• 1 Depuis 1964, ils recensent, étudient et font connaître le patrimoine français. D’abord assuré par l (...)
• 2 Les autres dossiers sont : dossier d’opération, dossier d’aire d’étude, dossier collectif, dossier (...)
• 3 Principes, méthode…, 2007, p. 211.
• 4 Attention aux confusions : les dossiers regroupant les œuvres de fonctions ou dénominations identiq (...)

1Les services régionaux de l’Inventaire général du patrimoine culturel1 présentent la documentation rassemblée selon différents types de dossiers patrimoniaux, qui obéissent à des normes discutées et validées sur le plan national. Au sein de cette organisation documentaire, le dossier thématique a la particularité d’émerger logiquement, mais sans obligation, d’une étude terminée ou dans ses phases de finition2. Le chercheur juge alors nécessaire et utile d’ouvrir un dossier de ce type. C’est un dossier de « synthèse portant sur un corpus d’œuvres liées par leur auteur, leur datation, leur iconographie, leur caractéristique physique3 … » et non leur fonction4. Il n’est pas enfermé dans les limites géographiques de l’étude, le thème pouvant avoir des échos dans toute la France, voire au-delà comme on le verra avec l’exemple d’un damas de soie particulier.

• 5 PAGNON, 2012 ; PAGNON, 2018.
• 6 169 dossiers d’œuvre sur Nîmes, 35 sur Beaucaire et 685 sur le reste du département, soit des dossi (...)
• 7 L’outil Gertrude a permis d’organiser des informations éparses, par exemple dans l’IM34007104 ou l’(...)

2Les études sur les soieries des églises du Gard, valorisées par deux publications5, regroupent 889 dossiers6, malgré le relatif dépouillement de ce département qui a fortement subi les guerres religieuses. C’est essentiellement à partir de ce terrain qu’ont été créés la plupart des dossiers qui seront cités ici7, associé à des travaux comparables dans les départements de l’Hérault et de la Manche. Le sujet va être abordé selon les caractéristiques évoquées ci-dessus sauf celles de la datation : aucun dossier thématique établi sur ce critère n’a semblé réellement pertinent puisque le champ datation est aisément interrogeable dans une base de données.

• 8 Archives municipales de Montpellier, 1ANN.

5Il n’existe pas de fonds d’archives non plus pour la maison Malentino, de Montpellier. Mais son histoire est aujourd’hui bien connue grâce au dépouillement de l’Annuaire de l’Hérault8 et aux interrogations sur la presse de l’ancien Languedoc-Roussillon, qui a été numérisée et océrisée. Dans cette famille, elles étaient au moins trois sœurs : Isabelle (1843-1929) crée l’entreprise en 1887 et s’installe en plein centre de l’Écusson montpelliérain, au 7, Place Saint-Côme ; ses ornements portent une étiquette avec son prénom. Elle est rejointe par Louise († 1926) et, vers 1897, elles déménagent à quelques dizaines de mètres, au 27, Grand Rue. Des trois étiquettes de l’entreprise, la deuxième annonce les M^elles Malentino, entre 1897 et 1929. Marie David-Malentino († 1914), s’associe à Isabelle et Louise en 1903 ; ses deux enfants, David et Louise, vont perpétuer les activités du commerce qui s’appelle « À la protection de saint Joseph » à partir de 1902. La troisième marque textile, beaucoup plus rare, est celle de la M^on David-Malentino, après la disparition des trois sœurs, donc après 1929 (fig. 2).

• 9 DURIN-TERCELIN, 2021, p. 110.
• 10 BERTHOD, 1992, p. 90 ; BERTHOD, 2015, p. 84-85.

6Cet exemple démontre que la recherche sur un créateur est logiquement « de la responsabilité » du chercheur situé géographiquement au plus près des sources. L’idéal serait qu’un dossier thématique soit créé par ce chercheur, et que les autres professionnels profitent de ses trouvailles et viennent enrichir le dossier de leurs propres exemples. Sinon, chacun est réduit à la seule consultation de la bibliographie, ce qui est le cas pour les maisons Clergue9 ou Arnaud10, ou bien il collecte les données en ouvrant un dossier thématique, attendant plus d’éléments (Poujol & Chotard) pour compléter la recherche (fig. 3).

• 11 PAGNON, 2015.
• 12 PAGNON, 2016.

