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Tufs calcaires holocènes récents dans le Nord de la France

Recent Holocene calcareous tufa in Northern France
Jean Sommé
p. 43-49

Résumés

Dans les séquences fluviatiles quaternaires du Nord de la France, des dépôts de tuf sont surtout présents dans la zone limite entre le haut-pays crayeux et les plaines du bas-pays à substrat tertiaire (sables et argile). De larges gisements de tuf fluvio-lacustre superficiels sont observés dans le sud-ouest de la plaine maritime, dans le bassin de Saint-Omer (Aa) et dans la vallée de l’ancienne Scarpe. Ils ont en commun un âge holocène subatlantique, antérieur et contemporain de l’époque romaine.

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Texte intégral

L’auteur remercie Laurent Deschodt pour ses informations et ses observations, et Jean-Pierre Coutard pour ses remarques.

1- Introduction

1Les tufs calcaires constituent un faciès très répandu dans les formations fluviatiles des vallées nordiques situées dans un environnement crayeux. C’est le cas en particulier des vallées de l’Aa, de la Scarpe, de l’Escaut et de la Deûle (fig. 1). Les formations tufacées, qui représentent aussi surtout une sédimentation de phases interglaciaires et interstadiaires, sont largement présentes dans les séquences tardiglaciaires et holocènes des fonds de vallée. Elles sont plus discontinues, en fonction de leur conservation, dans les dépôts fluviatiles pléistocènes des basses terrasses comme celle de la Scarpe à Biache-Saint-Vaast, datant du début du dernier cycle interglaciaire-glaciaire saalien (Tuffreau & Sommé, dir., 1988). Mais, d’une façon générale, dans les unes comme dans les autres, il s’agit d’une sédimentation localisée. Fait cependant exception, pour le Pléistocène, le complexe de Watten, datant du Weichselien ancien, qui s’étend largement sous la séquence holocène dans la vallée de l’Aa en aval de Saint-Omer (fig. 2). Dans ce même marais de Saint-Omer, les tufs holocènes affleurent largement en surface. De même, les tufs holocènes superficiels forment un vaste gisement dans l’ancienne vallée de la Scarpe en aval de Biache. Dans un autre contexte géomorphologique, ils s’étendent aussi très largement à la surface de la plaine maritime du Calaisis. Ces trois gisements ont par ailleurs en commun d’avoir un âge holocène récent, ce qui amène, en particulier dans un souci d’inventaire, à rappeler ici leurs caractéristiques.

Fig. 1 : Nord de la France : tufs calcaires et substrat antéquaternaire.

Fig. 1 : Nord de la France : tufs calcaires et substrat antéquaternaire.

1 : Haut-pays crayeux (altitude supérieure à 100 m) – 2 : Escarpement structural – 3 : Bas-pays crayeux – 4 : Bas pays à substrat tertiaire (sables et argile) – 5 : Boutonnière à substrat jurassique – 6 : Zone de dépôt de tufs.

Fig. 2 : Sondages de Saint-Momelin et de Watten (Nord) (d’après Dercksen, 1977 ; Van der Woude & Roeleveld, 1985 ; Sommé et al., 1992, 1994).

Fig. 2 : Sondages de Saint-Momelin et de Watten (Nord) (d’après Dercksen, 1977 ; Van der Woude & Roeleveld, 1985 ; Sommé et al., 1992, 1994).

1 : Sable – 2 : Sable limoneux et argileux – 3 : Limon et argile – 4 :Tourbe – 5 : Tuf  – 6 : Date 14C.

2- Les tufs de la plaine maritime

2Signalés par Gosselet (Gosselet & Ladrière, 1893 ; Gosselet, 1903) à Calais, les tufs ou limons calcaires à Limnées ont été plus largement décrits dans le reste de la plaine maritime du Calaisis par Dubois (Dubois & Duparque, 1922 ; Dubois, 1924) qui a démontré leur caractère lacustre. Aux sept gisements distingués par cet auteur entre Calais et Guînes qui ont ensuite été précisés et cartographiés, ont été aussi ajoutés, plus à l’Est, ceux des marais de Guînes, puis d’Ardres (Bonte et al., 1971 ; Sommé & Cabal, 1972 ; Servant & Barthès, 1972 ; Servant, 1974 ; Sommé, 1975 ; Masson, 1979). En outre le gisement du Marais de Guînes a donné lieu à la publication d’une coupe détaillée (datations 14C) (Van der Woude & Roeleveld, 1985).

