- 1 Ce sont des formations à accès libre dans lesquelles l’étudiant n’a pas à subir une sélection à l’e (...)
1Au Maroc, les politiques éducatives ont toujours accordé un intérêt particulier à l’enseignement supérieur, vu la place qu’il occupe en tant qu’élément constitutif du développement humain et social. Toutefois, le système universitaire marocain est confronté à de nombreux enjeux et défis dus notamment aux difficultés de gestion des effectifs étudiants en perpétuelle augmentation. La difficulté de s’adapter à ce nouvel environnement conduit de nombreux primo-entrants à quitter les bancs de l’université. Selon le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS, 2019, p. 21), « plus de 25 % des étudiants abandonnent leurs études après une année d’inscription » dans les filières universitaires à accès ouvert1. Afin de remédier à cette situation et d’améliorer le rendement interne de l’université marocaine, le ministère de tutelle a entrepris plusieurs réformes, notamment en améliorant les dispositifs existants en matière d’orientation et d’accompagnement des étudiants. Ainsi, depuis le Programme d’urgence 2009-2012, de nombreuses actions de tutorat ont vu le jour au sein de plusieurs universités marocaines dans l’objectif de lutter contre le décrochage universitaire et d’aider les nouveaux étudiants à dépasser les difficultés d’adaptation à l’enseignement supérieur.
- 2 Faculté des lettres et des sciences humaines.
2Nombreuses sont les recherches qui ont montré que les dispositifs d’aide à la réussite comme le tutorat sont fréquemment suivis par les apprenants qui en ont le moins besoin et qui sont le plus portés vers la réussite (Laterrasse, Alberti & De Léonardis, 2002 ; Beaupère & Boudesseul, 2009 ; Romainville & Michaut, 2012 ; Ben Abid-Zarrouk & Weisser, 2013). Parmi les résultats d’une enquête réalisée par Borras (2011), le manque d’information des potentialités du tutorat explique, en partie, le non-recours à ce dispositif d’aide à la réussite. Un travail de thèse élaboré par Pourcelot (2015), évaluant l’efficacité du tutorat à partir du modèle de Ben Abid-Zarrouk (2013), montre également que les étudiants qui mettent en œuvre des stratégies de réussite optimales, qui prêtent attention aux renseignements reçus sur les potentialités de ce dispositif pédagogique, qui en sont satisfaits et qui voient bien son utilité réussissent leur première année plus que les autres étudiants. La prise en considération des éléments contextuels et individuels s’avère donc nécessaire pour évaluer l’efficacité du dispositif de tutorat, une efficacité qui reste subjective et diffère d’un étudiant à un autre (Ben Abid-Zarrouk & Weisser, 2013). Nous avançons, ainsi, l’hypothèse que les représentations des étudiants à l’égard du tutorat impactent leur recours aux séances d’accompagnement. Cette contribution tente, dans ce sens, d’interroger les facteurs d’efficacité de ce dispositif d’aide à la réussite dans le contexte universitaire marocain en croisant les regards des acteurs qui y participent. Elle repose sur les principaux résultats d’une enquête mixte, à la fois quantitative et qualitative, effectuée auprès des étudiants, tuteurs et tutorés, à la FLSH2 de l’université Ibn Zohr, à Agadir. Elle présentera, d’abord, le cadrage théorique du travail, les objectifs et les questions de recherche et s’attachera, ensuite, à détailler le protocole méthodologique déployé pour recueillir et analyser les données. Nous exposerons, dans un dernier temps, les résultats quantitatifs et qualitatifs obtenus et les discuterons à la lumière du choix théorique.
3L’efficacité du tutorat a fait l’objet de nombreuses recherches. La plupart de ces études révèlent que les étudiants qui bénéficient de l’accompagnement tutoral réussissent plus souvent leur première année (Michaut, 2000 ; Bédouret, 2004). Dans ce sens, une autre recherche menée par Ben Abid-Zarrouk et Weisser (2013) souligne que le dispositif de tutorat favorise la réussite des étudiants qui l’utilisent de façon optimale. Dans le même sens, Alberti & Laterrasse (2002) estiment que le tutorat est un accompagnement pédagogique efficace et individualisé qui facilite l’intégration des primo-entrants à l’université. Or, cette activité de soutien ne serait en mesure, à elle seule, de remédier au décrochage universitaire (Danner, Kempf & Rousvoal, 1999). Les étudiants qui réussissent grâce au tutorat ont un rapport aux études plus développé. Ils sont plus motivés et s’engagent davantage dans leurs études pour réussir (Endrizzi, 2010).
