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Waziers, le Bas-Terroir : Historique de dix années de recherches archéologiques et géomorphologiques dans un marais pléistocène de la plaine de la Scarpe (2011-2021).

Waziers, le Bas-Terroir: History of ten years of archaeological research in a Pleistocene marsh of the Scarpe plain (2011-2021)
David Hérisson, Laurent Deschodt, Pierre Antoine, Jean‑Luc Locht, Samuel Lacroix, Angélique Sergent, Yann Petite, Luc Vallin, Sylvie Rorive, Frédéric Simon et Camille Noûs
p. 225-246

Résumés

La région des Hauts-de-France a livré ces trente dernières années un nombre conséquent d’occupations néandertaliennes attribuées au Paléolithique moyen, corrélées à la fin du Pléistocène moyen et au début du Pléistocène supérieur. Malgré ces nombreuses découvertes, l’Eemien – le dernier Interglaciaire (129‑116 ka) – demeure une période méconnue sur le plan paléoenvironnemental et anthropologique, constat valable pour la moitié Nord de la France mais également pour l’ensemble de l’Europe du Nord-Ouest et même plus largement pour l’Europe occidentale. Dans le présent article, nous retraçons l’histoire de la découverte d’une nouvelle formation eemienne, jusqu’ici inédite, à Waziers (Nord). Elle prend une importance particulière de par la bonne préservation et la diversité des restes organiques ainsi que par la présence d’éléments archéologiques. Malgré de nombreuses difficultés, les résultats acquis au bout de dix années d’exploration (2011-2021) à Waziers sont abondants et de qualité. Ils sont issus d’opérations plurielles, dirigées par plusieurs acteurs appartenant à différentes institutions et co-signataires du présent article. Nous avons souhaité reprendre ici l’historique des découvertes et des opérations afin de présenter clairement les apports de chaque intervention. Le but est aussi de montrer l’importance de la complémentarité des observations et le caractère crucial de la collaboration des acteurs archéologiques dans l’exploitation de telles découvertes. La documentation recueillie pendant cette décennie d’investigations est de toute première importance car rarissime pour reconstituer les comportements des Néandertaliens, les paysages et environnements qu’ils ont parcourus et exploités au cours du Tardiglaciaire du MIS 6 et pendant l’interglaciaire eemien. Le gisement de Waziers rejoint la liste des sites remarquables pour l’étude du Paléolithique dans le nord de la France (i.e. complexe de sites de Cagny, Caours, Biache- Saint-Vaast ou Renancourt) et rappelle par bien des aspects, notamment la qualité de préservation de ses vestiges organiques (surtout végétaux) et par l’étendue des dépôts pléistocènes préservés, un autre gisement paléolithique d’exception en Europe occidentale, le complexe de sites de Schöningen.

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Texte intégral

REMERCIEMENTS

Un grand nombre de personnes ont œuvré pour que les recherches à Waziers voient le jour et puissent tout simplement se faire, il nous est donc agréable ici de les remercier sincèrement. Merci notamment à :

- tous les bénévoles qui ont pris part aux différentes opérations programmées sur le terrain et en dehors : Nelson Ahmed-Delacroix, Elie Dabkowski, Philippe Hérisson, Antoine Kostek, Samuel Lacroix, Frédéric Lallemand, Sophie Lefebvre, Yann Petite, Chloé Pfister, Sylvie Rorive, Pierre-Gil Salvador, Angélique Sergent, Noémie Sévèque, Frédéric Simon,

- la mairie de Waziers, ses maires successifs, M. Michon et M. Desmons, leurs adjoints, Mme Morantin, Mme Caron, M. Dogimont et les différents acteurs des services municipaux, pour l’aide dans les négociations multiples et leur soutien dans les actions de valorisation menées auprès des waziérois,

- la Direction Régionale de Affaires Culturelles et particulièrement le Service Régional de l’Archéologie Nord-Pas-de-Calais puis Hauts-de-France, les conservateurs régionaux de l’archéologie successifs M. Révillion et M. Collart, les agentes prescriptrices successives Mmes Audoly, Bollard-Raineau et Pagli, pour le soutien financier, leur réactivité, leur confiance dans le portage de ce programme de recherche ambitieux et imprévisible,

- les exploitants agricoles, à savoir les membres des familles Caron et Cliquet pour leur autorisation d’accès cruciale pour les différentes interventions,

- les nombreux propriétaires des parcelles pour leur autorisation d’accès cruciale pour les différentes interventions,

- la société AVENTIM et particulièrement sa dirigeante Mme Anne-Céline Lacherie pour son autorisation d’accès ayant permis de mener les fouilles 2014 et 2015,

- l’INRAP, et plus particulièrement pour la direction des Hauts-de-France Laurent Sauvage, Richard Rougier, pour la direction du CSNE Marc Talon et Gilles Prilaux, Guillaume Hulin pour la DST, pour les jours accordés aux agents pour certaines des opérations programmées et le soutien logistique et géophysique accordé,

- les laboratoires du C.N.R.S. ArScAn (UMR7041), LGP (UMR8591) et HNHP (UMR7194) pour leur support financier, le soutien logistique et l’accès aux équipements,

- la C.A.D.-D.A.P. (devenue Direction de l’Archéologie Préventive de Douaisis Agglo) pour la mobilisation de l’ensemble de son personnel : son directeur (Luc Bernard), éclairé des précieux conseils de Etienne Louis, Christian Severin et Emmanuelle Leroy-Langelin, et toutes les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation des diagnostics et des fouilles, et plus particulièrement Camille Lehnbach, Sophie Lefebvre, Faustine Carpentier, Sébastien Pronier, Marie Lebrun et Emmanuelle Bonnaire,

- la société FONDASOL pour l’accord de reproduction d’une figure issue de son rapport géotechnique préalable à la construction du Leroy Merlin.

Nous remercions également les relecteurs pour leur relecture attentive.

1 - Introduction

1La région des Hauts-de-France a livré ces trente dernières années un nombre conséquent d’occupations néandertaliennes attribuées au Paléolithique moyen (280-40 ka) et corrélées à la fin du Pléistocène moyen et au début du Pléistocène supérieur (Locht et al., 2016). Malgré ces nombreuses découvertes, l’Eemien – le dernier Interglaciaire (129-116 ka) – demeure une période méconnue sur le plan paléoenvironnemental et également anthropologique, à cause de la rareté des contextes favorables à la préservation de ces dépôts interglaciaires et des gisements archéologiques associés. Ce constat est valable pour la moitié Nord de la France mais également pour l’ensemble de l’Europe du Nord- Ouest et plus largement pour l’Europe occidentale. La découverte de formation eemienne et de gisement archéologique ou paléontologique associé reste exceptionnelle et devient par conséquent un évènement majeur pour la reconstitution de notre passé. Ce fut le cas en 2003 avec la (re)découverte de la séquence de tuf eemienne de Caours dans la Somme et de ses niveaux d’occupation (Antoine et al., 2006). Dans le présent article, nous retraçons l’histoire de la découverte d’une autre formation eemienne, jusqu’ici inédite, à Waziers (Nord). Elle prend une importance toute particulière de par la bonne préservation et la diversité des restes organiques ainsi que par la présence d’éléments archéologiques. Au-delà de la satisfaction de transmettre à la communauté scientifique cette nouvelle pierre pour construire sur de solides fondations nos connaissances de l’Eemien, il convient de replacer le contexte général dans lequel se sont déroulées ces dix années de recherche.

2Tout d’abord, comme en témoigne le découpage de l’article, les recherches ont pris des formes diverses sur le terrain et toutes les opportunités pour récupérer des données sur la zone ont été exploitées, que ce soit en contexte préventif comme programmé, et dans ce dernier cas avec parfois des conditions à la limite de celles d’une archéologie de sauvetage. Rappelons que l’archéologie préventive concerne les interventions dans le cadre d’aménagement du territoire, avec financement par les aménageurs, tandis que l’archéologie programmée est financée par des fonds publics et prend place généralement dans des zones moins menacées. L’impossibilité de fouiller dans un cadre préventif les occupations paléolithiques en 2013 (en raison de leur enfouissement sous les fonds de forme des projets) a amené à des négociations incessantes avec les aménageurs pour s’insérer autant que possible dans le programme d’aménagement de la Z.A.C. du Bas-Terroir, puis avec les exploitants agricoles sur les parcelles contiguës susceptibles d’être à court terme concernées par d’autres aménagements. Le cadre d’intervention en archéologie programmée, où réactivité et moyens à disposition (surtout mécaniques) sont éloignés des standards du préventif, s’est révélé peu adapté à ce type d’opérations. Toutefois, la prise en compte de l’intérêt de la zone et la réactivité du Service Régional de l’Archéologie (S.R.A) ont été salutaires. Les recherches présentées ici n’auraient simplement pas existé sans l’investissement des agents et le soutien financier du S.R.A. Mais tout positif que fût le rôle du S.R.A., les difficultés d’accès aux terrains ont constitué dès l’invention du gisement une limitation majeure et persistante, avec des négociations longues, souvent stériles, l’impossibilité de programmer réellement les interventions et l’absence de maîtrise dans le choix des zones à investiguer. Cette incertitude permanente a été un frein important aux développements des recherches.

3À ces contraintes externes, se sont ajoutées dans un premier temps, il ne faut pas le cacher, des difficultés de collaboration en raison notamment de passif(s) entre les structures dans un secteur d’archéologie préventive en tension. Il a fallu que chacun fasse preuve d’ouverture pour qu’une relation de confiance s’installe et aboutisse à une collaboration fructueuse dont les présents résultats témoignent.

4Hors terrain, un autre frein assez inattendu a été la difficulté à trouver des spécialistes de certains indicateurs paléoenvironnementaux ou archéologiques rares, voire jamais étudiés pour le Pléistocène, car non préservés dans la très grande majorité des cas, à l’instar des macrorestes végétaux ou des insectes, pour ne citer que ces derniers.