3Les gisements de tuf affleurent dans la partie sudoccidentale de la plaine maritime où les dépôts marins de l’Assise de Calais sont recouverts par la Tourbe de surface (fig. 3). Certains sont localisés au milieu du marais tourbeux : Pont à Trois planches (n2), Grand Marais de Saint-Tricat (no3) ou voisinent plus étroitement la bordure crayeuse : Rue d’Hames (no6), Rivière d’Hames (no7), Marais d’Ardres (no9) ; les autres jalonnent la limite d’extension des dépôts marins Dunkerque II (IV-VIIe siècle après J-C) qui les recouvrent en partie : Pont du Leu (no1), Planche Tournoire (no4), Marmousets (no5), Marais de Guînes (no8, le plus vaste). D’une façon générale, le dépôt repose sur la tourbe plus ou moins érodée, si bien que localement celle-ci peut manquer sous le tuf qui couvre alors directement l’argile ou le sable gris-bleuâtre marin de l’Assise de Calais. Souvent ces gisements de tuf s’individualisent par leur légère éminence , pouvant dominer le marais tourbeux jusqu’à près d’un mètre de dénivellation. C’est le cas lorsque le dépôt présente son épaisseur maximum (1,20 m).

4Le faciès caractéristique des tufs pulvérulents est limoneux ou limono-sableux : fraction sableuse (plus de 50 micromètres) : 5 à 30 % ; fraction limoneuse (502 micromètres) : 60 à 75 % ; fraction argileuse (moins de 2 micromètres) : 7 à 14 %. La teneur en CaCO3 est le plus souvent de l’ordre de 95 %, mais peut être localement plus faible jusqu’à 75 %. Le tuf est très coquillier avec un nombre réduit d’espèces : Limnaea limosa Linné, Bythinia tentaculata Linné, Planorbis umbilicatus Müller, Valvata piscinalis Müller, Limnaea stagnalis Linné, Cyclas cornea Linné (Dubois & Duparque, 1922 ; Dubois, 1924).

5L’âge de la formation du tuf peut être cerné par deux repères chronologiques fournis par les dépôts qui l’encadrent au sommet et à la base. Les traces de l’occupation gallo-romaine, très importante dans cette partie méridionale de la plaine maritime, qui sont présentes sur la tourbe et sur les dépôts de la phase marine préromaine (Dunkerque I), le sont également sur le tuf. C’est en particulier le cas du gisement archéologique d’Ardres (Sommé & Cabal, 1972 ; Cabal, 1973) qui s’étend d’une façon continue sur des dizaines d’hectares et qui correspond à un vaste vicus dont l’histoire s’étend du Ier au IIIe siècle après J.C., avant l’inondation marine Dunkerque II.

6A la base de la formation tufacée, dans le gisement du Pont-du-Leu à Calais, avait été signalée la présence d’un lit coquillier marin reposant sur la tourbe (Gosselet & Ladrière, 1893). Dubois (1924) n’avait pu confirmer ce fait stratigraphique en raison de l’urbanisation du secteur et, insistant sur le recouvrement local du tuf par les sables marins de son Assise de Dunkerque, alors considérée comme uniquement médiévale, concluait que les marnes calcaires ou tufs étaient « sensiblement gallo-romains et immédiatement post-gallo-romains ». L’existence d’un mince dépôt marin attribué à la phase Dunkerque I, entre la tourbe et le tuf, caractérise aussi la partie septentrionale du gisement du Marais de Guînes, dans des conditions stratigraphiques identiques à celles du gisement de Calais (Sommé, 1975). L’interprétation a été confirmée par les datations 14C du Banc Vert (Marais de Guînes) : sommet de la tourbe érodée : 3370 ± 35 ; coquilles de Cerastoderma edule à la base du tuf : 2515 ± 50 (Van der Woude & Roeleveld, 1985). Le dépôt des tufs de la plaine maritime se situe donc dans les siècles qui ont précédé l’ocupation galloromaine dont l’apogée se place aux IIe et IIIe siècles après J.C. (Cabal, 1973 ; Thoen, 1978). La sédimentation lacustre s’est effectuée dans des dépressions creusées dans la tourbière comme le montrent l’amincissement et parfois la disparition de la tourbe. Cette dernière continuait à se former latéralement, le limon calcaire s’intercalant en une ou deux couches dans la tourbe à la bordure des gisements. Ces étangs de dépôt de tuf, aux limites fluctuantes dans le temps, jalonnent le tracé de cours d’eau débouchant de la bordure crayeuse, imparfaitement représentés par les héritiers actuels canalisés ou des talwegs secs. La craie mobilisée par ces rivières résulte d’un drainage karstique ou d’une érosion au fond du lit car les versants sont régulièrement couverts de loess. Il faut souligner que ce dépôt de calcaire lacustre meuble est un événement unique dans la sédimentation holocène de cette partie de la plaine maritime, bordière de la région crayeuse, alors que, dans la basse vallée de l’Aa, en contexte géomorphologique proche, le même type de dépôt a été précédé de plusieurs phases similaires.

