1La première partie de ce volume est consacrée à la publication de deux présentations faites à l’occasion de la session « Les environnements quaternaires des occupations humaines : dynamiques, variabilités et mutations versus adaptations, stratégies territoriales et modifications environnementales » que nous avons coordonnée dans le cadre de la 12e édition des colloques Quaternaire parrainé par l'Association Française pour l'Étude du Quaternaire (AFEQ‑CNF INQUA) qui s’est tenue sur le campus Condorcet à Paris‑Aubervilliers en février 2020 et organisée par J. Dabkowski, Y. Chabot et A. Garnier.

2Durant les dernières décennies, le développement des études géoarchéologiques a permis non seulement de reconstituer le cadre physique des environnements passés et leur dynamique morpho‑sédimentaire, mais aussi de préciser les processus de formation des sites archéologiques. En retour, les nombreux résultats archéologiques issus de ces investigations offrent la possibilité d’affiner les cadres chrono‑stratigraphiques, de caractériser les systèmes d'activités et l'organisation spatiale des peuplements et de leurs territoires exploités, du Paléolithique jusqu’aux périodes historiques.

3Dans cette session du Colloque Q12, pas moins de 14 communications et 13 posters ont été retenus traitant d’une très grande diversité de contextes géographiques, chronologiques et culturels. Nous avons pu aborder les interactions socio‑environnementales fondées sur un travail multidisciplinaire (i.e. géomorphologie, analyse stratigraphique, micromorphologie, géochimie...) offrant l’occasion de discuter les questions de taphonomie des vestiges, des biais et des potentialités associés à l’échelle spatiale adoptée ou encore de la résilience des milieux et des sociétés face aux perturbations. Une attention particulière a notamment été portée aux discussions centrées sur l'anthropisation des sols et des paléoenvironnements en fonction du forçage des activités humaines dans les systèmes quaternaires. Nous avons également été attentifs à la question de la capacité des milieux à se régénérer malgré les « perturbations anthropiques » et à la question de l’adaptation (ou non) des comportements des sociétés passées à l’évolution de leur environnement.

4À l’issue du colloque, alors que l’ensemble des auteurs a été contacté et sollicité pour participer à la publication des présentations dans la revue Quaternaire, seuls deux articles sont ici présentés. Ces deux textes rescapés ne suffisent donc pas à constituer ce que l’on qualifierait usuellement de numéro thématique. Il s'agit de deux articles qui ont su résister aux contretemps et aux aléas inhérents à tout processus de publication, aux assauts de l'érosion de la motivation, aux changements de l’organisation du travail liés à la pandémie de Covid‑19... Cette disproportion entre le nombre de présentations et le nombre d’articles soumis et publiés, encore plus importante lorsque l’on rapporte cela aux 8 sessions proposées soit 65 communications et 60 posters, interroge cependant. Selon nous, elle traduit non pas un désintérêt pour la publication ni pour la revue Quaternaire, mais bien une évolution symptomatique de la recherche depuis une vingtaine d’années. Parmi les différentes raisons à l’origine de ce faible taux de publication des présentations, on peut se demander si l’ultra‑sollicitation liée à un fantasme ubiquiste ne serait pas dans l’air du temps ? Puisqu’on a l’illusion de pouvoir être partout à la fois, on nous demande d’être partout à la fois. C’est ce qu’Hartmut Rosa (2013) appelle l’accélération sociale et que François Roddier (2012) décrit comme le syndrome de la Reine Rouge selon lequel : « il faut courir le plus vite possible pour rester sur place ». C’est dire la gageure ! La recherche scientifique n’échappe pas à cette évolution sociale dont le rétrécissement de l’espace et du temps présent nous donne une impression insatisfaisante de manque de temps permanent. N’en prenons pas ombrage. Tous les participants à cette session et plus généralement au colloque ont nourri à bien des égards la réflexion sur l’évolution paléo‑environnementale quaternaire, les méthodes de datations, les relations Sociétés/Milieux… Nous les en remercions.

5Le premier article présenté est celui d’A. Gonnet et al. portant sur l’étude d’une séquence colluviale mise au jour lors de l’opération de fouille préventive du site de Mareuil‑le‑Port « Terre des Morts » (Marne). Le relevé pédo‑stratigraphique d’une séquence de comblement de vallons secs associée à des analyses micromorphologiques et la réalisation d’une série de dates OSL apportent de nouvelles données sur les modes d’occupation des sols dans ce secteur de la vallée de la Marne. Elles mettent également en évidence un forçage anthropique à partir du Bronze final. Cette approche alimente ainsi les modèles construits à partir de l’étude des fonds de vallées du Bassin parisien et plus généralement du Nord‑Ouest de l’Europe.

6Le second article de J.‑M. Carozza et al. est consacré aux ports fluviaux de la Garonne aval (Gironde) et à leur aménagement suite aux changements des dynamiques alluviales depuis le Moyen‑Âge jusqu’à l’époque industrielle. Cet article examine trois sites portuaires associés à la bastide de Cadillac en croisant l’étude des archives historiques (documents écrits et cartes anciennes) et de nouvelles données acquises lors de relevés sur le terrain (mesure de la résistivité électrique associée à un carottage ciblé). Ces approches tout à fait complémentaires ont permis de montrer comment la métamorphose fluviale, identifiée au cours du MoyenÂge, ainsi que la physionomie de la vallée de la Garonne ont induit une relocalisation des ports et l’adaptation des activités portuaires dans ce secteur.

7Ces deux publications témoignent ainsi de la grande qualité des échanges qui ont eu lieu lors de cette session et plus largement lors du colloque. Nous terminons cet avant‑propos en remerciant chaleureusement les organisateurs, l’ensemble des participants et plus particulièrement les auteurs de ces deux articles ainsi que les relecteurs que nous avons sollicités. Tous ont accepté de prendre le temps de la discussion et des échanges qui nourrissent nos disciplines.