5Malgré toutes ces difficultés, les résultats acquis au bout de dix années d’exploration au Bas-Terroir à Waziers sont abondants et de qualité. Ils sont issus d’opérations plurielles, dirigées par plusieurs acteurs appartenant à différentes institutions et co-signataires du présent article. Nous avons souhaité reprendre ici l’historique des découvertes et des opérations afin de présenter clairement les apports de chaque intervention. Le but est aussi de montrer l’importance de la complémentarité des observations et le caractère crucial de la collaboration des acteurs de l’archéologie dans l’exploitation de telles découvertes. À ce premier article qui reprend tout l’historique succède un second qui exploite les informations d’ordre stratigraphique et aboutit à une synthèse lithostratigraphique (Deschodt et al., 2022). Ces deux premiers articles établissent le cadre des différentes études présentées dans les articles suivants.

2 - Localisation géographique et contexte géologique de la zone du Bas‑Terroir à Waziers

2.1 - localisation du bas-terroir à Waziers

6La ville de Waziers est localisée dans le département du Nord, immédiatement au nord-est de la ville de Douai (fig. 1). La zone du Bas-Terroir (50°23’33.5ˮN, 3°06’48.2ˮE) est définie dans le cadre de nos recherches comme l’espace encadré par la route de Tournai et la rue Maurice Facon à l’ouest, la rue Marcel Bultez au sud, les rues Jules Ferry et Abel Depret à l’est, et enfin la ruelle Madame au nord, soit un espace d’environ 1,25 km² (en moyenne 1,5 km de long sur un axe SO-NE pour 850 m de large sur axe NO-SE). L’essentiel des recherches archéologiques retracées ici a été effectué sur la Z.A.C. dite du « Bas-Terroir », une zone commerciale d’environ 500 m sur 200 m (100 000 m²) qui s’étend au sud de la route montante (D917) desservant la rocade minière A21 (fig. 2).

Fig. 1 : Localisation du gisement de Waziers, le Bas-Terroir.

Coordonnées en mètres Lambert 93. (A) Au sein d’une partie de l’espace de l’Europe du Nord-Ouest et du bassin de l’Escaut, et localisation de la zone présentée dans le carton B. MNT d’après SRTM3, PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, modèle géologique 3D de la Flandre (v1.2011) (modifié), BD alti 25 (IGN) et ERRUISOL (Région Wallonne). (B) Dans son contexte morphologique régional, même échelle orographique que le carton C, MNT d’après PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, Lidar Scarpe (DREAL Nord-Pas-de-Calais) et ERRUISOL (Région Wallonne). (C) Localisation des figures 2 et 3 en bordure de la plaine de la Scarpe, MNT d’après PPIGE NPDC-GRID 2012-2013 et Lidar Scarpe (DREAL Nord-Pas-de-Calais).

Fig. 1: Location of the site of Waziers, Le Bas-Terroir. Lambert 93 meters survey. (A) Within part of North-western Europe area and the Scheldt basin, and location of the area shown in window B. DEM according SRTM3, PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, 3D geologic model of Flander (v1.2011) (modified), BD alti 25 (IGN) and ERRUISOL (Région Wallonne). (B) Location of C frame in regional morphologic context, same orographic scale than C frame, DEM according PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, Lidar Scarpe (DREAL Nord-Pas-de-Calais) and ERRUISOL (Région Wallonne). (C) Location of the figures 2 and 3 on the Scarpe river plain fringe, DEM according PPIGE NPDC-GRID 2012-2013 and Lidar Scarpe (DREAL Nord- Pas-de-Calais).

2.2 - La rivière Scarpe-Scarbus et la plaine de la Scarpe

7Le lieu-dit du Bas-Terroir se situe à environ 300 m du cours actuel de la Scarpe, à son entrée dans la plaine du même nom (fig. 1).

8La plaine est alimentée par de petits cours d’eau provenant du plateau de la Gohelle (Escrebieux), et de la Pévèle (Ruisseau de Coutiches, Courant de l’Hôpital, Elnon). La Scarpe, aujourd’hui canalisée, est le cours d’eau le plus important et draine une partie de l’Artois avant de rejoindre l’Escaut à l’extrémité nord-est de la plaine. Toutefois, le tracé actuel de la Scarpe, avec son bassin artésien, résulte d’une capture anthropique médiévale via le seuil de Vitry-en-Artois (Louis, 1990 ; Louis & Collette, 2009). La rivière antérieure à la capture (que nous dénommons Scarpe-Scarbus pour éviter tout risque de confusion avec la Scarpe actuelle ; Deschodt, 2014) prenait sa source aux environs de Lambres-Lez- Douai, à environ 6 km en amont de Waziers (fig. 1). Les dépôts alluviaux pléistocènes observés à Waziers sont donc associés à cette modeste rivière Scarpe-Scarbus pour un bassin versant de l’ordre de 70 km².

9La basse plaine de la Scarpe se développe sur environ 40 km de long et 10 km de large (fig. 1) à la faveur des affleurements de dépôts marins paléocènes meubles (majoritairement les « sables d’Ostricourt », sable glauconieux thanétien), entre l’Ostrevent et la Gohelle (régions crayeuses au sud et au sud-ouest) et la colline de la Pévèle au nord (développée principalement dans l’ «Argile d’Orchies » yprésienne). Le remblaiement quaternaire de la plaine est modeste (de l’ordre de 3 mètres), essentiellement sableux et dépourvu de nappe de graviers résistants (absence de roche cohérente dure dans le bassin versant). La morphologie de détail a été façonnée par l’activité fluviatile et éolienne à la fin du Pléniglaciaire (Deschodt, 2019). Des traces discrètes de chenaux pléniglaciaires, parfois réoccupés par les écoulements ultérieurs, alternent avec des dunes linéaires basses. La partie ouest de la plaine, à laquelle appartient Waziers, est scellée par une couverture loessique attribuée à la fin du Pléniglaciaire weichselien (Fourrier, 1989, 1992 ; Deschodt, 2019).

Fig. 2 : Localisation des différentes opérations d’archéologie préventives et programmées ayant eu lieu sur la zone du Bas-Terroir à Waziers de 2011 à 2021.

En rouge, les limites de la zone dite du « Bas-Terroir » ; en bleu, les limites de la Z.A.C. du Bas-Terroir; en rose en pointillés larges, l’emprise du diagnostic archéologique préventif de 2011 ; en rose en pointillés ponctuels, l’emprise du diagnostic archéologique préventif de 2013 ; en vert, l’em- prise des secteurs 1 et 2 de la fouille archéologique préventive de 2013 ; en noir, les emprises des fouilles archéologiques programmées de 2014-2015 et de 2017 ; en gris foncé, la bande diagnostiquée en sondages programmés de 2015 ; en rose en ligne continue, l’emprise du diagnostic archéologique préventif de 2020. Fond cartographique : OpenStreetMap. D.AO. : D. Hérisson.

2.3 - Géologie et topographie de détail

10Le Bas-Terroir occupe vers 21 m d’altitude la partie distale d’un versant à pente très faible (de l’ordre de 0,25 %) qui se connecte à la plaine. La couverture quaternaire masque le passage de la craie (vers le haut du versant) à l’« Argile de Louvil » puis au « Sable d’Ostricourt ». Une légère dépression est sensible sur la zone.

3 - De la découverte d’une séquence tourbeuse à son attribution à l’eemien : premières observations et interprétations dans un cadre d’archéologie préventive (2011-2013)

3.1 - De la tourbe tardiglaciaire (?) dans un premier diagnostic d’archéologie préventive en 2011

11Le projet de la Z.A.C. du Bas-Terroir sur la commune de Waziers (Nord), au lieu-dit le Bas-Terroir a suscité la prescription d’un diagnostic archéologique par le S.R.A. du Nord-Pas-de-Calais en 2011 sur les 8 ha à aménager. Le diagnostic a été réalisé par la Communauté d’Agglomération du Douaisis - Direction de l’Archéologie Préventive (C.A.D.-D.A.P.) du 14 novembre au 16 décembre 2011 sous la direction de S. Rorive (2012). Six sondages en puits ont été menés par Y. Petite (géomorphologue de la C.A.D.-D.A.P.) dans le cadre du diagnostic (figs. 2 & 3). Ouverts jusqu’à 2,50 m de profondeur (profondeur limitée pour des raisons de sécurité), ils ont permis la mise au jour d’une séquence de sables argileux lités sous-jacents à des sables argileux gleyifiés et recouverts par des limons. Ouvert en paliers dans l’angle nord de l’emprise, un septième sondage a rencontré à 3,20 m de profondeur un niveau de tourbe épais de plus d’un mètre (fig. 4). Cette séquence sédimentaire inédite (fig. 5) figure dans le rapport du diagnostic 2011 (Rorive et al., 2012) et est reprise dans le rapport de diagnostic 2013, effectué sur la zone adjacente (Sergent et al., 2013). Par comparaison avec les sites les plus proches (Douai « Hôtel Dieu » [Munaut et al., 1995] ; Dourges [Deschodt et al., 2005] ; Houplin- Ancoisnes [Deschodt et al., 2004]) et en l’absence de mobilier archéologique, il avait été supposé que ces niveaux puissent être tardiglaciaires.

12Fig 3

13Fig.4

14Fig.5

3.2 - De la tourbe dans les sondages géotechniques de la societe fondasol en 2011

15La société Fondasol a mené une campagne géotechnique sur la Z.A.C. en décembre 2011 dans le cadre des futurs aménagements. Au total, cinq sondages de reconnaissance lithologique (SP), sept essais de pénétration statique (PS), un sondage piézométrique et dix-huit sondages à la pelle mécanique (PM – jusqu’à 2 m de profondeur) ont été réalisés (Carneau, 2012 ; fig. 3). Le sondage SP3 (associé au sondage 7 du diagnostic 2011) montre des horizons tourbeux à 2,5 m de profondeur sur une puissance de 1,5 m (fig. 6), tout comme le sondage SP5 avec une quarantaine de centimètres de tourbe à 3,70 m de profondeur, tourbe surmontée dans les deux cas par du sable limoneux gris beige à nodules de craie. Les profondeurs des niveaux tertiaires et du socle crayeux ont ainsi pu être estimées à 7,80 m pour les Argiles de Louvil et 12 m pour les niveaux crayeux (soit en altitude NGF, 13,45 m pour les Argiles de Louvil et 9,25 m pour le substrat crayeux). Par endroits, les niveaux argileux tertiaires sont surmontés par du Sable d’Ostricourt.

