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Construction, occupation et déconstruction de la grange gallo-romaine du “Parc des Châteaux” à La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher)

Construction, occupation and deconstruction of the Gallo-roman barn at the Parc des Châteaux at La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher)
Grégory Poitevin, Stéphanie Bigot, Marie-Pierre Chambon, Philippe Gardère et Dorothée Lusson
avec la collaboration de Michel Barret, Nicolas Holzem et Béatrice Marsollier

Résumés

Le site gallo-romain de la ZAC du “Parc des Châteaux” à La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher), a été exploré sur environ 1 600 m2. La fouille réalisée en 2015 permet de retracer l'évolution chronologique et architecturale d’une grange en fonction du Ier au le IIIe s. ap. J.-C. Les résultats de cette opération éclairent sous un nouvel angle la connaissance de ce type de bâtiment emblématique du terroir beauceron à l’époque romaine. La phase de démolition de la structure apporte de précieuses données sur l’économie liée au recyclage des matériaux de construction. L’étude des tuiles, issues de ces remblais de démolition, s’intègre dans l’enrichissement du corpus régional.

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Texte intégral

1. Présentation du site

1Située sur la commune de La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher), à 4 km au nord-est de la ville de Blois, l’opération de fouille prend place au “Parc des Châteaux”, à 1 km au nord-ouest du centre-bourg actuel (Fig. 1). L’historique des recherches pour ce site débute en 2014 avec le diagnostic archéologique préventif mené dans le cadre des travaux de la future ZAC du “Parc des Châteaux”. Plusieurs sites protohistoriques, antiques et médiévales ont été repérés sur l’emprise de 38 ha du projet (Poitevin et al. 2014). L’établissement gallo-romain est caractérisé par un bâtiment maçonné de type grange. Ce dernier appartiendrait à une exploitation rurale plus vaste se développant au nord, en dehors de l’aire explorée. La construction de l’ancienne ligne ferroviaire bordant au nord l’emprise de fouille a dû détruire une partie des vestiges. Cette découverte au diagnostic a donné lieu à la réalisation d’une fouille préventive, menée en 2015 sur 1 642 m2 (Poitevin et al. 2017). Le site gallo-romain est bordé par une voie de la même période, à quelques centaines de mètres à l’ouest.

Fig. 1 - Localisation de la fouille sur la carte des cités et voies antiques.

Fig. 1 - Localisation de la fouille sur la carte des cités et voies antiques.

D’après J. Vilpoux, C. Cribellier, E. Roux, 2012, PCR “Agglomérations secondaires antiques en région Centre”

2. Contexte géologique et topographique (Ph. Gardère)

2La fouille se situe sur le coteau nord (rive droite) de la Loire, à près de 1,5 km de son lit mineur (Fig. 1 et 2). Ce secteur du plateau – extrémité sud-ouest de la Petite Beauce – montre un paysage monotone aux reliefs peu marqués. Les pentes sont longues et le dénivelé entre le fond des talwegs et les collines n’excède pas une dizaine de mètres. La fouille est localisée à mi-pente d’une de ces petites vallées sèches dont le fond se situe une cinquantaine de mètres plus à l’est. Le substrat consiste en calcaires et marnes de Beauce, de l’Aquitanien, recouverts par des limons de plateau. La partie inférieure des limons est fréquemment constituée d’une semelle graveleuse contenant des fragments de silex roulés et des sables grossiers (Caudron et al. 1972 : 2). Le site antique concerné est implanté dans un secteur où le calcaire est aujourd’hui très proche de la surface, à environ 0,3 m au plus. Les observations complémentaires réalisées lors du diagnostic archéologique indiquent que la tranche sédimentaire contemporaine de l’occupation antique des lieux était alors équivalente. Le secteur a donc été dénudé avant l’Antiquité et le faible taux de sédimentation n’a jamais réellement permis ensuite le recouvrement du site.

Fig. 2 - Contexte topographique (a), transects (b) et géologique (c) du site.

Fig. 2 - Contexte topographique (a), transects (b) et géologique (c) du site.

Interpolation d’après le RGEalti®-IGN ; carte géologique de Blois no 428 BRGM

G. Poitevin, Inrap

3Le choix de l’emplacement, à mi-flanc d’un versant et en position basse dans une vallée sèche, peut être considéré comme intentionnel. En contexte rural, dans une zone où la couverture sédimentaire est peu épaisse, il est probable que les secteurs offrant le meilleur développement des sols – et donc un bon potentiel agronomique - aient été réservés aux cultures. De fait, c’est à l’endroit où le potentiel pédologique est le moins bon que les occupants du site ont sans doute choisi d’implanter leur bâti, limitant ainsi la répercussion sur les meilleures terres agricoles, situées immédiatement au sud et à l’est (Poitevin et al. 2017 : 36, fig. 5).

3. Contexte historique et archéologique

3.1. Le site et son territoire

  • 1 Toutes deux à une soixantaine de kilomètres.

4Situé dans le sud-ouest du territoire carnute (Fig. 3 : n1), le site se trouve à environ 4 km de l’agglomération secondaire de Blois-Blesa (n14). Cette dernière est implantée à mi-chemin sur l’axe antique qui, à l’époque romaine, reliait par la rive droite de la Loire l’agglomération secondaire d’Orléans-Cenabum, au haut-Empire, à Tours-Caesarodunum1, capitale de la cité des Turones. Installé sur le plateau surplombant la rive nord du fleuve, le site s’inscrit dans une aire s’étendant de la rive droite de la Loire à la commune de Villebarou, comprenant les communes de La Chaussée-Saint-Victor, Blois et Saint-Denis-sur-Loire.

Fig. 3 - Contexte archéologique gallo-romain dans l’environnement du site.

Fig. 3 - Contexte archéologique gallo-romain dans l’environnement du site.

G. Poitevin, Inrap

3.2. Le réseau routier

5Le réseau routier antique desservant ce secteur du territoire carnute aurait une origine protohistorique (Watteaux 2003 : 201-208 ; Chouquer 2005 : 29-34; Couvin et al. 2018 : 280-283). L’itinéraire antique reliant Tours à Orléans est mentionné par la Table de Peutinger, mais non par l’Itinéraire d’Antonin (Chevalier 1997 : 200-201). Il correspond à l’aménagement de voies sur chacune des deux rives de la Loire (Havet 2015 : 44-47, 72-77). Le tracé du fleuve structure fortement la trame viaire. Ainsi, la voie antique nord (Fig. 3 : nA) emprunte le rebord du plateau suivant un itinéraire qui reste à préciser (Soyer 1971 : 46 et 51). La fouille d’un tronçon de cette chaussée a été réalisée dans l’agglomération secondaire proche, au nord-est, de Suèvres (Loir-et-Cher) (Couderc et al. 2016 : 106-112). La voie est utilisée jusqu’à la période moderne, où elle remplaçait par l’actuelle route départementale D2152. La seconde voie qui structure le paysage est celle reliant Blois à Vendôme (nB), dont une portion a été fouillée au lieu-dit “le Moulin d’Arrivée”, sur la commune de Fossé (Durand et al. 1998). Des opérations récentes d’archéologie préventive ont permis d’étudier des portions de voies et chemins appartenant au réseau viaire secondaire desservant localement le plateau puis se greffant sur le réseau principal en bord de Loire. Ainsi, le diagnostic réalisé ici même a permis de suivre une voie antique empierrée et orientée NO-SE sur environ 260 m de long (nC) (Poitevin et al. 2014 : 72-75). La fouille du “19 rue de la Vallée Maillard”, à Blois, a mis en évidence une voie antique avec ses fossés bordiers (nD) (Fouillet et al. 2016). Plus à l’ouest, repérées sur quelques dizaines de mètres de longueur, deux autres portions de voie/chemin desservent un probable secteur cultuel et une villa (nos E et F) (Guiot, Couvin et Marsollier 1998 ; Joly, Couvin et Fontaine 2008). La trame viaire régulière est traversée par la voie diagonale reliant l’agglomération secondaire de Blois à la capitale de cité carnute Chartres (Eure-et-Loir), dont des portions ont été étudiées lors de diagnostics localisés à la sortie de Blois (nG) (Poitevin, Josset et Morisse 2021 ; Poitevin 2022).

6Ces axes de communication s’insèrent dans une trame parcellaire quadrillée non orthonormée encore perceptible de nos jours. Axée sur le cours du fleuve, cette trame est schématiquement orientée NE-SO et NO-SE (Robert 1996 ; Couvin et al. 2018 : 280-281). Elle englobe le réseau parcellaire régulier mis en lumière à Mer (Loir-et-Cher), le parcellaire dit de Beaugency, mais également depuis les récents travaux du programme Solidar, la forêt de Blois et en rive gauche les forêts domaniales de Russy, Boulogne et Chambord (LIGER 1974 ; ROBERT 1996 ; 2011 : 177-181 ; COUVIN et al. 2018 : 277-285 ; Laplaige et al. 2018). Ce réseau structure sur plusieurs centaines de kilomètres carrés les terrains du plateau bordant la Loire. Il tirerait son origine au second âge du Fer (Watteaux 2003 : 201-208; Chouquer 2005 : 29-34 ; Couvin et al. 2018 : 280-283).

3.3. Les sites

7Actuellement, la période romaine est la mieux représentée dans l’environnement de la fouille (Fig. 3). La mise en valeur du territoire est illustrée par quatorze sites. À partir du ier s. ap. J.-C., l’agglomération blésoise se développe principalement le long de la Loire (n14). Un pont sur le fleuve y est aménagé et favorise la création d’un pôle de peuplement au sud, dans le quartier Vienne.

8La hiérarchisation des établissements ruraux de la zone d’étude est difficile à préciser. En effet, les données disponibles issues des diagnostics, des fouilles et des photographies aériennes se révèlent lacunaires et hétérogènes. Cinq établissements, dont le site du “Parc des Châteaux” (n1), sont interprétés comme des villae. À l’est, les deux sites protohistoriques du “Moulin à Vent” et des “Épines”, à Saint-Denis-sur-Loire, sont certainement à l’origine des établissements ruraux antiques détectés en prospection aérienne (nos 2 et 3). Découvertes lors d’un diagnostic, la grange et la cave antiques des “Misagroux”, à Blois, suggèrent la présence d’une villa aux alentours (n4) (Joly, Couvin et Fontaine 2008). À 5 km au nord-ouest de l’emprise de notre site, une villa a été mise au jour au lieu-dit “le Champ des Fossés”, commune de Fossé (n5) (Alilaire 1991 ; Mortreau et al. 2010). Typologiquement, ce dernier établissement se rattacherait à la catégorie des villae à deux cours bien représentées en Beauce (Delétang 1982 : 78-80).