7Dans le domaine des ornements liturgiques, la coupe et le montage sont des éléments essentiels. C’est ce qui a justifié la création de dossiers sur les ornements liturgiques de coupe italienne et sur les ornements liturgiques réversibles, et même une publication sur le sujet11. Par rapport aux caractéristiques d’une chasuble française, l’italienne (ou romaine) est plus trapue (hauteur de 109-110 cm environ et largeur de 72 cm environ) ; dans le dos, le décor est ordonné autour d’une colonne dorsale au lieu d’une croix, côté français ; sur le devant, se dessine un tau et non une bande verticale. Sur le voile de calice, le motif décoratif principal se place au centre et non en avant sur un côté ; les pales des étoles et des manipules italiens sont en forme de triangles isocèles, particularité qui n’a existé qu’aux XVI^e-XVII^e siècles en France. Ces pièces sont arrivées en France grâce aux voyageurs qui les ont rapportées ou commandées expressément12 et non grâce à un système commercial organisé ; c’est pourquoi elles sont à la fois assez rares et disséminées sur tout le territoire. Rareté et répartition géographique aléatoire découragent tout essai de synthèse, mais le dossier thématique semble être le bon outil de prise en compte de ces ornements italiens. Si les ornements réversibles ont fait l’objet d’un premier bilan national publié, il peut déjà être considéré comme dépassé alors que le dossier thématique peut être constamment enrichi et mis à jour (fig. 4).

• 13 Signification de chemins suivis : répétition 2 à 3 fois de la même ondulation sur une largeur d’éto (...)

9Les dessins textiles sont un sujet de recherche des plus pertinents, en particulier celui du « damas à grandes fleurs, tiges et fruits du buis sur ruban de dentelle », qui offre un exemple de grande extension géographique et chronologique. Le dessin est à la fois à pointe (c’est-à-dire régi par un axe central) et à méandres : deux rubans de dentelle ondulent en symétrie mais face à face, sans chemins suivis13, tandis que le centre est à petit bouquet dont fleurs et feuilles font songer à des primevères ; des feuilles et fruits de buis sont posés sur les rubans de dentelles. Des tiges à grandes fleurs croisent les rubans tout en décrivant des méandres de même rythme (fig. 6).

• 14 ARIBAUD, 1998, p. 67 et 148.
• 15 SCHORTA, 2000, p. 203.
• 16 PAEPKE, 2000.
• 17 GASTINEL-COURAL, 1988, p. 31.
• 18 THORNTON, 1965, p. 116; ROTHSTEIN, N° 96.

10Christine Aribaud14 publie ce dessin en 1998 en le datant vers 1750 ; les trois chasubles concernées, une verte, une noire et une rouge, sont conservées à la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse et l’hypothèse formulée est que les étoffes pourraient être tourangelles. Bien loin de là, entre 1763 et 1769, le roi Frédéric II de Prusse fait construire dans son parc royal de Sanssouci, à Postdam, à quelques kilomètres de Berlin, son Nouveau Palais (Neues Palais). Le même damas s’y trouve utilisé15, et il est visible encore aujourd’hui – retissages – sur des meubles à Sanssouci et au Neues Flügel de Charlottenburg ; le dessin est donc clairement lié aux commandes de ce roi. Des tisserands en damas étaient prospères à Postdam du temps de Frédéric II et ont certainement reproduit ce dessin, qui reste lié aux châteaux du grand roi de Prusse. Si Karola Paepke16 parle de damas de fabrication berlinoise et cite celui-ci comme faisant partie des tissus utilisés dans plusieurs châteaux frédériciens, cela ne prouve pas que le dessin soit une création allemande. La Grande fabrique lyonnaise a traversé des périodes fastes ou difficiles, parce qu’elle était trop dépendante de la situation politique du royaume et des aléas de la cour (mariages, deuils). C’est pourquoi des ouvriers et même des dessinateurs lyonnais se sont trouvés contraints d’émigrer. Certains réussissaient à obtenir une place importante à l’étranger. Tel fut le cas, dans les années 1775, d’un dessinateur né à Lyon, Mayet17, qui devint directeur des fabriques du roi de Prusse, tout en essayant (en vain) de revenir dans sa ville d’origine. En France, les exemples de ce motif abondent, comme existèrent plusieurs mises en carte, attestées par différentes hauteurs du même dessin et par quelques infimes différences iconographiques. Le dossier thématique indique des exemples dans douze départements mais il est probable que ce tissu se trouve dans tous. De plus, ce damas de belle qualité a eu une grande longévité puisqu’il semble avoir été tissé jusque vers 1850. Il reflète la rapidité avec laquelle un motif pouvait circuler, en particulier au XVIII^e siècle. On sait par exemple que Madame Garthwaite18, dessinatrice anglaise, a reçu en 1735 une mise en carte du célèbre dessinateur lyonnais Jean Revel, signée et datée de l’auteur, en décembre 1733.

