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Partages autour d’un référentiel de compétences pédagogiques dans l’enseignement supérieur

Sharing insights on a teaching competency framework in higher education
Nathalie Younès, Marion Sabart et Sophie Serindat

Résumés

Cet article s’appuie sur une recherche collaborative évaluative conduite depuis 5 ans entre deux ingénieures pédagogiques (IP) et une chercheuse en sciences de l’éducation et de la formation à propos d’un dispositif institutionnel de formation pédagogique des enseignant.es chercheur.es obligatoire. Dans une perspective d’évaluation écologique, il est plus spécifiquement étudié dans quelle mesure un référentiel de compétences, coconstruit au cours de cette recherche collaborative, devient un objet frontière entre les parties prenantes du dispositif de formation : à la fois opérateur d’une évaluation-régulation du dispositif de formation et des compétences des différentes parties prenantes impliquées, et outil de recherche pour caractériser les processus coopératifs et créatifs, par lesquels des personnes d’univers socio-professionnels différents, réussissent à se coordonner pour conduire une évaluation-régulation écosystémique. La recherche met en évidence les évolutions du référentiel de compétences et de son usage comme autant d’indicateurs de ces processus en lien avec le développement professionnel des IP auxquels ils contribuent et que celui-ci renforce. Elle permet de réinterroger la notion d’objet-frontière à l’interface du praxéologique et du scientifique.

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Texte intégral

Introduction

1Après des décennies de débats critiques sur la qualité de l’enseignement universitaire, une formation pédagogique des néo-maitresses et maitres de conférences est désormais obligatoire au cours de leur première année d’exercice correspondant à l’année de stage. Instituée par décret en 2017 (JORF, Décret n° 2017-854 du 9 mai 2017 et arrêté n° 0054 du 6 mars 2018), comme souvent en France, cette évolution récente s’inscrit dans une politique plus globale de valorisation de la qualité de l’enseignement universitaire se traduisant par un ensemble de dispositifs et de démarches : mise en place de services d’appui à la pédagogie, évaluation de l’enseignement par les étudiants, soutien aux projets d’innovation pédagogique et plus récemment congé pour projet pédagogique, en parallèle du congé pour recherches ou conversions thématiques (CRCT) existant depuis 40 ans (Denouël, 2023).

2Cette politique survient dans un milieu professionnel complexe et multidimensionnel définissant pour chacun de multiples contextes de pratiques renvoyant à une discipline d’appartenance, à des réseaux de socialisation particuliers, à un contexte d’enseignement et de recherche local. Ce milieu se caractérise par de fortes tensions s’exerçant entre les différentes missions des enseignants-chercheurs, pris entre les exigences de la recherche, celles de l’enseignement et les tâches administratives afférentes toujours plus nombreuses (Dreyfuss et Rascol-Boutard, 2023 ; Paivandi et Younès, 2019 ; Fave Bonnet, 2003). La formalisation d’un référentiel de compétences national, fruit d’un processus réunissant au niveau national les différentes parties prenantes de l’enseignement supérieur (MESRI, 2019), vise à fournir un cadre structurant tant pour l’évaluation que le développement professionnel des enseignants-chercheurs. Il montre bien le foisonnement des attendus.

  • 1 IP = ingénieure pédagogique, CP = Conseiller pédagogique (dénominations interchangeables pour certa (...)

3Avec l’introduction de la formation à la pédagogie comme une nouvelle prescription, une tension supplémentaire vient s’exercer entre la culture pédagogique généraliste portée par les IP/CP (Ingénieur.es pédagogiques/ Conseiller.es pédagogiques)1 des services d’appui à la pédagogie et les cultures disciplinaires des EC (enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheuses) et des départements universitaires dans leur diversité (Crosse, 2023).

4Comment dès lors évaluer un dispositif de formation à l’enseignement destiné aux nouvelles et nouveaux MCF ? Etant donné la complexité des liens entre les évolutions des contextes et les évolutions des pratiques, il serait illusoire de croire qu’une méthode simple et unique puisse suffire à établir des indicateurs indiscutables de l’impact d’un tel dispositif appréhendé comme une procédure fixe. La démarche évaluative mise en œuvre vise plutôt à activer des méthodes synergiques selon un cadre théorique que nous présentons dans la première partie de ce texte qui s’attache plus particulièrement à rendre compte des transformations à l’œuvre dans la vie d’un dispositif de formation-accompagnement particulier. Inscrite dans une perspective d’évaluation écologique, sensible aux inter-relations transformatives in situ, entre les personnes, les dispositifs et les milieux (Younès, 2013, 2020), cette démarche évaluative donne une large place aux hétérogénéités, fluctuations, divergences, tensions et co-constructions entre parties prenantes (Younes et al., 2022).

