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Le fiasco de la smart city de Google à Toronto

Éthique de la pensée complexe contre solutionnisme technologique
The Google smart city fiasco in Toronto.The ethics of complex thinking versus technological solutionism.
Bernard Fallery

Résumés

Entre utopie et dystopie, le concept de Smart city est en question. La ville intelligente fait rêver, mais les réalisations concrètes de captation des comportements ont vite été contestées par les citoyens. L'histoire très documentée du fiasco de Google en 2020 à Toronto permet d'illustrer ce solutionnisme technologique qui envisageait de construire une ville-plateforme, une ville-calculée. L'hyper-connexion et l'optimisation algorithmique peuvent alors être analysées au niveau de l'éthique. On peut avancer qu'aucun des trois grands principes éthiques – celui de personne, celui de devoir ou celui d'utilité - ne pourra fonder une éthique pour le numérique. Les inévitables conflits ne seront pas à résoudre, mais à vivre, dans une éthique relevant de la pensée complexe.

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Texte intégral

Introduction

1Le concept de Smart city est-il en voie de disparition ?

2Peut-on se réjouir de poser cette question, car elle envisage la fin d'un cauchemar technologique basé sur la généralisation et l'optimisation des systèmes de surveillance ? Doit-on au contraire s’inquiéter de poser cette question, car elle envisage de retarder des solutions technologiques pour des villes plus durables, plus flexibles et même plus démocratiques ? (Damon, 2016).

3Entre utopie et dystopie, l'objet Ville intelligente Smart city est typiquement un objet-frontière, qui peut certes être utilisé par plusieurs communautés sans consensus préalable, mais donc aussi sans lui donner le même sens (CNIL, 2017). Popularisé par IBM qui avait même déposé en 2011 la marque Smarter Cities©, le concept de Ville intelligente a enthousiasmé nombre d'élus au nom de l’efficacité dans la gestion urbaine, il a été repris par nombre de chercheurs en sciences humaines autour de l'Open data et des Civic Tech (Vanin, 2019), pour finalement subir un échec retentissant en 2020 avec le grand projet de Google à Toronto.

4C'est en partant de cette étude de cas, l'histoire très documentée de l'abandon du projet Quayside à Toronto, que nous pourrons d'abord proposer une analyse : s'agit-il seulement d'un fiasco de Google dans un cas spécifique ou bien faut-il y voir le début de la fin du solutionnisme pour des villes « intelligentes » ?

5La contestation des citoyens de Toronto apparaissant largement comme une contestation de l'hyper-connexion, de la captation des données comportementales et de l’optimisation algorithmique, il devient alors nécessaire d'analyser ces conflits au niveau éthique, un niveau peu discuté dans la littérature pourtant si abondante sur le sujet (Turmel et Roche 2016).

6Au-delà d'une analyse toujours nécessaire des nombreux risques éthiques liés à la Smart city, nous proposons une réflexion plus théorique en soutenant qu'aucun des trois grands principes éthiques ne pourra fonder une « infoéthique » pour le numérique basé sur les données massives et l'apprentissage statistique. La Pensée complexe développée par Edgar Morin propose que les inévitables conflits éthiques ne sont pas à résoudre ou à dépasser, mais à vivre dans la dialogique et la « reliance » (Morin, 2004).

1. Quartier Quayside à Toronto : le calendrier du fiasco de Google

7Trois chapitres ont scandé l'histoire du projet Google à Toronto : comment Google s'est imposé, comment Google s'est excité, et comment Google a dû tout abandonner.

1.1. Google s'impose en 2017

8En 2002 le gouvernement, la province et la ville créent Waterfront Toronto, une société publique d'aménagement pour organiser le renouvellement du « Bord de l'eau » sur le lac Ontario, une friche portuaire de plusieurs centaines d'hectares placée au cœur de la ville. Après l’échec d'une candidature de la ville aux Jeux olympiques en 2008, Waterfront est sous pression après ses quinze ans de financement sans grandes réalisations, quand elle lance en mars 2017 une Demande de Proposition pour un projet pilote sur les cinq hectares du quartier Quayside. Elle annonce trois objectifs (durabilité, logements abordables et développement économique) et reçoit six soumissions.

9En juin 2017, soit trois mois plus tard, Stephen Diamond, président de Waterfront, donne une semaine à son conseil d'administration pour approuver un résumé en quatre pages d'un Accord-cadre avec Sidewalk Labs. Cette filiale d'Alphabet-Google, dont le nom signifie littéralement « Labos des trottoirs », devient un « partenaire d'innovation et de financement ». Dan Doctoroff, CEO fondateur de Sidewalk (et ancien adjoint au maire de New York en charge des projets immobiliers et d'infrastructures), exulte : "Nous avons cherché dans le monde entier l’endroit idéal pour donner vie à notre vision du quartier du futur. Nous l’avons trouvé ici à Toronto". Pourtant le Premier ministre Justin Trudeau ose avouer, en faisant référence à l'ancien président de Google, « Eric [Schmidt] et moi parlons de collaborer à ce sujet depuis quelques années maintenant, et en voyant que tout cela est extraordinairement excitant ». Mais dans le rapport du vérificateur provincial de l'Ontario, on peut déjà lire « La province n'a pas de cadre stratégique pour guider le développement d'une ville intelligente à usage mixte comme celle qui est envisagée pour Quayside ».

