Émilie Campmas. (1983-2019)

doi:10.4000/paleo.5972

Texte intégral

1Emilie s’est éteinte le 8 mars 2019 après plusieurs années de combat acharné contre le cancer. Cette fichue maladie nous a enlevé une collègue archéozoologue dont la jeune carrière était déjà foisonnante et avec qui il était passionnant et stimulant de travailler, mais elle nous a aussi privées d’une amie, d’une jeune femme dont la joie de vivre restera à tout jamais dans notre cœur.

2Émilie a débuté son cursus universitaire à Bordeaux. Elle rencontre en 2004 Véronique Laroulandie et Cédric Beauval qui vont lui faire découvrir l’archéozoologie et la taphonomie. Elle entame alors, avec ce dernier, un premier travail sur les traces de consommation laissées par les loups sur les ossements de bovidés, qui se soldera par la publication d’un référentiel qui fait aujourd’hui encore, référence en la matière. Elle effectue ensuite un stage de Master 1 à Toulouse à l’UTAH en 2006 sur la faune issue de déblais de la grotte abri du Moulin à Troubat. Au cours de son Master 2 en 2007, elle s’approprie les problématiques inhérentes à la question de la subsistance des groupes paléolithiques d’Afrique du Nord et les économies côtières. Elle entame tout naturellement dans la foulée son doctorat sur cette même thématique. Elle soutient brillamment sa thèse en 2012 à Bordeaux sous la direction de Patrick Michel et Sandrine Costamagno en mettant en évidence le rôle déterminant du littoral dans les modalités d’occupation des territoires par les groupes humains atériens puis ibéromaurusiens du Maroc. Mais Emilie disposait de plusieurs cordes à son arc et outre sa lecture très fine du matériel osseux et la qualité de ses publications, elle était aussi une femme de terrain très investie. Depuis 2006, elle était membre de la mission franco-marocaine « El Harhoura-Témara » et en 2016 elle avait entamé une mission ethnographique sur la frange côtière de la façade atlantique autour de Rabat-Témara afin de croiser données archéologiques et ethnologiques sur l’exploitation des mollusques marins. Pour mieux documenter la complémentarité des ressources animales terrestres et marines, elle avait, depuis quelques années, élargi ses champs de compétence à la malacologie. Formée à cette discipline auprès de Catherine Dupont, elle avait commencé à développer des approches expérimentales sur l’utilisation des coquilles de mollusque comme couteau de boucherie. Cherchant à cerner la diversité des adaptations côtières tant chez les Néandertaliens du Pléistocène européen que chez les Hommes anatomiquement modernes du Pléistocène supérieur et du début de l’Holocène d’Afrique du Nord et d’Eurasie, elle commençait tout juste à élargir ses recherches à toute la zone circumméditerranéenne.

3Au cours de ces années, Emilie avait remporté plusieurs bourses et prix saluant la rigueur et la qualité de son travail : Bourse de thèse L’Oréal France en 2010, Prix Jeune chercheur de la SAMRA en 2016, puis prix Jeune chercheur de la Fondation des Treilles en 2018. Elle avait été recrutée en tant qu’ATER à l’Université Toulouse Jean Jaurès de 2014 à 2016 et avait été reçue au concours de chargé de recherche du CNRS en 2018 et avait alors intégré le laboratoire TRACES - UMR 5608.

4Tous celles et ceux qui l’ont rencontrée sur un chantier de fouille, autour de l’étude d’une série osseuse, d’une expérimentation de découpe ou de cuisson, lors d’un colloque ou de tout autre temps d’échange, savent qu’elle ne reculait devant aucune difficulté. Travailleuse acharnée, boulimique de connaissances, Emilie était une jeune chercheuse hors du commun tant par son dynamisme, que part sa rigueur scientifique, son sens du collectif, son enthousiasme oh combien communicatif ! Elle était devenue en quelques années une chercheuse incontournable jouissant d’une pleine reconnaissance dans le domaine d’expertise qui était le sien : l’adaptation au milieu côtier des chasseurs-collecteurs paléolithiques. Le colloque «Sociétés humaines et environnements dans la zone circumméditerranéenne du Pléistocène au début de l’Holocène» qui s’est tenu les 8 et 9 mars 2021 à l’Université Toulouse Jean Jaurès et qui a accueilli plus de 200 personnes a été l’occasion de lui rendre un dernier hommage. Les actes seront publiés prochainement dans un numéro spécial de Paleo.

5C’est avec beaucoup d’émotions que nous tenions une nouvelle fois à saluer son courage, son parcours scientifique si riche et stimulant intellectuellement et surtout la personne qu’elle était. Nous sommes toutes les deux honorées de pouvoir continuer à mettre en lumière son travail et les problématiques qui lui étaient chères dans le cadre de l’AssEmCa, association portée par ses parents, Annick et René, et créée en son hommage (https://sites.google.com/view/assemca).

6Emilie, tu nous manques énormément.

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Bibliographie

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Pour citer cet article

Référence papier

Myriam Boudadi-Maligne et Sandrine Costamagno, « Émilie Campmas », PALEO, 31 | 2021, 23-25.

Référence électronique

Myriam Boudadi-Maligne et Sandrine Costamagno, « Émilie Campmas », PALEO [En ligne], 31 | 2021, mis en ligne le 19 juillet 2022, consulté le 13 septembre 2024. URL : http://journals.openedition.org/paleo/5972 ; DOI : https://doi.org/10.4000/paleo.5972

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