3.3- A nouveau de la tourbe pléistocène (?) et des vestiges paléolithiques dans le second diagnostic d’archéologie préventive en 2013

16La suite du projet de la Z.A.C. du Bas-Terroir a entrainé la réalisation d’un nouveau diagnostic archéologique de près de 3 ha, sur des parcelles situées à l’ouest de celles investiguées par le diagnostic de 2011 (figs. 2 & 3). Le diagnostic a été réalisé par la Communauté d’Agglomération du Douaisis - Direction de l’Archéologie Préventive (C.A.D.-D.A.P.) du 4 au 7 février 2013 sous la direction d’A. Sergent (2013). En complément des classiques tranchées de diagnostic pour les périodes historiques, quatre sondages profonds en puits ont été ouverts à la pelle mécanique. Le sondage 2 a livré un limon organique dit « tourbeux » entre 3,5 et 4 m de profondeur. Le sondage 4 a permis la mise au jour entre 3,5 et 4,5 m de profondeur de plusieurs niveaux de tourbe. Ces derniers contenaient un fragment de radius d’Aurochs, très bien conservé et présentant vraisemblablement une fracturation intentionnelle ancienne (fig. 7), ainsi qu’une pointe pseudo-Levallois en silex (fig. 8). Suite à des échanges entre Yann Petite (C.A.D.-D.A.P.) et Laurent Deschodt (INRAP), l’hypothèse a été émise d’une datation plus ancienne que celle qui avait été proposée de prime abord, ce qui a amené le S.R.A. à demander une étude complémentaire, en accord avec l’aménageur face à la découverte de ces vestiges attribuables au Pléistocène dans un niveau tourbeux.

Fig. 3 : Localisation et récapitulatif des observations menées sur le site de Waziers jusqu’en 2017.

Coordonnées en mètres Lambert 93. 1/ Fouille campagne 2014, emprise au sol et en fond de fouille (Locht, 2014 ; Hérisson, 2016), 2/ Fouille campagne 2015 (Hérisson, 2016, 2017), 3/ Fouille campagne 2017 (Hérisson, 2018), 4/ Sondage à la tarière mécanique destructive (campagne 2013 ; Antoine et al., 2013), 5/ Sondage géotechnique antérieur à l’aménagement de la zone (Carneau, 2012), 6/ Carottage (campagne 2013 : Antoine et al., 2013 ; Hérisson, 2016), 7/ Sondage dit « du Puisard » (fouille préventive, 2013 : Sergent et. al, 2013 ; Deschodt 2014), 8/ Sondage en puits réalisé en opéra- tion archéologique préventive par le service archéologique de la communauté de commune du Douaisis (Rorive et al., 2012 ; Sergent et al, 2013), 9/ Sondage en puits au godet preneur (campagne 2015 : Hérisson, 2016), 10/ Sondage en puits réalisés lors de la campagne de fouille programmé 2014 (Locht, 2014), 11/ Zone explorée en géophysique (conductivité, EM31, campagne 2015 : Hérisson, 2016), 12/ Zone explorée en géophysique (conductivité, EM31, campagne 2013 : Antoine et al., 2013), 13/ Tomographie électrique (campagne 2013 : Antoine et al., 2013).D.A.O. : L. Deschodt.

Fig. 3: Location and summary of the observations made on the Waziers site until 2017. Lambert 93 meters survey. 1/ Digging campaign 2014, hold on the ground and bottom of excavation (Locht, 2014 ; Hérisson, 2016), 2/ Digging campaign 2015 (Hérisson, 2016, 2017), 3/ Digging campaign 2017 (Hérisson, 2018), 4/ Destructive mechanical auger survey (2013 campaign: Antoine et al., 2013), 5/ Geotechnical survey prior to the area development (Carneau, 2012), 6/ Coring borehole (2013 campaign: Antoine et al., 2013 ; Hérisson, 2016), 7/ Pit called “du Puisard” (2013 preventive digging: Sergent et al., 2013 ; Deschodt 2014), 8/ Pit boring carried out during preventive archaeological operation by the archaeological department of the association of metropolitan areas of Douai (Rorive et al., 2012 ; Sergent et al., 2013), 9/ Pit boring with grab bucket (2015 campaign: Hérisson, 2016), 10/ Pit boring carried out during the 2014 digging campaign (Locht, 2014), 11/ Geophysic investigation (conductivity, EM31, 2015 campaign: Hérisson, 2016), 12/ Geophysic investigation (conductivity, EM31, 2013 campaign: Antoine et al., 2013), 13/ Electric tomography (2013 campaign: Antoine et al., 2013). C.A.D.: L. Deschodt.

Fig. 4 : Localisation des sondages et structures fouillées par la CAD-DAP en lien avec la découverte de vestiges paléolithiques durant les diagnostics préventifs de 2011, 2013 et de la fouille préventive historique de 2013.

Les sondages ou structures en noir sont ceux cités dans l’article. MNT d’après PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, Lidar Scarpe (DREAL Nord- Pas-de-Calais) et ERRUISOL (Région Wallonne). Conductivité élec- trique par EM31 d’après Hulin & Virmoux, 2022. D.A.O. : D. Hérisson et S. Lacroix.

Fig. 4: Location of the test pits and structures excavated by the CAD-DAP linked with the discovery of palaeolithic remains during the preventive surveys of 2011, 2013 and the preventive historical exacava- tion of 2013. The test pits or structures in black are those cited in this paper. DEM according PPIGE NPDC-GRID 2012-2013, Lidar Scarpe (DREAL Nord-Pas-de-Calais) and ERRUISOL (Région Wallonne). EM31 Electric conductivity according to Hulin & Virmoux, 2022. C.A.D.: D. Hérisson and S. Lacroix.

Fig. 5 : Vue du sondage en paliers (sondage 7) exécuté lors du diagnostic archéologique préventif de 2011 et livrant notamment une succession de niveaux de tourbe entre 16,50 m et 17,50 m NGF, cliché : S. Rorive in (Sergent et al., 2013).

Fig. 5: View of the stepped test pit (sondage 7) executed during the archaeological preventive survey of 2011 and notably delivering a succession of peat layers between 16,5 m and 17,5 m NGF, photo: S. Rorive in (Sergent et al., 2013).

Fig. 6 : Extrait du relevé du sondage SP3 réalisé lors de l’étude géotechnique par la société Fondasol en 2011 (Carneau, 2012), révélant 1,5 m de tourbe noire à partir de 18,2 m NGF.

Fig. 6: Extract of the survey of the SP3 borehole carried out in 2011 during the geotechnical study by the company Fondasol (Carneau, 2012), revealing 1.5 m of black peat under 18.2 m NGF.

Fig. 7 : Radius d’aurochs fracturé provenant du niveau de tourbe M du sondage 4 en puits du diagnostic archéologique préventif de 2013 (fig. 2, 3 et 4). Vue dorsale et médullaire (gauche), vue palmaire (droite).

La fracturation est typiquement hélicoïdale accompagnée d’enlève- ments corticaux. Ces stigmates laissent peu de place au doute quant à leur origine anthropique d’autant que les indices de fracturation répondent également au modèle (circonférence < ¼ et L < ¼). Cliché : S. Louguet-Lefebvre in (Sergent et al., 2013).

Fig. 8 : Pointe pseudo-Levallois en silex provenant du niveau de tourbe M du sondage 4 en puits du diagnostic archéologique préventif de 2013 (fig. 2, 3 et 4).

Cliché : S. Rorive in (Sergent et al., 2013).

17Les 14 et 15 février 2013, un sondage en pyramide inversée avec paliers de sécurité (SD5) est réalisé à 3 m au sud du sondage 4 par une équipe de la C.A.D.- D.A.P., associée à L. Deschodt (géomorphologue de l’Inrap) et assistée par des agents du S.R.A. du Nord- Pas-de-Calais (M. Audoly, Ph. Hannois, B. Masson et L. Vallin). La séquence (fig. 9) débute par des blocs et graviers de craie à 5,3 m de profondeur, surmontés de limons fluviatiles calcaires sur 1 m d’épaisseur. Des dépôts de limons tourbeux sont recouverts de plusieurs niveaux de tourbe livrant notamment des bois, formant un ensemble d’environ 1 m d’épaisseur. Cet ensemble d’unités tourbeuses est tronqué ou surmonté selon les endroits par plusieurs niveaux de dépôts alluviaux grossiers (graviers et granules de craie) à fins (sables) de 30 cm à 1 m d’épaisseur. La partie supérieure des dépôts est constituée de dépôts fluvio-éoliens, de limons lœssiques et de sables sur une puissance d’environ 2,5 m, eux-mêmes surmontés d’un petit horizon humique développé sur colluvions. Au-delà des observations plus fines sur la séquence, le sondage 5 a permis la mise au jour d’un corpus de 14 vestiges osseux et dentaires de mammifères provenant majoritairement des niveaux tourbeux (fig. 9). Ils appartiennent à trois espèces (d’après S. Louguet in Sergent et al., 2013) : l’Aurochs (Bos primigenius), le Chevreuil (Capreolus capreolus), et le Cerf élaphe (Cervus elaphus). Ces trois espèces indiquent un environnement mixte (forêt et prairie) sous climat tempéré et humide de type interglaciaire. Un fragment de côte arbore une strie de découpe avec un profil en « v », attestant d’une intervention anthropique sur l’os avec un outil tranchant (fig. 10). Vingt-six restes d’avifaune ont été mis au jour dans les unités tourbeuses du sondage 5, dont une douzaine ont pu être attribués à la famille des anatidés (d’après C. Lehnebach in Sergent et al., 2013). Ils ne portent aucun stigmate imputable à l’action de prédateurs naturels ou à l’intervention humaine. Des tests d’identification sur les restes ligneux ont permis à A. Dietrich (xylologue à l’Inrap) de déterminer du peuplier. Une cupule de gland de chêne a également été retrouvée dans la tourbe (fig. 11). Quatre éclats de silex taillés et un fragment de galet ont été mis au jour dans le sondage 5, mais tous ces éléments sont en position secondaire dans les dépôts tronquant les limons tourbeux. Seul un éclat a été retrouvé plus haut dans la séquence, dans des limons sableux constituant la couverture fluvio-éolienne.