9Les autres établissements antiques à vocation agropastorale se composent de fermes à enclos fossoyés (nos 6 et 7) ou de sites plus délicats à cerner, tels que “les Guignères” ou “le Bétrier”, à Blois (nos 8 et 9) (Provost 1988 ; Guiot et Marsollier 1998 ; Fouillet et al. 2018 ; Poitevin et al. 2024). Non loin de la voie antique Tours-Orléans, la fouille de sauvetage assurée par D. Pussot au lieu-dit “l’Hermitage” a permis de découvrir une cave d’un établissement rural (n10) (D. Pussot, fouille inédite, 1974 ; Kisch 1976 : 322 ; Ferdière 1984 : 242 ; Provost 1988 : 79). La structure contenait de la céramique et des restes issus du travail de tabletterie.

10La fouille réalisée le long de la Loire, au lieu-dit “Saint-Victor”, a mis en évidence des bâtiments maçonnés dépendant sans doute d’une villa implantée sur le rebord du plateau (n11) (Roy et al. 2023 : 340-343). Ces constructions auraient des fonctions commerciales en lien avec le fleuve tout proche.

11À Villebarou, un ensemble de deux enclos maçonnés antiques, à vocation funéraire, a été fouillé en 1998 au lieu-dit “les Mardeaux” (n12) (Guiot et al. 1998b : 16-18). À Blois, le diagnostic des “Onze Arpents” a permis la découverte de deux inhumations associées à quelques fosses et trous de poteau (n13) (Guiot et al. 1999).

12En comparaison avec le terroir voisin de Mer (41), la densité de sites antiques détectés sur le plateau nord de Blois paraît moindre (Couvin et al. 2018 : 278-285). Plusieurs facteurs expliqueraient cette différence. Au cours des dernières décennies, l’important étalement urbain blésois a certainement effacé de nombreux vestiges. La détection aérienne, plus aisée dans ce contexte, a permis la découverte de nombreux établissements ruraux dans le secteur de Mer, contrairement au secteur blaisois. Les diagnostics réalisés à Blois ont des dimensions plus faibles qu’à Mer et se répartissent sur une plus vaste surface conduisant à un effet de saupoudrage. Cette relative dispersion des fenêtres d’observation minore, pour le moment, la densité des sites reconnus sur le plateau de Blois.

4. Chronologie et stratigraphie

13Dès la phase de décapage, on a constaté une organisation spatiale et une chronologie des vestiges strictement conformes à celles observées et énoncées lors du diagnostic. Schématiquement, elles sont caractérisées par un bâtiment ayant connu plusieurs phases de construction entre le ier et le iiie s. ap. J.-C. et des sols extérieurs aménagés (Fig. 4). Quelques autres faits ont été enregistrés, mais ils concernent essentiellement la période contemporaine.

Fig. 4 - Plan général des vestiges.

Fig. 4 - Plan général des vestiges.

G. Poitevin, Inrap

  • 2 US appartenant à des faits et US indépendantes comprises.
  • 3 Dont 7 US issues du diagnostic et contenant de la céramique.
  • 4 341 restes (NR) pour 19 individus (NMI).

14La proportion d’US datée est aisément calculable2 : sur les 96 US initialement enregistrées3, 20 identifient des numéros de creusement qui par nature ne peuvent contenir du mobilier (US négatives). Sur les 76 US positives, 33 (soit une petite moitié) livrent du mobilier en céramique, représentant autant de lots (soit environ la moitié). Les autres catégories de mobilier n’apportent pas de donnée chronologique fiable. Cette proportion, d’environ une US sur deux datées, cache une large hétérogénéité. En effet, près des deux tiers des lots de céramiques ne comportent que d’un à dix tessons, ce qui tempère leur valeur ou leur pertinence chronologique. Dix lots, soit près d’un tiers, proposent une datation possible sur la base de 11 à 22 tessons. Enfin, trois lots contiennent 43 à 54 restes assurant de la fiabilité de leur datation. Le corpus4 se compose majoritairement de fragments de panse (85 %), avec de rares éléments de forme. Les éléments de forme sont rares. Le taux de fragmentation des ensembles est élevé (cf. 7). Dans l’ensemble, les lots céramiques offrent des quantités de restes relativement réduites. En outre, le mélange de fragments de différentes périodes à l’intérieur d’un même lot témoigne de dépositions secondaires (résidualité), résultant très certainement de remaniements. Les informations chronologiques doivent donc être prises avec prudence et les datations proposées restent ainsi volontairement larges.

15Les données stratigraphiques ont partiellement remédié aux insuffisances quantitatives et qualitatives des datations proposées par la céramique. Elles permettent d’obtenir une périodisation acceptable et fiable de ce secteur du site (Fig. 6). Les données chronologiques et stratigraphiques renseignent essentiellement les phases de construction et de démantèlement d’un bâtiment antique, appartenant à un établissement rural plus vaste (Poitevin et al. 2014). Mais il est important de signaler que cette proposition de périodisation vaut uniquement pour la partie fouillée et peut ne pas refléter celle de l’intégralité du site.

16Actuellement, aucun élément ne permet de relier les vestiges antiques découverts à un établissement gaulois préexistant. La grande majorité du mobilier archéologique s’inscrit dans une fourchette chronologique large englobant tout le haut-Empire (fin ier av.-fin iiie ap. J.-C.). Cependant, certains éléments indiquent une installation au tournant de notre ère. Quant aux quelques fragments de tradition laténienne, ils se rattachent, plus vraisemblablement, au début de la période romaine (période 1, phase a) (Fig. 5).

Fig. 5 - Périodisation des vestiges de la fouille et diagramme stratigraphique.

Fig. 5 - Périodisation des vestiges de la fouille et diagramme stratigraphique.

B. Marsollier, Inrap

17Cette première phase a laissé des traces fugaces. Pour la seconde moitié du ier s. ap. J.-C. et le début du iie s., les preuves de l’occupation humaine sont plus tangibles et se manifestent par la construction d’un bâtiment maçonné et l’aménagement de plusieurs sols extérieurs : Période 1, phase b. Dans une troisième phase, comprenant le reste du iie et le iiie s., le bâti est sans doute ajusté aux besoins de l’établissement rural et s’illustre avec l’extension du bâtiment (période 1, phase c).

18La période 2 est caractérisée par le démantèlement quasi complet du bâtiment (Fig. 5). La stratigraphie et les dépôts révèlent que ce chantier vise à la récupération, de manière planifiée et méthodique, des matériaux du bâtiment. La fin de cet épisode marque l’abandon définitif du site ou, tout du moins, de ce secteur du site, au cours de la seconde moitié du iiie s. Aucun élément mobilier ne peut être clairement daté de l’Antiquité tardive.

19Après l’abandon du site, au cours du Moyen Âge, les terrains sont mis en culture, puis en partie boisés. À la période contemporaine, des traces de dessouchages ont été mises en évidence (Fig. 5). Ces travaux sont peut-être liés à la construction de la voie ferrée présente sur la partie N-NO de la parcelle. Cette longue période comprise entre l’Antiquité et la période contemporaine ne sera pas développée ici.

5. Période 1 : implantation et évolution d’un établissement rural (début de notre ère-première moitié iiie s.)

5.1. Période 1, phase A : les premiers signes de l’occupation ? (début de notre ère-première moitié ier s. ap. J.-C.)

  • 5 US 1236 et 2034.
  • 6 US 2001, 2004 et 2005.
  • 7 US 2053.
  • 8 US 1176, 2005 et 2006.

20La première phase d’occupation du site est délicate à appréhender sur le secteur fouillé. En effet, sur l’emprise décapée, une seule structure est strictement attribuable à cette phase chronologique. Cependant, l’étude de la céramique laisse apparaître de nombreux restes en position résiduelle (Fig. 6). Individuellement, certains éléments peuvent remonter au début de la période romaine (cf. 7). Ce lot résiduel se compose, entre autres, de fragments de gobelet de type Beuvray5 (15 av. J.-C.-50 ap. J.-C.) (Fig. 33 : iso. 15) (Couvin 2005) et de céramique commune brune ligérienne à surface enfumée de tradition laténienne6 (10 av. J.-C.-50 ap. J.-C.). Des fragments d’amphores italiennes (10 av. J.-C.-50 ap. J.-C.), de Tarraconaise7 (Pascual 1, 10 av. J.-C.-50 ap. J.-C.) et régionales (productions précoces du ier s.) sont identifiables. De la vaisselle en terra nigra (20/30 ap. J.-C.-75) proviendrait également de cette phase d’occupation initiale, avec en particulier des assiettes à bord rectangulaire de type Menez 6/168 (Menez 1985) (Fig. 33 : iso. 2).

Fig. 6 - Plan des vestiges de la période 1, phase A de la fouille et du diagnostic.

Fig. 6 - Plan des vestiges de la période 1, phase A de la fouille et du diagnostic.

G. Poitevin, Inrap

21Malgré la rareté des vestiges immobiliers, ces céramiques résiduelles permettent d’envisager une occupation domestique sur (ou à proximité de –) l’aire fouillée. Les éléments de datation, à considérer avec précaution, la situeraient entre 10 av. J.-C. et 50 ap. J.-C.

22Seule la fosse F179 se rattache à cette phase d’occupation (Poitevin et al. 2014 : 84). Découverte dans une tranchée de diagnostic, elle se situe à environ 90 m au sud-ouest de l’emprise de fouille (Fig. 6). Sa localisation pourrait constituer la limite occidentale du site. De creusement rectangulaire, elle est longue de 2,30 m et large de 1,26 m. Elle a été pratiquement arasée par des labours profonds. Le reste de comblement de la structure est composé de limon argileux brun clair, homogène, contenant quelques pierres chauffées, de rares nodules de terre cuite et de la céramique. La fonction primaire du creusement n’a pu être déterminée. Les deux fragments d’assiette en terra nigra dateraient au plus tôt ce comblement entre 20 et 60 ap. J.-C. (Poitevin et al. 2014 : 127, annexe 3).

5.2. Période 1, phase B : la construction de la grange maçonnée (deuxième moitié du ier s. ap. J.-C.- début iie s.)

  • 9 US 2005, 2006, 2008 et 2017.
  • 10 US 2005.
  • 11 US 2003.
  • 12 US 1230 et 2005.
  • 13 US 1178 et 2005.