4Évaluant les facteurs de non-recours au tutorat, Borras (2011, p. 27) conclut que cet accompagnement doit être bien ciblé et fréquenté par ceux qui en ont le plus besoin notamment à travers « une meilleure communication auprès des étudiants sur le dispositif, son calendrier et son contenu ». S’y ajoutent, selon Stassen (2012, p. 135), deux conditions qui doivent être prises en considération pour améliorer l’efficacité du tutorat, à savoir le repérage des étudiants « à risque d’échec », et « l’identification des processus qui sont à l’origine de ces risques ». Baudrit (2003), quant à lui, conclut, après une revue de littérature consacrée à l’efficacité du tutorat, que la congruence sociale et la congruence cognitive sont deux conditions sine qua non à l’efficacité de cet accompagnement pédagogique. D’après Michaut (2003), l’efficacité du tutorat est une réalité multidimensionnelle qui, pour être évaluée, appelle plusieurs critères et différentes méthodes, notamment :
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Comparer les résultats du groupe qui fréquente le tutorat à celui qui ne le fréquente pas.
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Faire passer des tests standardisés en début et en fin de période à tous les étudiants, qu’ils soient concernés ou non par ce dispositif, de manière à comparer leur progression à la lumière de leurs caractéristiques sociales et scolaires.
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Apprécier la fréquentation du dispositif qui repose généralement sur le taux d’assiduité des étudiants aux séances d’accompagnement.
5Étudiant l’efficacité des dispositifs pédagogiques dans l’enseignement supérieur, Ben Abid-Zarrouk (2013) montre, par ailleurs, que cette efficacité peut être à la fois institutionnelle et individuelle. Si la première est une approche objective qui cible les objectifs de l’institution et les intentions du concepteur, la seconde tend plutôt à responsabiliser l’usager en le mettant au centre du dispositif. Cette efficacité individuelle d’un dispositif pédagogique correspond généralement, selon la même auteure, à « l’atteinte des objectifs de l’usager, et non de l’institution, avec le concours de l’usager. L’hypothèse sous-jacente est qu’un même dispositif peut être efficace pour certains mais pas pour d’autres » (Ben Abid-Zarrouk, 2015, p. 198). Ainsi, l’efficacité de ces dispositifs d’accompagnement reste subjective et diffère d’un étudiant à un autre (Ben Abid-Zarrouk & Weisser, 2013). Estimer l’efficacité du dispositif de tutorat s’avère ainsi un examen difficile qui mobilise plusieurs approches, ce qui explique que cette pratique reste jusqu’à présent une zone d’ombre dans la recherche en sciences de l’éducation (Borras, 2011). Cependant, la « double responsabilisation (de l’usager et de l’institution via le dispositif) devrait permettre d’affiner l’évaluation du dispositif » (Ben Abid-Zarrouk & Pourcelot, 2015, p. 211).
6Pour mieux saisir l’image que les étudiants ont de l’efficacité du tutorat, nous avons eu recours à l’analyse des représentations sociales de ces « producteurs de sens » (Jodelet, 2003). L’objectif est de « comprendre de façon riche les phénomènes à l’étude à partir des significations que les acteurs de la recherche leur donnent » (Savoie-Zajc, 2000, p. 174). Adoptant une approche systémique, notre étude s’est ainsi focalisée sur les acteurs, tuteurs et tutorés, dans le but d’explorer la manière dont ils perçoivent le tutorat à l’université et d’étudier l’impact de ces représentations sur l’efficacité de ce dispositif d’aide à la réussite. L’objectif de cet article exploratoire sera, d’une part, de rendre compte de la réception du tutorat à l’université marocaine en dégageant les représentations des enquêtés sur l’apport de cette forme d’accompagnement. Il sera question, d’autre part, de décrire le rapport qui existe entre les variables « Assiduité aux séances de tutorat » et « Perception du tutorat » dans le contexte universitaire marocain. Nous souhaitons répondre aux questions de recherche : selon les acteurs du tutorat, tuteurs et tutorés, ce dispositif est-il efficace dans le contexte universitaire marocain ? Les représentations que l’étudiant se fait de l’efficacité du dispositif tutoral influent-elles sur son recours à l’accompagnement tutoral ?
- 3 « Le dispositif tutoral à l’université marocaine : innovation, efficacité et enjeux pédagogiques » (...)
7Il convient de souligner que « la complexité et le flou relatif qui caractérisent les représentations impliquent de préciser les choix méthodologiques qui permettent de les inférer puisqu’elles ne se donnent pas à voir spontanément » (Charlier, 1989 cité par Piot, 1997, p. 115). Pour répondre à l’objectif de cette recherche, nous avons opté pour une approche mixte. Le choix d’une telle approche permet la triangulation des dispositifs d’enquête afin d’accroître la validité et la fiabilité des résultats obtenus (Duchastel & Laberge, 2014). À ce titre, trois instruments d’enquête ont été adoptés : des entretiens semi-directifs à l’adresse des tuteurs, un focus group et un questionnaire auprès des étudiants tutorés. Deux groupes de participants ont ainsi constitué l’échantillon de notre enquête qui s’est déroulée de mai à juillet 2017 à la FLSH de l’université Ibn Zohr d’Agadir, dans le cadre d’un travail de thèse sur l’évaluation de l’efficacité du tutorat en contexte universitaire marocain3.