• 19 Notamment, PAGNON, 2008, p. 27-28.

12Des dernières années du XVIII^e siècle ou, plus sûrement des toutes premières décennies du XIX^e siècle, des satins liserés prolongent l’esprit du XVIII^e siècle avec des couleurs gaies et harmonieusement équilibrées, des tissus fins et souples au toucher. C’est le cas du « satin liseré 2 lats à bouquet noué avec un cordonnet à quatre glands » (fig. 8) et du « satin liseré 2 lats à bouquet et feuillage inversé » (fig. 9). Le premier, aujourd’hui repéré dans dix départements mais certainement présent dans d’autres, a déjà été publié19. Le second a été identifié dans le Gard, l’Hérault et la Manche. C’est encore un dessin centré sur un bouquet d’où sortent deux liserons bien reconnaissables, entouré de deux tiges abritant des épis de blé et des grappes de raisin ; l’ensemble crée un losange ou un carré sur pointes, les pointes étant matérialisées par des feuilles d’acanthe opposées.

• 20 BOCK, 1859, vol. 1, chap. 1, PL. IX ; VALANTIN, 2002b, p. 140.
• 21 LEEFLANG, 2015, p. 120-121.
• 22 DALIBERT, 2018 : carré Hermès « Tally-Ho », p. 28.

14Dans un encadrement hexagonal, deux cerfs enchainés par le cou se font face, sur un sol herbeux, sous un soleil flamboyant ; au sommet de chaque hexagone, deux rapaces ouvrant leurs ailes semblent prêts à s’affronter. Franz Bock publie en 1859 son exemplaire, un lampas de soie lancé, or sur fond rouge, dans sa Geschichte der liturgischen Gewänder des Mittelalters20. De plus, il vend des morceaux de textiles à divers musées dont celui des tissus de Lyon en 1875 (Inv. 22745). La maison Lemire père & fils (aujourd’hui Prelle), de Lyon, tisse le tissu aux cerfs dès 1857 (échantillons 4571 et 4592). Le succès est très grand ; les fabricants lyonnais – Tassinari le tisse à partir de 1866, puis Henry, à partir de 1871 – mais également les Anglais et Allemands (Dutzenberg à Krefeld) font de même. Le dossier thématique fait le point de la bibliographie conséquente concernant ce dessin et dresse une liste loin d’être exhaustive des exemples repérés dans seize départements français, en Allemagne, aux Pays-Bas21, au Canada (Montréal). Ultime avatar, un foulard de la maison Hermès est directement issu de ce dessin22.

• 23 BOCK, 1859, vol. 1, chap. 1, Pl. VIII.
• 24 Notamment DURIN-TIERCELIN, 2021, p. 188.

15Avec une source identique, une soierie italienne du XIV^e siècle de la collection du chanoine Bock23, l’histoire du « tissu aux lions » est plus complexe à suivre parce que le dessin a fait l’objet de versions légèrement différentes, quant aux animaux mis en scène et aux inscriptions mises en avant. Là encore, le dossier vise à rassembler la documentation (fig. 11). Le tissu est plus luxueux que le précédent et plus rare24.

• 25 ERRERA, 1927, p. 77-78. Son exemple est daté du XIV^e siècle.
• 26 WILLEMIN, 1839, vol. 1, p. 65, Pl. 108.
• 27 CHAILLOU, 2013.
• 28 Exemples conservés au musée de Cluny, les plus anciens datant du VI^e siècle. Cf. DESROSIERS, 2004, (...)