5Cet article s’appuie sur une recherche collaborative évaluative (RC) conduite depuis 5 ans entre deux ingénieures pédagogiques et une chercheuse en SDEF à propos du dispositif institutionnel de formation pédagogique des enseignant.es chercheur.es, devenu obligatoire lors de la première année de leur recrutement à l’université. Il est plus spécifiquement étudié dans quelle mesure un référentiel de compétences coconstruit au cours de cette recherche collaborative devient un objet frontière (Star, 2010) entre les parties prenantes du dispositif de formation : à la fois opérateur d’une évaluation-régulation des compétences et du dispositif de formation et outil de recherche afin de caractériser les processus coopératifs et créatifs, par lesquels ces acteurs, appartenant à des univers socio-professionnels différents réussissent à se coordonner pour conduire une évaluation-régulation écosystémique. L’enquête s’attache ainsi à identifier les évolutions du référentiel de compétences et de son usage comme autant d’indicateurs de ces processus coopératifs et créatifs, en lien avec le développement professionnel des IP/CP auquel ils contribuent et que celui-ci renforce.

Perspective écosystémique, transformative et émancipatrice

6L’écosystème de l’évaluation écologique rejoint une perspective d’évaluation émancipatrice et capacitative individuelle et collective, visant à offrir des marges de manœuvre et de sens à la fois par des méthodologies et des formes de participation situées renvoyant également à un ethos de la collaboration (Younès, 2020, 2024). C’est une évaluation qui considère à la fois les orientations translocales des politiques, des technologies, des outils et des cultures mais aussi la spécificité de chaque situation locale et des parties prenantes impliquées. Une telle optique amène à interroger tout particulièrement la complexité et les caractéristiques des dispositifs ainsi que des partages et des engagements en jeu, étant donné la nécessité de tenir compte des expériences situées à la fois dans des milieux singuliers et aussi dans des trajectoires institutionnelles et personnelles. Ceci requiert de travailler à différents niveaux d’analyse et d’interrelations à tisser ensemble tout en prenant en compte les convergences et divergences qui apparaissent. En tendant à mettre en interaction les différentes strates d’évaluation (quantitative, qualitative, participative), l’évaluation écologique participe à la création d’un écosystème formatif adaptatif, propice au développement professionnel des différentes parties prenantes impliquées, en l’occurrence dans cette recherche, des néo-MCF (nMCF) accompagné.es et des CP accompagnatrices. Dans cet article, le choix est fait de se centrer plus particulièrement sur les regards des CP qui sont les conceptrices et les porteuses du dispositif de formation-accompagnement de l’université (DFAU) sachant que les IP qui s’engagent dans la RC, le font, au-delà de sa visée d’évaluation du DFAU, dans une perspective de développement professionnel.

7Comme la plupart des concepts des SHS, le développement professionnel n’est pas un concept univoque (Uwamariya et Mukamurera, 2006). Sa définition en termes de "transformations individuelles et collectives des identités et des compétences mobilisées dans ou mobilisables dans des situations professionnelles " (Barbier et al., 1994 ; Jorro, 2013), laisse ouverte la question de la nature et des moteurs de ces transformations dans des contextes de recherche et/ou de formation mettant l’évaluation au cœur de ces dispositifs de développement professionnel.

8La recherche en évaluation a démontré l’importance et la difficulté des processus de référentialisation ou coconstitution référentielle entre les parties prenantes d’un dispositif d’évaluation qui ne partagent pas a priori les mêmes référents ni en termes d’objectifs, ni en termes de connaissances, ni en termes de pratiques et de méthodes. Un champ de travaux conséquent des sciences de l’éducation et de la formation a conceptualisé des méthodologies participatives pour opérationnaliser des formes de collaboration dans l’évaluation. Dans le cas des recherches-interventions participatives, l’accent est mis sur une double validation, sociale et scientifique des résultats situés ainsi produits (Marcel 2020). Dans le cas des recherches collaboratives, les logiques de l’action et les logiques de la recherche sont articulées via des dynamiques de co-situation, coopération et coproduction (Desgagné et al., 2001).

9Émergeant des recherches empiriques sur les processus de collaboration dans une perspective d’écologie institutionnelle, le concept d’objet-frontière (Star, 1988 ; Star et Griesemer, 1989) apparait tout particulièrement pertinent à mobiliser dans le cas des recherches collaboratives évaluatives qui s’appuient sur l’étude des processus de référentialisation à la base de la construction d’une culture commune. En effet, Star et Griesemer (1989) désignent comme des objets-frontières, des artefacts suffisamment flexibles pour être interprétés différemment par chacune des parties prenantes, mais aussi suffisamment stables pour constituer un référent commun. Ils inscrivent ce concept dans une « écologie institutionnelle », soit le réseau complexe et dynamique d'interactions entre divers groupes et parties prenantes au sein d'une institution, qui doivent cohabiter en faisant avec leurs différences tout en contribuant à la cohésion et au fonctionnement global de l'institution. Selon Akkerman et Bakker (2011), les objets-frontières sont des outils puissants pour faciliter la collaboration entre disciplines et promouvoir l'apprentissage. Leur flexibilité et leur capacité à être adaptés à différents contextes sont essentielles pour surmonter les barrières entre différentes communautés de pratique. Roblez (2025) en souligne la valeur heuristique dans le cas d’une recherche intervention évaluative.