8Notre questionnaire a été nourri de plusieurs travaux consacrés à l’accompagnement tutoral à l’université (Ben Abid-Zarrouk & Pourcelot, 2015 ; Borras, 2011 ; Endrizzi, 2010). Pour optimiser cet instrument de manière qu’il soit le mieux adapté à notre contexte, nous avons procédé à un prétest sur un petit échantillon ayant les mêmes caractéristiques que notre cible. Quant au contenu, il s’agit plus particulièrement d’identifier les caractéristiques individuelles et scolaires des étudiants, le contexte dans lequel ils bénéficient du tutorat, de mettre en lumière le rôle de cet accompagnement pédagogique par rapport à des aspects relatifs à la réussite et à l’abandon des primo-entrants à l’université. Il a également pour but de permettre aux étudiants ayant bénéficié de ce dispositif d’aide à la réussite d’exprimer leur degré de satisfaction quant à son efficacité, sa place et ses pratiques.
9En ce qui concerne la collecte des données, nous avons opté, lors de cette enquête quantitative, pour un « plan d’échantillonnage aléatoire simple stratifié » ayant comme critère de stratification la filière d’étude choisie (Berthier, 2016). Notre échantillon se compose ainsi de 115 primo-entrants marocains ayant bénéficié de l’accompagnement tutoral (42 % [48] de la population est de sexe féminin et 75 % des participants ont moins de 22 ans). Le tableau 1 indique la répartition de la population enquêtée par filière :
Tableau 1. Répartition des étudiants enquêtés par filière
10Il convient de souligner que nous avons administré l’instrument d’enquête en adoptant la méthode assistée par interrogation directe (Ganassali, 2014). Nous avons tenu, pour des considérations éthiques et administratives, à présenter cette recherche à la vice-doyenne chargée du tutorat et à avoir sa permission avant d’intervenir auprès des étudiants.
11L’analyse des données quantitatives a été effectuée sur le logiciel SPSS. Les tests d’indépendance (khi-deux et V de Cramer) ont été réalisés pour vérifier les relations de corrélation et identifier ainsi les croisements de variables significatifs pour notre étude (Ben Abid-Zarrouk, 2011). Il convient de rappeler que nous avons soumis à l’analyse nos 115 questionnaires après avoir vérifié les réponses collectées. L’objectif est de filtrer l’ensemble des informations pour éliminer les questionnaires qui présentent des anomalies ou contiennent une multitude de non-réponses.
12L’enquête qualitative permet dans notre cas de clarifier et d’approfondir les données collectées par questionnaire (Savoie-Zajc, 2000). Nous avons ainsi procédé à des entretiens semi-directifs. Les questions du guide d’entretien conçu pour les étudiants tutorés ont été formulées en prenant en considération les objectifs de la recherche. Une grille d’entrevue contenant des questions identiques a été élaborée à l’adresse des tuteurs. L’objectif est d’obtenir leur point de vue sur les mêmes thèmes pour permettre la triangulation des données collectées. Les points suivants ont ainsi été abordés dans l’ensemble des entretiens (les entretiens individuels et le focus group) : la définition du tutorat, son rôle dans la réussite des étudiants, l’organisation de l’activité tutorale ainsi que les facteurs du recours ou non à ce dispositif éducatif. Les entretiens se terminent par un questionnement sur les facteurs d’efficacité du tutorat.
13L’échantillon de la recherche qualitative est constitué de deux populations, à savoir : les tuteurs (n=09) et les étudiants tutorés (focus group ; n=09). Le choix des tuteurs a été effectué de manière probabiliste parmi ceux qui assurent le soutien des primo-entrants, dans le but d’avoir un échantillon représentatif (09/20 tuteurs). Ce souci de représentativité a également déterminé le choix des étudiants tutorés et des filières auxquelles ils appartiennent.
Tableau 2. Répartition des étudiants tutorés participant au focus group
14Les données de l’enquête qualitative proviennent de neuf entretiens semi-dirigés, d’environ trente minutes chacun et d’un focus group mené auprès des étudiants tutorés (1 h 30 environ). En matière de mise en œuvre de la collecte de données, notre travail de terrain a été effectué conformément aux règles d’éthique. Après avoir reçu l’autorisation de la vice-doyenne chargée du tutorat, nous avons obtenu le consentement de tous nos informateurs qui ont été assurés, à maintes reprises, de l’anonymat et de la confidentialité des verbatims.
15Tous les entretiens ont été enregistrés et transcrits. La méthode exploitée pour saisir les représentations consiste ainsi à faire interagir l’ensemble de données collectées en analysant notamment le discours des participants (Jodelet, 2003). Les données qualitatives sont ainsi analysées sur le plan thématique. L’analyse de contenu (Bardin, 2007), effectuée manuellement (Paillé, 2011), est complétée par le recours à Nvivo, un logiciel de traitement de données qualitatives. Nous nous sommes ainsi focalisés sur les fragments associés aux représentations du tutorat et à son efficacité en contexte marocain.
16Dans les lignes qui suivent, nous analyserons la relation entre l’efficacité du tutorat et les représentations des étudiants quant à ce dispositif. Nous exposerons, d’abord, les résultats de l’analyse quantitative. Nous nous intéresserons, ensuite, aux facteurs qui pourraient favoriser l’efficacité de ce dispositif pédagogique selon la perception des tuteurs et des étudiants tutorés participant à notre enquête qualitative.
