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Le bois, archive des changements climatiques entre mer et montagne du paléolithique moyen au mésolithique : composition isotopique (13c/12c), reconstitutions paléoclimatiques, histoire des forêts et interactions hommes/milieux

Résumé de thèse
Wood, an archive of climatic changes between sea and mountains from the middle palolithic to mesolithic: isotopic composition (13c/12c), paleoclimatic reconstructions, forest history and human/environment interactions
Benjamin Audiard
p. 63-65

Notes de l’auteur

Thèse co-dirigée par Isabelle THÉRY-PARISOT et Giovanna BATTIPAGLIA, disponible sur demande, par courrier électronique, auprès de l’auteur.

Texte intégral

1Le Pléistocène supérieur, qui s’inscrit dans le dernier cycle glaciaire/interglaciaire, est marqué par de nombreuses fluctuations climatiques et environnementales de durées inégales et d’intensités variables. Or, l’expression de celles-ci à l’échelle du territoire est d’autant plus complexe que ce dernier est hétérogène. L’identification et la caractérisation des mutations paysagères et des variations climatiques, à une échelle locale et à haute résolution temporelle, représentent ainsi un enjeu crucial pour les préhistoriens, dès lors que l’on cherche à appréhender au mieux leur rôle dans l’évolution des sociétés nomades de l’époque.

2À cet égard, l’étude taxinomique des charbons de bois se présente comme une méthode intéressante, permettant non seulement de reconstituer la végétation ligneuse exploitée comme combustible à proximité du site, mais aussi la gestion de cette ressource au regard du contexte socio-économique. Cependant, cette approche appliquée à l’étude des sites paléolithiques est souvent confrontée à certains verrous méthodologiques et interprétatifs (nécessité d’un grand nombre de charbon, faible diversité taxinomique, informations écologiques et économiques imbriquées, etc.).

3Partant de ce constat, et motivés par plusieurs décennies d’étude du signal isotopique dans le bois, nous avons développé une approche croisée associant les analyses taxinomiques et isotopiques (δ13C) des charbons archéologiques du Pléistocène supérieur jusqu’au début de l’Holocène (fig. 1). Celui-ci, par l’intermédiaire de la réponse physiologique des plantes, permet de renseigner les variations climatiques et environnementales (humidité du milieu, développement du sol, etc.). Si les résultats prometteurs d’études pionnières sur charbons laissaient envisager son potentiel, ceux-ci restaient quasi exclusivement associés à des occupations de l’Holocène. L’approche isotopique méritait alors d’être développée et adaptée aux séquences du Pléistocène et aux problématiques méthodologiques qui lui sont propres (masse de charbon limitée, étude de l’évolution du signal basse fréquence sur plusieurs décennies à plusieurs milliers d’années, évolution des paramètres atmosphériques, etc.).

Fig. 1 : Schéma de synthèse de la méthode d’analyse croisée (isotopique et taxinomique) des charbons archéologiques du Pléistocène supérieur. Fig. 1: Summary diagram of the crossover approach (isotopic and taxonomic) of Late Pleistocene charcoals.

Fig. 1 : Schéma de synthèse de la méthode d’analyse croisée (isotopique et taxinomique) des charbons archéologiques du Pléistocène supérieur. Fig. 1: Summary diagram of the crossover approach (isotopic and taxonomic) of Late Pleistocene charcoals.

Benjamin Audiard

4Mes travaux de thèse se sont organisés en deux étapes : (i) la création d’un référentiel actuel sur Pinus sp. (taxon récurrent du Pléistocène supérieur) pour approfondir l’étude de la réponse du signal isotopique aux variations climatiques et environnementales à différents degrés de carbonisation ; (ii) une étude exploratoire des assemblages anthracologiques de neuf sites archéologiques couvrant des occupations du Paléolithique moyen au Mésolithique (sud-est de la France : les Canalettes – Paléolithique moyen, la Combette – Paléolithique moyen, Chauvet-Pont d’Arc – Paléolithique supérieur, la Baume d’Oulen – Paléolithique supérieur et Mésolithique, la Grotte aux Points – Paléolithique supérieur, les Deux-Ouvertures – Paléolithique supérieur, les Prés de Laure – Paléolithique moyen et supérieur, la Baume de Monthiver – Paléolithique supérieur et Mésolithique ; nord-est de la France : Mutzig – Paléolithique moyen).

5Outre la création d’une base de données comme outil de comparaison pour les études isotopiques à venir, nous montrons à travers notre référentiel la possibilité : (i) d’utiliser le signal isotopique des charbons de Pinus indépendamment de l’espèce et issus d’un même degré de carbonisation, et (ii) de corriger les effets de la carbonisation sur le δ13C si nécessaire. De plus, il est montré que les tendances du signal isotopique moyen sont plus largement contraintes par les caractéristiques environnementales et climatiques des sites de collecte (évolution lente) plutôt que par les variations climatiques saisonnières/annuelles (évolution rapide). Ces observations suggèrent ainsi la possibilité d’étudier l’évolution du δ13C moyen de charbons anciens sur le long terme (évolution basse fréquence, pluridécennale à plurimillénaire) et dans l’espace (zone biogéographique).