1.2. Google dans l’excitation en 2019

10Ce n'est qu'en juillet 2018 c'est-à-dire un an plus tard, que l'Accord-cadre complet est finalement publié (il était jusqu'ici resté secret), en même temps qu'un premier Plan Development Agrement « dans un idéal progressiste d'inclusivité et de durabilité »: des espaces et logements modulables, des immeubles à structure bois, des véhicules autonomes, de multiples services basés sur tous les types de capteurs de données... et avec « en annexe » des règles juridiques très particulières sur l'exclusivité des contrats, sur la propriété intellectuelle et sur la gouvernance des données. Ann Cavoukian, l'ancienne commissaire à la protection de la vie privée de l’Ontario, consultante réputée à l'origine du concept de Privacy by design et qui avait été recrutée par Sidewalk, démissionne immédiatement1 : "J’avais imaginé que nous allions créer une smart city respectueuse de la vie privée, pas une smart city de la surveillance".

11Les ingénieurs de la Silicon Valley se mettent au travail pendant un an et c'est en juin 2019 que Waterfront et la société civile découvrent enfin l'énorme projet immobilier conçu par Google. Le MIDP Master Innovation and Development Plan, un diaporama-fleuve de 1.500 pages, est moins un véritable plan d'urbanisme qu'une présentation marketing ou une série de cartes postales : un district entier quinze fois plus grand que le quartier de départ (77 ha au lieu des 5 ha prévus, avec l'engagement d'y transférer alors le siège social de Google au Canada). On y découvre une gouvernance centralisée des données issues d'innombrables capteurs de déplacements ou d'absences, pour au final une privatisation de l'espace public2: tunnels robotisés de livraisons et de déchets, pistes cyclables chauffantes, parkings adaptables en « loft », panneaux muraux flexibles, trottoirs modulables en fonction du trafic, propre système de code postal, rues sous ventilateurs et/ou canopées autonomes... Teresa Scassa, juriste-conseil de Waterfront, s’inquiète3 : « Ce n’est pas le rôle de l’entreprise de construire un tel projet de mise en commun de données, si l’on veut qu’elles soient gérées dans l’intérêt général ».

1.3. Google abandonne tout en 2020

12C'est alors au tour de la société civile de se mettre « au travail ». Des citoyens de Toronto s'organisent et par exemple ils détricotent le MIDP dans un rapport argumenté4 de 17 pages : sur les conflits d’intérêts avec Waterfront, sur les concertations qui ne sont que des communications, sur les fausses innovations, sur les promesses d'emplois fantaisistes de 44.000 emplois permanents dans vingt ans, sur les dérogations aux règles du logement, sur les multiples zones de surveillance en temps réel (les déplacements, le trafic, le bruit, l’énergie, l'eau, les déchets, les incivilités...), le tout dans un grand flou sur l'anonymisation, la propriété et l'usage des ces données, avec même la création de statuts juridiques inédits comme celui « d'espaces ouverts » (qu'ils soient publics ou privés) et celui de « données urbaines » (collectées dans ces nouveaux espaces ouverts).

13En mai 2020 cette prise de parole de la société civile est devenue incontournable. Après plusieurs tentatives de reculades devant la commission d’évaluation technique de Waterfront (envisageant même un tiers de confiance canadien pour la gouvernance des données numériques), Sidewalk annonce par surprise son retrait définitif dans un message toujours en ligne5 justifiant succinctement qu'un projet réduit à 5 hectares n'est plus rentable depuis la crise sanitaire : « une incertitude économique sans précédent s'est installée dans le monde et sur le marché immobilier de Toronto ». Pas un mot n'évoque les deux années de polémiques ou de controverses argumentées, de contre-expertises officielles ou d'actions citoyennes.

2. Un fiasco de Google... ou le fiasco du concept de ville intelligente ?

14Revenir trois ans après sur cet échec d'un méga-projet de Smart city, c'est d'abord répondre à cette question : s'agit-il d'un simple fiasco de Google à Toronto ou bien plus généralement du fiasco du concept de ville « intelligente » ?

2.1. Le fiasco de Google

15Le fiasco à Toronto est presque devenu un véritable cas d'école : une recherche avec le moteur Scholar.Google sur failure sidewalk toronto smart city donne plus de 18.000 références. Nous nous sommes appuyés ici sur une analyse de contenu de quatre discours : les trois volumes du plan MIDP (2019, 1.500 pages très illustrées, longtemps restées en ligne), le travail très documenté de Goodman & Powles (2019, 42 pages. avec 250 notes de bas de page), notre traduction en français du rapport publié par des citoyens de Toronto (David Robertson, 2019, 17 pages) et l'ouvrage de Josh O'Kane (2022, 416 p.). Un codage à la main, sous la forme de surlignages et d'annotations par une quarantaine de mots-clés, permet de qualifier le fonctionnement global de ces discours (thème, thèses, présupposés). On peut alors résumer les trois raisons de ce fiasco : Google n'est pas une entreprise de développement urbain, Waterfront n'est pas une autorité du numérique, les citoyens de Toronto ne sont pas tous des naïfs.