17Les résultats quantitatifs se focaliseront plus particulièrement sur les tris croisés. La réalisation de ces tris a pour objectif l’analyse des corrélations que nous pouvons observer entre les différentes variables. Nous allons, ainsi, vérifier l’existence de ce type d’association entre la variable « Assiduité aux séances de tutorat » d’un côté et la variable « Perception du tutorat » de l’autre. Nous présentons dans ce qui suit les différents tableaux de croisement effectués et analysés selon les tests du khi-deux et du V de Cramer.
18Afin d’interroger l’efficacité du dispositif de tutorat à l’université marocaine, nous nous sommes intéressés, d’abord, à son impact sur la réussite des étudiants en rapport avec le taux d’assiduité aux séances d’accompagnement (Michaut, 2003). La totalité des 115 enquêtés a participé à au moins une séance et 35 étudiants ont assisté à toutes les séances. Le tri croisé illustré par le tableau ci-dessous montre que les étudiants les plus fidèles aux séances de tutorat, qui assistent à toutes les séances, sont ceux qui réussissent le plus leur premier semestre.
Tableau 3. « Participation au tutorat » croisé avec « valider le premier semestre »
19En effet, la valeur du khi-deux et du V de Cramer (χ² = 7,26, ddl = 1, 100-p = 97,35 ; V =0,25) indique une relation de corrélation significative entre « participation au tutorat » et « valider le premier semestre ». Les étudiants les plus fidèles aux séances de tutorat en présentiel sont ceux qui ont obtenu leur premier semestre. Les résultats illustrés par le tableau 3 sont confirmés par le tableau 4 qui rapporte le croisement des variables « abandon des séances de tutorat » et « valider le premier semestre ».
Tableau 4. « Abandon des séances de tutorat » croisé avec « valider le premier semestre »
20D’après la valeur significative du khi-deux (χ² = 5,83, ddl = 1, 100-p = 98,42), nous écartons l’hypothèse H0, selon laquelle les deux variables sont dissociées. Il existe, ainsi, une relation de dépendance négative entre « valider le premier semestre » et « abandonner les séances de tutorat ». Les étudiants qui abandonnent le moins les séances de tutorat en présentiel sont les plus nombreux (81,3 %) à réussir leur premier semestre.
21Le tableau ci-dessous rapporte le croisement des variables « abandon des séances de tutorat » et « répondre aux attentes des étudiants ». Ce tri croisé permet de tester si la satisfaction des étudiants influence leur présence aux séances de tutorat. Nous constatons ainsi que les étudiants tutorés qui ont avancé que le tutorat a répondu à leurs attentes sont proportionnellement moins nombreux à abandonner les séances de tutorat comparativement à ceux qui n’en sont pas satisfaits (25 % contre 47,8 %).
Tableau 5. « Abandon des séances de tutorat » croisé avec « répondre aux attentes des étudiants »
22Selon le test du khi-deux (χ² = 4,10, ddl = 1, 100-p = 95,71), il paraît qu’il ya une corrélation positive entre « répondre aux attentes des étudiants » et le fait de ne pas abandonner les séances d’accompagnement. Être satisfait de l’activité tutorale influe donc significativement sur le taux d’abandon des séances de tutorat en présentiel.
23Le tri croisé illustré dans le tableau 6teste si les représentations des étudiants quant au rôle du tutorat impactent leur présence aux séances d’accompagnement. Nous remarquons, après le croisement de ces deux variables, que les étudiants tutorés qui voient dans le tutorat un dispositif d’aide nécessaire à l’université sont également moins nombreux à abandonner les séances de tutorat par rapport à ceux qui le voient comme facultatif (20,3 % contre 50 %).
Tableau 6. « Abandon du tutorat » croisé avec « juger le tutorat nécessaire »
24Dans le même sens, comme le montre le tableau 7, les étudiants tutorés qui sont convaincus de l’apport du tutorat dans la réussite sont proportionnellement moins nombreux à abandonner les séances de tutorat comparativement à ceux qui ne le sont pas (21,8 % contre 66,7 %) :
Tableau 7. « Abandon des séances de tutorat » croisé avec « potentialité du tutorat »
25Les tests du khi-deux et de Cramer (χ² = 13,85, ddl = 2, 100-p = 99,90 ; V = 0,35) montrent que les représentations des étudiants quant aux potentialités du tutorat influent très significativement sur leur taux de présence aux séances de tutorat en présentiel. Les étudiants qui confirment que le tutorat permet de réussir sont proportionnellement moins nombreux à abandonner les séances d’accompagnement.
26L’enquête qualitative exposera les résultats relatifs aux acceptions du tutorat, au recours au dispositif de tutorat et aux facteurs d’efficacité. Il convient de rappeler que nous nous appuyons, à ce niveau, sur les propos recueillis auprès des tuteurs et des étudiants tutorés.