18À l’issue de cette campagne de sondages du diagnostic préventif de 2013, la présence avérée de lœss en couverture, la composition faunique et botanique des vestiges mis au jour permirent de proposer une attribution à un interglaciaire pléistocène pour les dépôts tourbeux de la séquence, sans pouvoir préciser à cet instant lequel. Cette interprétation est corroborée par les résultats de datation par 14C-AMS d’un échantillon de tourbe demandée par le S.R.A., indiquant que l’âge 14C conventionnel de l’échantillon est antérieur à 43 500 BP (Beta : 348494). « Aucun âge radiocarbone calibré ne peut être proposé pour cette date car le niveau d’activité était trop faible pour pouvoir être différencié du signal du bruit de fond », et cela malgré le fait que « le prélèvement a fourni une grande quantité de carbone pour assurer la réalisation de la mesure qui s’est déroulée normalement » (Save, 2013). Quant aux témoins du passage d’hommes préhistoriques à Waziers, ils sont ténus mais confirment un ou plusieurs passages par la pointe pseudo-Levallois retrouvée dans la tourbe du sondage 4 et les rares traces d’intervention anthropique laissées sur des restes d’Aurochs.

3.4 - De la tourbe eemienne et des vestiges paléolithiques dans le puisard, des témoins d’occupations paléolithiques dans les fonds de fosse de la fouille historique de 2013

19Sur les parcelles diagnostiquées en 2011, une fouille fut prescrite par le S.R.A. pour étudier les vestiges laténiens et gallo-romains. La fouille fut dirigée par S. Lacroix assisté de F. Simon (C.A.D.-D.A.P.) du 4 décembre 2012 au 24 septembre 2013 (Lacroix, en cours). A cette occasion, de nouvelles observations sur des occupations paléolithiques ont été effectuées dans le cadre d’un sondage en pyramide inversée dit « du puisard » et lors de sondages ouverts pour étudier plusieurs fosses « historiques ».

3.4.1 - Le sondage dit du « puisard »

20Démarrée le 4 décembre 2012, sur un terrain situé en zone humide, la fouille a rapidement pâti des intempéries à répétition. Les eaux hivernales ne s’évacuant pas sur le secteur 1, il est apparu indispensable de procéder au creusement au nord-est de l’emprise d’un ouvrage technique dit « puisard » pour drainer l’accumulation des eaux de pluie et pouvoir poursuivre la fouille (figs. 3 & 4). Devant le potentiel de découvertes paléolithiques, des spécialistes de la période furent conviés lors du creusement du puisard pour compléter l’équipe de la C.A.D.-D.A.P. : P. Antoine (C.N.R.S.) et L. Deschodt (Inrap) pour la géomorphologie et, E. Goval (Inrap) et D. Hérisson (Inrap) pour l’archéologie préhistorique. En concertation avec l’aménageur et le S.R.A., le sondage a été ouvert le 18 avril 2013 sous la forme d’une pyramide inversée prolongée par un puits.

21La stratigraphie observée (fig. 12, Deschodt et al., 2022) montre, sous le sol de surface (décarbonatation environ 1,2 m), une couverture limoneuse homogène (0,5 m) passant progressivement à des dépôts fluvio‐ éoliens, puis, à partir d’environ 3 m de profondeur, à un ensemble de dépôts fluviatiles fins organiques, de tourbes à bois et de limon travertineux à mollusques. Le tout repose en profondeur sur des formations fluviatiles gravelo‐crayeuses (craie franche non atteinte). Les dépôts fluviatiles fins à dominante organique sont associés à une morphologie de barre de méandre, soulignée par les stratifications obliques faiblement inclinées, observées dans leur partie sommitale.

22Compte tenu des connaissances sur les séquences quaternaires régionales (Deschodt, 2012 ; Deschodt et al., 2012), la couverture lœssique qui fossilise la formation organique montre un faciès typique de dépôts éoliens et fluvio‐éoliens de la fin du dernier glaciaire (Pléniglaciaire supérieur) en fond de vallée et sur lesquelles se développe le sol de surface (Tardiglaciaire‐Holocène). La formation à dominante organique sous‐jacente « Formation de Waziers» est donc clairement antérieure à la grande phase d’extension lœssique de la fin du Pléniglaciaire weichselien (± 25‐17 ka). L’attribution des dépôts organiques tourbeux à un interstade du Weichselien moyen (± 55‐30 ka), a priori possible et un temps évoquée compte tenu du bilan stratigraphique mis en évidence, nous sembla cependant totalement exclue en raison des contenus biologiques découverts dans ce sondage et dans le sondage 5 (cf 3.3). En effet, dans le sondage 5 mené en février 2013, la partie sommitale de la tourbe et les niveaux fluviatiles sablo‐calcaires organiques sus‐jacents ont livré de très grosses pièces de bois et des cupules de gland (chêne), des restes osseux attribués au chevreuil qui traduisent un environnement nettement forestier ainsi qu’un contexte tempéré de type optimum interglaciaire excluant de fait un interstade du Weichselien moyen. Les rares restes végétaux découverts en association avec des dépôts interstadiaires dans la région dans la fourchette 55‐30 ka se limitent à des débris végétaux appartenant aux genres Betula et Salix et quelques pièces de taille centimétrique attribuées à Pinus et datées de 32 ka BP 14C (Antoine et al., 2009).

Fig. 9 : Sondage 5 en paliers du diagnostic archéologique préventif de 2013 (fig. 2, 3 et 4).

(A) Log stratigraphique, description lithologique : A, humus ; B, dépôts de colluvions et anthroposols ; C, dépôts éoliens et action de la pédoge- nèse sur ces horizons de surface ; D, sable limoneux verdâtre avec de petits graviers de craie épars ; E, dépôts fluvio-éoliens ; F, dépôts fluvia- tiles à importantes charges sédimentaires ; G, dépôt fluviatile de régime calme ; H, dépôts alluviaux de régime torrentiel ; I, Alternance de dépôts de versant et de dépôts alluviaux ; J, Sable fin lité à quelques litages plus organiques (allochtone ou sub-autochtone), avec à la base des lits de graviers ; K, succession de sables entrecroisés avec une tendance du banc d’accrétion allant de l’ouest vers l’est sur la coupe nord et du sud vers le nord sur la coupe est ; L, séquence alluvionnaire visible uniquement dans la partie nord et nord-ouest du sondage ; M, ensemble holorganique formé en climat tempéré ; N, limon argileux très clair, gleyifié et calcaire correspondant à un dépôt fluviatile peu dynamique ; O, substrat crayeux sénonien. (B) Vue du sondage à partir de l’ouest vers l’est. D.A.O. et cliché : Y. Petite in (Sergent et al. 2013, modifié).

Fig. 9: Stepped test pit 5 of the archaeological preventive survey of 2013 (fig. 2, 3 and 4). (A) Stratigraphic log, lithological description: A, humus; B, colluvium deposits and anthroposoils; C, aeolian deposits and pedogenesis action on these surface horizons; D, greenish silty sand with sparse chalk gravel; E, fluvio-aeolian deposits; F, fluvial deposits with high sediment loads; G, quiet regime fluvial deposit; H, torrential alluvial deposits; I, alternation of slope deposits and alluvial deposits; J, fine sand with a few more organic bedding (allochthonous or subautochthonous), with gravel beds at the base; K, succession of intersecting sands with a tendency of the accretion bank going from west to east on the northern section and from south to north on the eastern section; L, alluvial sequence visible only in the north and northwest part of the test pit; M, holorganic layers formed in a temperate climate; N, very clear clayey silt, gleyed and limestone corresponding to a low dynamic fluvial deposit; O, senonian chalky substrate. Photo and C.A.D.: Y. Petite in (Sergent et al., 2013, modified).

Fig. 10 : Côte de boviné (aurochs ?) présentant une strie de décharnement issue du niveau I2 du sondage 5 du diagnostic archéologique préventif de 2013.

Le niveau I2 est une alternance de limon gris-beige et de niveaux riches en granules de craie (fig. 9). Cliché : S. Louguet-Lefebvre in (Sergent et al., 2013).

Fig. 10: Bovine rib (aurochs?) showing a defleshing striation from layer I2 of the stepped test pit « sondage 5 » of the 2013 preventive archaeological survey. Layer I2 is an alternation of gray-beige silt and levels rich in chalk gravels (fig. 9). Photo: S. Louguet-Lefebvre in (Sergent et al., 2013).

23Des prélèvements en vue de datation (OSL et U/Th sur gyrogonite) et de tests palynologiques et malacologiques ont été effectués. Les résultats rapides de l’analyse malacologique (mai 2013) confirmèrent l’attribution chronologique du complexe tourbeux. En effet, la tourbe livra notamment des espèces caractéristiques des phases interglaciaires (Hippeutis complanatus, Bithynia tentaculata, Physa fontinalis) parmi lesquelles deux sont particulièrement notables (Belgrandia marginata et Anisus septemgyratus) car elles n’existent plus dans les cortèges holocènes de la région et signent l’attribution des dépôts à une phase interglaciaire du Pléistocène (Limondin-Lozouet & Antoine, 2006 ; Limondin- Lozouet et al., 2006 ; Antoine et al., 2006).

Fig. 11 : Restes de cupule(s) de gland attestant la présence du chêne, provenant des niveaux de tourbe M du sondage 5 (fig. 9) du diagnostic archéologique préventif de 2013.

Cliché : A. Sergent in (Sergent et al., 2013).

Fig. 11: Remains of acorn cup(s) attesting to the presence of oak, from levels of peats M of the stepped test pit “sondage 5” (fig. 9) of the 2013 preventive archaeological survey. Photo: A. Sergent in (Sergent et al., 2013).

