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21 | 2026, La fabrique de la recherche collaborative en anthropologie

Date limite de soumission : 31 janvier 2025

Dir. Gilles Raveneau

Argumentaire

La recherche collaborative et la recherche-action sont devenues un thème central dans le domaine de l’anthropologie, de l’ethnologie et des sciences sociales aujourd’hui. Elles s’articulent à des enjeux importants relevant des transformations sociales et culturelles, des relations entre science et société, des enjeux sociaux, environnementaux, économiques ou politiques, des modes d’implication et d’application de l’anthropologie, de la sociologie et de la variété des métiers ouverts aux sciences sociales. Les défis sociétaux et environnementaux actuels ont renouvelé l’intérêt déjà ancien du croisement des savoirs scientifiques, d’action, d’expérience qui répond « à la fois aux préoccupations pratiques d’acteurs se trouvant en situation problématique et au développement des sciences sociales, par une collaboration qui les relie selon un schéma éthique mutuellement acceptable » (Rapoport, 1973). Des citoyens s’engagent auprès de scientifiques, et réciproquement, dans la production de connaissances utilisables pour l’action et pouvant jouer un rôle de transformation. Ce mouvement des « sciences et recherches participatives » (Houillier, Merilhou-Goudard, 2016) s’est particulièrement développé et structuré ces dernières années à travers les « boutiques de sciences », les living labs, open labs, fab labs, foundaries, tiers-lieux, etc., et les financements régionaux ou nationaux (PIA3, PIA4, labellisation SAPS des universités, ANR Recherches participatives 2022 et 2023), au point qu’il existe depuis 2017 une charte des Sciences participatives en France et que le conseil scientifique du CNRS a émis une recommandation (15 octobre 2021).

Bien que les objectifs de la recherche collaborative soient généralement clairs, issus de demandes d’acteurs de la société civile ou de propositions d’études, les modes de collaboration et la manière de travailler ensemble entre chercheurs et acteurs restent à élaborer et à définir. Il existe en effet une variété d’approches possibles et d’appellations : accompagnement, recherche-action, recherche participative, recherche collaborative, recherche coopérative, partenariale, recherche négociée, recherche embarquée, recherche-création, recherche de plein air, etc. Cette variété ne résulte pas tant d’un manque de clarté méthodologique ou de consensus sur la valeur de ce type de recherche, mais de la diversité des problématiques et des approches propres à ces recherches. On peut distinguer deux grandes familles de recherches participatives qui poursuivent des finalités différentes : la recherche-action où la production de connaissances vise à faciliter une dynamique de changement, et la recherche collaborative, qui vise à la fois à produire des connaissances et des données, et à former des praticiens. Il est considéré que les acteurs sont des co-chercheurs dans le processus de recherche-action, tandis que la recherche collaborative repose sur l’idée d’intégrer le point de vue des praticiens dans la recherche, en assumant une différence entre le chercheur et le praticien, tout en refusant une hiérarchie des savoirs savants et de l’action.

Ce numéro de Parcours anthropologiques propose d’entrer dans la fabrique concrète de ces recherches collaboratives en anthropologie en dépliant par le menu l’ethnographie des différentes étapes par lesquelles se constituent ces recherches au contact de collectifs pluriels, sans taire les difficultés de mise en œuvre ou les polémiques qu’elles peuvent aussi susciter. Le progrès dans la reconnaissance des pratiques de recherche-action ne doit pas empêcher de prendre en compte les critiques qui leur sont adressées ou les problèmes qu’elles suscitent. On sait que dans le milieu académique traditionnel certains remettent en question la scientificité de ce type d’approche, la jugeant trop soumise à l’engagement personnel des chercheurs, trop consommatrice de temps et pas assez objective. Comment se constitue et se négocie l’équilibre précaire entre la nécessité de travailler avec les communautés étudiées pour produire des connaissances plus pertinentes, susceptibles de transformer les problèmes et de faire bouger les lignes établies, et l’exigence de rigueur et du maintien de standards scientifiques élevés ? Comment se construisent concrètement des recherches participatives aujourd’hui ? Quels sont les défis et les opportunités qui se présentent lors de la mise en œuvre de ces approches ? Comment faire usage de cette démarche pour appréhender l’objet que l’on souhaite étudier ? Comment négocier le terrain et le statut des différents acteurs ? Comment s’élabore le projet, avec quels acteurs, selon quelle temporalité ? Comment est-il approprié par les participants, coconstruits ou non ? Comment gérer les asymétries de pouvoir inhérentes à la recherche ? Quelles sont les dimensions de l’action et de la transformation à l’œuvre ? Comment les évaluer ? Comment se négocient et s’organisent la collecte des données, puis leur analyse et leur interprétation ? Enfin, comment sont partagés et valorisés les résultats de la recherche ?

Ce numéro invite à une réflexion critique sur les expériences de recherche collaborative en anthropologie et en sciences sociales en portant attention à la manière dont se constituent, s’élaborent et se développent les spécificités de cette démarche dans un contexte ethnographique et de rapport à l’altérité.