27Nous allons étudier les représentations du tutorat à l’université marocaine selon les acceptions et les objectifs que nos enquêtés attribuent à cette pratique d’accompagnement. Nous analyserons, d’abord, le point de vue des étudiants tuteurs avant de passer ensuite aux perceptions des étudiants tutorés.
28Le tuteur est l’un des principaux acteurs du dispositif de tutorat. Sa représentation de cet accompagnement pédagogique en général et de sa pratique tutorale en particulier influencerait nécessairement l’efficacité de ce dispositif d’aide à la réussite. Les acceptions livrées par les étudiants tuteurs pour définir le tutorat sont variées mais sont souterrainement liées les unes aux autres. D’abord, le tutorat serait un moyen d’action pour lutter contre l’échec et l’abandon à l’université, comme le confirme ce participant : « Le tutorat, je le considère…comme un moyen pour lutter contre l’échec universitaire ». Une autre acception livrée dans le verbatim correspond au pouvoir du tutorat à agir sur les représentations des étudiants à propos des études universitaires. Cet aspect laisserait entrevoir le tutorat en tant que forme de médiation culturelle et interculturelle :
Le tutorat a influencé les représentations des étudiants : on essaie de corriger les représentations qu’ils se font de la vie universitaire, c’est que « la faculté est juste une station de repos en attendant de faire autre chose » […] C’est là où intervient précisément le tutorat, pour expliquer et éclaircir en quoi consistent les études universitaires d’une manière correcte.
29Nous trouvons également dans les propos d’un autre participant cette notion de médiation associée à la transmission de l’information pour qualifier la mission du tuteur : « Le tutorat est défini comme un service gratuit […] Les tuteurs sont des intermédiaires entre l’étudiant qui vient de s’inscrire en première année et le professeur […] on transmet l’information, on facilite l’acquisition de l’information dans le milieu universitaire ». Si les tuteurs définissent le tutorat comme une forme de médiation culturelle à l’université, ils semblent mettre davantage l’accent sur son rôle à favoriser l’intégration des étudiants au milieu universitaire. Selon les déclarations de ce tuteur, le tutorat permet aux primo-entrants de bénéficier de plusieurs services mais également de rencontrer d’autres étudiants et de construire ainsi leur réseau social au sein de l’université : « Le tutorat permet également de connaître d’autres étudiants de la même spécialité ». Les objectifs que peut atteindre le tutorat sont donc multiples. En plus de ceux qui ont été énoncés précédemment, il constitue, selon les propos des tuteurs interviewés, une pratique novatrice dans l’enseignement supérieur. Ce dispositif serait une forme d’innovation pédagogique qui semble rompre avec les méthodes d’enseignement traditionnelles à l’université marocaine : « Ce n’est plus la méthode d’enseignement traditionnelle, ce n’est plus un enseignement dans un amphi comme le professeur, mais on essaie de rapprocher l’étudiant du contenu enseigné avec une nouvelle méthode ».
30Ces définitions permettent de rendre compte des représentations des tuteurs quant au dispositif tutorat. La perception qu’ils ont de cet accompagnement s’articule principalement sur l’aspect médiateur et innovant de cette pratique à l’université marocaine. Les étudiants tutorés partageraient-ils le même point de vue ?
31L’étudiant, considéré comme l’un des principaux acteurs de l’enseignement supérieur, constitue l’élément central de l’accompagnement tutoral. L’analyse de ses représentations concernant le tutorat permet, entre autres, de mieux appréhender ce dispositif d’aide à la réussite dans le contexte universitaire. Les acceptions livrées par les étudiants tutorés pour définir le tutorat sont différentes et variées. Le tutorat serait, d’abord, un moyen d’intégration au sein de l’université, en particulier chez les étudiants de première année. Le nouvel inscrit pourrait ainsi s’intégrer plus facilement et apprendrait mieux l’entraide avec d’autres étudiants :
Oui, nous étions perdus à la fac et le tutorat nous a aidés à nous intégrer grâce aux différentes activités et aux différents ateliers. Le tutorat n’aide pas seulement l’étudiant à s’intégrer mais apprend également aux étudiants à s’entraider et à réviser ensemble, ce qui mène nécessairement à la réussite.
32Le tutorat serait alors un travail d’entraide et de collaboration dans lequel les étudiants s’organisent en groupe pour partager des tâches et travailler sur un objectif commun. Ce travail collaboratif permet, selon les étudiants tutorés, non seulement de mieux comprendre et communiquer mais devient également une source de motivation pour l’ensemble des étudiants : « Durant les séances de tutorat, il ya beaucoup d’énergie, vous comprenez mieux en groupe, il ya de la bonne ambiance et de la motivation. » Dans ce sens, le tutorat de langue serait un mode d’accompagnement favorable à la communication, et au travail de collaboration. Ce travail en groupe semble offrir aux apprenants l’occasion de communiquer, d’interagir et de développer leurs compétences linguistiques. Selon les étudiants qui ont participé à notre enquête, le tutorat est un dispositif d’accompagnement qui favorise la communication et l’acquisition des langues étrangères :
Grâce au tutorat, j’ai pu acquérir de nouvelles d’expressions pour mieux communiquer en anglais. On choisit un thème à débattre et tout le monde participe. Tu commences à avoir de l’audace, apprendre comment interagir, défier la peur pour prendre la parole en public, devant les autres.