Fig. 3 : Tufs calcaires de l’Holocène récent en plaine maritime.

Fig. 3 : Tufs calcaires de l’Holocène récent en plaine maritime.

1 :Tuf(avec no du gisement ; cf. texte)–2 : Dépôts de Dunkerque (sables)– 3 : Marais (tourbe affleurante reposant sur les dépôts de Calais). – 4 : Cordons littoraux(galets) : a. Holocène ; b. Pléistocène – 5 : Région intérieure à substrat crétacé (craie) – 6 : Région intérieure à substrat tertiaire (sables et argiles) – 7 : Courbe de niveau (en mètres NGF).

3 - La basse vallée de l’Aa (marais de Saint-Omer)

7La basse vallée de l’Aa s’évase fortement entre Arques et Watten dans une position orthoclinale entre la retombée artésienne du plateau crayeux et les collines de la Flandre intérieure, modelées dans l’argile yprésienne. D’amont en aval, le colmatage quaternaire, qui est typique du bas-pays nordique, possède une épaisseur qui va de moins de 10 m à 25 m (Salmon, 1913 ; Waterlot, 1968 ; Desoignies & Thibaut, 1968 ; Sommé, 1975 ; Sommé et al., 1992, 1994), l’augmentation étant imputable ici aux dépôts d’âge holocène. L’altitude de la plaine ainsi formée s’abaisse autour de 2 m NGF et prolonge vers le Sud la plaine maritime de la mer du Nord dite flamande. Cette dépression a en effet été envahie par la transgression flandrienne. La séquence sédimentaire holocène faite d’une alternance de tourbe, tuf et sable marin a une épaisseur de 15 mètres au sondage de Saint-Momelin (Dercksen, 1977 ; Van der Woude & Roeleveld, 1985) (fig. 2). Mais contrairement à la lithostratigraphie de la plaine maritime, le faciès tufacé associé ou sus-jacent aux tourbes apparaît à plusieurs reprises : vers les profondeurs de 10 m et de 7 m, et en surface. L’unité de tuf supérieure est la plus constante et s’étend largement vers le Sud, sur plus de 2 km au sud de Saint-Momelin, avec une épaisseur qui dépasse 2 mètres dans la partie axiale de la dépression (Servant & Barthès, 1973 ; Dercksen, 1977) (fig. 4). Cette formation calcaire tufacée est connue anciennement sous le nom, réputé alors impropre ou encore bizarre, de « fond de mer » ou « écume de mer » et a livré des restes archéologiques gallo-romains (Gosselet,1893, 1903 ; Blanchard, 1906 ; Dubois, 1924 ; Briquet, 1930 ; Waterlot, 1968).

8D’après les données analytiques de l’étude des sols le dépôt présente un faciès de limon sableux calcaire coquillier qui est comparable à celui des tufs du marais du Sud-Calaisis. La fraction limoneuse (66 à 90 %) est dominée par la phase limoneuse grossière (2050 micromètres) ; la fraction sableuse (supérieure à 50 micromètres), essentiellement fine, dépasse rarement 20 %. La fraction argileuse (inférieure à 2 micromètres) est toujours réduite à moins de 15 %, sauf lorsqu’il y a passage latéral à la tourbe ; ce qui se manifeste aussi par l’augmentation de la teneur en matière organique. La teneur en CaCO3 est régulièrement comprise entre 70 et 88 %.