16Le motif dit « au dragon » ou « à la chimère » est beaucoup utilisé dans les arts décoratifs au Moyen Âge, et est visible tant en peinture que sur les émaux ou les textiles25 (fig. 12). Nicolas-Xavier Willemin, dans son Monuments français inédits26 publié en 1839 le montre sur une plaque d’émail tout en affirmant que le support d’inspiration est certainement une étoffe. Il peut encore être rapproché des peintures murales des médaillons du logis des Clergeons de l’ensemble cathédral du Puy, daté du XII^e siècle27. Ce dessin a été tissé du début de la période néogothique jusque vers 1950. Entre ses quadrilobes, figurent des couples d’oiseaux adossés affrontés, souvent des perroquets, tournant le dos à l’arbre de vie, mais la tête retournée vers lui. Le dessin est fort ancien et provient du Moyen-Orient28. Un dossier thématique sur cette iconographie particulière a été tenté, mais le motif donne lieu à tellement de versions et de mises en carte que l’on s’y perd. Un seul dossier thématique existe à ce jour, celui des « oiseaux affrontés face à l’arbre de vie (type A) ».

• 29 VALANTIN, 2002a.

17À l’issue d’un premier travail fait avec Florence Valantin29, accompagné d’une exposition dans la Manche, nous avions recensé onze différents types de tissus aux anges lyonnais, à ne pas confondre avec le tissu du célèbre ornement angélique de Gaspard Poncet, tissé chez Henry, à Lyon, à partir de 1889. Les numéros 1, 2 et 8 se rencontrent à nouveau et sans surprise dans les églises du Sud ; il est tout de même à noter que le dessin d’« ange aux ailes repliés, jouant du luth, (type 8) », rare en Normandie, est plus fréquent dans le Gard, dans cinq églises. La chasuble de coupe ample de Mons porte l’étiquette de Poujol & Chotard, fabricant de Clermont-Ferrand qui devait se fournir en tissus à Lyon.

• 30 VALANTIN, 2003, p. 85.

20Le croisement des bras de la croix, sur l’orfroi dorsal des chasubles, est l’endroit privilégié du décor d’une chasuble. La figure du Christ s’y trouve souvent brodée, selon des modèles qui deviennent redondants à la fin du XIX^e siècle. Un dessin, à ne pas confondre avec d’autres, également centrés sur les deux figures de Jésus et de Jean (L’Évangéliste) le soir de la Cène, est l’œuvre de Jean Leroudier, dessinateur lyonnais ; le patron N° 1978, de 188530, en est issu. Le « dessin brodé : Jésus et saint Jean l’Évangéliste (allongé) de la Cène » montre Jean effondré sur la table, la main de Jésus sur son épaule, tandis que d’autres images montrent le même disciple, non auréolé, entourant les épaules de Jésus de son bras (fig. 15).

• 31 Collectif, 2004, p. 42-43.

21Une exposition31 du musée d’art et d’industrie de Saint-Étienne (Loire), en 2004, permet de désormais mieux dater le « dessin textile Ecce homo », nom donné par l’entreprise Neyret qui l’a créé en 1902 (patron 3236). Il est fortement inspiré d’une gravure d’après un tableau de Guido Reni. En 1913, est conçue une seconde mise en carte avec un fond ocre. La diffusion de ce motif est nationale (fig. 16).

• 32 HARDY, « l’industrie lyonnaise s’avère réticente à abandonner la fleur qui sied si bien aux robes e (...)
• 33 LÉON, 1928.
• 34 LÉON, 1928.

24Le secteur industriel des tissus religieux lyonnais fut assez lent32 dans la prise en compte des nouvelles idées créatrices et est quasiment absent de la grande exposition de 1925. Le Rapport général de l’exposition est clair : « une exposition d’art décoratif moderne ne pouvait faire une grande place aux ornements liturgiques encore trop souvent réduits à des pastiches du Moyen Âge33. » Les broderies d’art sacré échappent à ce jugement sans appel : « les chapes brodées par M^elle Sabine Desvallières ou par M^me Lemeilleur sont des œuvres dont les tendances modernes n’excluent pas le caractère sacré34. » Néanmoins, en regard des tissus rencontrés durant des années de travail en Normandie, j’ai été surprise de voir la quantité d’étoffes de style Art Déco dans le Gard, un Art Déco très géométrique certes, qui n’est sûrement pas antérieur aux années 1930, mais une production notable, quantitativement et qualitativement. Les entreprises lyonnaises qui ont tissé ces étoffes ne sont pas identifiées mais peut-être parce qu’aucun chercheur ne travaille réellement sur le sujet. Pour l’instant, les dossiers thématiques servent à faire remonter l’information sur les œuvres.

• 35 PAGNON, 2018, p. 106.