23Cette phase se distingue par la construction du bâtiment (Fig. 5 et 7). Ses techniques de construction introduisent la maçonnerie dans le bâti et correspondent à celles diffusées dans les campagnes du nord des Gaules, surtout à partir de la deuxième moitié du ier s. (Ferdière 2005 : 216-223). Ce chantier de construction a laissé quelques traces, décelées lors de la fouille : un échafaudage, un chemin pour l’acheminement des matériaux. Les autres faits de cette phase correspondent à des murs et divers aménagements, tels des sols extérieurs systématiquement empierrés et des trous de poteau. Par nature, ces faits ne contiennent pas ou que peu de mobilier, puisque, lors de leur création, ce ne sont pas des lieux de rejet. Cette évidence explique partiellement le faible nombre de fragments de céramique découverts pour cette phase 1B, soit environ une centaine. Seuls deux lots approchent la cinquantaine de tessons, offrant une bonne fiabilité chronologique. Six lots de céramiques situent cette phase B entre le milieu du ier s. ap. J.-C. et le début du iie s. De nombreux tessons se rattachent au ier s. de notre ère, avec de la vaisselle fine caractéristique de cette période : fine à engobe blanc9, fragment de sigillée précoce de Gaule centrale10 et, parmi la vaisselle commune, des pots de tradition Besançon11, des amphores12 (Fig. 33 : iso. 12) et des vases de stockage13 en productions ligériennes à pâte brune. Ces dernières productions posent un problème particulier, du point de vue chronologique, car elles se retrouvent tout au long du Haut-Empire. En l’absence de tout élément vraiment discriminant, il n’est, donc, pas possible de préciser la datation.

Fig. 7 - Plan des vestiges de la période 1, phase B.

Fig. 7 - Plan des vestiges de la période 1, phase B.

G. Poitevin, Inrap

24La majorité des faits et US de la phase 1B entretiennent des relations stratigraphiques avec ceux des phases postérieures (phase 1C et période 2), ce qui a facilité le phasage. Les vestiges de l’occupation de cette phase ont été fortement perturbés par l’intensité des occupations postérieures. Le passage de la phase B à la phase C est perceptible par les recoupements stratigraphiques et l’évolution du plan d’ensemble du bâtiment. En l’absence de mobilier bien datant, on peut tout juste envisager ce passage au cours du iie s., sans plus de précision. Finalement, ce sont 16 faits qui sont rattachés à cette seconde phase de la période 1.

5.2.1. Le bâtiment maçonné : une grange

25Cet édifice est clairement identifiable grâce aux différents fondations et murs qui le composent (Fig. 8 et 9). Cependant, son état de conservation n’est pas homogène. Pour simplifier, la moitié ouest du bâtiment, implanté sur un substrat limoneux, est mieux conservée que celle à l’est, posée sur le socle calcaire affleurant, au moins en l’état de l’érosion actuelle des lieux. Sur ce secteur du plateau blésois, le sol actuel, épais de trois à une dizaine de centimètres, n’a pas été suffisant pour protéger une partie de la construction des arasements successifs dus aux labours. En outre, les démolitions et récupérations de matériaux de la période 2 ont touché les constructions à divers endroits.

Fig. 8 - Coupes stratigraphiques des fondations du bâtiment, état 1 selon les axes indiqués sur le plan en bas à gauche.

Fig. 8 - Coupes stratigraphiques des fondations du bâtiment, état 1 selon les axes indiqués sur le plan en bas à gauche.

B. Marsollier, Inrap

Fig. 9 - Principales dimensions du bâtiment, état 1.

Fig. 9 - Principales dimensions du bâtiment, état 1.

G. Poitevin, Inrap

  • 14 Les surfaces concernant les pièces expriment des surfaces utiles.

26L’orientation de la construction, NE-SO, est identique à celle du parcellaire antique (cf. 3.2). Le bâtiment rectangulaire mesure 11,60 × 9,20 m, soit une superficie totale d’environ 107 m2. L’espace interne se compose d’une pièce principale rectangulaire de 54 m14, dont l’angle est manquant, totalement arasé (Fig. 9 : A). Sur sa longueur nord-ouest, deux petits pavillons d’angle, de 3,7 m2 (B) et 4,1 m2 (C), la flanquent. Ainsi encadré, en façade, l’espace F, de 9,3 m2, est ouvert vers l’intérieur, l’espace principal A.

27Le terrain sur lequel est implanté le bâtiment accuse une pente importante, d’environ 4 %, orientée SO-NE. La topographie du secteur et l’hétérogénéité du substrat (calcaire, limon de plateau et sa semelle graveleuse) ont conduit les concepteurs de la construction à réaliser un décaissement préparatoire sur l’intégralité de la surface du futur bâtiment, notamment pour la moitié ouest. Au contraire, dans le quart sud-est du bâtiment, peu d’aménagements ont été nécessaires. Ainsi, ce décaissement rectifie le pendage naturel du terrain et aplanit grossièrement les irrégularités du calcaire en place. Son emprise est quadrangulaire et délimite le contour extérieur des futures fondations. Avec des parois verticales, il atteint des profondeurs conservées comprises entre 0,12 et 0,16 m (Fig. 8 : coupes 1, 2 et 5). Les coupes longitudinale et transversale réalisées sur le bâtiment permettent d’observer le décaissement à l’intérieur de ce dernier. Bien que régulier, le fond du creusement n’est ni horizontal, ni même parfaitement plan. La déclivité initiale du terrain semble avoir été trop importante pour être totalement rectifiée. En outre, la construction du bâtiment ne nécessite sans doute pas un tel aménagement.

28Les murs mis au jour pour cette phase font partie d’un seul et même projet architectural. Les fondations ne sont pas installées dans des tranchées étroites comme pour la plupart des bâtiments antiques de la région. Tels des murs de terrasses, elles sont aménagées contre les parois du décaissement préparatoire pratiqué dans le substrat. La fondation de la construction s’apparente donc à celles observées pour des caves, à savoir composées d’un blocage interne contraint par les parois du creusement, côté extérieur du bâtiment, et par un parement, côté intérieur du bâtiment. Ces fondations sont principalement posées sur le substratum calcaire, offrant ainsi une assise stable à l’ensemble de la construction, avec des largeurs comprises entre 0,72 et 0,86 m.

29Le blocage des fondations est hétérogène d’un point à l’autre de la construction. Dans l’angle nord-est du bâtiment, il est composé de pierres calcaires non dégrossies dont le module est en moyenne de 10 × 5 × 5 cm, sans organisation particulière (Fig. 10). Pour toute la moitié ouest du bâtiment, leur module peut être plus important. Ainsi, quelques blocs sommairement équarris, mesurant jusqu’à 64 × 60 × 20 cm, sont posés à la base des fondations (Fig. 11). Ces blocs sont ensuite noyés dans des pierres de plus petit calibre. L’emploi de ces blocs paraît aléatoire et ne résulterait pas d’une nécessité architectonique absolue. Toutefois, dans les angles de la construction, des blocs calcaires massifs ont été employés pour renforcer la maçonnerie (Fig. 12). Dans tous les cas, la liaison entre les différents éléments n’est assurée que par du limon argileux brun, sans mortier.

Fig. 10 - Détail de la fondation F509, vue en plan.

Fig. 10 - Détail de la fondation F509, vue en plan.

Équipe Inrap

Fig. 11 - Exemple de bloc employé dans la fondation de F514.

Fig. 11 - Exemple de bloc employé dans la fondation de F514.

Équipe Inrap

Fig. 12 - Bloc utilisé pour renforcer l’angle de la maçonnerie formé par les murs F513/521.

Fig. 12 - Bloc utilisé pour renforcer l’angle de la maçonnerie formé par les murs F513/521.

Équipe Inrap

30Ces fondations semi-enterrées (supra) ont conservé par endroits le parement établi sur leur face interne. Celui-ci est composé de moellons calcaires (20 × 13 × 7 cm) liés au mortier de chaux et présente jusqu’à deux assises régulières (Fig. 13). Le décaissement préparatoire présente de légères irrégularités qui sont compensées, en parement, par l’adjonction de fragments de tegula sur un à deux lits et de moellons calcaires (Fig. 13 et Fig. 14). Ces aménagements permettent de régler la base des parements. Le mortier de pose est débordant et forme des bourrelets qui sont par la suite aplanis et lissés (Fig. 15) (Coutelas 2009 : 79). Parmi les éléments de démolition provenant des parements et découverts dans le bâtiment, on note la présence de nombreux fragments de mortier de chaux blanc (cf. infra, 6.4 : US 2012). Ils forment des plaquettes de quelques centimètres d’épaisseur. Issus incontestablement des parements, ces fragments présentent un traitement de surface comprenant un lissage de surface et des joints tirés à la pointe (Coutelas 2009 : 78-81). Ce marquage de la lame de la truelle dans le mortier entre les moellons assure la bonne insertion du mortier. Ce geste technique homogénéise également l’aspect d’ensemble, un effet décoratif qui atténue les irrégularités des moellons mis en œuvre et livre un rendu final plus esthétique (Coutelas et Monier 2012 : 196).

Fig. 13 - Détail des assises du mur F510, vue latérale.

Fig. 13 - Détail des assises du mur F510, vue latérale.

Équipe Inrap

Fig. 14 - Détail du parement et blocage du mur F519, vue verticale.

Fig. 14 - Détail du parement et blocage du mur F519, vue verticale.

Équipe Inrap

Fig. 15 - Détail du mortier (blanc) du parement du mur F520, vue verticale.

Fig. 15 - Détail du mortier (blanc) du parement du mur F520, vue verticale.

Équipe Inrap

31L’angle de maçonnerie formé par les murs F510 et F511 est remarquable par le traitement de surface des matériaux et le soin apporté à leur mise en œuvre. La base du parement est composée de tegulae et de pierres calcaires formant l’assise de réglage. Sur cette première assise sont installés deux rangs réguliers dont la taille des pierres est particulièrement soignée. La régularité des joints et des assises offre l’image d’un travail de qualité (Fig. 13).

32La jonction entre les fondations et les élévations extérieures est clairement identifiable. En effet, le liant argilo-limoneux utilisé pour le blocage interne de la fondation est remplacé par un mortier de chaux de teinte grise. Ce mortier ou béton contient une proportion importante d’éléments de grave millimétriques à centimétriques, idéal pour assurer la cohésion du cœur de la maçonnerie. Pour la réalisation des parements, ce liant ne se substitue pas au mortier de chaux blanc. En effet, les éléments grossiers du béton ne sont pas compatibles avec le jointoiement de moellons (Coutelas 2009 : 69).

