Nos remerciements vont à notre collègue Detlef Gronenborn ainsi qu’à Teresa et Jacobus Van der Merwe, propriétaires de la ferme de Volstruisdrif, qui nous ont accordé toutes facilités pour notre travail. Ces missions ont pris place dans le cadre du programme « Archives Khoisan » soutenu par l’IFAS ; que cette institution ainsi qu’Aurelia Segatti, sa directrice de l’époque, en soient remerciés. Merci à Jane Klose, Antonia Malan, Annette Schmidt, Jaco Boshoff et Heather Coleman pour leurs avis éclairés au sujet de la pipe hollandaise.
1Les pasteurs khoekhoe, population nomade d’Afrique du Sud, ne peuvent-ils être appréhendés que par le truchement des sources européennes ? De ce fait, leur profondeur historique se limite-t-elle à une poignée de siècles, ceux au cours desquels ils sont tombés sous le regard des Occidentaux avant de s’évanouir ? Ces pasteurs – richement documentés par les écrits des premiers colons et des voyageurs abordant les environs du cap de Bonne-Espérance à partir de la fin du xve siècle et qui les rendront célèbres sous le vocable de « Hottentots » – disparaissent en effet, de façon assez brutale, à partir du xviiie siècle (Smith, 1993 ; Fauvelle-Aymar, 2002). Leurs descendants se diluent alors dans la société sud-africaine et sont peu à peu remplacés dans notre représentation des populations indigènes de cette partie du monde par les seuls chasseurs‑cueilleurs san (ou bushmen). Or, ces populations de pasteurs nomades khoekhoe sont sans nul doute des acteurs très importants, voire déterminants, de la néolithisation de l’Afrique australe. Elles incarnent une forme d’organisation socio‑économique, politique aussi peut-être, qu’il est indispensable de prendre en compte lorsque l’on cherche à restituer dans toute sa complexité la mosaïque de situations intervenues entre les agro-pasteurs de langue bantoue d’une part et les chasseurs-cueilleurs san d’autre part.
2Pourtant, aussi importantes soient-elles, ces populations ont connu un tel effacement qu’elles finissent par ne même plus posséder d’identité archéologique propre. En effet, une fois leurs troupeaux de moutons et de bœufs réduits à quelques ossements épars, une fois leurs kraals (terme désignant tant les parcs à bestiaux que les campements dans leur ensemble) réduits en cendre, leurs traces matérielles – quelques poignées de quartz taillés, quelques tessons de céramique retrouvés, le plus souvent, dans de petits abris rocheux ou bien associés à de puissants amas coquilliers le long des côtes – se confondent volontiers avec celles de chasseurs-cueilleurs, au point que l’on finit par douter de leur existence même. C’est la raison pour laquelle, à l’instar peut-être d’autres populations pastorales préhistoriques de par le monde, leur étude constitue un défi pour notre discipline.
3L’identité de ces différentes populations – pasteurs et chasseurs – est en effet un débat récurrent de l’archéologie et de l’histoire sud‑africaine (pour une synthèse sur ces questions, voir Fauvelle-‑Aymar, Sadr, 2008). Si, pour certains auteurs, il s’agit bien de groupes culturellement différenciés (Smith, 1986 ; Yates, Smith, 1993), pour d’autres, Khoekhoe et San illustrent les deux visages d’une seule et même entité culturelle à différents stades d’organisation ou de désorganisation sociale (Deacon, 1984 ; Schrire, 1992). Dès lors s’expriment des positions antagonistes quant à notre capacité à les distinguer formellement dans le registre archéologique. Et, de ces positions, découlent des scénarios bien différents sur l’origine de l’économie pastorale dans cette partie du monde : si l’on ne peut définir un bagage culturel propre aux populations qui la pratiquent, il devient impossible de remonter dans le temps par le moyen des vestiges archéologiques pour déterminer si ces Khoekhoe « historiques » sont les descendants de populations migrantes qui se seraient implantées dans la région du Cap quelques centaines d’années seulement avant l’arrivée des colons européens, ou bien s’il s’agit de San ayant adopté de proche en proche cette nouvelle économie, au gré d’un mouvement plus lointain de diffusion du bétail et des pratiques d’élevage. Deux scénarios qui s’opposent, mais qui peuvent se conjuguer si l’on admet que les deux processus ont pu se succéder (Fauvelle‑Aymar, 2004). Ainsi, l’introduction du mouton à partir du tout début de notre ère a pu être le fruit d’un phénomène de diffusion au sein de populations autochtones de chasseurs-cueilleurs (Sadr, 2003), et les pasteurs khoekhoe ont pu n’apparaître dans le paysage de la région du Cap que plus tard, dans le courant ou au tournant du Ier millénaire, peut-être sous l’effet d’une autre migration survenue entre-temps dans la partie orientale de l’Afrique du Sud, celle des agro-pasteurs bantous.