16Comme d'autres grands empires numériques, Google-Alphabet lorgne sur plusieurs nouveaux « marchés », d'abord ceux de la santé et de l'éducation mais aussi celui de l'urbanisme. Derrière un projet de valorisation foncière en Partenariat-Public-Privé, l'opération de Toronto apparaît surtout pour la holding Alphabet (créée en 2015 en même temps que cette nouvelle filiale Sidewalk) comme la construction d'une vitrine mondiale des innovations urbaines liées à l'Internet des objets. C'est d'ailleurs bien là son vrai métier, comme on peut le découvrir dans le MIDP avec sa conception idéalisée d'une ville-plateforme et de sa couche numérique (figure 1) : « Conceptual site diagrams illustrate the integrated digital and physical layers of Quayside’s proposed systems. These diagrams supply early insights into the spatial location of sensors and related technology for each of the digitally enabled services on the list ».

Figure 1 : La structuration d'une ville-plateforme (MIDP Google, 2019)

17Waterfront est une autorité temporaire, non élue et sans compétences dans le numérique ou la propriété intellectuelle. Etant sans but lucratif son intérêt immobilier reste modeste, elle a plutôt vu dans l'opération Quayside une occasion de redorer son blason avec «a globally significant demonstration project that advances a new market model for climate-positive urban developments ». Malgré des irrégularités dans la soumission, dans la sélection et dans le respect des accords (et aussi suite à plusieurs démissions d’administrateurs de Waterfront), c'est donc assez logiquement que Sidewalk est rapidement passé d'un statut de soit-disant « partenaire d'innovation et de financement » à celui de développeur principal du projet. Le petit Waterfront a fait venir le grand Google, puis l'a laissé développer son projet sans être capable de définir le moindre cahier des charges comme en témoigne J. Priol (2020).

18Les citoyens de Toronto n'ont pas été naïfs, ils ont rapidement compris ce que les administrateurs de Waterfront et de la ville voulaient ne pas voir : il s'agissait surtout, au-delà de la présentation d'innovations parfois fantaisistes ou illégales, d'un projet de captation à grande échelle de toutes les traces numériques du district par vingt-cinq types de capteurs, traces numériques centralisées sur une méga-plateforme de données gérée par une multinationale de droit étasunien6. A part une spéculation foncière à très long terme sur les plus beaux terrains de Toronto, on ne voyait en effet pas très bien quel aurait été le véritable modèle d'affaire de Google dans tous ces nouveaux services imaginés par le brainstorming d'ingénieurs de la Silicon Valley (manifestement inquiets des rigueurs de l'hiver canadien). Même au delà même d'une analyse coûts/avantages, ce que Google offrait dans le projet n'avait finalement plus d'importance face à la souveraineté que la ville devait abandonner.

2.2. Le fiasco de la ville intelligente ?

19La question de l'extinction prochaine du concept de ville intelligente est aujourd'hui posée (Bihouix, 2021), au-delà de son fiasco emblématique à Toronto.

20C'est en 2008 que IBM popularise le concept avec sa Smarter Planet Initiative puis le Smarter Cities Challenge, en proposant un centre de commande centralisé qui allait pouvoir assurer le pilotage automatique d'une ville, à distance et en temps réel. À Montpellier comme à Nice ou à Rio, ces tentatives de « panoptique » par une plateforme transversale de toutes les données urbaines (data-driven city) ont été des échecs retentissants (Roche & al., 2012 ; Courmont et Vincent 2020), mais le concept de Smart city a pourtant connu très vite le succès (Nam & Prado, 2011 ; Dameri & al. 2016) :

21auprès d'élus des collectivités locales, avec la promesse d'une régulation plus fine et efficace des problèmes d’énergie comme des problèmes de sécurité... sans compter l’excitation d'un élu pour avoir une place dans les classements internationaux comme le Smart21 (Eveno, 2018) - des palmarès très médiatisés qui délivrent des labels tout aussi contestables mais tout aussi structurants que ceux qui excitent les présidents d'universités - 

22mais aussi auprès de chercheurs académiques en sciences humaines, avec la perspective de villes plus transparentes, fluides voire démocratiques, autour des open data et des civic tech. Urbaniser la technologie plutôt que numériser l'urbanisme ?

23et bien sûr auprès d'entreprises de toutes tailles, avec de nouvelles possibilités de « disruption » par de continuelles innovations numériques (figure 2).

24Le tout a donné lieu à des approches pour le moins plurielles des Smart Cities (Eveno, 2018 ; Cathelat, 2019 ; Languillon-Aussel, 2020).