33Les élévations conservées au-dessus du décaissement se composent de deux parements et d’un blocage interne. Les tronçons de murs les plus lisibles se concentrent sur la moitié sud-ouest de la construction. Par rapport au niveau de circulation extérieur, les élévations reposent sur les fondations, sur une seule assise conservée, tout en adoptant des largeurs identiques. Interprétable comme de réglage, cette première assise d’élévation ne porte pas de traces d’ouverture ou d’aménagement quelconque. Les parements sont constitués de moellons calcaires dont le calibre moyen est uniforme sur un même tronçon de mur, mais diffère sensiblement d’une portion de mur à l’autre. Ainsi le calibre moyen passe de 16 × 19 × 10 à 35 × 20 × 8 cm. Le liant est identique à celui observé sur les parties basses des parements à l’intérieur du bâtiment. Le blocage interne est composé de pierres calcaires non dégrossies disposées en hérisson et en lit régulier. Comme pour les parements, le calibre moyen des pierres change d’une portion de mur à une autre. Il est compris entre 10 × 8 × 5 et 15 × 10 × 4 cm. Le liant du blocage incorpore de la chaux, du sable et du sédiment brun-orangé du type limon des plateaux (Lp), lui conférant une teinte grisâtre.

  • 15 Calcaire de Beauce.

34L’examen des pierres et moellons calcaires de la construction confirme l’origine locale du matériau. Dans les alentours, les deux faciès de calcaire15 employés affleurent à proximité de la surface. Le premier est un calcaire micritique gris contenant peu de fossiles et assez cassant (dolomitique). Le second est plus jaune et contient davantage de clastes (cailloux et fossiles). Il est caverneux (carié) et se brise en grumeaux. Les deux faciès se débitent de façon médiocre, donnant un piètre matériau de construction : blocaille et moellons grossièrement équarris, dans lesquels l’abondance de microfissures empêche l’obtention de grands modules. À l’affleurement, les deux types ont tendance à se démanteler naturellement en blocs tabulaires, qui ont ici été débités. L’affleurement et le démantèlement naturel des bancs permettent une collecte de surface opportuniste et abondante. Les deux faciès se remarquent dans les fondations du bâtiment. Les pierres et blocs de calcaire aux formes naturellement émoussées ont également été utilisés pour la réalisation des blocages internes des murs. Les moellons ont été quant à eux extraits du sous-sol. Le calcaire a fait l’objet d’importantes extractions dans le secteur à la période romaine. Les opérations menées sur la ZAC du “Parc des Châteaux” ont révélé, par exemple, plusieurs vastes fosses d’extraction, dont certaines assurément contemporaines de l’établissement rural auquel appartient le bâtiment (Poitevin et al. 2014 : 98-99 ; Cherdo et al. 2017 : 182-186). Une dernière source d’approvisionnement en pierres calcaires est envisageable, avec la récupération et la réutilisation de matériaux issus de structures ou bâtiments antérieurs. En effet, des pierres chauffées ont été découvertes lors de l’examen archéologique des murs du bâtiment. Elles ont manifestement subi un passage au feu et ne proviennent donc pas directement de leur lieu d’extraction. Ces éléments rubéfiés sont systématiquement employés dans la réalisation des blocages internes des murs.

35Les liants employés dans la construction ont également une origine locale. Le limon argileux brun-orangé utilisé en liant pour les fondations et le blocage des élévations est présent en grande quantité sur le plateau. Naturellement, il se présente sous la forme de couche plus ou moins épaisse de limon de plateau (Lp). Intervenant dans la composition du mortier des parements et du béton, la chaux a également pu être produite localement grâce à l’exploitation du calcaire. Le granulat du béton provient de l’horizon basale du limon local. Ce matériau est affleurant et abondant sur ce secteur du plateau blésois (cf. 2). Les éléments les plus grossiers de cette ressource sont absents dans le béton. Il est donc probable que le limon ait été séparé de la grave par criblage, préalablement à son mélange avec la chaux.

36De nombreux sites ruraux gallo-romains possèdent des édifices similaires au bâtiment découvert sur la fouille au “Parc des Châteaux”. Les points communs concernent aussi bien le plan, la morphologie des constructions, que la situation topographique des bâtiments sur les sites. En 2014, avec près de 900 édifices recensés, une synthèse a été réalisée sur ce bâtiment caractéristique des campagnes gallo-romaines (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017). Dans le secteur de la Petite Beauce, certains établissements comptent jusqu’à trois exemplaires. Des édifices strictement identiques se retrouvent localement sur les villae des “Prâles” à Tavers (41) (DelÉtang 1982 : 91, fig. e) et de “Beaudisson” à Mer (41) (Couvin et al. 2018 : 54-57).

37Ainsi, ces édifices apparaissent le plus souvent dans la pars rustica des villae, parmi les dépendances (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 170). L’orientation et leur emplacement semblent conditionnés par la topographie générale du terrain et la volonté des constructeurs d’ouvrir ce bâti vers les autres aménagements du site, et en général, vers la cour de service (Fouillet et al. 2007). L’association des nombreux plans du corpus cité et les exemples fouillés ont permis d’interpréter ces bâtiments comme des granges aux fonctions polyvalentes (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 173-177).

  • 16 Les granges du corpus ont des longueurs comprises entre 9 et 16 m, des largeurs comprises entre 8 e (...)
  • 17 Bâtiment 1 : 11,6 × 9,2 m, pour une surface de 107 m2.

38Par son plan largement stéréotypé, le bâtiment est à intégrer dans la catégorie du modèle-type : corps principal à grande salle précédé en façade de deux petites pièces encadrant un porche (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 159-160). Ce modèle-type serait le fruit de l’évolution d’un module de base quadrangulaire auquel auraient été adjoints en avancée les deux pavillons d’angles encadrant le porche. La conception et la réalisation du bâtiment s’inspirent uniquement du modèle type et non pas d’un éventuel édifice antérieur. Il est donc construit à une période où le modèle-type et non d’un éventuel type antérieur d’édifice. Il est donc construit à une période où le modèle de base est bien établi. La moyenne des dimensions relevée sur l’ensemble du corpus16 place le bâtiment parmi les constructions de taille modeste17 (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 159).

39Hormis son plan type de bâtiment de stockage, ce bâtiment n’a livré aucun élément permettant d’identifier la vocation de ses espaces internes. En effet, la totalité des sols de cette période initiale d’occupation a disparu. Les US des pièces A, B et C qui reposent pourtant sur le fond du creusement préparatoire, sont interprétés comme appartenant à la phase de récupération du bâtiment, période 2 (cf. infra,  6) (Fig. 8). Elles s’appuient contre les murs de l’édifice dont une partie des parements est déjà récupérée. La stratigraphie enregistrée passe donc sans transition de la construction du bâtiment à sa démolition, l’occupation n’ayant laissé aucune trace. Ce hiatus stratigraphique est délicat à interpréter. Le sol semi-excavé aurait dû piéger facilement des dépôts et des artéfacts liés à l’occupation. Il est peu probable que le sol ait été nettoyé, voire curé, préalablement à la récupération des parements internes du bâtiment. La restitution de sols construits, ensuite détruits ou récupérés, dans les différents espaces expliquerait le hiatus stratigraphique. Plusieurs granges fouillées ont permis d’attester des planchers (Zeippen et Halbardier 2006 : 76-77 ; Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 175). Ce type d’aménagement crée des vides sanitaires sous plancher, facilitant l’aération des denrées stockées en rez-de-chaussée, et permet des nettoyages réguliers. Ces deux dernières caractéristiques expliqueraient ce hiatus stratigraphique par la disparition des dépôts liés à l’occupation à l’occasion de la phase de récupération des sols construits. Pour ce bâtiment, le pendage et les irrégularités ponctuelles du fond du creusement préparatoire laissent envisager la présence d’un plancher surélevé, créant ainsi ce vide sanitaire. Ce type de dispositif nécessite des éléments porteurs intermédiaires (lambourdes), au moins sur les espaces les plus vastes. Les récupérations ont fait disparaître les éventuels aménagements permettant l’ancrage des planchers à la base des murs. Les preuves matérielles confirmant l’existence de planchers au sein du bâtiment sont donc absentes. Cependant, l’ampleur des récupérations réalisées à la période 2 et la méticulosité avec laquelle elles ont été réalisées ne permettent pas de rejeter totalement cette hypothèse. La récupération d’un plancher sur lambourdes concorderait avec les données enregistrées.

40La bibliographie se rapportant à la vocation des espaces internes de ce type de bâtiment permet de formuler quelques hypothèses quant à celle du bâtiment fouillé. L’espace compris entre les espaces B et C est un porche couvert donnant accès à la pièce principale et également aux pièces latérales (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 159). Muni d’une large porte à deux battants, il permet un accès direct à des charrettes, grâce à ses importantes largeur et hauteur. Le déchargement des cargaisons s’effectue ainsi à l’abri des intempéries. La dizaine de mètres carrés ainsi disponible permet d’accueillir des activités agricoles nécessitant un espace aéré et abrité, tel que le battage. Les pièces latérales B et C sont habituellement interprétées comme des resserres, des porcheries ou des logements pour la main d’œuvre de l’exploitation agricole (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 175-177).

41À l’arrière du porche et des pavillons d’angle s’étend la salle A, le plus vaste espace du bâtiment. Disposant sans doute d’un plancher surélevé, cet espace pouvait servir à stocker des denrées. La puissance des murs permet d’envisager la présence d’un étage dont l’accès s’effectuerait par la pièce A (Poitevin et al. 2020 : 59-60). La pièce A peut recouvrir un grand nombre d’utilisations : entrepôt à matériel agricole, voire étable au rez-de-chaussée, fenil ou grenier, pour la conservation des récoltes, voire habitat, à l’étage. L’usage multifonctionnel de cet espace est indéniable (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 175-177).

42Plusieurs hypothèses de restitution des volumes du bâtiment sont envisageables. La différence fondamentale entre ces propositions réside dans le traitement et l’articulation du groupe de façade, formé par les pavillons d’angle et le porche, et le corps arrière (A), espace principal du bâtiment. La première restitution propose un toit à deux pans, avec une couverture complémentaire perpendiculaire, couvrant le porche (Ferdière 1985 : 372). Dans cette hypothèse, les pièces latérales s’intègrent totalement au reste de l’édifice. Dans la seconde hypothèse, le corps principal est doté d’un étage clairement identifié au-dessus des toits du groupe formé par les pavillons et le porche (Gaston 2008 : § 17, fig. 4 ; Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 163-165). Les pièces de la façade possèdent leurs propres couvertures à un ou deux pans.