De ma part en langue française… je voulais surtout travailler la prononciation parce que nous n’avons pas la possibilité de parler en français, de pratiquer le français…Des fois, tu passes un entretien, un oral ou un entretien, tu te sens bloqué, il ya donc trop de pression, grâce au tutorat je peux pratiquer le français quotidiennement.
33Le tutorat semble être un travail collaboratif qui motive et améliore le processus d’apprentissage, en particulier dans le domaine des langues étrangères. Si les étudiants prenant part à notre enquête paraissent plus enthousiastes à propos du tutorat de langue, ils semblent s’accorder sur le fait que le tutorat méthodologique devrait être provisoire pour aider l’étudiant à développer son autonomie et à apprendre à compter sur lui-même :
Pour moi, le tutorat doit être provisoire, on doit encadrer l’étudiant au début de ses études universitaires les premiers mois seulement, après il doit devenir autonome et compter sur lui-même. Il participe à la réussite des étudiants mais pas à 100 %, il n’est nécessaire qu’au début pour aider les étudiants à s’intégrer.
34Une étudiante souligne, dans le même ordre d’idées, que le tutorat participe partiellement à la réussite de l’étudiant, une réussite qui serait plutôt tributaire de son engagement dans ses études : « Le tutorat oriente, il a un impact sur la réussite de l’étudiant mais pas à 100 %. L’étudiant doit également compter sur lui-même, bien travailler et assister à ses cours. Il ne peut pas compter que sur le tutorat pour réussir. »
35Dans le cas du tutorat à la FLSH d’Agadir, les étudiants tutorés ne sont pas sélectionnés au début de l’année et ne passent aucun test de positionnement. Il suffit d’être inscrit en première année pour bénéficier de l’accompagnement tutoral, comme le déclare ce tuteur : « Le tutorat est destiné à tous les étudiants. Il y a pas de critères de sélection. Pour le soutien pédagogique, l’étudiant doit être inscrit en première année. » Durant les séances de tutorat, l’accompagnement se fait généralement en groupe de 20 à 40 étudiants. Selon les tuteurs prenant part à notre enquête, le taux de présence peut varier d’une séance à une autre avec une augmentation pendant la période des examens : « Oui, un groupe, une vingtaine de personnes » ; « Le nombre… ça dépend de chaque séance, mais normalement, c’est un groupe de 40 étudiants » ; « Le nombre d’étudiants augmente en période d’examens par exemple. » Le degré d’implication des étudiants est jugé de manière favorable par les tuteurs qui semblent s’accorder sur « la conscience et la maturité » des étudiants tutorés. Si telle est l’impression générale, il n’en demeure pas moins qu’il existe des cas d’abandon. Une étudiante tutrice considère ce désistement comme l’un des signes de l’inefficacité de l’accompagnement pédagogique : « L’effectif des étudiants qui assistent est un indice de la réussite de la séance […] s’ils trouvent que le service n’est pas bien, ils n’assisteront plus. »
36Les causes de l’abandon des séances de tutorat sont nombreuses et variées. Les étudiants tutorés qui ont participé au focus group révèlent plusieurs facteurs. Ce non-recours peut être, d’abord, associé à la qualité de l’information qui ne serait pas accessible à tous les étudiants : « mais j’ai pas pu assister à d’autres séances parce je n’étais pas informé du changement de la programmation des séances ». D’autres étudiants affirment que s’ils n’assistent pas aux séances de tutorat, c’est parce que ces séances d’accompagnement coïncident parfois avec la programmation des cours. Une mauvaise planification des séances de tutorat serait à l’origine de l’absence des étudiants tutorés : « La programmation des séances, des fois les séances de tutorat coïncident avec les cours et on ne peut pas y assister ». Un autre participant à notre focus group met l’accent sur la motivation des étudiants. Un apprenant qui se montre engagé et motivé prend, selon ce répondant, spontanément l’initiative de chercher et de diffuser l’information :
Assister ou ne pas assister aux séances de tutorat reste la responsabilité de l’étudiant […] le problème c’est l’étudiant, n’importe qui peut assister et faire circuler l’information à un autre étudiant, c’est un problème de motivation, est-ce qu’on est motivé pour assister ou pas ? J’ai assisté à toutes les séances de tutorat.
37Le non-recours au tutorat serait, par ailleurs, dû à la représentation des étudiants de cette forme d’accompagnement. Les participants au groupe de discussion ont déclaré, presque à l’unanimité, qu’ils ont manifesté une certaine réticence à intégrer le dispositif de tutorat en début d’année :
J’ai presque assisté à toutes les séances. Mais au début j’avais peur d’y participer parce que j’ai cru qu’il faisait partie des factions qui aident les étudiants en contrepartie.
Pour moi, c’était la même idée, j’ai cru que c’était une faction. Personne ne peut venir t’aider gratuitement, je me suis informé auprès de mes amis qui ont déjà assisté à des séances de tutorat et qui m’ont confirmé que cela n’avait rien à voir avec les factions.