4Force est de constater que les données archéologiques disponibles ne sont aujourd’hui pas assez étoffées pour nourrir une telle discussion. En particulier, comme l’a souligné C. Arthur (2008), nous manquons d’informations sur les sites correspondant au type d’implantations pourtant le plus communément décrit par les voyageurs occidentaux : les kraals, campements de plein air constituant l’habitat itinérant de ces populations pastorales (figure 1). En effet, la majeure partie des données archéologiques recueillies concerne des établissements en grotte et abri, ou des amas coquilliers sur le littoral (Parkington, 2006). À l’instar des recherches conduites dans le secteur de la Breede River (Arthur, 2008), c’est une même ambition – partir à la recherche des traces des Khoekhoe là où ils sont historiquement attestés – qui a motivé, entre 2004 et 2006, l’organisation d’une mission de prospection, d’abord dans la péninsule de Vredenburg, afin de revenir à la source d’une riche documentation archéologique, puis sur les bords du fleuve Berg (figure 2).
Figure 1 – Un kraal historique de Khoekhoe dépeint par l’illustrateur de l’ouvrage de P. Kolbe, Caput Bonae Spei Hodiernum (1719)
Les unités d’habitation, des huttes de branchages et de nattes, encerclent un espace central où sont gardés les moutons et les veaux.
Figure 2 - Carte des sites mentionnés dans le texte
KB : Kasteelberg. KFS : Kafferskuitje. VSD : Volstruisdrif.
DAO : F. Tessier
5Le point de départ de notre enquête a été l’analyse du site de Kafferskuitje 5 (KFS 5), préalablement identifié par l’un d’entre nous (K.S.) lors d’une prospection systématique conduite en 1991 et 1992 dans la péninsule de Vredenburg (Sadr et al., 1992 ; Sadr, Gribble, 2010), dans les environs du célèbre site de Kasteelberg. Ce dernier, petit relief granitique dominant la plaine sableuse environnante, a livré à A. Smith, l’archéologue du site, de nombreuses traces d’occupations préhistoriques et, en particulier, les vestiges d’une importante fréquentation des lieux au cours des deux derniers millénaires. Appartenant à cette phase chronologique, la séquence du locus de Kasteelberg B (KBB) constitue l’une des principales références documentant l’introduction d’une économie pastorale (en l’occurrence basée sur le mouton) dans cette partie de l’Afrique australe. Ce site a été l’un des premiers à fournir des éléments (vestiges céramiques, lithiques, perles en coquille d’œuf d’autruche, etc.) permettant de cerner l’identité archéologique de populations pastorales (Smith, 2006). Toutefois, de par sa nature, celle d’une occupation en pied de paroi dans un chaos rocheux, il demeure assez éloigné des descriptions de kraals issues de la littérature. En revanche, KFS 5 admet, on va le voir, un tel rapprochement.
6KFS 5 est une vaste implantation de plein air localisée au débouché d’un petit vallon et marquée par la dispersion de coquilles marines apportées du littoral proche, de céramiques indigènes et de vestiges lithiques présentant de grandes similitudes avec le mobilier des niveaux du iie millénaire de notre ère trouvé à KBB. Un tesson de céramique allemande (du type « Bartmann ») datant de la première moitié du xviie siècle s’accorde avec les datations radiocarbone (majoritairement concentrées sur les xive-xviie siècles) obtenues sur des coquillages, confirmant ainsi une fréquentation des lieux à la charnière des périodes précoloniale et coloniale, soit au moment où la présence de pasteurs khoekhoe est attestée (par des sources historiques) dans cette région. En outre, notre interprétation de KFS 5 comme un véritable kraal a été confortée par l’identification d’un large épandage de bouse vitrifiée, de vache ou de mouton, semblant matérialiser l’emplacement d’un parc de bestiaux en station (Fauvelle-Aymar et al., 2006).