43La nature des matériaux utilisés pour la toiture est identifiée grâce aux couches de destruction découvertes dans et à l’extérieur du bâtiment (cf. 6.3). La toiture se composait de tegulae et d’imbrices scellées au mortier de chaux, dont certains fragments ont une forme caractéristique de joints employés pour le scellement d’imbrices (Coutelas 2009 : 83-84).

5.2.2. La structure 2 : un échafaudage ?

  • 18 Par la suite, abrégé : TCA.

44Située le long de la façade sud-ouest du bâtiment, cette structure est constituée de six trous de poteau (Fig. 7 et 16). Les comblements ne comportent apparemment pas de calage. Ils contiennent quelques fragments de terres cuites architecturales18 mais aucun fragment de céramique. Une datation précise est donc impossible. Stratigraphiquement, les faits sont antérieurs au sol aménagé US 2006 (Fig. 16 : coupe F535 et F536). Ils ne sont associés à la période 1b que par leur rôle possible dans la construction du bâtiment.

Fig. 16 - Plan et coupes des poteaux de la structure 2 et leur localisation sur le plan du bâtiment, en haut à gauche.

Fig. 16 - Plan et coupes des poteaux de la structure 2 et leur localisation sur le plan du bâtiment, en haut à gauche.

G. Poitevin, Inrap

45En moyenne, les creusements ont des diamètres de 0,17 m pour une profondeur conservée de 0,12 m. Ils ont un profil régulier, avec des parois verticales et un fond plat. Les comblements sont homogènes, composés de limon argileux brun et d’encaissant remanié. La seule différence entre les remplissages des différents trous de poteau est la proportion plus ou moins importante de cailloutis calcaire et d’inclusions de mortier de chaux blanc. Ces éléments grossiers sont de même nature et similaires à ceux qui composent l’US 2006, scellant la St.2. L’arrachage des poteaux semble immédiatement suivi par la mise en place du sol aménagé.

46L’espace limité par ces six poteaux occupe une bande étroite de terrain d’une soixantaine de centimètres de large et 3 m de long. Les espacements entre poteaux sont irréguliers. Les caractéristiques des trous de poteau ne permettent pas à elles seules de reconstituer une structure bâtie. À l’inverse, l’association des poteaux au bâtiment permet d’envisager une hypothèse : sur environ 3 m de long, les aménagements forment deux alignements parallèles au mur. La première série est en moyenne à 0,93 m de ce dernier, la seconde en moyenne à 0,59 m. Les faits appartiendraient à un échafaudage permettant la construction du bâtiment ou à sa réfection attribuée à la phase C (cf. 5.3). Cette hypothèse aurait dû conduire à identifier des poteaux supplémentaires sur le périmètre entier du bâtiment, or, ce n’est pas le cas. Cette absence de vestige peut s’expliquer par l’affleurement du socle calcaire sur les parties nord et est du terrain. L’érosion observée au sud a pu facilement faire disparaître les traces de l’aménagement temporaire. Une réfection partielle de la façade sud-ouest peut également expliquer la localisation et les dimensions réduites de l’échafaudage. L’hypothèse permettant d’identifier les trous de poteau de la structure 2 comme appartenant à un appentis appuyé contre le mur de la grange est ici totalement rejetée.

475.2.3. Le chemin F525

48Localisé près de l’angle sud du bâtiment, le chemin F525 est visible sur une longueur de 5,80 m et une largeur moyenne d’1,76 m (Fig. 7 et 17). Il est partiellement recouvert par le sol aménagé US 2006. En coupe, le substrat est entaillé sur un 0,20 m par une série d’ornières plus ou moins étroites, parallèles ou se chevauchant les unes sur les autres. La multiplication des ornières aboutit à un brassage régulier des sédiments du sous-sol et des apports anthropiques. Aucun couple d’ornières parallèles ne peut être identifié. L’écartement des roues de char n’est donc pas déterminable.

Fig. 17 - Détail des ornières du chemin F525, vue oblique de l’ouest.

Fig. 17 - Détail des ornières du chemin F525, vue oblique de l’ouest.

Équipe Inrap

49Le corpus céramique correspondant à ce chemin et trouvé dans les ornières se compose de :

  • un fragment de dolium originaire des ateliers de Mougon ;

  • un fragment de céramique commune brune engobée blanc ;

  • un fragment d’amphore Pascual 1 provenant de Tarraconaise.

50L’imprécision des fourchettes chronologiques fournie par ces restes ne permet qu’une datation large, comprenant les ier et iie s. Cependant, la stratigraphie réduit cet intervalle : en effet, F525 n’est pas recoupé par le bâtiment et s’arrête à quelques centimètres du bâti. Il tient donc compte de la construction de la grange et doit en être contemporain. En outre, ce chemin est partiellement recouvert par les sols aménagés sans doute liés au fonctionnement de l’édifice. Il résulterait donc plutôt de l’acheminement de matériaux pour le chantier de construction du bâtiment. Il s’arrête au droit de l’angle sud-ouest de la construction en cours. Cette hypothèse coïncide avec la position stratigraphique du chemin, entre construction et occupation extérieure, représentant un court laps de temps de la deuxième moitié du ier s. ap. J.-C. ou au début du iie s. Elle expliquerait également la présence des nodules de mortier de chaux blanc et gris, des pierres et des fragments de tegula dans les ornières.

5.2.4. Les sols extérieurs aménagés

51Malgré l’affleurement, par endroit, du socle calcaire qui aurait pu présager de la disparition des niveaux de circulation, quatre sols extérieurs aménagés ont été identifiés : US 2002, 2004, 2006 et F506. Ils ceinturent partiellement le bâtiment sur environ 120 m2 (Fig. 7). Ces sols se composent de remblais de cailloutis calcaires centimétriques dont l’épaisseur n’excède pas une douzaine de centimètres (Fig. 8). Insérés en plan entre des affleurements de roche calcaire, ils assainissent les rares zones limoneuses et égalisent ainsi le terrain. Posés à plat sur ces sols, des fragments de tuiles et de céramiques constituent les restes de l’occupation et confirment l’identification comme sols. Le sol US 2004 est aménagé différemment des trois autres. Il est composé d’un premier lit de cailloutis calcaire dont le module moyen est de 9 × 7 × 4 cm, sur lequel est posé un second lit d’éléments calcaires plus fins, très compact. Du fait de sa localisation, en face de l’entrée de la grange, et du passage répété de probables lourdes charges, ce sol a nécessité plus d’attention pour sa réalisation – voire d’entretien – par rapport à ceux en périphérie du bâtiment.

  • 19 Représentant un NMI de 9.

52L’utilisation de ces sols indurés se caractérise par 108 restes19 de céramique posés à plat. Il s’agit d’espaces de circulation, ne représentant pas d’aires de rejets préférentielles. Les tessons sont bien souvent perdus dans ce secteur et y arrivent par hasard. Une part non négligeable du matériel se trouve en position secondaire, voire tertiaire, sans rapport avec son lieu de dépôt originel. Ces lots de céramique sont majoritairement composés de céramique commune de provenances locales telles que les productions ligériennes. Les fragments de céramiques fines à engobe blanc sont rares. Les lots contiennent également quelques tessons de terra nigra. Originaires de Bétique ou de Gaule, les restes d’amphores sont anecdotiques. Ces ensembles céramiques sont datables de la seconde moitié du ier-première moitié du iie s. ap. J.-C.

5.2.5. Le fossé St.3

53Le fossé (St. 3) est localisé à quelques mètres au sud du bâtiment (Fig. 7). Sur 19 m de longueur, le creusement est orienté NO-SE, puis SO-NE. Il est progressivement arasé vers le nord. Il présente une largeur de 0,95 m pour une profondeur conservée maximale de 0,24 m. Les parois sont évasées et le fond est plat à concave. Ce fossé délimite en partie, sur deux côtés, un espace autour de l’angle sud de la grange. Perpendiculaire à la pente, il capte les ruissellements de surface provenant du sud-ouest (sommet). L’eau est ensuite redirigée vers l’est, vers le talweg situé à quelques mètres. Ce fossé assure donc apparemment la bonne évacuation de l’eau sur l’emprise de l’occupation et assure un espace de circulation praticable, dans ce secteur proche du bâtiment.

5.3. Période 1, phase C : l’extension de la grange (iie s.-première moitié du iiie s.)

54Cette troisième phase d’occupation est caractérisée par l’adjonction d’au moins une pièce au bâtiment : l’espace D (Fig. 5 et 18). À l’image du premier état de la grange, la partie ouest de la construction a un plan parfaitement lisible (cf. supra). A contrario, la partie orientale, en particulier l’angle est de l’édifice, est totalement détruite.

Fig. 18 - Plan des vestiges de la période 1, phase C.

Fig. 18 - Plan des vestiges de la période 1, phase C.

G. Poitevin, Inrap

55Cette extension intervient probablement au iie et/ou première moitié du iiie s. compte tenu de la découverte de mobilier en céramique découverte en position résiduelle dans les US liés au chantier de récupération (période 2). En effet, citons les tessons de :

  • sigillée de Gaule centrale de la phase 7, soit de la deuxième moitié du iie et/ou première moitié du iiie s. (Bet et Delor 2000) ;

  • de jatte à bord rentrant en céramique commune sombre (Fig. 33 : iso. 16) ;

  • d’amphore ligérienne, de type Gauloise 4 (Fig. 33 : iso. 13).

  • 20 Répartie dans les US 1212, 2007, 2011, 2012, 2013, 2048 et 2047.

56Le cas de la jatte iso. 120 doit être signalé. Cette forme est conçue plutôt dans le courant du iie, voire dans la première moitié du iiie s. Elle est d’ailleurs associée ici à un pot à lèvre ronde, d’un modèle fréquent au cours du iiie s. (Fig. 33 : iso. 4) (Chambon et Simon 2014).