Spécificités d’un dispositif de formation pédagogique des enseignants et enseignantes universitaires

10Les retours d’expérience et les enquêtes montrent que les modalités de mise en œuvre de la formation pédagogique des MCF stagiaires sont variables en fonction des établissements (Bougoin, 2019 ; Capet, 2019 ; Herlicq & Maridet, 2019 ; Toulgoat, 2019 ; Cassignol et al., 2022). La politique de l’université investiguée est très proche de l’arrêté national qui est à la fois cadrant et limité en termes de prescription (ni des objectifs de compétences ni des modalités de formation ne sont définis). Elle institue une formation obligatoire la première année correspondant à 32 h de décharge du service d’enseignement pour une formation effective de 41 h. Le dispositif proposé est porté par le service de formation des personnels pour la partie réglementaire, et le service d'appui à la pédagogie en assure la mise en œuvre opérationnelle. Une autre spécificité locale est la création d’une charge de mission à destination d’une enseignante chercheuse en sciences de l’éducation et de la formation pour la conception, la mise en œuvre et le suivi du dispositif.

Constituants initiaux du dispositif

11Ce dispositif de formation-accompagnement évolue au fil du temps mais il est structuré autour d’un certain nombre de constituants spécifiques fondamentaux :

Un accompagnement personnalisé

12Les ingénieures pédagogiques du pôle qui assurent un accompagnement personnalisé de chaque maitre ou maitresse de conférences lors de son année de stage ont alors un rôle de conseillère pédagogique. Cet accompagnement se réalise principalement par des entretiens-conseils en présence ou parfois à distance, des échanges de mails et de la documentation. Ces temps d’entretien sont comptabilisés dans le volume de formation.

Une formation à la carte avec des modalités variées

13Hormis les temps collectifs et individuels obligatoires, le nMCF construit son programme de formation "à la carte" en fonction de sa situation personnelle et de ses besoins. Les modalités de formation-accompagnement se déclinent au choix sous différents formats : séminaires collectifs, ateliers de formation, MOOC, auto-formation, lecture de chapitres d'ouvrage et d'articles scientifiques, conférences.

Des temps individuels et des temps collectifs

14L’ensemble alterne entre des temps d’accompagnement et de formation individuels et collectifs pour favoriser les échanges et la construction d’une culture commune de la pédagogie.

Différentes modalités d’évaluation

15L’évaluation est un constituant à part entière du dispositif de formation-accompagnement. Elle se réalise à travers des modalités et des dispositifs divers : une demi-journée de bilan rassemblant les CP et les nMCF ; des questionnaires en ligne à destination des nMCF ; des séances de développement professionnel entre ingénieurs pédagogiques (conseil collégial, partage de pratiques) comme par exemple, la réunion support de l’analyse présentée dans cet article, animée par le collectif de la RC.

Un dispositif de formation-accompagnement en continuelle adaptation

16Il s’agit d’un dispositif en continuelle adaptation. Les transformations majeures identifiées se situent dans les modalités individuelles ou collectives de l’accompagnement, dans l’enrichissement de l’offre de formation à la carte et dans l’évolution de l’usage du référentiel de compétences pédagogiques des EC.

Modalités individuelles ou collectives de l’accompagnement

17La modalité d’accompagnement individuel qui est un pilier du dispositif a été ponctuellement abandonnée au profit d’un accompagnement collectif, en 2022/2023, année où le nombre de MCF recrutés a fortement augmenté passant de plus ou moins 15 à 27 (Tableau 1).

Tableau 1 : nombre de nMCF et de conseillères pédagogiques impliquées dans le dispositif par année universitaire

Année

nMCF

Conseillères pédagogiques

2017-2018

12

5

2018-2019

16

6

2019-2020

18

7

2020-2021

15

8

2021-2022

7

6

2022-2023

27

10

2023-2024

26

5

18Ce choix adaptatif contingent guidé par une logique quantitative a entrainé également une augmentation du nombre d’IP impliquées dans l’accompagnement. Cependant, suite à l’évaluation de fin d’année, il a été décidé que l’accompagnement serait de nouveau individuel en 2023, et ce alors que le nombre de nMCF restait constant et que le nombre d’IP impliquées dans le dispositif diminuait. Ainsi si le nombre de nMCF recrutés a pu être un facteur déterminant dans le passage à un accompagnement collectif à un moment particulier de la vie du dispositif, l’évaluation du dispositif a entrainé un choix collectif en faveur de l’accompagnement individuel et des repositionnements des IP qui n’étaient pas toutes à l’aise dans cette fonction. Certaines IP ont ainsi accepté d’accompagner jusqu’à 7 nMCF alors que d’autres ont abandonné cet accompagnement.

Enrichissement de l’offre de formation à la carte

19L’offre de formation évolue d’année en année avec l’ajout de modalités de formation. A ce jour on distingue :

  • Des ateliers de formation thématiques, réalisés en interne, généralement d’une durée de 2 à 3h. Ces ateliers de formation concernent principalement les compétences centrales de l’activité d’enseignant : concevoir des enseignements favorisant l’apprentissage actif, piloter et soutenir l’activité d’apprentissage, évaluer les apprentissages, en présentiel et à distance.

  • Des ateliers d’autoformation en ligne proposés par différentes universités ou des MOOCS. On constate une nette augmentation de ces nouveaux dispositifs formatifs. Au démarrage en 2018, seul le MOOC « Se former pour enseigner dans le supérieur » piloté par le ministère (Delalande et al., 2019) était proposé aux nMCF. Aujourd’hui une dizaine de MOOCS en français ont été repérés et font partie des possibilités offertes.