6L’application de la méthode sur les vestiges archéologiques met en évidence quant à elle une variabilité restreinte du signal isotopique (proche de la variabilité inter-individus observée dans les études actuelles), avec une conservation préférentielle des charbons issus d’un faible degré de carbonisation. Sur ce constat, nous proposons qu’à partir d’un faible effectif de charbons (15 à 30 idéalement), les évolutions du δ13C moyen sont représentatives de l’enregistrement isotopique des plantes anciennes (adaptées aux conditions atmosphériques et climatiques), et de surcroît, des évolutions environnementales et climatiques de basse fréquence (principalement des paramètres liés à la disponibilité en eau). Plus encore, compte-tenu de la capacité du signal isotopique à enregistrer des variations climatiques sur différentes échelles de temps (de dizaines d’années à des milliers d’années), il est possible d’étudier les évolutions isotopiques intra-stratifiées, à partir de petits échantillons issus de différents décapages ou niveaux d’occupations.

7L’approche isotopique permet ainsi de renseigner les évolutions climatiques/environnementales locales et à une haute résolution temporelle, là où les contraintes méthodologiques de l’étude taxinomique (nombre de charbons) et les verrous interprétatifs (évolution lente de la composition forestière, faible diversité taxinomique) sont récurrents dans les séquences anciennes. Plus encore, (i) l’indépendance du signal isotopique par rapport à la nature des dépôts anthracologiques (charbons dispersés, foyer) et de l’échantillonnage (tamisage, flottation, prélèvement manuel), (ii) la possibilité d’utiliser une analyse « individuelle » ou « groupée » et (iii) les résultats prometteurs sur d’autres essences que Pinus (Betula, Juniperus) apportent une polyvalence complémentaire à l’anthracologie.

8Outre les apports méthodologiques, ce travail a permis d’apporter des données environnementales et climatiques inédites sur les sites eux-mêmes, et par comparaison entre eux, à des échelles intrarégionales (moyenne vallée du Jabron, Gorge de l’Ardèche) et extrarégionales (synchronicité des signaux, différences géographiques). Notre travail questionne par ailleurs la gestion des combustibles dans l’environnements proche du site. On notera en particulier la proposition d’utiliser la variabilité du signal comme marqueur des changements d’aire de collecte du bois. Enfin, l’étude des sites archéologiques du Paléolithique moyen au Mésolithique apporte des pistes de réflexion dans les discussions autour de l’appréhension et de l’exploitation du territoire, ainsi que sur les schémas de mobilité à courtes et larges distances.

9En somme, l’originalité de notre approche, à l’interface des sciences environnementales et des sciences humaines, ouvre non seulement de nouvelles perspectives dans les reconstitutions environnementales et climatiques (locales et sur plusieurs échelles temporelles), mais également dans la réflexion actuelle autour de la relation sociétés/milieux (gestion du bois, schéma de mobilité, déterminisme naturel, etc.).

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Bibliographie

AUDIARD B., 2020 - Le bois, archive des changements climatiques entre mer et montagne du Paléolithique moyen au Mésolithique : composition isotopique (13C/12C), reconstitutions paléoclimatiques, histoire des forêts et interactions hommes/milieux. Thèse de doctorat, Université Côte d’Azur, Nice, 579 p.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 : Schéma de synthèse de la méthode d’analyse croisée (isotopique et taxinomique) des charbons archéologiques du Pléistocène supérieur. Fig. 1: Summary diagram of the crossover approach (isotopic and taxonomic) of Late Pleistocene charcoals.
Crédits Benjamin Audiard
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/16529/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 857k
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Pour citer cet article

Référence papier

Benjamin Audiard, « Le bois, archive des changements climatiques entre mer et montagne du paléolithique moyen au mésolithique : composition isotopique (13c/12c), reconstitutions paléoclimatiques, histoire des forêts et interactions hommes/milieux »Quaternaire, vol.33/1 | 2022, 63-65.

Référence électronique

Benjamin Audiard, « Le bois, archive des changements climatiques entre mer et montagne du paléolithique moyen au mésolithique : composition isotopique (13c/12c), reconstitutions paléoclimatiques, histoire des forêts et interactions hommes/milieux »Quaternaire [En ligne], vol.33/1 | 2022, mis en ligne le 12 mai 2022, consulté le 16 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/quaternaire/16529 ; DOI : https://doi.org/10.4000/quaternaire.16529

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Auteur

Benjamin Audiard

Université Côte d’Azur, CNRS, CEPAM, UMR 7264, FR-06300, NICE. Courriel : benjamin.audiard[at]outlook.fr

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Droits d’auteur

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