7Nous avons donc, avec KFS 5, l’un des premiers sites du Western Cape correspondant selon toute vraisemblance à un kraal de la période dite « de contact ». Ainsi que nous l’évoquerons plus loin, KFS 5 contribue ainsi à définir la signature archéologique d’une population pastorale « historique ». Toutefois, le croisement de ces données archéologiques avec les sources écrites demeure limité, car KFS 5 appartient à une zone géographique qui ne fut que tardivement décrite avec précision par les Européens (seulement à partir du xixe siècle). Il nous a donc paru nécessaire de pratiquer nos observations dans des zones historiquement mieux documentées. Pour cela, une seconde étape consista à conduire une prospection le long de la Berg (figure 3). Le choix de cette zone, dont les paysages ont souvent été décrits aux xviie et xviiie siècles car il s’agissait alors d’une des principales voies de pénétration des colons vers l’intérieur des terres, avait également le mérite de mettre à l’épreuve le modèle proposé par A. Smith, selon lequel les Khoekhoe se seraient déplacés au fil des saisons entre le littoral et les plaines fertiles du Swartland (figure 4 ; Smith, 1984).
Figure 3 – La Berg, vue depuis les environs de Volstruisdrif (VSD) et Toorkrans
Cliché : Fr. Bon
Figure 4 – Plaines du Swartland aux alentours du massif du Heuningberg
Cliché : Fr. Bon
8Plusieurs récits de la seconde moitié du xviie siècle ou des premières années du suivant relatent, avec plus ou moins de précision, des expéditions conduites dans les alentours de la Berg et les rencontres qui y ont été faites avec différents groupes indigènes. Certains auteurs, comme J. Danckaert en 1660 ou P. van Mierhoff en 1661, évoquent leur rencontre en divers endroits avec des groupes sonqua (ou soaqua), tandis que d’autres décrivent la présence de « Hottentots ».
9Si les premiers ne semblent pas posséder de bétail et peuvent, de ce fait, être considérés comme des chasseurs-cueilleurs (Parkington, 1984), les seconds sont à l’évidence des pasteurs nomades, avec lesquels les Européens ont d’ailleurs cherché à entrer en contact afin d’acquérir une partie de leur cheptel. Plusieurs kraals ont ainsi été aperçus, tels ceux du kaptein (titre néerlandais désignant les chefs indigènes) Goereman quelque part le long des rives de la Berg entre le Heuningberg et Misverstand (d’après le récit du gouverneur S. Van der Stel en 1685‑1686 ; figure 5) ou bien celui du kaptein Bootsman, d’abord à proximité des Vier‑en‑Twintig‑Riviere (« vingt-quatre rivières »), puis, quelque temps après, en aval de la confluence de la Berg avec la Matjiesrivier (d’après le récit de J. Starrenberg en 1705 ; relations de ces différents voyages dans Mossop, 1927 ; Thom, 1952-1958 ; Valentyn, 1971).
10Cette zone, bien documentée du point de vue historique, constituait donc un terrain privilégié pour tester notre capacité à identifier les traces archéologiques tangibles de ces populations pastorales. Pareille entreprise avait d’ailleurs déjà été tentée : une vingtaine d’années avant nous, T. Hart (1987) avait conduit une prospection motivée par le même objectif – celui d’identifier des traces d’implantation khoekhoe dans une zone où leur présence est attestée historiquement.
Figure 5 – Carte de la colonie du Cap
Cette carte, publiée en 1726, livre un état des connaissances contemporain du voyage du gouverneur Van der Stel en 1685-1686. Tous les groupes khoekhoe alors connus des Hollandais y sont localisés. Le réseau hydrographique de la Berg y est curieusement dédoublé, indiquant que deux sources d’information au moins ont été mobilisées et réunies. Cependant, en dépit de ces erreurs, la survivance jusqu’à l’époque actuelle de toponymes portés sur cette carte permet de localiser précisément certains lieux sur le terrain.