Fig. 12 : Vue du sondage en paliers dit du « puisard » du sud vers le nord en cours de réalisation lors de la fouille historique préventive de 2013.

Cliché : D. Hérisson.

Fig. 12: View of the stepped test pit so-called “puisard” from south to north executed during the preventive historical excavation of 2013. Photo: D. Hérisson.

24La synthèse des données alors disponibles amenèrent à conclure à la préservation exceptionnelle d’une séquence de dépôts organiques d’environnement fluviatile s’inscrivant dans un contexte climatique interglaciaire, logiquement Eemien (optimum : ± 125 ka). Cette préservation s’est effectuée dans un système fluviatile à méandres au sein d’une plaine alluviale à la topographie faiblement marquée. Côté faunique, le corpus demeura identique à celui des sondages 4 et 5 du diagnostic de 2013, avec de l’Aurochs, du Chevreuil et du Cerf élaphe. Côté lithique, seul un éclat Levallois préférentiel typique frais (fig. 13) fut découvert dans les déblais du fond du puits, et peut être attribué aux sables silto-organiques gris verts à débris végétaux et mollusques de l’unité stratigraphique de détail (ud) 15 d’après le sédiment caractéristique de cette unité qui était encore collée sur la pièce (Deschodt et al., 2022).

25Compte tenu de l’âge des artefacts en silex parfaitement préservés découverts associés à des restes osseux bien conservés (qui montrent de plus des fracturations et traces de découpe d’origine anthropique) au sein d’une séquence exceptionnellement riche en éléments organiques, ce site présentait des caractéristiques uniques et un potentiel exceptionnel de découverte pour le Paléolithique, les dépôts offrant notamment la possibilité de préservation d’outils en bois, grandement méconnus pour le Paléolithique.

3.4.2 - Les vestiges paléolithiques mis au jour lors de la fouille historique de 2013

26Lors de la fouille préventive des occupations historiques, des silex taillés provenant de niveaux paléolithiques remaniés sur une courte distance ont été mis au jour à plusieurs reprises au fond de sondages servant à l’étude de fossés et de fosses historiques. En procédant à des sondages mécaniques dans une série de fossés longeant la limite orientale du secteur 2 de la fouille, une trentaine de pièces lithiques ont été mises au jour par fouille mécanique puis manuelle les 25 et 26 avril 2013. L. Vallin est venu expertiser ces découvertes pour le S.R.A. le 29 avril, puis le 29 août 2013 lors de la découverte de nouveaux silex taillés. Il confirme l’appartenance du mobilier lithique au Paléolithique moyen à partir de critères techniques (débitage au percuteur de pierre dure, éclats laminaires peu nombreux, plusieurs éclats obtenus par une méthode Levallois préférentielle) et par la position de l’industrie (retrouvée dans un ou deux niveaux selon les sondages mais toujours dans les 2,5 premiers mètres, dans les limons fluvio-éoliens ou à l’interface entre un limon brun grisâtre à points de manganèse, parcouru de glosses grisâtres, et un sable limoneux orangé présentant également des taches grises d’hydromorphie) qui est de facto post-eemienne (figs. 14 & 15). Les conditions stratigraphiques (niveau d’érosion à granules de craie) et les caractéristiques de l’industrie (état physique, hétérogénéité) indiquent que les niveaux ne sont pas en place archéologiquement parlant. Ils résultent plutôt d’un démantèlement fluviatile avec redéposition du matériel sur une courte distance, matériel provenant d’une ou plusieurs occupations situées peut-être plus en amont sur un versant aujourd’hui érodé. Au total, 236 artefacts lithiques ont été mis au jour dans tous les sondages conduits lors de la fouille historique, majoritairement dans trois sondages (2015_sd 4 : n=82 ; 2015_sd 1 : n=80 ; 2015_sd B : n=34) et plus ponctuellement dans les autres (figs. 4 & 16). Aux caractéristiques générales énumérées ci-dessus, nous pouvons ajouter que la production est tournée au moins en partie vers l’obtention d’éclats Levallois préférentiels d’assez grandes dimensions, associés à des supports finement retouchés en racloirs simples convexes et double convergent. Toutes les pièces présentent un lustre prononcé attestant de mouvement dans le sable. Côté faunique, seules deux esquilles osseuses indéterminées et un potentiel petit fragment de bois de cervidé ont été découverts dans le sondage SD 4 dans le second niveau.

Fig. 13 : Eclat Levallois préférentiel en silex mis au jour dans le sondage dit du « puisard » dans les déblais du fond du puit lors de la fouille historique préventive de 2013.

1/ Il peut être attribué aux sables silto-organiques gris verts à débris végétaux et mollusques de l’unité stratigraphique de détail (ud) 15 (Deschodt et al., 2022) d’après la matrice qui le contenait et qui est encore visible sur lui lors de sa mise au jour, cliché : P. Antoine. 2/ Le même éclat après nettoyage à l’échelle 1:1, cliché : S. Rorive in (Sergent et al. , 2013).

Fig. 13: Flint preferential Levallois flake uncovered in the stepped test pit so-called “puisard” in the rubble from the bottom of the pit during the preven- tive historical excavation of 2013. 1/ It can be attributed to the green gray silto-organic sands with plant and mollusc debris of the stratigraphic unit of detail (ud) 15 (Deschodt et al., 2022) according to the matrix it contained and which is still visible on it when it was unearthed, photo: P. Antoine. 2/ The same flake after cleaning at scale 1:1, photo: S. Rorive in (Sergent et al. , 2013).

Fig. 14 : Vue de détail de la coupe du sondage 2015 sd 1 (localisa- tion sur fig. 4) de la fouille historique préventive de 2013, avec les deux niveaux remaniés ayant livré des silex taillés du Paléolithique moyen.

Le sondage 2015 sd 1 a livré 80 silex taillés dans deux niveaux. Le niveau supérieur se situe vers 2 m de profondeur à l’interface entre des sables lités d’origine fluviatile parcourus de glosses (au-dessus) et un sable orangé non lité, bien classé, fluviatile, contenant quelques granules de craie diffus et quelques gélifracts de silex usés (au-des- sous). Le niveau inférieur est situé à une vingtaine de centimètres sous le précédent, à la base du sable orangé non lité. Cliché : M-H. Rous- seaux (Lacroix, en cours).

Fig. 14: Detailed view of the section of the 2015 sd 1 pit (location on fig. 4) from the preventive historical excavation of 2013, with the two reworked levels having yielded knapped flint from the Middle Palae- olithic. The pit 2015 sd 1 yielded 80 knapped flint in two layers. The upper layer is located around 2 m deep at the interface between bedded sands of fluvial origin traversed by glosses (above) and unbedded orange sand, well classified, fluvial, containing some diffuse chalk gravels and some worn flint gelifracts (below). The lower level is located about twenty centimeters below the previous one, at the base of the orange sand that is not bedded. Photo: M-H. Rousseaux (Lacroix, in progress).

27Les douze sondages profonds réalisés sur la fouille historique témoignent d’une dilatation de la couverture pléistocène à partir d’un point haut du substrat tertiaire (probablement autour du sondage 4 ; fig. 4). De part et d’autre, les dépôts fluviatiles et fluvio-éoliens s’épaississent rapidement, masquant probablement un dénivelé important. Les sondages du secteur 1 (SDG 5) et du secteur 2 (SG 2 et SG 3) ont livré sous les formations fluvio-éoliennes des trois premiers mètres, un niveau de limon organique surmonté d’un niveau de granules de craie et de lambeaux de tourbe (fig. 17). Le sondage de la fosse 2319 (au sud-ouest de l’emprise, fig. 4) a permis l’observation détaillée sous les limons fluvio- éoliens d’un niveau de limon organique gleyifié d’une quarantaine de centimètres surmonté d’un horizon d’une dizaine de centimètres de tourbe dégradée et déformée par des processus périglaciaires (fig. 18).

4 - Cerner et explorer le potentiel sédimentaire et paléolithique eemien des zones du bas-terroir menacées d’aménagement dans un cadre d’archéologie programmée (2013-2015)

28L’essentiel des articles de ce volume présente les résultats acquis lors de cette première « triennale » de recherches programmées, et pour cette raison nous n’entrerons pas ici dans le détail des résultats acquis sur ces années de terrain 2013 à 2015. Nous nous contenterons de contextualiser les interventions et de renvoyer aux différents articles du volume.

4.1 - Campagne de prospection géophysique en em31 et panneaux électriques (juillet 2013)

29Une première campagne de prospection géophysique a été menée du 9 au 12 juillet 2013 sous la direction de P. Antoine dans le cadre d’une opération d’archéologie programmée sur les parcelles décapées de la fouille historique alors en cours en 2013 et les parcelles diagnostiquées en février 2013 (figs. 2 & 3). Un relevé de conductivité électrique moyenne a été effectué en EM31 sur l’ensemble de cette zone par G. Hulin, sur une surface totale d’environ 66 000 m². Puis, sur la base des résultats ainsi que ceux des observations antérieures, deux transects ont été positionnés transversalement à l’axe du paléochenal de la Scarpe-Scarbus et ont fait l’objet de deux panneaux électriques réalisés par C. Virmoux (Hulin & Virmoux, 2022).

4.2 - Campagne de sondages à la tarière mécanique –TM– et sondage carotté – sc (septembre 2013)

30S’appuyant sur les résultats acquis en géophysique révélant l’axe du paléochenal de la Scarpe-Scarbus, une campagne de sondages à la tarière mécanique fut entreprise sous la direction de P. Antoine du 11 au 13 septembre 2013 sur le secteur investi en EM31 (fig. 3). Seize sondages à la tarière mécanique destructive ont été effectués (notés TM) de manière à construire des transects perpendiculaires au cours du paléochenal et mieux cerner l’extension des dépôts eemiens en couplant les observations ponctuelles des sondages aux résultats géophysiques (fig. 3). Enfin, un sondage carotté (SC) a été réalisé à proximité de TM1 à l’emplacement où les formations eemiennes étaient les plus développées. Cinq tubes ont été extraits (tube 1 [0-1 m], tube 2 [1,10-1,94 m], tube 3 [2,04-3,07 m], tube 4 [3,07-4 m], tube 5 [4,05- 5,10 m]) dont le plus profond (tube 5) a fait l’objet d’une analyse palynologique (Gauthier, 2022). Ces travaux prospectifs complémentaires (géophysiques et sondages tarière) permirent de proposer une première carte localisant le paléochenal eemien de la Scarpe-Scarbus, les dépôts associés et les zones possédant le plus fort potentiel de préservation d’occupations paléolithiques (fig. 19).