Figure 2 : Fundamental Components of Smart City (Nam & Prado, 2011)

25Mais quant aux habitants, ce qu'ils peuvent vraiment voir d'une smart city est bien loin d'une transition vers la « ville durable ». Ils peuvent certes entendre parler de multiples expérimentations, mais sans concertations ni même de bilans. En revanche ce qu'ils peuvent vivre dès aujourd'hui ce sont des réalisations concrètes dans deux domaines :

26d'abord une numérisation presque totale des services publics (Défenseur des droits, 2019), ainsi qu'une captation de données par des services para-publics : l'application SNCF qui intègre maintenant celle de Uber, les applications GoogleMap et Waze qui optimisent à leur façon la signalisation urbaine et les plans de circulation automobile, les pharmacies qui utilisent la numérisation par la carte Vitale pour transmettre leurs données à la multinationale IQVIA7...

27ensuite une généralisation de la vidéosurveillance et même de la « souveillance » (Quessada, 2010) pour gérer des incivilités ou calmer des sentiments d'insécurité, avec l'aide massive de l'état et malgré une efficacité pour le moins modeste (Mucchielli 2018). La smart city, qui se voulait green-city à Grenoble avec 150.000 poubelles connectées par RFID ou à Lyon avec l’équipement de résidents en tablettes de suivi énergétique dans le quartier Hikari... se veut manifestement safe-city à Nice, qui a même franchi le pas illégalement avec un système israélien de reconnaissance faciale dans l'espace public.

28Or même au-delà des faiblesses souvent techniques et surtout politiques de ces « optimisations » (Haëntjens, 2018), deux nouvelles prises de conscience viennent aujourd'hui saper le modèle smart city.

29Il y a d'une part une cristallisation des débats autour de la donnée et une montée de l'opposition citoyenne : refus du compteur Linky, appropriation du RGPD, protection des données de santé, sabotage des antennes 5G, lutte contre la reconnaissance faciale ou le passe sanitaire... Beaucoup comprennent aujourd'hui que le flux de données géolocalisées qui est capturé autour de la ville hyper-connectée devient soit directement monétisé pour la valeur des informations comportementales (le techno-capitalisme, Sadin 2015 ; Le capitalisme de surveillance, Zuboff 2020), soit utilisé pour concevoir des services qui cherchent des effets de réseau et des rentes de monopole (le techno-féodalisme, Durand 2020). Un « territoire intelligent » ne pourrait se concevoir que si des chartes de données urbaines en permettaient la discussion, mais les exemples en ligne des chartes de Nantes ou de Montréal ou même les quelques jours de « convention locale8 » à Montpellier en 2024 montrent que les villes sont encore loin d'une gestion des Communs numériques au sens de Elinor Ostrom (Peugeot, 2011, Cnil 2017) : discuter des règles d'action à chaque niveau, une linking-city, pour maximiser la valeur sociétale sans dissuader les acteurs à l’origine de la création de nouvelles données.

30Il y a d'autre part la nouvelle prise de conscience que derrière les bénéfices environnementaux potentiels du numérique dans la ville optimisée (réseaux électriques intelligents smart grid, systèmes d'intermodalité pour les transports... Javed et al. 2021 ), il y a surtout des coûts environnementaux qui deviennent aujourd'hui considérables : des « externalités » comme disent les économistes, liées à une pollution numérique de plus en plus impressionnante que ce soit au niveau des infrastructures que de la fabrication des matériels, de leur usage et de leur recyclage (Rodhain, 2019, Flipo 2021). Selon le baromètre du numérique9 du Credoc 2019 (page 198), 53% des Français en 2008 pensaient encore le numérique comme bon pour l’environnement, ils ne sont plus que 38% (la question n'est plus posée en 2022?). Et encore ils ne connaissent pas tous SongDo, ville bâtie sur un polder de 600 hectares gagné sur la mer, fleuron en Corée du sud de la U-city (Peyrard, et Gelézeau 2020), la ville ubiquitaire où l'on est partout en étant n'importe où : commande de produits, réunions professionnelles, consultation médicale, cours particuliers... rendant inutiles toutes ces anciennes rencontres qui pouvaient être dangereuses ou toutes ces anciennes cartes qui ne contrôlaient pas l'espace public (Vidal 2013). Car si le petit secret de SongDo c'est son U-Média Center collectant l’ensemble des données transmises par la multitude de capteurs, senseurs, caméras de surveillance implantés dans tous les édifices et tout le mobilier urbain (Berthier 2015) pour optimiser les déchets, l’eau, l’électricité, jusqu'aux buildings aux fenêtres sans poignées pour ne pas bloquer les systèmes d’air conditionné... son plus grand secret bien gardé c'est que la production d’électricité repose, comme pour toutes les villes de Corée, sur une centrale à charbon10.

31L'idée d'une ville algorithmique hyper-connectée a eu son heure de gloire, pour ses effets marketing comme pour ses effets mobilisateurs, mais le concept de smart city est probablement en voie de disparition. Cela n'est d'ailleurs pas réjouissant, car non seulement la vraie question de ville durable et démocratique reste posée mais la question de l'hyper-connexion reste prise en charge quant à elle par les géants du numérique : après leurs déboires dans les métiers d'urbanistes intégrateurs, les Gafam-Natu-Batx semblent plutôt choisir aujourd'hui d'investir leurs immenses capacités financières dans les infrastructures (fermes de serveurs bien sûr, mais aussi réseaux 5G privés11, câbles sous-marins12, satellites13... dans une stratégie encore plus large vers la méta-connectivité).