D’après Valentyn, 1971 ; DAO : Fr.-X. Fauvelle-Aymar
11Or, de son propre aveu, il avait échoué dans cette entreprise du fait de la relative discrétion des traces archéologiques susceptibles d’être rapportées au Late Stone Age (LSA) en général et aux populations pastorales en particulier (Hart, 1987).
12Toutefois, la méthode qu’il avait suivie, consistant à prospecter un échantillon de zones test sans lecture géomorphologique préalable du paysage, pouvait peut-être en partie expliquer ce résultat. L’approche que nous avons mise en œuvre lors de deux campagnes de prospection effectuées au cours des mois d’avril 2005 et 2006 repose au contraire sur la caractérisation préalable des conditions géomorphologiques ayant pu dicter les choix d’installation de ces populations dans le paysage ainsi que sur la compréhension des facteurs de conservation de leurs traces. La zone choisie était sensiblement la même que celle de T. Hart, à savoir la portion d’une vingtaine de kilomètres où la Berg longe, par l’ouest, le massif du Heuningberg, entre ses affluents que sont, au sud, les Vier‑en‑Twintig-Riviere et, au nord, la Matjiesrivier (figure 6).
Figure 6 – Carte topographique du secteur d’intervention le long de la Berg
DAO : Fr. Bon
13Notre étude a tout d’abord permis de décrire un système de terrasses alluviales comprenant trois paliers principaux.
-
Le plus ancien correspond à une large terrasse alluviale dominant le lit actuel de la Berg de 30 à 40 m (T3). Essentiellement graveleuse, elle est notamment constituée de galets de quartz et de grès quartzitique emballés dans une matrice argilo-sableuse rougeâtre, produit de l’altération des Malmesbury shale qui forment le substrat géologique principal du Swartland. Cette haute terrasse est fortement disséquée par l’érosion et présente une altération importante.
-
Le palier intermédiaire (T2) est beaucoup moins bien exprimé. De fait, cette terrasse, dont les rares lambeaux se situent environ 20 m au-dessus du cours d’eau, forme ponctuellement des petites ruptures de pente en partie masquées par les formations colluviales, notamment issues de la T3 sus-jacente.
-
Enfin, la basse terrasse (T1) connaît un développement très variable selon les secteurs : mal exprimée dans les parties rectilignes de la vallée, elle forme en revanche de larges replats sablonneux bien préservés sur les rives convexes des méandres, 5 à 15 m au-dessus du lit actuel de la Berg. Ces morphologies, caractéristiques des rivières à méandres, se retrouvent quasi systématiquement tout au long de la portion étudiée. Les sédiments sont constitués essentiellement de sable et correspondent à des dépôts de barre de chenal accumulés au fur et à mesure de l’élargissement du méandre.
14La comparaison avec les données réunies pour d’autres rivières de la région du Cap (Theron et al., 1992) permet de proposer que la mise en place de la T3 remonte au Pliocène, antérieurement à une incision du réseau hydrographique liée à la surrection de l’ensemble de la région – les vieilles alluvions se retrouvant alors en position perchée. Par la suite, au cours du Quaternaire, la rareté des témoins alluviaux s’explique par l’étroitesse de la vallée, mais aussi par une incision relativement modeste. De fait, à l’exception des intérieurs de méandres, les différents paliers alluviaux ont été successivement érodés par la Berg (comme c’est le cas de la terrasse T2), et seuls les dépôts les plus récents (T1), datant certainement de la dernière phase froide du Quaternaire, ont été localement bien préservés.
15Partout où nous avons pu l’observer, la T3 est associée à des industries rapportables à l’Early Stone Age (EAS), industries dont T. Hart avait déjà souligné l’abondance (figure 7 a-b). En revanche, les témoins du Middle Stone Age (MSA) demeurent beaucoup plus discrets : si des productions Levallois (le plus souvent en silcrete à grain grossier) ont été ponctuellement relevées en association avec la T2, l’érosion de cette dernière explique sans nul doute la rareté des industries attribuables à cette période. Enfin, dès les premières identifications de la T1, nous avons pu constater que c’est elle qui recèle des concentrations d’artefacts attribuables sans équivoque au LSA.