4.3 - Première campagne de fouille programmée (mai-juin 2014) : de nouveaux indices d’occupations néandertaliennes

31Le choix d’implantation de la première fenêtre de fouille en 2014 s’est porté sur la parcelle AD-640 sondée en 2013 car il s’agissait de la seule zone encore disponible sur les surfaces diagnostiquées (aménagées entre temps) et qui possédait un fort potentiel sédimentaire et paléolithique (figs. 2 & 3). La fouille programmée a été réalisée du 26 mai au 20 juin 2014 sous la direction de J.-L. Locht (2014). Elle a consisté à ouvrir de nouveau la pyramide inversée du sondage 5 du diagnostic préventif de 2013 et d’étendre l’exploration vers l’ouest (figs. 3 & 4). Une ouverture au sol d’environ 400 m² a été pratiquée, ce qui a permis de fouiller 40 m² manuellement sur les 133 m² ouverts en fond de fouille (fig. 20). Deux objectifs étaient ciblés : étudier en détail la séquence stratigraphique et démontrer la présence d’une occupation humaine eemienne stricto sensu à Waziers. Le premier objectif fut rempli en faisant le maximum de prélèvements pour des analyses multi-proxy (principalement malacologie, palynologie, datations OSL, entomologie). Le second objectif fut également rempli en mettant au jour quatre artefacts dans deux niveaux distincts (Deschodt et al., 2022 ; Hérisson et al., soumis) : N1 (dans un niveau de tourbe, US5b) et N2 (dans un limon fluviatile déposé entre deux tourbes, US5c). Leur position stratigraphique rend leur attribution à l’Interglaciaire indiscutable. De plus, des stigmates sur des restes fauniques dans les mêmes niveaux prouvent l’exploitation des grands herbivores mais aussi de plus petits mammifères par l’Homme (traces de crémation sur os long d’aurochs, fracturation d’os longs, traces de découpe sur os de castor). Autre découverte remarquable : la mise au jour et la fouille d’un barrage ou d’une hutte de castor doivent être signalées (Auguste et al., 2022).

Fig. 15 : Vue de dessus du niveau inférieur en cours de décapage du sondage 2015 sd1 lors de la fouille historique préventive de 2013.

Une vingtaine d’artefacts ont été récoltés lors de la fouille manuelle de ce niveau remanié, groupés en petites concentrations au fond de petites poches ou ravines, incisées dans un limon argileux gris à texture grenue et remplies de sable grossiers et de quelques gélifracts usés. Cliché : F. Simon (Lacroix, en cours).

Fig. 15: Top view of the lower layer being stripped of the pit 2015 sd1 during the preventive historical excavation of 2013. About twenty artefacts were collected during the manual excavation of this reworked level, grouped in small concentrations at the bottom of small pockets or gullies, incised in a gray clay loam with a grainy texture and filled with coarse sand and a few worn gelifracts. Photo: F. Simon (Lacroix, in progress).

4.4 - Première campagne de sondages profonds (mai-juin 2014) : une géométrie des dépôts du paléochenal esquissée

32Une campagne de sondages profonds en puits à la pelle mécanique a été menée en parallèle de la fouille programmée le 11 juin 2014 (SP 1 et 2) et le 13 juin 2014 (SP 3, 4 et 5). Grâce à ces informations complétant les observations de la fouille (Locht, 2014), la géométrie générale des dépôts indique la présence d’une rive vers le sud de l’excavation tandis que les unités fluviatiles sont partout ailleurs présentes et semblent même se développer en épaisseur et en profondeur au nord de l’excavation 2014 (SP5 ; figs. 3 & 4).

4.5 - Seconde campagne de prospection géophysique en EM31 (mai 2015)

33Une étude géophysique a été réalisée afin de poursuivre, plus au nord, la campagne menée en 2013 (Hérisson, 2016 ; fig. 3). L’objectif global était d’aider à la restitution du contexte géomorphologique et archéologique de la vallée eemienne. La phase terrain a eu lieu le 18 mai 2015 et a été menée par G. Hulin. Elle a permis de couvrir environ 23 000 m² supplémentaires et de supposer une préservation différente du versant nord.

Fig. 16 : Industrie lithique mise au jour dans le sondage 2015 sd4 de la fouille préventive de 2013.

1 et 2/ Eclats non corticaux gélivés (n° D1 et 106), 3/ éclat semi-cortical avec bords ébréchés (n° D5), 4/ racloir double convergent sur fragment distal d’éclat non cortical (n° 40), 5/ éclat semi-cortical avec bords ébré- chés (n° 62). Quelques 60 artefacts lithiques et fragments de faune ont été collectés en position remaniée, disposés à plat et formant un mince niveau à la base d’un limon grisâtre, immédiatement au-dessus d’un limon sableux orangé dans le sondage 2015 sd4. Clichés : S. Rorive. D.A.O. : D. Hérisson et F. Simon.

Fig. 16: Lithic industry recovered in the pit 2015 sd4 of the preven- tive excavation of 2013. 1 and 2/ Non cortical freezed flakes (n° D1 et 106), 3/ semi-cortical flake with chipped edges (n° D5), 4/ double convergent side scrapper on a distal fragment of non cortical flake (n° 40), 5/ semi-cortical flake with chipped edges (n° 62). About 60 lithic pieces and some fragments of fauna were collected in a reworked posi- tion, laid out flat and forming a thin level at the base of a grayish silt, immediately above an orange sandy loam int the pit 2015 sd4. Photos: S. Rorive. C.A.D.: D. Hérisson and F. Simon.

Fig. 17 : Vue du sondage SG3 du secteur 2 de la fouille historique préventive de 2013.

Un niveau de limon organique surmonté d’un niveau de granules de craie et de lambeaux de tourbe a été mis au jour sous les formations fluvio-éoliennes des trois premiers mètres. Cliché : Y. Petite.

Fig. 17: View of the pit SG3 of the sector 2 of the preventive historical excavation of 2013. A level of organic silt topped by a level of chalk gravels and peat shreds was unearthed under the fluvio-aeolian forma- tions of the first three meters. Photo: Y. Petite.

4.6 - Seconde campagne de sondages profonds (juillet 2015) : un versant nord moins bien préservé

34Afin de confirmer cette dernière hypothèse et vérifier la nature des dépôts pléistocènes au nord de la route, une seconde campagne de sondage profonds en puits a été menée avec une pelle mécanique les 1er et 2 juillet 2015 (Hérisson, 2016 ; figs. 2 & 3). Vingt-deux sondages ont été creusés au godet preneur à cause de l’étroitesse de la bande de terre disponible longeant la route. L’ensemble du secteur prospecté en géophysique montre dans les sondages une absence de préservation de dépôts eemiens, probablement érodés lors de phase(s) érosive(s) au Weichselien. Seul un petit secteur entre les SP 19 à 18 peut présenter un potentiel de préservation de dépôts eemiens, qu’il conviendra de confirmer. Le plus fort potentiel pour de futures explorations se situe donc au sud-ouest de la zone prospectée en géophysique (fig. 3). Ce fait est confirmé par la séquence mise au jour dans les SP1 à SP5, identique à celle de la fouille 2014. Cependant, la présence d’eau au moment des sondages n’a pas permis d’explorer pleinement les dépôts eemiens et d’en évaluer le potentiel archéologique.

4.7 - Seconde campagne de fouille programmée (octobre-novembre 2015) : un nouveau niveau d’occupation au sommet de la tourbe

35Le choix d’ouverture en 2015 a été simple puisqu’aucune des autres options proposées n’a réussi à passer le cap des négociations d’accès au terrain (Hérisson, 2016). C’est donc vers une réouverture et extension de la fenêtre de la fouille de 2014 située dans le remplissage d’un paléochenal de la Scarpe- Scarbus que s’est orientée la fouille de 2015 (figs. 2 & 3). Contrainte par la cession de la parcelle, la fouille express s’est déroulée du 26 octobre au 4 novembre 2015 et a été menée sous la direction de D. Hérisson, comme l’ensemble des opérations programmées menées sur la zone à partir de 2015. Le but de cette campagne était de finir la fouille de la zone ouverte en 2014 et d’étendre l’exploration au sud afin de trouver et, le cas échéant, fouiller la zone de berge, théoriquement plus favorable à la préservation de traces d’occupation humaine. Une aire de 775 m² au sol a été ouverte pour atteindre 211 m² de formation eemienne décapés au troisième palier (fig. 20). Deux zones de fouilles manuelles ont été testées (fig. 20), une négative de 10 m² (absence de faune et d’artefacts ; angle sud-est de la fouille 2015) et une positive de 11 m² (présence d’artefacts lithiques et de faune ; au sud de la coupe 5 de la fouille 2014, fig. 20). L’intégralité du sédiment du secteur de fouille manuelle positif a été prélevée et ensuite tamisée, soit 1 230 litres de sédiment. Le reste de la surface a été décapé de manière fine à la pelle mécanique sur 145 m².

36La campagne de fouilles 2015, bien que courte sur le terrain, fut extrêmement riche en information, en permettant :

37- de confirmer la présence d’un modelé de rive avec juste un débordement tourbeux depuis le paléochenal au sud de la fouille 2014,

38- de mettre en évidence une configuration différente de l’hypothèse émise en 2014 d’un versant remontant rapidement au sud de la fouille 2014 (lit plus large que prévu dans l’axe nord-sud),

39- de mettre au jour un niveau archéologique inédit en position primaire dans un niveau de tourbe « à feuilles » (ud 300 – US5e – N3) situé sur une berge du paléochenal et constitué entre autres de deux petits amas de débitage,

40- de compléter le corpus faunique, notamment dans de nouvelles unités stratigraphiques,

41- de découvrir de nouveaux vestiges organiques qui livreront à coup sûr de précieux éléments pour reconstituer l’environnement eemien ou les activités anthropiques.