57Cet ajout, rectangulaire, est délimité par quatre fondations, dont une, au nord-ouest, subsiste de l’état précédent. Elle mesure ainsi 4,10 × 3,15 m, soit une emprise au sol d’environ 13 m2 hors tout pour une surface utile interne de 6,5 m2 (Fig. 19). Les relations stratigraphiques sont claires, les murs du second état sont posés contre ceux du premier état (Fig. 20). En outre, les matériaux et les techniques de construction diffèrent entre les deux états. Contrairement à l’état 1, l’édification de la pièce D n’est pas précédée par un décaissement intégral de la surface bâtie. Les fondations sont aménagées dans des tranchées étroites classiques. Ces dernières mesurent en moyenne 0,80 m de large pour une profondeur conservée de 0,20 m. Leurs parois sont verticales, légèrement évasées et leur fond est plat. Ces tranchées sont comblées de blocs et pierres calcaires non équarris, matériaux qui n’ont pas fait l’objet d’une sélection particulière et sont disposés sans organisation particulière. Quelques rares fragments de TCA et de céramiques sont également incorporés dans les constructions et l’ensemble est lié par du limon argileux brun foncé. Contrairement aux murs voisins du premier état, l’amorce de l’élévation n’est pas conservée. Dans l’ensemble, il ne s’agit pas de deux étapes d’un même projet de construction initial, mais bien d’une transformation du bâtiment, non planifiée initialement.

Fig. 19 - Principales dimensions du bâtiment, état 2.

Fig. 19 - Principales dimensions du bâtiment, état 2.

G. Poitevin, Inrap

Fig. 20 - Plan et profils des fondations du bâtiment, état 2 (espace D).

Fig. 20 - Plan et profils des fondations du bâtiment, état 2 (espace D).

B. Marsollier, Inrap

58La réalisation d’extensions sur les granges est régulièrement mise en évidence par les fouilles. Elles sont soit accolées à toute la largeur du mur pignon et ainsi prolongent les volumes du bâtiment initial (Poitevin et al. 2020 : 66-71), soit sur une partie d’un des murs (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 166). Les élévations et les toitures doivent alors prolonger totalement ou partiellement le bâti existant, sous la forme d’appentis. Pour ce bâtiment, deux hypothèses peuvent être énoncées :

59– la plus simple consiste à restituer la pièce D comme un appentis accolé à l’angle sud-ouest de la grange (Fig. 21 : hypothèse A). Les élévations se détacheraient visuellement alors de manière nette de l’extension, présentant un toit à pan unique et éventuellement sans communication directe entre les espaces A et D ;

Fig. 21 - Hypothèses A et B de restitution du plan du bâtiment, état 2.

Fig. 21 - Hypothèses A et B de restitution du plan du bâtiment, état 2.

G. Poitevin, Inrap

60– la seconde hypothèse tient compte de plusieurs paramètres (Fig. 21 : hypothèse B) : le quart est du bâtiment a disparu, à la suite de la récupération des matériaux puis de l’érosion, permettant éventuellement de proposer un plus important remaniement de la façade sud ; par son emplacement et sa forme, la pièce D est relativement similaire aux pavillons d’angles C et B. Il n’est donc pas exclu que la façade sud ait alors reçu un traitement identique à celle au nord. Par symétrie, un quatrième pavillon d’angle pourrait dès lors être restitué à l’est. Cette restitution par symétrie s’appuie sur des plans de grange à double façade symétrique, dite à plan en croix (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 162).

61Cette seconde hypothèse est privilégiée car ces bâtiments à quatre pavillons d’angle et à deux porches d’accès vers l’espace interne sont attestés essentiellement en Petite Beauce. Si ce type de construction est connu à ce jour par la prospection aérienne et en diagnostic, aucun n’a été fouillé dans son intégralité (Delétang 1982 : 80-81 ; Cherdo et Poitevin 2009 : vol. 1, 154-155).

62La restitution d’un quatrième pavillon d’angle pour le bâtiment est en effet très plausible, permettant d’ouvrir une nouvelle piste de réflexion. Il s’agit d’une des variantes de la grange à plan classique (cf. supra). Selon cette hypothèse, ce plan en croix pourrait être ainsi, dans un certain nombre de cas, un agrandissement du plan-type basique. Il ne constitue plus alors une variante du plan classique mais plutôt une évolution de ce dernier, lui-même issu d’un module de base rectangulaire simple. Le plan en croix constituerait le dernier stade d’une évolution typologique des bâtiments de type grange. Il est également intéressant de constater que l’aire de diffusion du plan en croix concorde avec l’une des zones géographiques où les granges à plan classique sont les plus diffusées : la Beauce (Ferdière, Gandini et Nouvel 2017 : 170). Cette région de plateau où se développe une agriculture importante a pu conduire les bâtisseurs à adapter le plan de base aux besoins spécifiques de ce terroir. La fonction de grenier est attestée pour certaines de ces granges à plan en croix (Ferdière 2015 : 27). Ces bâtiments sont regroupés dans la catégorie de type 3 à piliers internes de la typologie de Ferdière, Gandini et Nouvel 2017.

6. Période 2 : Le chantier de récupération (seconde moitié du iiie s.)

63Les vestiges découverts à l’occasion de la fouille documentent principalement deux périodes d’occupation du site antique. La première, décrite précédemment, illustre la mise en place d’une part d’un établissement rural (période 1, phase A), avec la construction d’une grange (période 1, phase b), puis son agrandissement (période 1, phase C). Les dépôts correspondant à l’occupation et aux activités liées à ce secteur et au bâtiment ne sont pas conservés. Si les labours ont indubitablement contribué à ce gommage, la cause essentielle en est le phénomène de récupérations de matériaux sur le bâtiment à la période 2 (Fig. 5 et 22). Ce chantier de démolition-récupération se manifeste par des prélèvements (absences) de matériaux sur le bâti, des couches de démolition et divers foyers sommaires apparemment implantés au cœur du chantier. La composition des US de démolition et la stratigraphie permettent de restituer le déroulement des travaux (infra, 6.1. à 6.5).

Fig. 22 - Plan des vestiges de la période 2.

Fig. 22 - Plan des vestiges de la période 2.

B. Marsollier, Inrap

  • 21 ISO 102 : US 2034 ; ISO 101 : US 2013.
  • 22 Sesterce ; Commode (à partir de 192) ; atelier : Rome ; métal : cuivre ; diam. : 29 mm ; poids : 23 (...)
  • 23 Antoninien ; Étruscille (250) ; atelier : Rome ; métal : billon ; diam. : 21 mm ; poids : 2,93 g ; (...)

64Sur les 24 US positives enregistrées, seules seize de la période 2 ont livré du mobilier en céramique. Le faible corpus totalise 148 restes pour un NMI total de 19. Dans le détail, ces lots de céramique contiennent de nombreux éléments résiduels provenant des phases A et B de la période 1. Dans l’ensemble, l’amplitude chronologique est large et comprend le iie s. et la première moitié du iiie s. Ce mobilier ne permet pas l’obtention de datations fines. La valeur même de cette fourchette chronologique est d’ailleurs à voir à la lumière par deux monnaies découvertes dans les gravats des démolitions : les monnaies iso. 102 et iso. 10121, découvertes à la base de la stratigraphie de la période 2, épisode du début des récupérations. L’US 2034 est datée par la céramique du ier s. mais la monnaie iso. 102 a été émise à partir de 192 ap. J.-C.22. Quant à l’US 2013, elle est datée par la céramique iie-première moitié iiie s. et la monnaie iso. 101 a été frappée en 250 ap. J.-C.23. Le décalage entre les datations céramiques et monétaires est important. La monnaie iso. 101 fournit un terminus post quem pour le commencement du chantier de récupération du milieu du iiie s. De fait, le mobilier en céramique est pour l’essentiel en position résiduelle et issu d’horizons remaniés.

6.1. La récupération des planchers

65Le hiatus chronologique entre la construction du bâtiment et sa destruction permet d’envisager la présence initiale d’un plancher (cf. supra, 5.2.1). En de nombreux points des pièces A, B et C, la base des parements des murs a été arrachée. Ces manques dans la maçonnerie ont sans doute plusieurs origines. Il pourrait s’agir d’un délabrement progressif de la base des murs durant l’utilisation du bâtiment, mais ceux-ci pourraient aussi marquer une première phase de récupération ou résulter de l’arrachage du plancher. Les travaux de récupération de matériaux ont en effet vraisemblablement – logiquement – commencé par l’enlèvement de ces derniers.

6.2. Des aménagements temporaires

66Dans la pièce principale (A) du bâtiment, cinq foyers ont été découverts : F522, F526, F527, F528 et F529 (Fig. 22). Leur distribution, exclusivement sur la partie sud-ouest de cette pièce, est à mettre en lien avec un meilleur niveau de conservation dans ce secteur. Ils sont adossés à un mur ou dans un angle de pièce. Dans la majorité des cas, le parement des murs est déjà récupéré. Les foyers se distinguent par les traces de chauffe et de rubéfaction conservées sur le socle calcaire sous-jacent, les pierres calcaires et le mortier des murs. Parfois, une sole est sommairement aménagée avec quelques pierres calcaires et des fragments de TCA.

67Les charbons de bois et les fragments de terres rubéfiées issus des foyers sont éparpillés dans la pièce A (Fig. 8 : US 2013). Parmi ces résidus, la présence de clous de menuiserie et de tige métallique, portant des traces de feu, suggère que le combustible utilisé est issu de récupération de bois d’ameublement ou d’huisserie. Les foyers et le sol alentour ont livré peu de rejets, traduisant sans doute une faible activité anthropique. Certains des fragments de céramique ont subi l’exposition à une forte chaleur. La contemporanéité du fonctionnement des foyers et du dépôt des fragments de céramique est évidente. La datation de ces tessons couvre le iie s. et le début du iiie s. L’aménagement de ces cinq foyers est rudimentaire et leur utilisation de courte durée. Leurs implantations et le combustible choisi suggèrent un certain opportunisme. L’US 2013 contenant des charbons de bois issus des foyers avait également livré la monnaie iso. 101, d’Etruscilla, émise en 250 (cf. supra).

  • 24 Étude menée par Guillaume Hulin, Inrap.