16Cette observation a été établie de la façon suivante : le long du tronçon de 20 km défini comme zone test, les parties concaves de sept méandres ont été étudiées d’un point de vue géomorphologique et archéologique ; dans six cas, la T1 y est bien exprimée ; dans chaque cas, elle contient des industries LSA réparties sur des surfaces supérieures à 10000 m2 et comprenant des concentrations importantes d’artefacts (tableau 1). Cette lecture géomorphologique a donc permis d’identifier un contexte livrant de riches indices d’occupations LSA, lesquelles traduisent à l’évidence un choix d’implantation privilégié à proximité du cours d’eau, à l’intérieur des méandres nappés par les sables de la basse terrasse. Cependant, aussi positif que soit ce résultat, il reste à savoir si nous sommes ou non en mesure de déterminer à quelle phase du LSA et à quelles populations ces traces se rapportent.
Figure 7 – Industries lithiques ESA associées à la T2 (Ertjieskloof, 7a) ou à la T3 (Toorkrans, 7b)
Clichés : Fr. Bon
Tableau 1 – Inventaire des méandres et zones prospectées le long de la Berg
N° du méandre (cf. carte figure 6)
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Toponyme
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Observations archéologiques
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Présence de la T1
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Indices d’occupations LSA
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Surface couverte par les indices d’occupations LSA
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1
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Toorkrans
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1980' (T. Hart) ; 2005-2006
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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2
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Volstruisdrif
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2005-2006
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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3
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Rooihoogte
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1980' (T. Hart)
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?
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(T. Hart)
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4
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Tweevlei
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non prospecté
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5
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Vrugbaar
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1980' (T. Hart)
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?
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(T. Hart)
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6
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Bridgetown
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non prospecté
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7
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De Pont-Voorwaarts
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non prospecté
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oui
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8
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Drie Heuwels 1
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2005
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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9
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Volkloof
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non prospecté
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10
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Drie Heuwels 2
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2005
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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11
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Heuningkrans A
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non prospecté
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12
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Dasdrif
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non prospecté
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13
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Heuningkrans B
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non prospecté
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14
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Kleindrif B
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2006
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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15
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Nuwedrif
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non prospecté
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16
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Kleindrif A
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non prospecté
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17
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Vier-en-Twintigriviere
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non prospecté
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18
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Arbeidsgenot
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2006
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non
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non
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19
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Ertjieskloof
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2006
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oui
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oui
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> 10 000 m2
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20
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Klein Bakoven
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non prospecté
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17Tous les contextes archéologiques concernés sont caractérisés par d’abondantes industries en quartz filonien, blanc ou fumé, associées à un débitage sur galet de grès quartzitique, les éclats obtenus sur ces différentes matières premières n’étant pas ou très rarement retouchés. Selon les secteurs, on relève cependant plusieurs différences notables :
-
un débitage de lames et / ou de lamelles en silcrete à grain fin accompagne significativement ou non les deux productions précédemment mentionnées ; lorsqu’il est présent, ce débitage rassemble alors l’essentiel des produits retouchés (lames ou lamelles retouchées, grattoirs et adze, pour l’essentiel) ;
-
si les débitages d’éclats sur galet de grès quartzitique n’offrent guère de variation, les productions sur quartz montrent des différences beaucoup plus nettes. Ces dernières sont toujours majoritairement réalisées sur enclume, mais leur exécution répond à deux modalités dont résultent des nucléus et des éclats sensiblement différents (figure 8). Chacune de ces modalités est accompagnée par un type de percuteurs qui lui est propre : soit des exemplaires « classiques » (en volume), soit des percuteurs plats, identiques aux enclumes elles-mêmes (figure 9).
Figure 8 – Modalités d’exploitation du quartz observées dans les industries des sites LSA prospectés le long de la Berg
DAO : Fr. Bon
Figure 9 – VSD secteur Aa, carré 1, enclume-percuteur plat
Cliché : Fr. Bon
18Il s’avère que l’industrie dominée par le débitage de quartz de modalité B (figure 8) est également celle où les productions lamino-lamellaires en silcrete sont les plus discrètes, confirmant ainsi l’existence de deux faciès technologiques distincts (tableau 2). D’autres traits matériels, telle la fréquence des vestiges céramiques, renforcent ce constat. Or, comme nous allons le voir dans le cas de Volstruisdrif (VSD), les critères permettant d’opposer ce site à l’ensemble des autres contextes explorés le long de la Berg sont autant d’arguments qui le rapprochent de KFS 5.