9Le tuf repose, soit directement soit par l’intermédiaire d’une mince couche de tourbe, sur des sables ou des limons et argiles marins. Cette dernière unité marine surmonte un complexe tourbeux, souvent épais de plusieurs mètres lorsqu’il est peu érodé, et qui correspond à la Tourbe de surface subboréale de la plaine maritime (fig. 2). Les dépôts de Dunkerque sont représentés par cette unité marine supérieure dont l’âge subatlantique est antérieur à l’époque romaine, si l’on considère , outre les données palynologiques régionales, la date 14C (2000 ± 30) de la tourbe sous-jacente au tuf dans le sondage de Saint-Momelin (Van der Woude & Roeleveld, 1985). Le tuf du bassin lacustre de Saint Omer dont la mise en place est postérieure à cette inondation marine (Dunkerque I) occupe ainsi une position stratigraphique analogue aux tufs de la plaine maritime, comportant par ailleurs comme eux des restes archéologiques gallo-romains qui permettent de cerner un âge comparable.

Fig. 4 : Tufs calcaires de l’Holocène récent dans le marais de Saint‑Omer.

Fig. 4 : Tufs calcaires de l’Holocène récent dans le marais de Saint‑Omer.

1 : Tuf – 2 : Substrat : limite Crétacé (C) (craie) – Tertiaire (L) (sables et argiles) – 3 : Courbe de niveau et altitude (en mètres NGF) – 4 : Sondages de Saint‑Momelin et de Watten.

4 - La vallée de l’ancienne Scarpe

10La vaste dépression d’Hamblain-les-Prés, longue de 4 km et orientée NNW-SSE, qui s’ouvre entre les vallées actuelles de la Scarpe à Biache-Saint-Vaast et de la Sensée à Sailly‑en‑Ostrevent et qui n’est drainée que par le faible courant canalisé de la Trinquise est une vallée morte (fig. 5). En effet elle était occupée originellement par la rivière venant d’Arras qui s’écoulait ainsi vers la basse Sensée et qui a été détournée vers Douai par un canal creusé dans le loess et la craie au niveau du seuil de Vitry-en-Artois (Ladrière, 1888 ; Gosselet, 1897 ; Lequeux, 1934). A proprement parler la haute Sensée actuelle, grossie du Cojeul, orientée SW-NE, dont le talweg est en pente nettement plus forte (2 m/km) que celui de la Scarpe d’Arras (0,60 m/km), apparaît n’avoir été qu’un affluent de cette dernière rivière qui s’écoulait vers l’Escaut. Le détournement de cette ancienne Sensée (Scarpe d’Arras), dont l’époque a été discutée en se référant aux données archéologiques et aux documents historiques sur le développement urbain de Douai et l’aménagement de la nouvelle voie d’eau, est situé à la fin du Xe siècle (Lohrmann, 1984 ; Demolon & Rouche, 1985). Des objets nettement datables du milieu du Xe siècle sont contenus dans les dépôts fluviatiles à granules de craie qui ravinent à Douai l’ancien lit de la rivière locale hérité de l’Holocène ancien et qui semblent corrélatifs du nouveau drainage (Munaut et al., 1995).