68La mise en place du sol de la pièce d’angle B, composé de limon argileux brun, intervient dans un laps de temps court, entre la première phase de récupération des planchers et la démolition complète du bâtiment (Fig. 8 : coupe 4). Seuls cinq restes de céramique fournissent une fourchette chronologique large, de la seconde moitié du ier s.-iiie s. Sa spécificité est de receler de nombreux objets ou fragments d’objets métalliques (fer et alliages cuivreux) : clous de construction, clous de menuiserie, clous décoratifs un élément de penture ou de ferrure, plaques et tiges métalliques, clef, mors de filet, gouttes en alliage cuivreux. De nombreux domaines d’activité, tels que production, transport, immobilier, domestique, sont représentés. En admettant que ces pièces correspondent à la phase d’utilisation de la pièce B, ce large éventail ne permet pas de statuer sur la vocation exacte de cet espace, ces différents domaines d’activités étant difficilement conciliables dans un si faible espace. La présence des gouttes en alliages cuivreux avait orienté la fouille de cette pièce vers la détection d’une zone de travail des métaux (Poitevin et al. 2014 : 80). Les données enregistrées lors de l’étude de susceptibilité magnétique24 oscillent entre 100 et 150×10-5 uSI. Que ce soit pour le terrain naturel ou pour les dépôts archéologiques, ces taux correspondent à des valeurs relativement hautes, avec une légère augmentation pour ces derniers. L’absence de forte anomalie, notamment sur les sols du pavillon B, invite cependant à rejeter l’hypothèse d’un espace de travail du fer. En revanche, le travail des alliages cuivreux, métaux non magnétiques, au cours de la période 2, de récupération, reste envisageable. La fouille complète de l’espace B a permis de replacer correctement dans la stratigraphie les objets issus du diagnostic. Finalement, l’US 2003 et les objets rattachés sont attribués à la période 2, moment où les matériaux de la grange sont en cours de récupération. Le dépôt des objets a dû s’effectuer entre deux phases de récupération du bâtiment. Les récupérations de matériaux qui s’opèrent et se poursuivent tout au long de la période 2 sont méthodiques (cf. infra). Les différents objets sont peut-être les vestiges d’un amas de métaux, stocké dans la pièce B avant leur transfert. Les objets en fer ne sont pas rassemblés au sein d’une forge en vue d’une éventuelle réparation. Ces matériaux peuvent provenir soit d’un amas métallique, soit d’un tas de pièces de bois qui aurait conservé ses éléments métalliques. Dans la seconde hypothèse, ces pièces de bois pourraient être issues de meubles, charpente, huisserie…, une diversité sans doute issue de plusieurs points d’approvisionnement au sein du site. La pièce B aurait pu servir d’espace de stockage pour le combustible nécessaire à l’alimentation des foyers observés dans la pièce A.

6.3. La récupération de la toiture

6.3.1. Description

  • 25 US 2011 et 2010.
  • 26 Fragments de TCA servant à la constitution de remblai ou sols, mortier de tuileau, éléments de bloc (...)
  • 27 Équivalente à l’US 2011.

69La récupération des planchers et le fonctionnement des foyers sont rapidement suivis par la mise en place d’US25 composées de fragments de tegulae et d’imbrices dans les pièces A et C (Fig. 23). Ces US contiennent également onze fragments de céramique dont la datation est comprise entre le iie s. et le début du iiie s. L’US 2010 sera évoquée très rapidement, car elle n’est conservée que dans les angles de la pièce C. L’US 2011 apporte des informations plus riches : observée sur environ 14 m2 environ et sur une épaisseur comprise entre 0,06 et 0,15 m, elle a fourni non moins de 806,6 kg de tuiles, pour 6 675 restes. La fouille et l’étude de ces TCA ont permis d’interpréter cette US comme le dépôt des vestiges après récupération partielle de la toiture encore en place ou déjà effondrée (cf. 6.3). Ce dépôt est le résultat d’un tri, les éléments intacts ou réutilisables étant totalement absents. Cependant, la localisation et la morphologie définitives de l’US ne résultent pas d’une seule opération de récupération. Les fragments de tuiles forment un amas principal, localisé dans la partie occidentale de la pièce A (Fig. 23). Les autres fragments de TCA découverts par ailleurs sur les sols sont peu nombreux et leurs dimensions sont millimétriques. Lors de la première opération de récupération, les tuiles ont sans doute été consciencieusement entassées. Le tri n’a pas donné lieu à la formation d’un dépôt diffus, dont les éléments auraient alors été répartis sur l’ensemble des sols. Les fragments ont été regroupés à l’intérieur du bâtiment et mis en attente. Ils ne représentent plus un stock de tuiles récupérées, mais une masse de matériaux de terre cuite réutilisable pour d’autres usages secondaires26, comme la réutilisation de fragments en matériau de construction tout-venant. Les limites de l’US 2011 sont nettes, assez abruptes, et ont l’apparence de fronts de taille. Dans la pièce C, l’US 201027 n’est présente que dans les quatre angles de l’espace : il semble s’agir d’une seconde action des récupérateurs, observée en négatif. La formation des US 2011 et 2010 est donc l’aboutissement de deux phases de récupérations ayant chacune son propre but. En résumé, le démantèlement des matériaux de la couverture a connu plusieurs étapes : tri réalisé vraisemblablement sur le toit, et premier prélèvement (tuiles réutilisables) ; stockage des restes en vue de leur transfert ultérieur ; second prélèvement (fragments de TCA en matériau de construction). Ce dernier n’a que partiellement altéré l’US 2011, la demande ou le besoin de matériaux s’étant sans doute tari. L’US 2010 a presque intégralement été récupérée et ne subsiste que dans les zones les moins accessibles de la pièce C. L’absence de sédiment d’origine colluviale indiquerait un laps de temps court entre chaque étape. Le réemploi de matériaux est fréquemment observé sur les sites antiques (Ballet, Cordier et DieudonnÉ-Glad 2003). Parfois, ces récupérations témoignent d’une organisation de la chaîne opératoire du travail, comme observée pour le bâtiment de notre site (Nin et Leguilloux 2003 : 146-147).

Fig. 23 - Plan du bâtiment maçonné avec les photographies géoréférencées de l’US 2011 (TCA).

Fig. 23 - Plan du bâtiment maçonné avec les photographies géoréférencées de l’US 2011 (TCA).

G. Poitevin, Inrap ; Y. Lozahic, Inrap

  • 28 Disposition et chevauchement.
  • 29 Longueur recouvrement × largeur recouvrement.
  • 30 Entre 9 et 12 cm.
  • 31 Les pentes des toitures antiques semblent comprises entre 17 et 23 degrés, soit entre 30 et 43 %.
  • 32 Estimée à environ 2 000 individus, soit environ 8,3 tonnes de tegulae, pour un poids moyen par tegu (...)

70La masse des prélèvements de tuiles et de matériaux en terre cuite n’est pas quantifiable. L’absence de module complet d’imbrex ne permet pas l’estimation de leur NMI dans l’US 2011. En outre, la mise en œuvre des imbrices sur le toit28 ne peut pas être déterminée. En revanche, une estimation de la superficie couverte par les tegulae identifiées dans l’US 2011 peut être réalisée. Pour ce faire, la base de calcul sera le NMI de tegulae défini par le poids, à savoir 160 (cf. 6.3.5.2). Ce NMI est multiplié par la superficie moyenne des tegulae. De cette dernière valeur est soustrait le recouvrement29 entre les tegulae, afin d’obtenir la superficie minimale de couverture des tuiles mises en œuvre. Le recouvrement mesuré entre les tegulae complètes est estimé en moyenne à 9 cm, selon la norme en général constatée30 (Nauleau 2013 : § 16). En définitive, le NMI de 160 comptabilisés permettrait de couvrir 12,3 m2. La part de tegulae conservée dans l’US 2011 peut être comparée à celle nécessaire au recouvrement total du bâtiment. La grange a une superficie au sol d’environ 142 m2, soit une surface de couverture d’environ 154 m2 avec une pente de toiture à 2331 (Demandrille et Cambou 2008 : 4-5 ; Lyonnet 2008 : 24 ; Nauleau 2013 : § 15-17). Ainsi, la part de tegulae fragmentées laissée par les récupérateurs antiques représente à peine 8 % de celles nécessaires à la couverture de l’édifice32.

5.3.2. Le corpus des TCA de l’US 2011

71Constituée de tegulae, d’imbrices et TCA indéterminées, l’US 2011 est donc localisée dans la pièce A du bâtiment (Fig. 23) et l’on a vu que sa composition et sa position stratigraphique suggèrent que la couche est résultat de l’effondrement d’une toiture ou plutôt de son remaniement en vue de récupération. Ce dépôt totalise 6 675 restes pour un poids total de 806,6 kg (Fig. 24 et 25). La terminologie utilisée pour cette étude des tuiles et la localisation des prises de dimensions reprennent ceux employés par Régis Bontrond (2013 : § 7 et fig. 2).

Fig. 24 - Distribution du pourcentage des NR et des poids par catégories de tuile.

Fig. 24 - Distribution du pourcentage des NR et des poids par catégories de tuile.

G. Poitevin, Inrap

Fig. 25 - Répartition des tuiles de l’US 2011, par NR/m² et par kg/m² ; découpage des classes selon la méthode des seuils naturels de Jenks.

Fig. 25 - Répartition des tuiles de l’US 2011, par NR/m² et par kg/m² ; découpage des classes selon la méthode des seuils naturels de Jenks.

G. Poitevin, Inrap

5.3.3. Méthodologie sur le terrain

72Un carroyage de 20 carrés d’1 m2 a été implanté sur l’intégralité de la surface de l’US. À la fouille, tous les fragments de tuile ont été comptés et pesés par carré et selon les différentes catégories (Poitevin et al. 2017 : Tableau 12 et 13). Compte tenu de la masse et du volume que représentait l’US, seuls les carrés 3 et 9 ont été exhaustivement prélevés, à titre d’échantillons, afin de réaliser des remontages et des mesures en post-fouille. Ces deux carrés ont été choisis de manière plus ou moins arbitraire : ils ne devaient pas être trop proches de la limite de l’US 2011, afin d’éliminer d’éventuels effets de fouille, et devaient a priori être représentatifs de l’ensemble. Mais, l’absence de tuile visuellement intacte et/ou complète, constatée à la fin du nettoyage de surface de l’US, a poussé à choisir des carrés où les individus semblaient les mieux préservés. L’échantillonnage réalisé sur les carrés 3 et 9 représente environ 16 % des restes de l’ensemble de l’US et 15 % de leurs poids. Sur les carrés non prélevés, quelques individus présentant des caractéristiques intéressantes ont en outre été prélevés : marque particulière, présence significative de mortier, individus quasi entiers…

5.3.4. Les pâtes

  • 33 Analyse réalisée sur la majorité des tuiles. Description : Jérôme Bouillon, céramologue, Inrap.

73La description de la pâte a été réalisée par examen macroscopique pour identification des différents éléments33. Les tegulae et imbrices sont composées de pâte généralement rouge à la cuisson, mais dont la teinte varie de l’orange au brun (Fig. 26). Elle est micacée et contient fréquemment des éléments de quartz laiteux millimétriques. Ces deux éléments proviendraient de l’exploitation d’argiles contenues dans les alluvions de la Loire, accessibles a peu de distance du site. Des concentrations plus ou moins importantes d’oxyde métallique sont visibles. Les tuiles étudiées forment une production homogène, issue d’un même banc d’exploitation et vraisemblablement d’un unique atelier, dont la localisation est proche.