- 4 L’université marocaine constitue un espace d’échange intellectuel mais également un lieu de confron (...)
38Ces étudiants croyaient que ce dispositif d’aide à la réussite faisait partie des factions estudiantines à la Faculté des lettres et des sciences humaines4. Ainsi, une information fausse ou imprécise sur cet accompagnement pédagogique serait, en partie, responsable du non-recours au tutorat à l’université.
39Les facteurs livrés par l’ensemble des participants afin d’optimiser l’efficacité du tutorat sont multiples. Les propos des tuteurs montrent que l’efficacité de l’accompagnement tutoral est corrélée à plusieurs facteurs humains. Encourager, valoriser et motiver semblent être, selon cette tutrice, des catalyseurs psychologiques pour les étudiants tuteurs : « Les ressources humaines, les tuteurs doivent être encouragés, être motivés, être positifs, pour travailler et encourager les étudiants. » Dans le même sens, l’efficacité du tutorat serait conditionnée par la qualité du lien social entre le tuteur et l’étudiant tutoré. Si ce mode d’accompagnement fait appel à des connaissances théoriques et méthodologiques, il exige de la part du tuteur la gestion de la dimension socioaffective de l’apprentissage. D’après ce participant, pour que le tutorat soit efficace, il doit, d’une part, répondre aux besoins des apprenants et, d’une autre, instaurer un climat d’empathie et de bienveillance dans un cadre amical :
Parce qu’il y a toujours un contact avec les étudiants. On ne joue pas le rôle du prof, on leur explique que nous sommes leurs collègues, que nous sommes tous pareils sauf que j’ai plus d’ancienneté par rapport à eux. C’est comme ça que je me suis présenté la première fois, j’ai plus de méthodologie, tu dois suivre mes conseils, ce n’est pas obligatoire mais c’est comme si tu avais à la maison un grand frère qui te conseille.
40Les étudiants participant au focus group semblent également mettre l’accent sur le lien social entre le tuteur et les tutorés pour garantir l’efficacité du tutorat. Une étudiante propose, dans ce sens, de programmer « plus d’activités para-universitaires pour développer le lien social entre les étudiants et les tuteurs comme les activités culturelles et sportives ». Un autre facteur livré dans les verbatims s’inscrit dans le contexte organisationnel de ce dispositif d’aide à la réussite. Il s’agit de la qualité de l’information présentée aux primo-entrants à propos du tutorat et de sa mission. C’est ce qui ressort des propos de ce tuteur qui insiste sur la sensibilisation des étudiants à l’importance et aux objectifs de l’accompagnement tutoral : « Pour un tutorat efficace, il faut […] sensibiliser les étudiants à l’importance du tutorat, essayer de les informer, surtout les visiter dans les amphis et leur faire comprendre le vrai sens du tutorat ». Dans ce sens, un étudiant tutoré considère que l’intégration des technologies d’information et de communication (TIC) serait un facteur d’optimisation de l’efficacité du tutorat à travers une meilleure diffusion de l’information. Il propose notamment la mise en ligne d’« une vidéo sur Youtube pour faire connaître le service tutorat de la FLSH Ibn Zohr ». Dans le même ordre d’idées, les étudiants prenant part à notre groupe de discussion semblent s’accorder sur la qualité de l’information comme facteur principal de l’efficacité du tutorat. Selon ces étudiants, une information partielle ou insuffisante peut être à l’origine du non-recours à l’accompagnement tutoral : « Tout le monde doit être au courant du tutorat » ; « Oui, c’est surtout le niveau informationnel qui doit être plus développé ». Par ailleurs, l’engagement de l’ensemble des ressources humaines constituerait une condition sine qua non à l’efficacité de ce dispositif pédagogique. L’administration, les tuteurs et les étudiants tutorés doivent, selon les propos de ces tuteurs, faire preuve d’un haut niveau d’engagement pour un tutorat efficace : « D’abord l’administration, et le tuteur, ils doivent être impliqués, c’est très très important » ; « C’est l’engagement total, l’engagement de la part de l’étudiant et aussi de celui qui gère le dispositif ».