La revue Parcours anthropologiques

Le projet éditorial de Parcours anthropologiques consiste à faire de notre revue un espace de rencontres d’idées, d’actualisation et de mise en discussion des conceptions de la discipline, notamment en ce qui concerne la pertinence et les significations actuelles de la recherche en anthropologie. La revue se veut un espace ouvert à la fois aux propositions et présentations de travaux de chercheurs de différents laboratoires d’anthropologie et d’autres univers de pratique de la discipline, tout comme aux dialogues de celle-ci avec d’autres composantes disciplinaires des sciences de l’homme.

Modalités de soumission des textes

Les chercheurs (chercheurs, enseignants-chercheurs, doctorants, postdoctorants) de toutes les disciplines des sciences humaines et sociales sont invités à adresser des articles originaux, en français ou en anglais, fondés sur des données de recherche empiriques et n’ayant pas déjà fait l’objet d’une publication dans des revues, ouvrages ou actes de colloques.

  • Ces propositions – maximum 50 000 signes, espaces compris – doivent être envoyées par courrier électronique au format .doc uniquement aux deux adresses suivantes : <gilles.raveneau@univ-lyon2.fr> et <denis.cerclet@univ-lyon2.fr>

  • Elles peuvent être accompagnées de documents photographiques et/ou vidéos de bonne qualité.

  • Un accusé de réception sera adressé en retour.

  • La note aux auteurs est consultable à cette adresse : https://journals.openedition.org/pa/219

Échéancier

  • Premier appel : 31 janvier 2025. Soumission des articles. À réception, ils seront examinés par le comité de rédaction qui jugera de leur recevabilité. Ensuite, ils seront adressés à deux évaluateurs qui les liront de manière anonyme et nous transmettrons leur avis. La décision de publication est du seul ressort du comité de rédaction de la revue.

  • Mai 2025 : Fin du processus d’évaluation par les pairs et communication des résultats aux auteurs.

  • 1er septembre 2025 : Dépôt des versions finales des articles retenus.

  • Automne 2025 : Fabrication du numéro

  • Début 2026 : Publication de la revue en ligne.

Bibliographie

ARGYRIS, C. et SCHÖN, D.A. (1991) « Participatory Action Research and Action Science Compared, A Commentary », in WHYTE, W.F. (éd.), Participatory Action Research, Londres, Sage, 1991, p. 85-95.

AGIER M. (1997) « Ni trop près ni trop loin. De l’implication ethnographique à l’engagement intellectuel », Gradhiva : revue d’histoire et d’archives de l’anthropologie, no 21, p. 69-76.

ALARY, J. (1988). Solidarités, pratiques de recherche-action et de prise en charge par le milieu, Montréal, Boréal.

BARBIER, R. (1996). La recherche-action, Paris, Anthropos.

BENOIT, C. (2017). « La recherche-action en anthropologie : une approche réflexive et collaborative », In C. Benoit (dir.), La recherche-action en sciences sociales, Rennes, Presses universitaires de Rennes, p. 13-30.

FLUEHR-LOBBAN, C. (2008). « Collaborative Anthropology as Twenty-first-Century Ethical Anthropology », Collaborative Anthropologies, no 1, p. 175-182.

GIROUX, S. et TREMBLAY, G. (2002). Méthodologie des sciences humaines : La recherche en action (2e éd.), Montréal, Paerson.

GOYETTE, G. et LESSARD-HEBERT, M. (1987). La recherche-action, ses fonctions, ses fondements et ses instrumentations, Québec, Presses universitaires du Québec.

GREENWOOD, D.J. et LEVIN, M. (1998). Introduction to action research: Social research for social change, Sage Publications.

HOUILLIER, F. et MERILHOU-GOUDARD J.-B. (2016). Les sciences participatives en France : États des lieux, bonnes pratiques et recommandations, rapport.

LASSITER, L.E. (2005). « Collaborative Ethnography and Public Anthropology », Current Anthropology, vol. 46, no 1, p. 83-106.

LES CHERCHEURS IGNORANTS (2015). Les recherches-actions collaboratives, une révolution de la connaissance, Paris, Presses de l’EHESP.

LIU, M. (1997). Fondements et pratiques de la recherche-action, Paris, L’Harmattan.

MANNING, E. et MASUMI, B. (2018). Pensée en acte, vingt propositions pour la recherche-création, Paris, ArTeC ; Dijon, Les Presses du réel.

MAYER, R., OUELLET, F., ST-JACQUES, M.-C. et TURCOTTE, D. (2000). Méthodes de recherche en intervention sociale, Boucherville, Éditions Gaëtan Morin.

RAPOPORT, R.N., (1973). « Les trois dilemmes de la recherche-action », Connexions, no 7, p. 115-132.

RESWEBER, J-P. (1995). La recherche-action. Paris, PUF.

SCHENSUL, J.J. et LECOMPTE, M.D. (1999). Ethnographer’s toolkit: The research cycle, AltaMira Press.

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