  • Des cafés pédagogiques envisagés comme des temps d’échanges dans la communauté enseignante d’1h30 à 2h., parfois sous la forme de retours d’expériences de collègues ont été progressivement mis en place au sein de l’université. Certains sont organisés spécifiquement à destination des nMCF.

  • Des observations de cours selon deux formes : 1/ observation par le ou la nMCF d’un.e enseignant.e expérimenté.e (en général son tuteur ou sa tutrice) ; 2/ le ou la nMCF est observé.e durant une séance de cours. Ce dispositif à visée collaborative consiste à lui fournir un feedback sur son enseignement suite à une observation ciblée réalisée par une CP et donnant lieu à un debriefing. Ce dispositif peut être complété par la mise en œuvre d’une démarche d’évaluation de l’enseignement par les étudiants. La première forme est plus souvent choisie que la seconde qui pourtant est jugée profitable tant par les nMCF qui l’ont pratiquée que par les CP qui les ont réalisées.

  • Des lectures et conférences pour lesquelles un écrit réflexif rédigé par le ou la nMCF est remis à son accompagnatrice. Il permet d’alimenter les échanges

  • La participation à des colloques et des séminaires en lien avec la pédagogie du supérieur, est également une possibilité ouverte, mais rarement choisie à ce stade de la carrière.

20Toutes ces modalités permettent de valider des heures de formation selon une équivalence définie.

21Les sources à l’origine de ces évolutions sont diffuses. Il s’agit à la fois de l’offre de formation pédagogique qui s’accroît d’année en année que ce soit en interne ou de manière externe. Les MOOCS sont ainsi de plus en plus plébiscités par les nMCF dans leurs choix de formation, une tendance intéressante à questionner. D’autres propositions comme l’observation de cours sont directement issues de l’analyse des besoins de formation réalisée dans le cadre de l’évaluation continue du dispositif. Il s’agit alors de dispositifs directement créés pour les nMCF qui sont ensuite aussi proposés plus largement à la communauté enseignante de l’université.

Méthodologie de la recherche collaborative évaluative menée sur trois années

22La recherche collaborative est menée depuis cinq ans entre deux ingénieures et conseillères pédagogiques et une enseignante-chercheuse en sciences de l’éducation et de la formation. Les trois sont parties-prenantes du dispositif de formation-accompagnement de l’université en question (DFAU) en ayant participé à sa conception, en assurant des formations et des accompagnements des enseignants-chercheurs, en étant impliquées dans l’évaluation et l’évolution de ce dispositif. L’une des ICP est actuellement responsable du DFAU. Les différentes protagonistes se connaissent de longue date, les deux ICP ayant suivi le Diplôme d’Université dédié à la pédagogie universitaire porté par l’enseignante chercheuse dans les années 2010 et depuis mené ensemble plusieurs projets ce qui constitue un terreau propice à la collaboration. De plus étant donné leurs positions dans le DFAU, chacune en connait les évolutions de l’intérieur et participe au portage de son évaluation continue. Dans le cadre de la RC évaluative, elles se mettent d’accord sur les objets d’investigation, les méthodes d’enquête et d’analyse ainsi que sur les supports de communication scientifique.

Trois étapes interdépendantes ont structuré la RC 

Etape 1 – Catégorisation des objectifs des nMCF

  • 2 PenSERA est le Réseau des accompagnateurs pédagogiques de l'enseignement supérieur en Auvergne-Rhôn (...)

23Une focalisation sur les objectifs prioritaires que se fixent les nMCF dans le cadre du DFAU est apparue importante pour, dans une visée d’évaluation, mettre en lien ces objectifs et le dispositif de formation-accompagnement proposé. Les trois protagonistes ont classé les objectifs des nMCF (sur deux années) chacune de leur côté, sans se mettre d’accord sur une grille commune afin de mettre en évidence les référents initiaux de chacune. Quatre « référentiels » ont ainsi émergé : une IP a utilisé le référentiel PenSERA (2019)2, une IP a utilisé le référentiel du Ministère (MESRI, 2019), la chercheuse a utilisé ce que nous avons nommé un « référentiel incorporé », c’est-à-dire qu’elle a classé les objectifs définis selon une démarche ascendante rejoignant des catégories conceptuelles largement partagées dans le champ de la pédagogie universitaire (étudiants actifs, gestion de classe, motivation des étudiants, conception des activités d’enseignement-apprentissage, gestion de l’hétérogénéité, évaluation des apprentissages, évaluation de l’enseignement, approche par compétences, développement professionnel). Il est rapidement apparu que les objectifs des nMCF n’étaient pas tous intégrables dans le référentiel PenSERA ce qui a conduit les IP à se tourner vers des ouvrages de référence en pédagogie universitaire (Berthiaume et Rege Colet, 2013, 2014). Ces divergences ont suscité des questionnements concernant la valeur des objectifs au regard des contextes dans lesquels ils sont définis, le rapport entre les objectifs et la grille de positionnement utilisée alors par certaines CP (PenSERA, 2019), les préoccupations pédagogiques des MCF pendant cette année de stage mais aussi les préoccupations absentes, en particulier l’apprentissage étudiant. Ces échanges et questionnements ayant été perçus comme source de développement professionnel par les IP participantes à la RC, elles ont souhaité les élargir à l’ensemble du groupe des CP, ce qui a donné lieu à l’étape 3.