41Afin de favoriser la réussite des étudiants marocains, plusieurs mesures ont été mises en place, notamment le tutorat en tant que dispositif d’accompagnement pédagogique. L’analyse des données quantitatives de notre étude a permis de constater que les étudiants qui sont plus fidèles au tutorat et qui le jugent nécessaire sont ceux qui réussissent le plus par rapport aux étudiants qui l’abandonnent. De nombreux chercheurs, à l’instar de Fornasieri, Lafont, Poteaux et Séré (2003), ont montré, dans le même sens, que les séances de tutorat sont fréquentées par les étudiants qui les jugent utiles, et non par ceux qui sont le plus en difficulté. Quant aux résultats qualitatifs, ils montrent que la participation au tutorat est généralement caractérisée par une perception positive. Les étudiants qui ont recours à ce dispositif confirment qu’il leur a permis d’acquérir la méthodologie du travail universitaire, de mieux s’intégrer à l’université et de construire un réseau d’entraide entre étudiants. Ce travail en groupe dans une ambiance conviviale devient pour eux une source de motivation. Ces résultats corroborent, tout d’abord, ceux de Coulon (2005), selon lesquels pour réussir l’étudiant doit s’affilier et tisser des liens avec les acteurs qui l’entourent. Ils confirment aussi ceux de Romainville (2000), pour qui la réussite des étudiants dépend de leur capacité à s’affilier, à s’approprier leur « nouveau métier » et à identifier des sources de motivation, à l’instar d’un cercle d’amis soucieux de réussir. Nos résultats appuient, de surcroît, ceux de Michaut (2003), selon lesquels ces étudiants qui réussissent grâce au tutorat ont un rapport aux études plus développé. Ils s’investissent davantage pour réussir et atteindre leurs objectifs. En ce qui concerne les étudiants tuteurs, ils perçoivent le tutorat comme une forme de médiation pédagogique avec une approche informelle des activités d’accompagnement. Ces résultats étayent ceux de Baudrit (2000), qui considère les tuteurs comme « des auxiliaires pédagogiques utiles, susceptibles de contrebalancer un excès d’académisme » (Baudrit, 2000, p. 126). Dans ce sens, le tuteur serait un médiateur qui aménagerait et faciliterait la mise en rapport de la culture universitaire avec des étudiants qui auraient, jusqu’alors, échoué à l’assimiler (Rézeau, 2002).
- 5 Il s’agit d’un processus de socialisation et d’une modification des pratiques et des représentation (...)
42Les facteurs d’efficacité mis en avant par l’ensemble des participants paraissent variés mais complémentaires. Nos participants, tuteurs et tutorés, semblent s’accorder sur le fait que le tutorat méthodologique participe partiellement à la réussite de l’étudiant. C’est l’engagement dans les études qui, selon ces enquêtés, détermine la réussite à l’université. Dans ce sens, les recherches de Pirot et De Ketele (2000) ont montré que l’engagement académique des étudiants de première année est un facteur déterminant dans leur réussite. L’efficacité du dispositif de tutorat serait également tributaire des représentations des acteurs impliqués dans cette forme d’accompagnement ainsi que du contexte socioculturel de sa mise en place. Les participants à notre enquête ont initialement associé l’accompagnement tutoral aux factions estudiantines qui s’apparentent à un processus de politisation5 du milieu étudiant à la Faculté de lettres et des sciences humaines d’Ibn Zohr. En tant que mode de socialisation, l’engagement dans les factions politiques d’étudiants correspond, parfois, à un processus d’aliénation des primo-entrants ; les nouveaux inscrits se trouvent contraints, en situation de conflit, de témoigner de leur proximité au groupe et de s’engager sur le plan politique, social et culturel dans des actes menant à des confrontations violentes à l’université (Gourisse, 2011). Le non-recours au dispositif tutoral dans notre contexte est dû principalement à la qualité de l’information, aux représentations des apprenants et à la mauvaise programmation des séances de soutien tutoral. Ce qui nous amène à reconnaître l’apport de l’information à l’optimisation de l’efficacité du dispositif de tutorat (Ben Abid-Zarrouk, 2013).
43Tout au long de cet article, nous avons essayé de rendre compte de l’efficacité du tutorat en contexte marocain à travers la perception de ses acteurs. Nous nous sommes ainsi appuyés sur les données qualitatives et quantitatives collectées lors de notre enquête auprès des étudiants, tuteurs et tutorés, à la FLSH d’Agadir. Compte tenu de ce qui précède, il convient de noter que l’ensemble des participants semblent s’accorder sur l’importance de cet accompagnement pédagogique en contexte universitaire. L’analyse a révélé que le tutorat est un élément significatif dans la réussite des étudiants dans l’enseignement supérieur marocain. Ce dispositif éducatif joue un rôle important dans le soutien pédagogique, la socialisation et l’intégration des primo-entrants dans le milieu universitaire. Après la confrontation des différentes perceptions de nos enquêtés, il paraît que le tutorat est considéré comme un dispositif pédagogique qui impacte positivement la réussite des apprenants, favorisant notamment l’apprentissage des langues étrangères et l’acquisition de la méthodologie du travail universitaire. Cependant, son image en tant que forme de faction au niveau de la perception des étudiants pourrait constituer un facteur de non-recours à ce dispositif dans le contexte universitaire marocain.
44La présente recherche a mis l’accent sur l’un des obstacles qui risquent d’entraver l’efficacité de l’accompagnement tutoral dans l’enseignement supérieur marocain, à savoir les représentations des primo-entrants de ce dispositif éducatif. Le poids de la qualité de l’information dans la pratique du tutorat n’est plus à démontrer. Quel serait alors le rôle de l’enseignant dans les dispositifs de communication développés entre l’institution universitaire et les étudiants à propos de l’accompagnement pédagogique ? Ainsi, serait-il intéressant d’interroger les attitudes et les représentations de ce principal acteur du système universitaire à l’égard de l’accompagnement tutoral au sein de l’université marocaine.
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