Tableau 2 – Marqueurs industriels relevés dans les principaux sites prospectés le long de la Berg comparés au mobilier de KFS 5
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KFS 5
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VSD Aa (carré 1 et alentours)
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VSD Ab (carré 3 et alentours)
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Toorkrans Aa Ab
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Drie Heuwels 1
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Kleindrif B
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Ertjieskloo
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Production en quartz > autres roches > silcrete
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×
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×
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×
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×
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×
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×
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×
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Produits retouchés en silcrete
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×
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×
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×
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×
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×
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Production en quartz modalité B > A
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×
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×
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Production en quartz modalité A > B
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×
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×
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×
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×
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×
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Production lamellaire en silcrete significative
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×
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×
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×
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×
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×
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Percuteur "classique"
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×
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×
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×
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×
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×
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×
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×
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Percuteur plat / enclume
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×
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×
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×
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Groove recyclé en percuteur / enclume
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×
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×
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Bored stone applatie
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×
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×
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×
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Groove modèle étroit ("canoe shaped")
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×
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Groove modèle large ("boat shaped")
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×
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×
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19Emblématique des conditions topographiques décrites précédemment, le site de Volstruisdrif occupe l’intérieur d’un méandre étroit (méandre 2 de notre secteur d’étude ; figure 6) formé d’une longue langue de sable (figure 10). Ici, les terrasses T3 et T2 sont fortement érodées, mais des industries se rapportant à l’ESA et au MSA, ainsi que des productions laminaires en silcrete évoquant des phases plus anciennes du LSA, sont contenues dans les colluvions dispersées sur la pente dominant la terrasse sableuse T1. C’est au pied de cette pente, à l’endroit où la topographie s’établit à l’horizontale, que la majeure partie des traces archéologiques rapportables au LSA a été observée.
Figure 10 – VSD, vue depuis Toorkrans, sur la rive opposée de la Berg
Cliché : Fr. Bon
20Comme dans l’ensemble des autres contextes, ces traces se composent d’abondants vestiges de quartz blanc ou fumé, ainsi que d’éclats et de nucléus en grès quartzitique (figure 11). Toutefois, ici, leur association avec de nombreux tessons de céramique nous a incités à conduire une prospection plus minutieuse ; celle-ci a révélé deux composantes archéologiques spatialement distinctes (figure 12).
-
Une partie du site (secteur Ab, soit carré 3 et alentours) livre une industrie en tout point comparable à celles des autres contextes explorés le long de la Berg, à l’exception de la présence de vestiges céramiques, qui, ailleurs, restent rares ou sont absents. On y rencontre ainsi un débitage de quartz répondant à la modalité A accompagné par une fraction significative d’industries lamino-lamellaires en silcrete, les autres instruments en pierre se limitant à des percuteurs « classiques » (sans compter l’ubiquiste débitage d’éclats sur galet de grès quartzitique).
-
À une cinquantaine de mètres de là, en direction du sud-est (secteur Aa, soit carré 1 et alentours), la densité des vestiges céramiques s’accroît tandis que la composition de l’industrie lithique change : les produits en silcrete se raréfient, et le débitage de quartz devient majoritairement de modalité B. À cette dernière s’associent plusieurs enclumes et percuteurs plats (figure 13), dont des exemplaires correspondant au recyclage de polissoirs-meules ou de grooves (figure 14). Un fragment de bored stone aplatie complète l’ensemble (figure 15).