11La vallée morte d’Hamblain-les-Prés, dont la largeur peut atteindre près de 2 km, est colmatée par un remblaiement de graviers, sables, limons et tourbes, dont l’épaisseur est comprise entre 14 mètres au nord, au niveau de Biache-Saint-Vaast, et 17 m au sud, près de la Ferme des Prés (Sommé, 1975). Elle présente surtout la particularité d’être tapissée d’une façon continue par des tufs calcaires superficiels, épais de 0,5 à 3 mètres, qui contraste avec le caractère plus localisé de ce type de dépôt dans la vallée de la Scarpe en amont de Biache-Saint-Vaast. Ce limon calcaire très coquillier s’enrichit en profondeur de granules de craie en même temps qu’il présente un faciès faiblement concrétionné. Cette stratigraphie est surtout représentée dans les zones bordières du fond de vallée dont l’altitude est légèrement supérieure (43-44 m NGF), situation topographique qui tend à se généraliser dans la partie méridionale et qui détermine ainsi une sorte de barrage de la vallée. C’est en fonction de l’observation de ce modelé que, sur la carte géologique, cette zone a été cartographiée en alluvions anciennes, « distinguées uniquement pour des raisons morphologiques » (Desoignies, 1966). Au nord et au sud de ce secteur et dans une position plus basse (42 m), une tourbe noire apparaît sous moins d’un mètre de limon calcaire coquillier (Révillion, 1977). Le tuf est également largement présent dans la vallée actuelle de la Scarpe jusqu’aux abords de Vitry où, surmonté d’un mince limon tourbeux, il forme une couche de 1 à 3 m d’épaisseur, reposant sur la tourbe (Ladrière, 1888 ; Jelski, 1968).

12Le tuf d’Hamblain-les-Prés couvre donc d’une façon continue une vaste étendue ce qui implique une mise en place dans des conditions lacustres. Les vestiges archéologiques montrent que l’âge de la masse principale doit se situer immédiatement avant l’époque galloromaine (Jelski, 1968), l’occupation humaine de cette époque étant relativement importante dans la région, en particulier autour d’Hamblain-les-Prés (Agache, 1971). Cependant la sédimentation a pu se poursuivre localement plus tardivement comme le montre la stratigraphie relevée à Fampoux (fig. 5), quelques kilomètres en amont, où un limon calcaire coquillier repose à 0,68 m de profondeur sur une tourbe noire qui 13 et 15 cm plus bas a fourni deux dates 14C : 1810 ± 70 BP et 2040 ± 70 BP avec un contexte pollinique correspondant à cette période (Emontspohl, 1993, 1994).

Fig. 5 : Tufs calcaires de l’ancienne vallée de la Scarpe.

Fig. 5 : Tufs calcaires de l’ancienne vallée de la Scarpe.

A – Ancien tracé de la Scarpe d’Arras.– F : Fampoux ;B : Biache-Saint Vaast. B -Vallée morte d’Hamblain-les-Prés.– 1 : Tuf épais de plus d’1m – 2 : Tuf épais de moins d’1 m reposant sur la tourbe– 3 : Courbe de niveau et altitude (en m NGF). 4 : Substrat : limite Crétacé (craie) – Landénien (sables). – FP : Ferme des Prés.

5 - Autres dépôts de tuf holocènes

13Des dépôts de tufs calcaires fluviatiles sont présents, à faibles profondeurs, dans d’autres basses vallées situées à la limite septentrionale de la région à substrat crayeux (fig. 1). C’est en particulier le cas pour la vallée de l’Escaut, en aval de la confluence avec la Sensée, où le tuf surmonte en général la tourbe développée surtout à l’Atlantique (Gosselet, 1921 ; Masson & Vallin, 1988 ; Ruchard et al., 1992 ; Deschodt, 2002). Dans le bassin de la Deûle, les tufs lacustres de Dourges qui s’étendent dans une dépression située entre la Gohelle crayeuse et la Pévèle à substrat argileux yprésien sont d’âge tardiglaciaire (Deschodt et al., 2005). Des limons calcaires tardiglaciaires apparaissent également à faible profondeur plus en aval dans l’axe de la même vallée (Deschodt et al., 2004). Au sud de la Pévèle, dans la plaine de la Scarpe, des dépôts limoneux calcaires sont encore localement présents (Fourrier, 1989). A une dizaine de kilomètres en aval de Douai, un tuf calcaire typique superficiel, datant de l’Holocène récent, a été observé dans le méandre de Vred, recouvrant des restes gallo-romains. (L. Deschodt, communic. pers.).