42En parallèle des opérations de terrain, de nombreuses études ont été menées dont deux aboutirent en 2015. D’une part, une première date U/Th sur gyrogonite a livré un âge (minimal) de 103 + 3,5/-3,4 ka, en accord avec la séquence eemienne. D’autre part, l’étude palynologique a pu proposer une succession d’une dizaine de palynozones locales, depuis la fin d’un glaciaire (colonne prélevée en 2014 dans les limons sous les tourbes et à leur base) jusqu’à un optimum interglaciaire (tourbes dans le tube 5 de la carotte SC de 2013). Les palynozones locales Waz3 et 4 se retrouvent respectivement au sommet et à la base de chaque prélèvement, permettant de faire le lien stratigraphique entre les deux lieux de prélèvement. Les successions des zones palynologiques montrent un enregistrement unique presque complet de cette période, débutant par le développement de boisements ouverts au sein d’une végétation herbacée sèche typique de phases pré-tempérées, puis une amélioration climatique avec la mise en place de la tourbière en plusieurs étapes.

43Les 211 m² de la séquence eemienne explorés en deux campagnes de fouilles ont livré un nombre important de prélèvements pour les différents proxys qu’il fallut traiter et analyser en laboratoire. L’enveloppe budgétaire conséquente demandée pour les analyses et l’absence de terrain accessible menacé à court terme par l’aménagement ont poussé l’équipe à se concentrer sur l’analyse des différents proxys en laboratoire en 2016.

Fig. 18 : Vues du sondage de la fosse 2319 de la fouille historique préventive de 2013.

(A) Vue globale de la coupe de la fosse en cours de fouille. (B) Vue de détail des horizons de tourbe et de niveaux de limons organiques. Clichés : S. Lacroix.

Fig. 18: View of the pit 2319 of the preventive historical excavation of 2013. (A) Global view of the section of the pit during excavation. (B) Detailed view of the horizons of peat and organic silt layers. Photos: S. Lacroix.

Fig. 19 : Zones (encadrées en rouge et numérotées de 1 à 3) de plus fortes probabilités de conservation de niveaux archéologiques structurés associés à une sédimentation eemienne estimées à l’issue de la campagne de prospections géophysiques et de carottages en septembre 2013 (Deschodt et al., 2013).

(a) axe hydrographique réuti- lisé au Weichselien. (b) Formation travertineuse et tourbeuse eemienne (entre environ 15 et 17 m IGN69) associée au chenal. (c) Formation tourbeuse à la même altitude que (b), Eemien probable. (d) Formation à tendance organique ou à débris organiques observés en profondeur (vers 14 m IGN69). (e) Sondage géotechnique. (f) Sondage en puits à la pelle mécanique. (g) Sondage carotté. (h) Sondage à la tarière méca- nique destructive. (i) Point d’extrémité de panneau de résistivité.

Fig. 19: Areas (framed in red and numbered from 1 to 3) with a higher probability of conservation of structured archaeological layers asso- ciated with eemian sedimentation estimated at the end of the geophy- sical and coring campaign in September 2013 (Deschodt et al., 2013). (a) Hydrographic axis reused during the Weichselian. (b) Eemian travertine and peat formation (between about 15 and 17 m IGN69) asso- ciated with the channel. (c) Peat formation at the same elevation as (b), Eemian probable. (d) Formation with an organic tendency or organic debris observed at depth (around 14 m IGN69). (e) Geotechnical survey. (f) Mechanical pit boring. (g) Coring borehole. (h) Destructive mecha- nical auger survey. (i) Resistivity panel end point.

Fig. 20 : Localisation des différentes zones de fouilles programmées de 2014 et 2015 (d’après Hérisson, 2016, modifié).

En pointillé rouge, emprise de l’ouverture de la fouille 2014 (ca. 400 m²). En vert foncé, emprise de l’ouverture de la fouille 2015 (775 m²). En rose, zones fouillées manuellement en 2014, environ 40 m² au total. En violet, fouille mécanique fine de 145 m². En bleu marine, fouille manuelle test de 10 m². En bleu-gris, fouille manuelle de 11 m². D.A.O. : D. Hérisson.

Fig. 20: Location of the different areas of scheduled excavation of 2014 and 2015 (after Hérisson, 2015, modified). In red dotted line, limit of the opening of the 2014 excavation (ca. 400 m²). In dark green, limit of the opening of the 2015 excavation (775 m²). In pink, areas excavated manually in 2014, around 40 m² at total. In purple, mechanical fine excavation of 145 m². In navy blue, test area of manual excavation of 10 m². In blue-gray, manual excavation of 11 m². C.A.D.: D. Hérisson.

5 - explorer le potentiel sédimentaire et paléolithique eemien à l’est du Bas-Terroir dans un cadre d’archéologie programmée (2017)

44En 2017, la zone explorée en fouilles en 2014 et 2015 étant désormais aménagée (Hérisson, 2018), c’est à l’est de la Z.A.C. du Bas-Terroir que les investigations se sont focalisées, à une soixantaine de mètres au nord- ouest du sondage dit du « puisard » de 2013 (cf 3.4.1, figs. 2 & 3). La campagne sur le terrain a débuté le 21 et 22 septembre 2017 par le creusement d’une première pyramide inversée à l’angle sud-ouest de la parcelle accessible (fig. 21). Cette première ouverture a été ainsi menée car elle permettait d’obtenir un accès à l’ensemble de la séquence pour la montrer aux habitants de Waziers lors de l’excursion de la journée du patrimoine du 23 septembre 2017.

45Cette première pyramide inversée a permis d’observer la conservation relativement bonne des unités de tourbe sur ce secteur et confirmer la présence du chenal et de son remplissage dans la continuité des données acquises jusqu’alors par géophysique et par carottage. La fouille à proprement parler a été menée du 2 au 16 octobre 2017. Le décapage mécanique s’est poursuivi en fouillant au fil de l’avancée à partir de la pyramide inversée en direction du sud-est, formant in fine une tranchée à paliers d’environ 50x13m d’ouverture au sol pour 28x2m en fond de fouille (fig. 22). Deux sondages en puits (SP 1 et SP 2) ont été réalisés aux deux extrémités de la tranchée pour explorer les dépôts les plus profonds et le substrat. Les corrélations entre les séquences des fouilles 2014/2015 et 2017 ne posent pas de problème particulier, malgré quelques variations latérales de faciès et unités différentes sous la séquence de tourbe. La séquence 2017 et les analyses multi-proxy étant encore en cours, nous n’entrerons pas ici dans le détail des corrélations, laissant les résultats de la fouille 2017 prendre forme dans de prochaines publications. La synthèse lithostratigraphique, les études et la synthèse paléoenvironnementale du présent volume prennent en compte les ouvertures et prélèvements effectués jusqu’en 2015. Notons simplement qu’en 2017 la berge du chenal principal a pu être fouillée et qu’un chenal secondaire a été en partie mis au jour à l’extrémité sud-est de la tranchée de la fouille. Après cette campagne de 2017, la triennale prévue 2017-2019 s’est achevée faute d’accès au terrain. Les exploitants agricoles ne souhaitaient plus d’investigations archéologiques, même programmée, conséquence d’un contexte local tendu avec le lancement d’un projet d’extension de la Z.A.C.

Fig. 21 : Vue de la pyramide inversée de l’est vers l’ouest creusée au début de la campagne de fouille programmée 2017, cliché : L. Vallin.

Fig. 21: View of the stepped pit from east to west executed at the beginning of the scheduled excavation campaign of 2017, photo: L. Vallin.

Fig. 22 : Vue du début du creusement de la fenêtre de fouilles de 2017, partant de la pyramide inversée au nord-ouest (visible au premier plan) et s’étendant au final sur 50 m de long en direction du sud-est, cliché : D. Hérisson.

Fig. 22: View of the beginning of the digging of the 2017 excavation window, stemming from the stepped pit to the north-west (visible in the foreground) and ultimately extending over 50 m in a south-easterly direction, photo: D. Hérisson.

Fig. 23 : Localisation des sept sondages profonds en puits réalisés lors du diagnostic préventif de juin 2020, sur une parcelle adjacente aux fouilles programmées 2014 et 2015, D.A.O. : L. Deschodt in (Locht et al., 2020).

Fig. 23: Location of the seven deep test pits executed during the preven- tive archaeological survey of June 2020, on a plot adjacent to the 2014 and 2015 scheduled, C.A.D.: L. Deschodt in (Locht et al., 2020).

6 - Un diagnostic préventif à proximité des fouilles 2014-2015 (2020) : la paléotopographie des berges et des chenaux précisée

46Suite à une demande de réaménagement du magasin Leclerc Drive, une prescription de diagnostic d’archéologie préventive a été émise par le S.R.A. des Hauts-de-France afin de vérifier l’extension des formations fluviatiles pléistocènes et des vestiges archéologiques associés dans cette parcelle contigüe à celle des fouilles 2014/2015 (fig. 2). L’opération a eu lieu du 9 au 11 juin 2020 sous la direction de J.-L. Locht (Inrap ; Locht et al., 2020). Sept sondages profonds en puits ont été réalisés à la pelle mécanique (fig. 23) et chaque godet a été fouillé à la main pour récupérer les vestiges lithiques et osseux. Les corrélations avec les observations de 2014 et 2015 ont été faites sans difficultés majeures. Les sondages SP1, SP2 et SP3 présentent comme pour la fouille de 2015 toute proche une remontée des niveaux tourbeux fortement déformés par des fractures et des effondrements thermokarstiques. Le sondage SP4 à l’extrémité sud voit de nouveau le développement d’une tourbe, témoignant que le talweg situé derrière le magasin semble propice à la conservation de la « formation de Waziers » (fig. 24). Les sondages SP6 et SP7 montrent sans ambiguïté que le chenal fouillé en 2014 se prolonge à cet endroit, à proximité et probablement sous la route. Côté archéologique, deux cassons de silex taillés de petites dimensions ont été mis au jour dans l’unité 7 du SP4 en position légèrement remaniée dans un lit de limon, de sable et de tourbe remaniée avec quelques graviers de craie et associés à deux fragments de côtes d’éléphantidés. Notons aussi la présence d’une vingtaine de fragments crâniens (dont un maxillaire) d’un possible rhinocéros et d’un fragment de diaphyse d’os long de petit herbivore dans le sondage SP1 en position remaniée à l’interface tourbe/graviers. L’enseignement principal de ce diagnostic est la mise en évidence de la continuité du niveau vers l’amont du versant selon deux zones : (1) le chenal en partie sous la route et (2) le talweg au sud de l’emprise (fig. 25). La paléotopographie du site devient de plus en plus claire après chaque opération avec deux paléochenaux identifiés, l’un à l’ouest, l’autre au sud (fig. 25). D’après les données des fouilles 2014/2015 et du sondage SP4 de 2020, les occupations humaines semblent être localisées sur l’interfluve et sur les berges des paléochenaux.