Figure 11 – VSD secteur Aa, carré 1, nucléus à éclats en grès quartzitique [sandstone]
Cliché : Fr. Bon
Figure 12 – VSD, plan de répartition du mobilier ainsi que des différents secteurs étudiés
DAO : Fr. Bon
Figure 13 – VSD secteur Aa, enclume-percuteur plat
Clichés : Fr. Bon
Figure 14 – VSD secteur Aa, groove recyclé en percuteur plat-enclume
Cliché : Fr. Bon
Figure 15 – VSD secteur Aa, fragment de bored stone aplatie
Cliché : Fr. Bon
21Ainsi que nous venons de l’évoquer, les vestiges céramiques sont plus nombreux au sein de cette dernière zone (une trentaine de tessons répartis sur environ 500 m2). Tous les tessons présentent une paroi mince, trait caractéristique de la production céramique du LSA d’Afrique australe (Sadr, Sampson, 2006). On note parmi ces tessons la présence d’un tenon (lug) typique des productions du iie millénaire de notre ère (figure 16 ; Sadr, Smith, 1991). Le reste d’une rangée de points imprimés au-dessus du tenon, c’est-à-dire à la jonction du col et de la panse du pot, permet d’associer cette pièce au type « lugged incised » (LINC), appartenant au milieu du iie millénaire de notre ère (Sadr, Sampson, 1999). La seule autre pièce diagnostique est un fragment de bord à lèvre épaissie et arrondie vers l’extérieur, un type de lèvres qui se rencontre principalement dans les assemblages céramiques du milieu du iie millénaire. Les autres éléments correspondent à des tessons indifférenciés et sans décor, même si plusieurs présentent un voile d’ocre rouge.
Figure 16 – VSD secteur Aa, carré 1, céramique indigène et patelles
Clichés : Fr. Bon
22La combinaison de ces caractères montre de nombreuses similitudes entre cette partie du site de VSD et celui de KFS 5. Pour l’industrie lithique (tableau 2), on insistera sur l’usage, en lien avec une même modalité dominante d’exploitation du quartz (modalité B), de percuteurs-enclumes façonnés, certains correspondants au recyclage de grooves (figure 17).
Figure 17 – KFS 5, groove recyclé en enclume-percuteur plat
Cliché : Fr. Bon
23En outre, une relation géographique entre ce site de VSD, implanté à l’intérieur des terres, et la zone littorale est suggérée par la présence de coquilles marines (de type « limpet » : « Scutellastra arganvillei alias ‘patelles’ » ; figure 16). Il faut toutefois noter que la seule coquille datée a donné un âge de 4460 ± 80 BP, soit 3370‑2900 cal BC (Beta‑204535), ce qui paraît bien trop ancien en regard du reste du mobilier. On peut cependant proposer l’hypothèse d’une collecte de « vieilles coquilles », car, s’il est difficile de cerner les motifs pour lesquels ces coquilles ont été transportées sur une telle distance, leur consommation semble, et quel que soit leur âge, pouvoir être écartée. Si l’on admet cette éventualité, cela renforcerait l’hypothèse d’un itinéraire de nomadisme entre le littoral et les plaines du Swartland compatible avec le modèle proposé par A. Smith (1984).
24Cette liaison culturelle et peut-être géographique entre VSD et KFS 5 permet de considérer que le premier correspond, au moins en partie (secteur Aa), à une implantation attribuable aux mêmes populations que le second : en l’occurrence, selon nos conclusions pour KFS 5, à des pasteurs, même si l’absence de vestiges fauniques à VSD empêche de confirmer ce statut.
25Si l’on admet cette hypothèse et que l’on reprend les termes du questionnement qui a servi de point de départ à cette enquête, pouvons-nous aller jusqu’à considérer que VSD est l’un des kraals documentés par les sources écrites le long de la Berg, autrement dit l’un de ceux de Goereman ou bien celui de Bootsman ? Ce n’est évidemment pas si simple ! Même si nous étions en mesure de dater avec précision les vestiges relevés à VSD, ce qui n’est pas le cas, il serait illusoire de chercher à matérialiser de la sorte les récits historiques. Quelques indices, toutefois, permettent de suggérer que cette installation est bien contemporaine de la période coloniale. Dans le secteur Aa de VSD, un fragment de fourneau d’une pipe hollandaise en argile du type « Gouda », attribuable à la première moitié du xviiie siècle (figure 18), peut ainsi constituer le témoignage de ces contacts et échanges si souvent relatés entre colons d’origine européenne et populations africaines. La pipe, en corne ou en argile, relique matérielle de l’addiction au tabac si souvent évoquée chez les Khoekhoe coloniaux, a presque acquis, dans l’iconographie de cette période, un caractère d’attribut visuel du « Hottentot » (figure 19). Signalons également la présence de quelques tessons de céramique européenne à VSD (figure 20), mais leur datation renvoie plutôt à l’installation ultérieure des premières fermes, à partir du xixe siècle.