3. Une éthique pour le numérique, la pensée complexe contre le solutionnisme

32Si on considère les contestations de la ville intelligente comme une contestation de l'hyper-connexion, de la captation des comportements et de l’optimisation algorithmique, il est nécessaire d'analyser cette contestation au niveau éthique, un niveau peu discuté dans la littérature pourtant si abondante sur le sujet. Il faut certes continuer à lister des « risques éthiques » (Turmel et Roche 2016) : mettre la vie privée en danger, privatiser l'espace public, optimiser l'état de fait, augmenter le risque climatique, cacher l'aspect systémique de l’agrégation de projets multiples, accentuer des discriminations sans même pouvoir les expliquer, accentuer la logique sécuritaire face à la grande vulnérabilité des systèmes techniques... Mais il faut aussi continuer une analyse éthique plus théorique : entre les principes de la philosophie morale, l'idéologie du solutionnisme et la méthode de la Pensée complexe.

3.1. Une éthique pour le numérique ? Les trois grands principes philosophiques dans l'impasse

33Pour donner un sens à un comportement dans une certaine situation (l’action, la décision...), l'éthique se place toujours entre les valeurs morales (le bien, le mal, le juste...) et les règles de droit (la législation, les sanctions...) (figure 3). Certes ce sont bien les grands principes philosophiques qui permettent de comprendre, par exemple, comment une véritable « bioéthique » a pu se construire depuis Hippocrate : la vertu personnelle mise en avant par Aristote, ou le devoir défendu par E. Kant, ou l'utilitarisme soutenu par J. Bentham et J.S Mill. Nous avons cherché à présenter ces trois principes sur le site SIetManagement.fr14 (Fallery, 2020). Mais on peut alors soutenir qu'aucun de ces grands principes ne pourra jamais fonder une « infoéthique » pour le numérique basé sur les données massives et l'apprentissage statistique.

Figure 3 : Les valeurs morales, le droit et l’éthique

34Parler d’une éthique pour le numérique c’est considérer qu’elle a une spécificité : elle concerne ces situations contradictoires (conflits, déviances, dilemmes, paradoxes…) qui associent à la fois le comportement des individus (l’action numérique en réseau) ET le comportement propre des technologies numériques (lesquelles ne sont jamais neutres, mais deviennent même de plus en plus autonomes et ambivalentes).

35Le principe relativiste de la vertu personnelle « Agis avec Prudence critique pour assurer les conditions de la vie bonne » ne peut plus avoir de sens, quand les technologies numériques font disparaître le libre arbitre. L’hyper-connexion (géolocalisation, traçage des contacts, impossibilité de se déconnecter, finalités non explicitées de la captation de données personnelles...) et l'optimisation basée sur l'apprentissage profond (vectorisation du monde, reconnaissance de formes, inférence automatique... LeCun, 2015) génèrent un nouveau mode de contrôle social : rendre les comportements nécessaires, sans même qu'ils soient obligatoires. Mais décider ce n'est pas seulement optimiser des catégorisations sans aucune causalité, décider c'est d'abord définir l'espace d'un problème et c'est ensuite savoir comment on a envie de le traiter. Une relecture de celui qui fut un des pères de l'intelligence artificielle serait ici bien nécessaire (H. Simon, 1976, traduction française).

36Le principe universaliste du devoir « Agis selon une maxime que tu puisses vouloir universelle » ne peut plus avoir de sens, quand l'inflation des chartes d’éthique ne débouche ni sur la moindre sanction, ni même sur la moindre réprobation. Serment Holberton-Turing, déclaration de Montréal, déclaration de Toronto, Programme de l’Unesco… on est ici bien loin du serment d'Hippocrate qui a fini par institutionnaliser15 la bioéthique. Ici les tentatives de déontologie numérique deviennent plutôt du blanchiment éthique (Metzinger, 2019). Non seulement un blanchiment éthique de l’écosystème du numérique lui-même (tellement l'impératif catégorique de l'universalité est bafoué presque chaque semaine par les comportements des empires numériques : évasion fiscale, revente de données et manipulations, cours de bourses insensés, censures, concentrations, obsolescence programmée...), mais encore un blanchiment éthique des modes de vie de plus en plus contraignants qui découlent du système de gouvernementalité algorithmique (Rouvroy, 2020).

37Quant au principe utilitariste des conséquences « Agis en évaluant si les conséquences sont utiles au bonheur général », il ne peut plus avoir de sens si les conséquences justifient toujours les moyens numériques, sinon même quand ce sont les moyens numériques qui finissent par devenir la fin. Dans l'écosystème Gafa-Natu-Batx qui oriente aujourd’hui le développement des systèmes d’IA (Fallery, 2022), les performances viennent alors justifier l'empreinte écologique de la 5G, la sécurité vient justifier la vidéosurveillance algorithmique des comportements, l'innovation vient justifier les concentrations monopolistiques, l'amélioration les systèmes de prédiction vient justifier des discriminations « collatérales », la médecine personnalisée vient justifier la centralisation autoritaire des données de santé...