Etape 2 – Élaboration d’un référentiel local adapté

24Un référentiel « local » a ensuite été élaboré sur la base d’un consensus entre les protagonistes de la RC quant aux différents domaines couverts par les objectifs des nMCF en lien avec les référentiels mobilisés. Ce référentiel a été formalisé en cohérence avec l’approche par compétences soutenue dans l’établissement fondée sur le cadre de Tardif (2006) par une des ICP (la responsable du DFAU).

Etape 3 – Partage du référentiel produit dans la RC

25La troisième étape de la RC a pris la forme d’un séminaire de développement professionnel des CP conçu selon un dispositif isomorphe et réduit des précédentes étapes de la RC. Dans un premier temps, elles ont été invitées à une réflexion collective sur l’usage d’un référentiel de compétences dans l’accompagnement. Cette réflexion a été conduite à partir d’un questionnaire individuel via l’utilisation d’un système interactif de rétroaction à usage synchrone (Detroz et Younès, 2024). Ce système consiste à poser des questions dans un diaporama et à recueillir et traiter numériquement instantanément les réponses des participant.es, qui peuvent ensuite être visualisées et discutées collectivement. Les questions portaient sur la perception du dispositif de formation, l’usage du référentiel de compétences, leur sentiment de compétence sur les différentes compétences du référentiel, les éléments plus spécifiquement accompagnés. Un second temps visait la coconstitution d’un référentiel partagé à partir de l’utilisation du référentiel coproduit pour identifier l’accompagnement conduit par chaque IP.

Mise en synergie du quantitatif, du qualitatif et du participatif dans l’analyse des données

26Les analyses sont appuyées sur un recueil de données multiples :

  • la documentation institutionnelle concernant la politique de formation obligatoire et le DFAU,

    • 3 La description du dispositif évolue dans ces différentes communications témoignant ainsi des transf (...)

    les traces de la RC évaluative menée durant ces cinq ans notamment les communications réalisées durant ces trois années (Younès et al. 2020, 2022a et b)3,

  • les objectifs définis par les nMCF dans le cadre du DFAU et répertoriés dans l’espace numérique dédié,

  • les référents mobilisés pour la catégorisation des objectifs et collectés dans les comptes-rendus de réunion de la RC,

  • le compte rendu de la réunion organisée avec les CP non participantes à la RC afin de partager et mettre à l’épreuve le référentiel de compétences coconstruit,

  • les points de vue des CP non participantes à la RC recueillis via un questionnaire.

27Ces données principalement qualitatives mais aussi quantitatives, ont donné lieu à des analyses qualitatives conjointes pour produire les résultats décrits ci-après. Les documents rassemblés dans l’espace numérique de travail ont été lus et analysés par les trois protagonistes de la RC qui ont comparé leurs analyses et se sont mises d’accord sur les éléments significatifs à considérer au regard des objectifs de l’enquête.

Résultats de la recherche collaborative

28Trois principaux résultats sont identifiables à l’issue de cette RC en lien avec l’objectif de décrire, comprendre et expliquer les transformations du référentiel des compétences pédagogiques et de son usage dans la formation pédagogique des nMCF à leur entrée dans le métier : la production d’un référentiel de compétences adapté et validé collectivement, la mise en évidence d’un accompagnement différencié des compétences d’enseignement, et l’évolution de l’usage de ce référentiel.

Un référentiel redéfini dans la RC et validé collectivement

29Le référentiel de compétences local rédigé à l’issue des étapes 1 et 2 par une IP en référence à l’APC selon Tardif (2006) et validé collectivement lors de la réunion de l’ensemble des IP/CP impliquées dans le DFAU (étape 3) reprend les trois compétences du référentiel PenSERA, directement reliées à l’activité d’enseignement : concevoir un dispositif de formation, piloter les activités d’apprentissage et évaluer les apprentissages. Deux autres compétences ont été ajoutées soulignant l’importance, dans le métier, de la dimension individuelle et de la dimension collective, écosystémique du développement professionnel. Il s’agit d’une part de la compétence : « se développer en tant qu’enseignant du supérieur », d’autre part de la compétence : » Participer au développement de l’enseignement du supérieur ».

Figure 1 : Le référentiel de compétences coconstruit

Figure 1 : Le référentiel de compétences coconstruit

Mise en évidence d’un accompagnement inégal des différentes compétences

30L’enquête conduite auprès des CP a permis de faire émerger un accompagnement inégal de ces différentes compétences (Fig. 2).

Figure 2 : accompagnement inégal des compétences des nMCF

Figure 2 : accompagnement inégal des compétences des nMCF

31Les compétences « concevoir un dispositif de formation » et « piloter les activités d’apprentissage » sont les plus accompagnées. La compétence « Évaluer les apprentissages » est relativement bien moins accompagnée. La compétence « Participer au développement de l’enseignement du supérieur » est très peu accompagnée (moins de 2 % de l’accompagnement).

