. Nous avons également souligné l’exigence des gouvernements d’instituer, au sein des établissements de formation, des enseignements à distance, ce qui nous a permis de présenter TICE Afrique comme une plateforme propice aux activités pédagogiques complémentaires. Nous avons constaté que les contributeurs à l’étude de terrain sont unanimes sur la pertinence de TICE Afrique comme plateforme de formation continue. Pour certains, ils y complètent leur expérience professionnelle en développant de nouvelles compétences numériques alors que les conditions de crise sanitaire sont souvent difficiles. De même, les limites imposées par l’accès délicat aux structures numériques adéquates ne motivent pas l’implication dans des autoformations au numérique. Dans un certain sens, ce ne sont que des personnes dites chanceuses qui ont plus de facilité à compléter leur formation avec aisance au sein de TICE Afrique. C’est pourquoi, d’un commun accord, de nouvelles activités de formation sont mises en place afin de soutenir un maximum de membres, de sorte que les bénéfices générés constituent des sources de valorisation personnelle, au plan socio-affectif et professionnel. Néanmoins, la contribution demeure d’abord individuelle et selon les besoins particuliers. Il est donc difficile de construire une véritable dynamique impliquant le plus grand nombre, compte tenu de la diversité et de la disparité des intérêts et des différences du niveau de maîtrise de l’outil numérique. Ainsi, il est judicieux de considérer les contingences structurelles relatives à la fracture électrique dans plusieurs pays africains. Ainsi, bien que TICE Afrique soit une plateforme de cohésion sociale, les activités de complémentarité des formations sont en cours et plusieurs défis sont notés.
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