27La « croix grecque pattée » dans un médaillon circulaire est la base d’un autre dessin, dans un réseau de polygones (fig. 3a). Avec ce motif, onze églises du Gard possèdent des chasubles de forme française mais aussi de forme ample (Castillon-du-Gard) ; celle de Saint-Pons-la-Calm porte la marque de Poujol & Chotard, de Clermont-Ferrand. Dans sept communes, les symboles eucharistiques que sont le blé et les grappes de raisin ont été totalement revus et placés dans un « octogone Art Déco » (fig. 21a). Le dessin le plus réussi esthétiquement reste celui qui comprend une « croix de Malte dans un quadrilobe Art Déco ». Un carré sur pointe s’insère entre les quadrilobes ; la fleurette qui orne son centre répond aux courbes du quadrilobe et le tout forme un ensemble harmonieux. Il a été vu dans quatre églises du Gard, en blanc, violet et noir (fig. 21b). Un dernier dessin, tapis couvrant d’écailles Art Déco, existe dans cinq églises35.

• 36 PAGNON, 2018, p. 17-19.

28Les mouvements catholiques diocésains ont suscité une ferveur enthousiaste, notamment à l’issue de la première guerre mondiale36. C’est ce que souligne le nombre impressionnant de bannières des Vaillantes du Gard repérées – 24 exemplaires – alors qu’elles ne furent en usage qu’entre l’été 1927 et 1933. À côté d’un modèle normé, tant pour le tissu que pour le décor, quelques pièces originales ont tout de même pris place, dont la bannière du Vigan est le plus bel exemple.

• 37 Julie Schlumberger, CDAOA, et Catherine Roge-Bonneau, du centre de conservation et de restauration (...)
• 38 Elles sont clairement différentes des œuvres montrées dans GUELTON, 2008.

30En travaillant avec les collègues37 du département des Pyrénées-Orientales l’inventaire préliminaire des textiles du Pays d’art et d’histoire transfrontalier Les Vallées catalanes du Tech et du Ter, a permis d’observer une famille très particulière de damas de soie qui semble n’exister que dans la zone frontière concernée. Ces motifs ont en commun un réseau couvrant tout le fond – sans guère d’espaces vides – dans lequel s’insèrent des motifs floraux stylisés (fig. 22). Des couronnes de formes variées, des jeux de damiers ou de triangles dans le damas sont autant de détails caractéristiques. Ils se distinguent parfaitement des étoffes italiennes38 de la même époque, qui va de la seconde moitié du XV^e au début du XVII^e siècle. C’est avec les chercheurs catalans qu’il faut chercher à faire progresser la recherche de ce côté.

• 39 Merci à Maryse Durin-Tercelin, chercheur à l’Inventaire général d’Auvergne-Rhône-Alpes, pour avoir (...)
• 40 Merci à Jean Davoigneau, chargé de mission à la Mission Inventaire du ministère de la Culture, pour (...)
• 41 Région Pays de la Loire, Région Nouvelle-Aquitaine, Région Auvergne-Rhône-Alpes, Patrimoine en Bour (...)

32Dans le cadre d’une recherche sur le temps long inhérent à la lente progression des inventaires textiles, ces dossiers thématiques ont le grand avantage d’être évolutifs ; grâce à l’accumulation des pièces repérées, à la mise à jour des dossiers thématiques et de la bibliographie, ils peuvent faire gagner un temps certain aux autres chercheurs. Si des chargés d’inventaire de régions différentes peuvent travailler sur un même dossier – c’est techniquement possible39 – les demandes d’accès informatiques, les manipulations sont chronophages et redondantes. Il serait plus efficace de créer des dossiers nationaux ou encore de convenir de faire converger vers le chercheur – ou le centre de documentation du service – qui a créé initialement le dossier toutes les nouvelles informations à ajouter. Le but, faut-il le rappeler, est de mieux réussir à dater les œuvres et de trouver leur lieu d’exécution, voire leur auteur, ambition immense de chercheurs en tout petit nombre40. Dans l’état actuel des pratiques d’utilisation de Gertrude diffusion, avec des portails régionaux, il est également possible de créer des liens web entre dossiers de régions différentes. S’il est impossible de travailler sur les dessins textiles autrement qu’en visionnant tous les dossiers en ligne, l’expérience faite avec la Maison Poujol & Chotard, en interrogeant les différents sites internet41 régionaux de l’Inventaire a permis effectivement de consolider au niveau national les connaissances sur cette entreprise.