3.2. Une éthique pour le numérique ? L'idéologie du solutionnisme technologique

38Le solutionnisme n'est pas une éthique, mais une idéologie. Une idéologie qui trouve ses racines dans le taylorisme et dans le mythe du « décideur » : l'organisation scientifique du travail sépare des ingénieurs des méthodes qui savent trouver les solutions et des exécutants qui n'attendent qu'un salaire ; et le mythe du décideur individuel sépare le manager hiérarchique qui choisit la solution et des employés qui travaillent. Un mythe qui a réussi à perdurer malgré toutes les attaques, notamment celle de James March, montrant dans le Garbage Can Model comment ce sont en fait des flux largement aléatoires qui se croisent dans une décision : des flux de solutions, de participants, de problèmes et de contraintes. « You often do not know what the question is in organizational problem solving, until you know the answer » (March, 1998, p.3).

39Le solutionnisme technologique est alors au croisement de ces mythes individualistes du capitalisme industriel et de l'idéologie libertaire qui s'est développée aux Etats-Unis autour des règles de fonctionnement d'Internet. Le slogan de Google était « Changer le monde » et son président Eric Schmidt annonçait lors d’une conférence en 2012 : « Si nous nous y prenons bien, je pense que nous pouvons réparer tous les problèmes du monde ». Internet, la technologie du Réseau des réseaux, est apparue comme le modèle pour faire disparaître les institutions jugées vieilles et inefficaces au profit de l’intérêt particulier et du contrôle sur soi-même érigé comme un principe ; aujourd’hui la conjonction s'est opérée avec les systèmes d'intelligence artificielle basés sur l'apprentissage statistique par des données massives. Hors des institutions et hors de toutes délibérations (Dacheux, 2020), l'interconnexion générale des individus et des données permet d'avancer des solutions « pragmatiques » contre l’obésité, la faim, les épidémies, le réchauffement climatique, la mortalité sur les routes, l'insécurité, les problèmes d'enseignement en ligne, les problèmes d'urbanisme et de déplacements, les pollutions numériques... Le tout avec le soutien a priori paradoxal des gouvernements et des institutions, qui y voient finalement un contrôle facile des effets plutôt qu'une gestion beaucoup plus complexe des causes. Ce solutionnisme technologique, déjà dénoncé à l'époque par J. Ellul (1988), a été brillamment résumé par le titre de l'ouvrage détaillé de E. Morozov (2014) : Pour tout résoudre, cliquez « ici ».

40Pour Jeremy Bentham (1834) et John Stuart Mill (1863) le principe éthique de l'utilité consiste à choisir les actions en fonction d'une évaluation de leurs conséquences, en visant le bonheur du plus grand nombre. L'utilité apparaît comme la solution quand la notion de personne perd son caractère absolu ou quand la notion de devoir n'a pas réussi à s’institutionnaliser dans des corporations aussi fortes que celles des médecins. Il est clair que l'utilité des conséquences peut très bien convenir aux tenants du solutionnisme, mais c'est aussi une démarche classique chez la plupart des ingénieurs et des managers, :

41d'une part l'évaluation des conséquences se combine bien avec une approche quantitative maîtrisée par les scientifiques : calcul d'un ratio, analyse de risques, résolution logique d'un dilemme, calcul d'impact, balance coûts/avantages, classement multi-critères... (Berreby et al. 2018).

42d'autre part le principe d'utilité ne repose pas sur une théorie simplement économique mais bien sur une théorie des préférences : il s'agit de faire ce qui peut être classé comme le plus utile. La force de l'utilitarisme est alors qu'il est le seul des trois principes à pouvoir ainsi « résoudre » provisoirement les inévitables conflits sur les principes et sur les valeurs – mais à la condition de ne pas regarder de trop près le sort réservé au petit nombre (Cléro, 2011).

43La Pensée complexe prétend quant à elle que ces inévitables conflits ne sont justement pas à « résoudre » ou à dépasser, mais qu'ils sont à vivre.

3.3. Une éthique pour le numérique ? La méthode de la Pensée complexe

44« Nous avons besoin d’une méthode de connaissance qui traduise la complexité du réel », c'est le projet d'Edgar Morin, développé entre 1977 et 2004 au cours des six tomes de La Méthode (Morin, 2004) en s’insérant dans le paradigme de la complexité (Cilliers et Preiser 2010). Dans le tome 6 consacrée à l'éthique, E. Morin s'appuie sur deux grands concepts pour une Pensée complexe, la dialogique et la reliance :

45la dialogique n'est pas la dialectique. Au lieu de résoudre les contradictions par une synthèse ou une transformation, la dialogique « assume cette tension en deux notions devant s’exclure l’une l’autre, mais qui sont indissociables en une même réalité » (Le Moigne et Morin 2007, p. 78). La dialogique n'est pas une logique binaire, mais « uni-duale » : plusieurs logiques différentes sont liées en une unité, mais sans que la dualité ne se perde dans cette unité complexe et dynamique. D'un point de vue opérationnel c'est alors une boucle dialogique (qui est rétroactive par effet de feedback, mais surtout récursive par transformation dynamique du système), qui permet de modéliser des interactions éthiques, complémentaires, concurrentes et antagonistes, pérennes et toujours évolutives ;