  • 4 Lors de la session introductive du DFAU, il est demandé aux MCF, à l’aide du même système numérique (...)

32Un accord est rapidement intervenu quant au caractère approprié, en cette première année de formation, sur la nécessité de mettre l’accent sur le développement des compétences professionnelles cœur de métier propres à l’EC. Ainsi il a été jugé que la part minime dévolue à la compétence « participer au développement de l’enseignement supérieur » était justifiée. En revanche le constat du faible accompagnement de la compétence évaluative a interrogé. S’agissait-il d’une adaptation des CP aux préoccupations des nMCF qui n’expriment pas le besoin de développer cette compétence a contrario des compétences de conception et de pilotage ainsi qu’en témoigne l’enquête conduite en début d’année leur demandant de classer leurs préoccupations ?4 ou s’agit-il d’un déficit de compétences des CP dans ce domaine ? Le sondage conduit auprès des CP montre qu’en effet, celles-ci se jugent moins compétentes pour accompagner la compétence évaluative que les compétences relatives à la conception et au pilotage de l’enseignement (Fig 3). De plus, les accompagnatrices déclarent pour la plupart avoir « peur d’être embarquées sur des sujets qu’elles ne maitrisent pas » (Fig. 4).

Figure 3 : maitrise relative par les CP des différentes compétences du référentiel

Figure 3 : maitrise relative par les CP des différentes compétences du référentiel

Figure 4 : peur d’être embarquée sur des sujets non maitrisés

Figure 4 : peur d’être embarquée sur des sujets non maitrisés

33Ces constats partagés ont conduit à la décision d’étoffer l’offre de formation en matière d’évaluation des apprentissages et des enseignements contribuant ainsi au développement des compétences des CP sur ces thématiques.

Évolution de l’usage du référentiel d’une grille d’autopositionnement à un support de réflexion individuel et collectif partagé

34Si toutes les CP ont déclaré utiliser le « référentiel PenSERA » au début et à la fin de l’accompagnement, 7/10 l’utilisaient comme un outil d’autopositionnement, alors que 3/10 s’en servaient comme un support d’inspiration pour la définition d’objectifs par les nMCF. 2 présentaient aussi le référentiel du ministère. L’enquête a fait ressortir un certain malaise face à l’usage de la grille comme un outil d’autopositionnement pour des raisons renvoyant à des difficultés symétriques. D’une part la difficulté des nMCF à comprendre un outil en décalage avec leurs connaissances et leur culture de l’enseignement, à s’autoévaluer et identifier des progrès, sentiment d’infantilisation. D’autre part, les difficultés des CP à accompagner les nMCF dans l’utilisation de cet outil, à guider le diagnostic des besoins, à faire face au décalage des temporalités et des postures.

L’objet-frontière en discussion

35Les résultats de cette RC permettent de réinterroger la notion d’objet-frontière à l’interface du praxéologique et du scientifique. En effet, la double finalité affichée des RC pose la question d’une double validation sociale et scientifique des résultats produits (Marcel, 2020). La validation sociale « renvoie à l’utilité perçue pour l’action ou la décision par le contexte socioprofessionnel des savoirs élaborés » (Marcel, 2020), alors que la validation scientifique est opérée par les pairs qui vérifient la pertinence, la rigueur et la portée de la recherche sur le plan des connaissances produites. La validation considérée dans une dynamique de processus écologique est en résonnance avec les travaux de recherche qui explorent l’importance à accorder aux modalités d’ouverture et de réflexivité. Ainsi Lather (1993, 2006) qui invite à penser la validation dans une orientation réflexive et dans une perspective qualitative, réinterroge les résultats de recherche eux-mêmes, afin d’identifier les limites de la validité des interprétations produites, dans une démarche refusant la complétude et favorisant la diversité. Lather parle de « validité derridienne, rhizomique, avec des relais, des circuits, des ouvertures multiples » (1993, p. 680), de validité « profondément située et partielle, associant éthique et épistémologie via des pratiques d’engagement et de self réflexivité » (p. 686). L’une des implications de cette reconsidération du concept de validité repose sur la prise en compte nécessaire des conséquences attendues mais aussi inattendues des recherches.

36Une précédente étape de la RC avait mis au jour les tensions émergeant d’une part des différents référentiels de compétences des enseignants-chercheurs mobilisés qui ne se recouvraient pas complètement et d’autre part de l’usage d’une grille d’autopositionnement invitant les nMCF à situer leurs compétences pédagogiques dans un but formatif pouvant être perçu comme normatif (Younès et al. 2022). Ces résultats invitaient à la poursuite du processus de référentialisation entrepris dans la RC au cours de la catégorisation des objectifs pédagogiques définis par les nMCF et à son élargissement à l’ensemble des CP impliquées dans la mise en œuvre du dispositif de formation-accompagnement.