Fig. 24 : Vue du sondage SP4 du sud vers le nord de la campagne de diagnostic préventif de juin 2020.

(A) Le sondage montre une séquence similaire à celle observée en 2014/2015, avec notamment des niveaux de tourbe bien préservée entre 3 et 4 m de profondeur. (B) Vue de détail de la fin du sondage au contact du substrat tertiaire. Clichés et montage : L. Deschodt in (Locht et al., 2020, modifié).

Fig. 25 : Proposition d’extension de la formation eemienne de Waziers à l’issue de la campagne de diagnostic préventif de juin 2020.

Fond : carte de conductivité électrique obtenu en EM31 (Hulin & Virmoux, 2022) Les lignes blanches continues représentent les limites probables des chenaux tandis que les lignes blanches en pointillés indiquent les limites supposées et à vérifier des chenaux. En rouge, zones fouillées en 2014, 2015 et 2017 et sondages préventifs de 2020 (rectangles). Cercles noirs entourées de blanc, points d’observation de la séquence, pour le détail cf fig. 3. D.A.O. : L. Deschodt in (Locht et al., 2020).

Fig. 25: Proposal for the extension of the Waziers eemian formation following the preventive survey campaign of June 2020. Background: electrical conductivity map obtained in EM31 (Hulin & Virmoux, accepted). The continuous white lines represent the probable limits of the channels while the dashed white lines indicate the assumed and to be verified limits of the channels. In red, excavated areas of 2014, 2015 and 2017 and preventive test pit of 2020 (rectangles). Black circles surrounded by white, sequence observation points, for detail see fig. 3. C.A.D.: L. Deschodt in (Locht et al., 2020).

7 - Une troisième campage de prospection géophysique en EMP (septembre 2021) : de nouvelles perspectives dans un cadre programmé ?

47La dernière opération en date sur la zone du Bas-Terroir fut une troisième campagne de prospection géophysique en EMP menée le lundi 27 septembre 2021 par la société Geocarta, et mise en œuvre dans le cadre du programme de prospections géophysiques du S.R.A. des Hauts- de-France. Cette campagne visait à mieux connaître les pourtours des zones investiguées jusqu’alors afin de connaître les secteurs au plus fort potentiel pour la préservation des dépôts eemiens et des occupations paléolithiques qu’ils pourraient conserver. La première série de parcelles prospectées en septembre 2021 représente une surface d’environ 212 000 m² (fig. 2) et sera complétée par une seconde campagne courant 2022 portant sur environ 130 000 m². Nous ne présenterons pas ici les résultats de ces prospections encore en cours d’analyse car bien que la cartographie générée soit prometteuse, la prospection géophysique doit demeurer un outil d’aide à la décision. Elle demande comme nous l’avons montré dans les précédentes campagnes à Waziers à ce que des points d’observation directe des dépôts soient effectués pour connaître la nature des zonations que les résultats de conductivité ou de résistivité dessinent. Néanmoins, notons que l’autorisation d’accès au terrain par les exploitants agricoles pour mener cette campagne géophysique marque un tournant dans les négociations qui étaient demeurées stériles depuis 2015 et laisse espérer que de nouvelles investigations dans le cadre de l’archéologie programmée seront possibles dans un futur proche.

8 - Conclusion introductive

48Ces dix années de recherches (2011-2021) sur la zone du Bas-Terroir à Waziers ont permis de découvrir puis, pour partie, d’identifier, cerner, fouiller et analyser une séquence inédite datant de l’Eemien et les vestiges exceptionnels qu’elle livre. Malgré les diverses difficultés rencontrées pour exploiter ce potentiel unique (cf § 1), la documentation recueillie pendant cette décennie d’investigations est de toute première importance car rarissime pour reconstituer les comportements des Néandertaliens, les paysages et environnements qu’ils ont parcourus et exploités au cours du Tardiglaciaire du MIS 6 et pendant l’Interglaciaire eemien. Le gisement de Waziers rejoint la liste des sites remarquables pour l’étude du Paléolithique dans le Nord de la France, au même titre que le complexe de sites de Cagny pour le Paléolithique inférieur, Caours ou Biache-Saint-Vaast pour le Paléolithique moyen ou Renancourt pour le Paléolithique supérieur. Le gisement de Waziers se démarque par la qualité de préservation de ses vestiges organiques (surtout végétaux) et par l’étendue des dépôts pléistocènes préservés, demandant au final une approche paysagère. De par ces deux particularités, le site ou plutôt le complexe de sites de Waziers rappelle un autre gisement paléolithique d’exception en Europe occidentale, le complexe de sites de Schöningen.

49Cet historique des recherches nous rappelle la complémentarité et la nécessaire collaboration entre les institutions et les acteurs archéologiques sur le terrain et en dehors pour que de telles découvertes puissent être faites puis exploitées dans les meilleures conditions possibles. D’un autre côté, l’aménagement de la Z.A.C. du Bas-Terroir a engendré un double effet : une effet positif dans un premier temps permettant de révéler une séquence totalement inédite dans ce secteur grâce aux différentes opérations d’archéologie préventive et notamment de diagnostics préventifs ; un effet négatif dans un second temps en limitant les possibilités d’opérations de terrain dans le cadre de l’archéologie programmée (temps très court d’intervention avant l’aménagement puis, accès impossible après l’aménagement, doublé de tensions chez les agriculteurs locaux entrainant de très grandes difficultés pour accéder aux parcelles contigües).

50Le potentiel archéologique et paléoenvironnemental reste immense sur la zone du Bas-Terroir à Waziers comme en témoignent les données géophysiques, les sondages effectués et les zones déjà fouillées. Ces dernières, bien que représentant un infime volume des dépôts eemiens préservés sur la zone, ont d’ores-et-déjà livré de précieux éléments pour mieux appréhender les paléoenvironnements successifs et les multiples passages de groupes néandertaliens durant la fin du Saalien et l’Eemien. Ces premiers éléments sont présentés dans les 11 articles suivants qui se focalisent – presque – exclusivement sur les résultats acquis lors des campagnes de fouilles programmées de 2014 et 2015. Ces articles entrent plus en détail dans chacune des facettes que ce gisement livre à partir d’un bilan des analyses déjà menées et abouties. Le tome 2 s’achève sur une approche dite « multi-proxy », ou plus simplement une approche pluridisciplinaire, classique en préhistoire mais toujours efficiente, et sur un data-paper présentant la documentation et les données supplémentaires provenant des recherches sur le gisement de Waziers et mises à disposition de la communauté scientifique en ligne.

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Bibliographie

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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David Hérisson, Laurent Deschodt, Pierre Antoine, Jean‑Luc Locht, Samuel Lacroix, Angélique Sergent, Yann Petite, Luc Vallin, Sylvie Rorive, Frédéric Simon et Camille Noûs, « Waziers, le Bas-Terroir : Historique de dix années de recherches archéologiques et géomorphologiques dans un marais pléistocène de la plaine de la Scarpe (2011-2021). »Quaternaire, vol. 33/4 | 2022, 225-246.

Référence électronique

David Hérisson, Laurent Deschodt, Pierre Antoine, Jean‑Luc Locht, Samuel Lacroix, Angélique Sergent, Yann Petite, Luc Vallin, Sylvie Rorive, Frédéric Simon et Camille Noûs, « Waziers, le Bas-Terroir : Historique de dix années de recherches archéologiques et géomorphologiques dans un marais pléistocène de la plaine de la Scarpe (2011-2021). »Quaternaire [En ligne], vol. 33/4 | 2022, mis en ligne le 30 janvier 2023, consulté le 04 juin 2023. URL : http://journals.openedition.org/quaternaire/17136 ; DOI : https://doi.org/10.4000/quaternaire.17136

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David Hérisson

CNRS-UMR7041 ArScAn, équipe AnTET. MSH Mondes. 21 allée de l’Université, FR‑92023 NANTERRE Cedex. Courriel : david.herisson@cnrs.fr

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Laurent Deschodt

INRAP Hauts-de-France. 32 Avenue de l’Etoile du Sud, FR-80440 GLISY ; CNRS-UMR 8591 - Laboratoire de Géographie Physique, Environnements Quaternaires et Actuels. 2 rue Henri Dunant, FR-94320 THIAIS. Courriel : laurent.deschodt@inrap.fr

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Pierre Antoine

CNRS-UMR 8591 - Laboratoire de Géographie Physique, Environnements Quaternaires et Actuels. 2 rue Henri Dunant, FR-94320 THIAIS. Courriel : pierre.antoine@lgp.cnrs.fr

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Samuel Lacroix

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Sylvie Rorive

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CNRS-UMR 8164 - HALMA. Université de Lille, Campus Pont-de-bois, Rue du Barreau, BP 60149, FR-59653 VILLENEUVE D’ASCQ Cedex ; INRAP Hauts-de-France. Centre de recherches archéologiques d’Achicourt 11 rue Planquettes FR-62217 ACHICOURT. Courriel : frederic.simon@ inrap.fr

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