46la reliance se fonde sur la conviction que tout autre est un sujet, un alter ego (Bolle de Bal, 2009). A l'inverse de l'exclusion, une éthique de reliance doit être l'expression des impératifs de fraternité, de responsabilité et de solidarité, des impératifs qui génèrent des liens pour pouvoir affronter l'incertitude logique. « Relié » est passif, « reliant » est participant, « reliance » est activant. On peut parler de déliance pour l'opposé de « reliance » (Morin 2004, p. 269). Nous avons besoin de reliance pour vivre l’uni-dualité : « L'éthique complexe conçoit que le bien puisse contenir un mal, le mal un bien, le juste de l'injuste, l'injuste du juste (p. 60), « Le mal existe, mais il n'y a pas de principe du Mal » (p. 244). D'un point de vue opérationnel on ne trouvera donc pas ici de recettes éthiques, la reliance n'est que l'impératif de base et ne cherche pas une optimisation. « La reliance est un impératif éthique primordial, qui commande les autres impératifs à l’égard d’autrui, de la communauté, de la société, de l’humanité » (ibid. p. 114). Une éthique complexe apparait au final comme une méthode pour « travailler à bien penser » (p. 251), en tissant des liens à partir de disjonctions/conjonctions (Vallat 2017), en apprenant à ne pas exclure les dialogiques.

47En cherchant à opérationnaliser ces deux grands concepts de dialogique et de reliance, nous avions déjà analysé la contestation du Health data hub, une plate-forme centralisée de toutes les données de santé françaises, hébergée... par Microsoft (Fallery, 2021).

3.4 Le projet Quayside. Trois boucles dialogiques définissent une succession de « situations éthiques »

48Pour comprendre que le projet de Google à Toronto ne doit pas être vu seulement comme un problème compliqué relevant d'une décomposition analytique, mais bien comme un problème relevant d'une éthique complexe, il est possible de mobiliser la dialogique et la reliance.

Figure 4 : Les boucles dialogiques dans le projet Quayside

49Trois boucles dialectiques peuvent alors être définies (figure 4) :

50une boucle dialogique sur les connaissances, qui voit se succéder les différents sujets abordés, avec des impératifs éthiques à la fois antagonistes et complémentaires. De quel développement parle-t-on ? (développement urbain pour WaterFront, développement social et durable pour les élus, développement technologique et immobilier pour Google). De quelle souveraineté parle-t-on ? (souveraineté nationale, ou économique, ou personnelle pour les habitants). De quelle gouvernance des données parle-t-on ? (gouvernance centralisée par Google, ou gouvernance polycentrique pour les riverains) ;

51une boucle dialogique sur l'énonciation, qui voit se succéder les différentes formes de communication, avec là encore des impératifs successifs et concurrents : l’intérêt de polémiques publiques en opposition aux controverses argumentées, l'action de Google (lobbying, planification secrète, marketing public) en opposition à la délibération (des élus ou des riverains) ;

52une boucle dialogique sur les interactions, qui voit enfin se succéder des impératifs éthiques successifs sur le périmètre et sur l’horizon du projet : une vitrine mondiale pour Google opposée à un quartier test pour les élus, une privatisation de l'espace public opposée à un consentement par les habitants, un niveau d'urgence pour Google opposé aux impacts potentiels pour les riverains.

53Sur chacune de ces trois boucles dialogiques un impératif éthique peut prévaloir à un moment donné et il entre en résonance avec un impératif des autres boucles pour concrétiser alors une des « situations éthiques » qui vont se succéder :

54une première situation éthique s'est concrétisée dans l'épisode « GESTION DE PROJET » : sous la bienveillance de l'autorité Waterfront, Google réussit à imposer un alignement entre un impératif de langage (confidentialité, lobbying, communication marketing), un impératif de connaissance (technologie numérique, innovations urbaines) et un impératif sur le niveau d'interactions (urgence, impact considéré local) ;

55une deuxième situation éthique s'est concrétisée dans l'épisode « PRIVATISATION » : avec une mobilisation des citoyens et une réaction de certains élus, un nouvel alignement se réalise entre un autre impératif de connaissance (l'espace public, le développement du logement social, l'état de droit), un autre impératif de communication et d’énonciation (entre polémiques et délibérations) et un autre impératif sur la définition du niveau des interactions (impacts potentiels, sur l'urbanisme de toute la métropole, sur la gentrification, sur la démocratie locale) ;

56enfin une troisième situation éthique s'est en définitive concrétisée dans l'épisode « DONNÉES PERSONNELLES » : un nouvel agilement des impératifs éthiques de réalise autour de la gouvernance des données (centralisée versus polycentrique, captation versus consentement), du langage dans les actions des citoyens (réunions, rapports, expertises) et du niveau de préoccupation des élus (souveraineté canadienne).