Figure 18 – VSD secteur Aa, pipe à tabac hollandaise
Clichés : Fr. Bon
Figure 19 – Aquarelle de la fin du xviiie siècle (ca 1780) figurant des strandlopers ou « écumeurs des plages », Khoesan déclassés vivant aux marges de la société de la colonie du Cap
L’illustration montre un échantillon de la culture matérielle du groupe : huttes de nattes, os de baleine, œufs d’autruche, arcs et flèches, coquilles au sol. L’homme assis à gauche fume à l’aide d’une corne de vache ; l’homme au centre tient en main une pipe en argile
Illustration accompagnant le récit des voyages de R.J. Gordon, d’après Raper, Boucher, 1988, pl. 52
Figure 20 - VSD secteur A, échantillon de céramiques européennes
Clichés : Fr. Bon
26La conjugaison des données réunies sur ces différents sites, en l’occurrence l’ensemble des éléments qui rapprochent KFS 5, VSD et KBB, contribue, selon nous, à préciser la définition d’un faciès archéologique attribuable aux populations pastorales khoekhoe. Même en admettant de nombreuses similitudes entre pasteurs et chasseurs‑cueilleurs, ce résultat renforce l’identité archéologique des premiers, à l’instar de ce qui a été proposé par plusieurs auteurs, dans cette région (Smith et al., 1991 ; Bollong et al., 1997) comme ailleurs (Beaumont, Vogel, 1984 ; Sampson, 1986 ; Beaumont et al., 1995 ; Parsons, 2007 et 2008). Précisons toutefois que, dans le domaine de l’industrie lithique, les critères technologiques sur lesquels nous nous appuyons ne concernent pas seulement la proportion relative entre matières premières et catégories de produits (éclats de quartz-lamelles de silcrete), qui a pu être interprétée non comme la signature de plusieurs populations contemporaines, mais comme une variation chronologique (Sadr, Gribble, 2010) ou fonctionnelle (Schrire, 1992) au sein de la même population. L’un de nos critères principaux concerne les modalités d’exploitation du quartz. Bien qu’il s’agisse d’un dénominateur commun à la majeure partie du LSA récent du Western Cape, notre objectif est justement de dépasser le qualificatif d’« unformal » si souvent appliqué à ces productions en révélant l’existence de savoir-faire distincts. En l’occurrence, notre analyse souligne l’importance du débitage axial sur enclume et des instruments (percuteur plat-enclume) qui lui sont associés dans des sites comme KFS 5, VSD et KBB (Rivat, 2006). Les recherches à venir diront si ce qui pourrait apparaître comme un simple détail technique incarne ou non une signature technologique du « vrai » Néolithique pastoral sud-africain. Il serait également utile de poursuivre l’étude d’instruments tels que les grooves (figures 21 et 22) et les bored stones (figure 23 ; Sadr, Fauvelle‑Aymar, 2006 ; Morin, 2006 ; Sadr, Gribble, 2010), susceptibles, eux aussi, de fournir une véritable signature matérielle.
27Il est, pour cela, nécessaire de faire progresser nos connaissances et de nous doter de davantage d’exemples permettant de relier de plus vastes espaces, comme de remonter le temps. Alors seulement, l’archéologie apportera sa contribution à la question de l’origine des populations pastorales khoekhoe. En vue de cette enquête, VSD nous apporte, outre sa signature industrielle, un modèle prédictif d’implantation dans le paysage, dont il serait particulièrement intéressant de tester la portée à plus grande échelle et, à cette fin, on peut d’ores et déjà souligner que des observations similaires ont été effectuées sur les bords de la Breede (Arthur, 2008) ou de l’Orange (Smith et al., 2001). Complétant la variété offerte par d’autres découvertes récentes (Jerardino, Maggs, 2007), ces kraals implantés au bord des cours d’eau ont vocation à enrichir une typologie de sites qui nous permettra de penser le paysage depuis les pratiques et les comportements de ces populations pastorales et non pas seulement à travers le regard des voyageurs occidentaux.
Figure 21 – VSD secteur A, fragment de groove, modèle large [boat shaped]
Cliché : Fr. Bon
Figure 22 – KFS 5, fragment de groove double, modèle étroit [canoe shaped]
Cliché : Fr. Bon
Figure 23 – KFS 5, échantillon de bored stones aplaties, entières et fragmentée
Dessins : J. Morin ; clichés : Fr. Bon