6 - Conclusion

14La spécificité des vastes gisements de la plaine maritime, de l’Aa et de l’ancienne Scarpe tient d’abord à leur mise en place dans des conditions fluvio-lacustres qui entrainent l’importance de leurs dimensions. Ces volumes sont certainement liés à l’environnement géomorphologique, l’amont des bassins versants correspondant aux parties les plus élevées du haut pays (altitudes supérieures à 150 m), limitées par des escarpements structuraux (fig. 1), facteur favorable à l’érosion de la craie affleurante. Mais l’originalité de l’événement que représente cette sédimentation, particulièrement bien mise en évidence dans la plaine maritime, est de se situer dans les siècles qui précèdent immédiatement l’occupation gallo‑romaine, laquelle date essentiellement des IIe et IIIe siècles après J.-C. Son importance et sa généralisation à plusieurs régions impliquent sans doute une origine commune d’ordre climatique, qui pourrait être la détérioration marquant le Subatlantique, pour rendre compte d’un apport abondant d’eau calcaire par les rivières drainant le domaine crayeux. Le présent inventaire, qui montre les limites des connaissances acquises sur ce type de gisement, incite à envisager de nouvelles études tant sur la nature et la genèse que sur l’âge de sédiments qui, au demeurant, étant proches de la surface, sont d’un accès facile et intéressent aussi l’étude pédologique.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 : Nord de la France : tufs calcaires et substrat antéquaternaire.
Légende 1 : Haut-pays crayeux (altitude supérieure à 100 m) – 2 : Escarpement structural – 3 : Bas-pays crayeux – 4 : Bas pays à substrat tertiaire (sables et argile) – 5 : Boutonnière à substrat jurassique – 6 : Zone de dépôt de tufs.
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/758/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 86k
Titre Fig. 2 : Sondages de Saint-Momelin et de Watten (Nord) (d’après Dercksen, 1977 ; Van der Woude & Roeleveld, 1985 ; Sommé et al., 1992, 1994).
Légende 1 : Sable – 2 : Sable limoneux et argileux – 3 : Limon et argile – 4 :Tourbe – 5 : Tuf  – 6 : Date 14C.
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/758/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 45k
Titre Fig. 3 : Tufs calcaires de l’Holocène récent en plaine maritime.
Légende 1 :Tuf(avec no du gisement ; cf. texte)–2 : Dépôts de Dunkerque (sables)– 3 : Marais (tourbe affleurante reposant sur les dépôts de Calais). – 4 : Cordons littoraux(galets) : a. Holocène ; b. Pléistocène – 5 : Région intérieure à substrat crétacé (craie) – 6 : Région intérieure à substrat tertiaire (sables et argiles) – 7 : Courbe de niveau (en mètres NGF).
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/758/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 77k
Titre Fig. 4 : Tufs calcaires de l’Holocène récent dans le marais de Saint‑Omer.
Légende 1 : Tuf – 2 : Substrat : limite Crétacé (C) (craie) – Tertiaire (L) (sables et argiles) – 3 : Courbe de niveau et altitude (en mètres NGF) – 4 : Sondages de Saint‑Momelin et de Watten.
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/758/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 52k
Titre Fig. 5 : Tufs calcaires de l’ancienne vallée de la Scarpe.
Légende A – Ancien tracé de la Scarpe d’Arras.– F : Fampoux ;B : Biache-Saint Vaast. B -Vallée morte d’Hamblain-les-Prés.– 1 : Tuf épais de plus d’1m – 2 : Tuf épais de moins d’1 m reposant sur la tourbe– 3 : Courbe de niveau et altitude (en m NGF). 4 : Substrat : limite Crétacé (craie) – Landénien (sables). – FP : Ferme des Prés.
URL http://journals.openedition.org/quaternaire/docannexe/image/758/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 75k
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Pour citer cet article

Référence papier

Jean Sommé, « Tufs calcaires holocènes récents dans le Nord de la France »Quaternaire, vol. 17/2 | 2006, 43-49.

Référence électronique

Jean Sommé, « Tufs calcaires holocènes récents dans le Nord de la France »Quaternaire [En ligne], vol. 17/2 | 2006, mis en ligne le 01 juin 2008, consulté le 11 février 2025. URL : http://journals.openedition.org/quaternaire/758 ; DOI : https://doi.org/10.4000/quaternaire.758

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Auteur

Jean Sommé

UMR 8018 CNRS, Université des Sciences et Technologies de Lille, F – 59655 Villeneuve d’Ascq Cedex.

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