37L’utilisation de référentiels de compétences des CP est une approche à visée de développement professionnel des CP (i.e. les accompagnants), classiquement utilisée (Blondeau et al., 2012 ; Gagnon, 2010 ; Houle & Pratte, 2007). L’originalité de notre recherche collaborative, repose sur le fait que c’est le référentiel de l’enseignant du supérieur (i.e. l’accompagné) qui a constitué une opportunité de développement professionnel pour les CP à trois niveaux : au niveau des trois protagonistes de la RC, au niveau individuel des CP parties prenantes du DFAU, au niveau collectif du service d’appui à la pédagogie qui se dote d’un référentiel partagé comme nouvel outil structurant de ses activités. En effet, l’élaboration et l’utilisation d’un référentiel de compétences de l’enseignant du supérieur ont été l’occasion de prendre du recul, d’adopter une posture réflexive sur ses pratiques d’accompagnement des MCF stagiaires. Cela a permis aux CP de prendre conscience de leurs lacunes sur certaines thématiques en termes d’accompagnement et de formation (notamment sur l’évaluation des apprentissages). Cette prise de conscience a suscité le besoin de développer leurs expertises et de concevoir différentes modalités de formation sur ces thématiques (pédagogie et évaluation inclusive, évaluation de l’enseignement par les étudiants, approche par compétences…). Des expertises spécifiques se sont progressivement constituées chez les CP qui se sont chacune spécialisées sur l’un de ces thèmes. De manière générale, la culture de la pédagogie universitaire s’est renforcée dans la pratique de l’accompagnement, permettant des accompagnements plus ciblés prenant en compte les contextes et les conditions particulières des nMCF.

38La RC a ainsi permis d’élaborer un référentiel partagé approprié et d’ancrer un usage formatif de ce référentiel. La prise de conscience collective par les accompagnatrices des manques en matière d’accompagnement sur certains thèmes de pédagogie universitaire et d’une dérive normative dans la mise en œuvre du dispositif de formation accompagnement, est une forme d’émancipation vis-à-vis des logiques qui pilotent les pratiques à l’insu des intentions visées. Cette émancipation se traduit par un rapport plus flexible à l’accompagnement et par une articulation du référentiel et du dispositif de formation-accompagnement dans une logique formative permettant d’orienter et de réguler les actions. Approprié, le référentiel devient un outil de réflexion et de construction en évolution et non plus de positionnement normatif vis-à-vis de critères qui ne font pas sens pour toutes les parties prenantes. Le sens partagé se construit à travers un usage progressif et incarné du référentiel. Une acculturation progressive partagée au référentiel et à son vocabulaire se réalise ainsi dans le temps dans l’inscription plus nette des activités du dispositif de formation-accompagnement en lien avec le référentiel et son usage au cours de l’accompagnement. Les séances d’échanges sur les pratiques d’accompagnement entre les CP, telles qu’elles existent à ce stade sont fondamentales pour établir cette culture du partage. Mais leur nourrissage par les apports de la recherche sont également nécessaires de même que pour le développement des compétences des accompagnatrices. Le référentiel de compétences s’est donc transformé à chaque point de rencontre de compétences professionnelles plurielles, des politiques nationales et des adaptations locales.

39L’impact opérationnel effectif de la RC est à mettre en perspective avec une démarche ancrée sur cinq années et des coopérations plus anciennes. Cela touche à la fois à l’acceptation par l’équipe de rythmes et d’objectifs différenciés et à une configuration commune ouverte à des géométries variables. Toutefois un écart est à relever quant à l’appropriation du modèle théorique et méthodologique de l’évaluation écologique qui sous-tend la RC. Le modèle n’a pas été repris en tant qu’objet partagé par les IP qui ont des objectifs pragmatiques et considèrent qu’il s’agit de la partie dévolue à la chercheuse. Comme le soulignent Freney et al. (2010), l’appropriation des concepts et des méthodes des sciences de l’éducation et de la formation, nécessaires pour l’exercice du métier de CP peut se révéler ardue (si ce n’est décevante) particulièrement dans les cas nombreux où la formation universitaire des CP n’est pas inscrite dans cette discipline.

40Par contre il est à noter que la visée de résultats à portée scientifique est limitée par des objectifs d’efficacité immédiate. Un écart est à constater entre les validations sociale et scientifique sans que cela ait suscité des différends affectant le fonctionnement de l’équipe. Une tolérance mutuelle pour l’univers de chacune s’est établie avec toutefois le risque que la chercheuse ait adopté une posture donnant une priorité aux objectifs praxéologiques. Ceci étant, le climat de confiance établi au fil du temps portait la possibilité des expressions et attentes diverses.

41Dans les conditions de cette RC, il a été mis en évidence comment un référentiel de compétences coconstruit pouvait constituer un objet-frontière fructueux tant pour la recherche que pour la régulation du DFAU et le développement professionnel des IP/CP. Elle ne dit pas grand-chose de ce qu’il en est du point de vue des nMCF accompagnés. Dans quelle mesure le référentiel s’avère-t-il un outil pertinent pour le développement professionnel des nMCF ? Dans quelle mesure les savoirs issus de la RC irriguent-ils les pratiques de l’accompagnement ? Amènent-ils à d’autres dérives comme par exemple, orienter les nMCF vers ses propres intérêts ? En définitive, le référentiel de compétences coconstruit joue-t-il vraiment un rôle d’objet-frontière entre les CP et les nMCF ? Au regard des difficultés et des critiques que rencontre l’approche par compétences (Tardif, 2006 ; Van Der Maren et Loye, 2012), la question est largement ouverte à de nouvelles investigations tant du côté des CP que de la communauté enseignante.