57Alors que Google était dominant dans l'épisode Gestion de projet, il lui a fallu céder du terrain dans l'épisode Privatisation, en revenant notamment sur l'étendue du projet et sur ses prétentions dans le partenariat de financement. Dans le troisième épisode où les impératifs éthiques ont tourné à la contestation sa politique de Données personnelles, Google a encore cherché à céder du terrain sur la souveraineté, mais au final a tout abandonné sous le prétexte d'incertitudes liées à la crise sanitaire, à la satisfaction des citoyens mais à la grande surprise et au désappointement des élus. En utilisant les concepts de la pensée complexe on peut dire qu'un défaut de reliance liée à la nature même des acteurs a fini par bloquer le fonctionnement des boucles dialogiques : David contre Goliath, avec une politique du fait accompli au départ du projet et une politique du fait accompli pour en sortir.

Conclusion

58L'étude de cas menée sur le fiasco de Google à Toronto nous a conduits à considérer que le concept de ville intelligente risque bien de disparaître tel qu'il avait été conçu au départ comme une grande promesse révolutionnaire. On peut en tout cas comprendre que Google n'est pas prêt de se relancer dans un autre projet de « vitrine mondiale ».

59Mais si la ville intelligente est quand même aujourd'hui une réalité quotidienne (fonctionnement des réseaux publics, relations avec l'administration, stimulation de l'économie) c'est avec des risques éthiques dans de nombreuses situations (liés à l'hyper-connexion, à la captation de données personnelles et à l’optimisation algorithmique). Ceci nous a conduits à une réflexion sur les conflits éthiques inévitables ; inévitables, car ils ne trouveront pas de résolution ou de dépassement dans un des grands principes philosophiques classiques autour de la personne, du devoir et l'utilité.

60Dans une éthique pour le numérique, qui associerait à la fois le comportement des individus en réseau et le comportement de technologies devenues largement autonomes, il nous reste donc à vivre ces conflits, « en travaillant à bien penser » dans différentes « situations éthiques » comme le propose une éthique de la complexité. Vivre des conflits éthiques en reliance, cela veut notamment dire avoir un comportement qui accepte tous les thèmes de débats (avec des niveaux et des impératifs éthiques différents, donc à la fois antagonistes et complémentaires), qui reconnait toutes les formes de temporalité (l'urgence, l'essentiel, mais aussi le potentiel) et qui reconnait toutes les formes d'énonciation (la controverse argumentée, mais aussi la polémique et même la rébellion).

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Notes

1 https://www.theguardian.com/world/2018/oct/23/toronto-smart-city-surveillance-ann-cavoukian-resigns-privacy

2 https://www.engadget.com/2019-06-24-sidewalk-labs-quayside-toronto-master-plan.html?counter

3 https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/10/13/la-ville-numerique-a-besoin-d-une-gouvernance-publique-des-donnees-qui-implique-la-population_6055891_3234.html

4 http://goodjobsforall.ca/wp-content/uploads/2019/10/sidewalk-labs-primer.pdf

5 https://medium.com/sidewalk-talk/why-were-no-longer-pursuing-the-quayside-project-and-what-s-next-for-sidewalk-labs-9a61de3fee3a

6 https://theconversation.com/sidewalk-labs-smart-city-plans-for-toronto-are-dead-whats-next-138175

7 https://www.cnil.fr/fr/entrepot-de-donnees-sante-iqvia-cnil-rappelle-conditions-et-cadre-legal-ayant-permis-son-autorisation

8 https://www.montpellier.fr/evenement/27246/3624-premiere-reunion-de-la-convention-citoyenne-locale-sur-l-intelligence-artificielle.htm

9 https://www.credoc.fr/publications/barometre-du-numerique-2019

10 https://www.clionautes.org/les-villes-face-au-changement-climatique.html

11 https://www.blog-nouvelles-technologies.fr/217969/reseau-5g-prive-aws-amazon-nouveau-service-revele-par-lentreprise/

12 https://paris-singularity.fr/les-nouveaux-cables-sous-marins-de-google-et-meta-marquent-une-revolution-dans-le-fonctionnement-et-le-controle-dinternet/

13 https://investir.lesechos.fr/actu-des-valeurs/la-vie-des-actions/amazon-commande-des-lancements-de-satellites-aupres-de-3-societes-dont-arianespace-1857801

14 http://www.sietmanagement.fr/le-numerique-et-lethique-deontologique-devoir-moral-ethique-de-la-discussion/

15 https://www.lequotidiendumedecin.fr/actus-medicales/ethique/le-chercheur-chinois-lorigine-des-bebes-genetiquement-modifies-condamne-3-ans-de-prison

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Pour citer cet article

Référence électronique

Bernard Fallery, « Le fiasco de la smart city de Google à Toronto »Netcom [En ligne], 37-1/2 | 2023, mis en ligne le 17 janvier 2024, consulté le 19 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/netcom/8248 ; DOI : https://doi.org/10.4000/netcom.8248

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Auteur

Bernard Fallery

Professeur émérite, Université de Montpellier, Bernard.fallery@umontpellier.fr, Laboratoire MRM, Montpellier Recherches en Management

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