Conclusion

42La recherche collaborative a permis d’activer des synergies entre la recherche et les pratiques pour que les deux se développent tout en alimentant une grande partie des évolutions du dispositif de formation. L’enquête évaluative, par la mise en relation des différents points de vue des CP et des nMCF dans la RC, amène à une réflexion qui n’épuise pas l’explication des phénomènes mais permet de les conscientiser et d’en tirer des pistes d’action consécutives : ici un travail collaboratif entrepris pour faire l’inventaire des ressources disponibles pour le développement professionnel des accompagnatrices sur les compétences les moins maîtrisées et une redéfinition de l’usage du référentiel. Le référentiel coconstruit est aussi devenu un élément cadrant du dispositif de formation-accompagnement utilisé dès la journée d’accueil des nMCF et les premiers entretiens conseils ainsi que pour la conception d’ateliers d’échanges structurés autour des compétences pédagogiques clés du référentiel, une évolution du DFAU dans laquelle le référentiel a pris une place significative. Le référentiel de compétences coproduit dans cette RC se constitue ainsi comme un objet-frontière facilitant la collaboration entre les différentes communautés de pratiques des CP et des EC, ainsi que l’apprentissage et le développement de leurs compétences et identité professionnelles mais aussi comme élaboration d’un milieu commun. L’étude de son impact pour les nMCF eux-mêmes - qui apparait plutôt en filigrane dans cette enquête - serait une suite heuristique de cette RC, la mise en relation de leurs points de vue avec ceux des CP ouvrant l’investigation à de nouvelles perspectives et compréhensions. Et ce d’autant que, dans l’enseignement supérieur, comme à d’autres niveaux du système éducatif, l’usage de référentiel de compétences reste une question critique, largement en débat.

43Une quête de correspondance entre les visées praxéologiques et les visées scientifiques s’est effectuée sans que celles-ci ne se superposent. La difficulté à moins tenu à l’articulation des cultures qu’au temps requis pour mener à bien cette recherche collaborative. En effet, bien que la recherche soit considérée comme centrale dans l’activité des IP, elle occupe un temps relativement limité car elle fait rarement partie de leur cahier des charges voire de leurs compétences perçues (Linder et Dello Stritto, 2017 ; Schaub, 2021). Jaramillo Cherrez (2021) souligne le fait que bien que les IP soient désormais parties prenantes de la conception de dispositifs formatifs, les approches actuelles de la recherche ne leur reconnaissent que peu souvent une place dans la production de connaissances à ce sujet et appelle à un renforcement de leur rôle dans ce domaine. Pour ce faire Schaub (2021) préconise un renforcement de cette activité dans le cahier des charges et la formation des IP, ainsi que la collaboration avec des chercheurs et chercheuses.

44Si la RC évaluative apparait comme une voie propice à de tels développements, dans la confrontation au terrain et aux contraintes administratives et méthodologiques, c’est l’importance des temporalités nécessaires pour s’accorder quant à l’appropriation, les interprétations et les modifications du dispositif de formation évolution avec le contexte, qui est à souligner concernant l’objet-frontière représenté par le référentiel dans une perspective d’évaluation écologique.

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Notes

1 IP = ingénieure pédagogique, CP = Conseiller pédagogique (dénominations interchangeables pour certaines, pour d’autres un élément définitoire de l’identité professionnelle). Nous employons ici le terme IP de manière générique et CP pour identifier les IP impliquées dans le dispositif de formation-accompagnement

2 PenSERA est le Réseau des accompagnateurs pédagogiques de l'enseignement supérieur en Auvergne-Rhône-Alpes producteur d’une grille de positionnement des compétences des enseignant.es du supérieur à partir du référentiel du MESRI

3 La description du dispositif évolue dans ces différentes communications témoignant ainsi des transformations du dispositif au fil du temps.

4 Lors de la session introductive du DFAU, il est demandé aux MCF, à l’aide du même système numérique interactif de rétroaction à usage synchrone de classer leurs principales préoccupations en enseignement parmi 7 propositions : Préparer mes contenus de cours, Connaitre mes étudiants, Planifier l’enseignement de l’année, Concevoir mes outils d’évaluation, Utiliser le numérique, Améliorer ma communication orale, Autre. Préparer les cours et planifier l’enseignement sont classés largement en tête

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : Le référentiel de compétences coconstruit
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Titre Figure 2 : accompagnement inégal des compétences des nMCF
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Titre Figure 3 : maitrise relative par les CP des différentes compétences du référentiel
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Titre Figure 4 : peur d’être embarquée sur des sujets non maitrisés
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Pour citer cet article

Référence électronique

Nathalie Younès, Marion Sabart et Sophie Serindat, « Partages autour d’un référentiel de compétences pédagogiques dans l’enseignement supérieur  »Questions Vives [En ligne], N° 42 | 2024, mis en ligne le 11 octobre 2025, consulté le 15 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/questionsvives/9661 ; DOI : https://doi.org/10.4000/14wa1

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Droits d’auteur

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