Fig. 26 - Macro-photo de pâte de tegula (x 12,5).

Fig. 26 - Macro-photo de pâte de tegula (x 12,5).

B. Pradat, Inrap

5.3.5. Les tegulae

5.3.5.1. Caractéristiques générales des tegulae

74La longueur complète des tegulae a pu être mesurée sur cinq individus issus de remontages, dont les longueurs varient entre 35,8 et 36,6 cm, avec une moyenne de 36,1 cm et un écart-type de ± 0,3 cm. L’amplitude, de 0,8 cm, est faible et permettrait d’identifier un seul module au sein de l’US 2011. Ce constat est cependant à considérer avec précaution, compte tenu de la faiblesse du nombre de tegulae complètes. Sur les dix individus où la mesure est possible, la largeur est comprise entre 27,8 et 29,8 cm avec une moyenne de 28,4 cm (écart-type de ± 0,7 cm). Les tegulae complètes ou quasi complètes sont classiquement rectangulaires, à l’image de celles étudiées sur l’atelier de potier de Vrigny (Loiret) (Ferdière, Guillemard et Lanos 2012 : 101).

75Malgré des largeurs légèrement supérieures, les dimensions des tegulae sont comparables à celles étudiées sur les sites de l’atelier de Vrigny (Loiret) et du sanctuaire de Brienon-sur-Armançon (Yonne) (Fig. 27). Comparés à d’autres sites régionaux ou extrarégionaux, ces trois sites possèdent un corpus de tegulae de petit module.

Fig. 27 - Comparaison des dimensions en centimètres des tegulae du site avec plusieurs autres sites gallo-romains de Lyonnaise et du nord-est de l’Aquitaine.

Site

Longueur min. (cm)

Longueur max. (cm)

Longueur moyenne (cm)

largeur min. (cm)

largeur max. (cm)

largeur moyenne (cm)

Rapport L/l moyen

ZA le parc de Châteaux, La Chaussée Saint-Victor (41)

35,8

36,6

36,1

27,8

29,8

28,4

1,25

Châtillon, Vrigny (45)

33

38,6

35,9

24,1

29,3

25,7

1,4

Pile Funéraire, Cinq-Mars-la-Pile (37)

34,6

37

?

30,2

30,7

?

?

Pouillé-Thésée (41)

40

45

?

30

36

?

?

Atelier de tuilier, Meudon (92)

39

42

?

29

31

?

?

Atelier de tuilier, Lezoux (63)

43

52

?

32

39

?

?

Fontaine Merle, Trouhaut (21)

?

?

40

?

?

Mâlain (21)

?

?

41

28

30

?

?

Sanctuaire, Genainville (95)

37

38,5

?

26

31

?

?

Sanctuaire, Brienon-sur-Armançon (89)

34,5

37

?

26,5

28,6

?

?

Atelier de tuilier, Suèvres (37)

35

45

42,7

31,5

34

33,4

1,28

G. Poitevin, Inrap

76Sur les quatre individus où le calcul est réalisable, le rapport L/l varie de 1,21 à 1,29, avec une moyenne de 1,25. Ce rapport est donc légèrement inférieur à celui de 4/3 (soit 1,33) pour les tegulae des sites civils au nord de la Loire (Goulpeau 1988 : 102-103). Il reste toutefois dans la norme et marque sans doute un particularisme local (Bontrond 2013 : § 10).

77L’épaisseur moyenne de la tranche aval est de 2,3 cm, avec une amplitude faible de 0,4 cm. Celle de la tranche amont est de 2 cm : avec une amplitude de 0,9 cm, les variations d’épaisseur de la tranche amont sont plus importantes que celles aval. En moyenne, la tranche aval de la tegula est légèrement plus épaisse de 0,3 cm que celle amont, ce qui est assez insignifiant. Mais cette différence est systématiquement soulignée dans les études de TCA et semble être la norme (Bontrond 2013 : § 11). Elle permet un déplacement du centre de gravité de la tegula et ainsi une meilleure stabilité sur le toit. La surface supérieure du plateau porte régulièrement des marques : piquetage, desquamation légère. Ces dégradations de matériau sont dues à l’usure liée aux intempéries. Les parties protégées de la tegula, telles que les rebords et la partie du plateau où s’effectue le chevauchement entre deux tegulae, sont quant à elles intactes.

78La hauteur moyenne des rebords atteint 4,3 cm, avec un écart-type de ± 0,39 cm. Elle est comparable à celles relevées à Vrigny et à Châteaubleau (Seine-et-Marne) (Ferdière, Guillemard et Lanos 2012 : 105 ; Bontrond 2013 : § 13). Sur les sept individus où la mesure est possible ici, la hauteur des rebords diminue légèrement – de l’ordre 0,1 à 0,8 cm – d’aval en amont de la tegula. Cette différence contribue encore au déplacement du centre de gravité (cf. supra). L’épaisseur des rebords est comprise entre 1,7 et 3,6 cm, une amplitude importante mais courante, avec une moyenne à 2,8 cm. Le rebord ne présente jamais une largeur constante et s’amincit vers son extrémité amont.

  • 34 Présence-absence.

79Sur les 118 profils de rebords complets, environ 97 % ont un profil interne oblique, avec un sommet présentant un oblique vers l’intérieur et un sillon longitudinal extérieur marqué (Fig. 28). Moins de 3 % des profils ont un profil interne oblique, un sommet présentant un oblique vers l’intérieur et plat vers l’extérieur. 100 % des profils externes sont verticaux. Le sillon longitudinal extérieur ne paraît pas être un critère pour définir deux types de rebords34. En effet, le sillon est créé vraisemblablement alors que la tuile est encore dans le cadre de bois et donc avant la phase de découpe des encoches. Il est façonné au doigt de l’amont vers l’aval. Sur quelques individus complets, ce sillon n’est parfois marqué que sur une partie de la longueur. Son absence sur quelques centimètres, en partie amont du rebord et avant l’emplacement de la future encoche amont, forme un profil au sommet oblique vers l’intérieur et plat vers l’extérieur. En conclusion, les deux types de profil décrits précédemment peuvent être présents sur un même rebord. Tous les rebords étudiés appartiennent à un lot homogène. Les rares différences observées semblent liées à de menus changements du tour de main du tuilier. Les traces de mortier sont régulièrement visibles sur les rebords les tegulae. Elles couvrent généralement le sommet du rebord et débordent parfois sur la tranche. Pour une toiture, le mortier sert de joint entre deux tegulae et l’imbrex qui recouvre et protège ce même joint. Pour l’US 2011, les joints de mortiers visibles sur les tegulae portent régulièrement l’empreinte de la tegula attenante.

Fig. 28 - Profils types de tegula (a) et d’encoches aval (b et c).

Fig. 28 - Profils types de tegula (a) et d’encoches aval (b et c).

G. Poitevin, Inrap

80La base interne du rebord est soulignée, sur le plateau, à 47 reprises, d’une gorge longitudinale d’1 cm de largeur au maximum et d’1 à 2 mm de profondeur : dans la majorité des cas, elle est peu profonde, voire à peine visible. D’après les critères descriptifs établis par Benjamin Clément (2009 : 618), les gorges recensées ici peuvent être classées dans la catégorie des “gorges esquissées”. Sur les sites étudiés en Gaule du Centre-Est, ces gorges esquissées sont prises en compte dans l’évolution typo-chronologique des tegulae. Elles sont présentes entre 90 et 40 av. J.-C., puis de la fin du ier s. ap. J.-C. jusqu’au iiie-ive s. Entre ces deux intervalles, la gorge est nettement plus profonde et visible (Clément 2009 : 618-619). Les tegulae étudiées ici ont assurément été fabriquées au cours du Haut-Empire et appartiennent à un bâtiment construit au cours de la seconde moitié du ier s. ap. J.-C. Le critère typo-chronologique mis en exergue par B. Clément n’apporte donc aucune précision supplémentaire pour dater l’US 2011. En revanche, la présence ou l’absence de gorge n’est pas pertinente pour ce lot. En effet, les deux cas de figure ont été observés sur un même individu remonté.

Les encoches

81Ces encoches sont destinées à l’emboîtement des tegulae sur la pente du toit. L’encoche aval est le résultat de deux découpes successives : l’une verticale (ou droite) du rebord extérieur et l’autre en biseau, de la partie basse de l’angle (Fig. 28 et 29). Les traces ou entailles laissées par le couteau ne suggèrent pas une préférence d’enchaînement entre les deux opérations. La longueur moyenne des encoches aval est de 5,4 cm, la grande majorité des encoches se concentrant entre 4,7 et 6,3 cm, soit une amplitude d’1,6 cm. La largeur moyenne des encoches aval est de 3 cm, la très grande majorité des largeurs étant comprises entre 2,5 et 3,8 cm. Le décrochement de l’encoche, c’est-à-dire la largeur correspondant à la découpe verticale de l’encoche, mesure en moyenne 0,9 cm, la majorité des mesures variant de 0,7 à 1,3 cm. La hauteur moyenne de l’encoche aval est de 2,4 cm. Avec 2,1 cm, l’amplitude des valeurs est importante. Cependant, la grande majorité des encoches ont des hauteurs comprises entre seulement 2 et 2,9 cm. Dans l’ensemble, les mesures des encoches aval paraissent homogènes : longueur, largeur, hauteur et décrochement. Dans la majorité des cas, les plus importantes amplitudes correspondent à de rares exemplaires hors norme (Fig. 30).

Fig. 29 - Encoche aval et gorge types de tegulae.

Fig. 29 - Encoche aval et gorge types de tegulae.

N. Holzem, Inrap

Fig. 30 - Récapitulatif des mesures des encoches aval des tegulae de l’US 2011.

Longueur (cm) de l’encoche aval

Largeur (cm) de l’encoche aval

Hauteur (cm) de l’encoche aval

Décrochement (cm) de l’encoche aval

min.

max.

moy.

écart-type

min.

max.

moy.

écart-type

min.

max.

moy.

écart-type

min.

max.

moy.

écart-type

3,8

6,8

5,4

0,71

2

4,7

3

0,5

1,5

3,6

2,4

0,42

0,4

1,6

0,9

0,26

G. Poitevin, Inrap

82L’encoche amont consiste en une découpe plate ou oblique du rebord. Elle atteint à peu près la surface supérieure du plateau de la tuile. Leur longueur moyenne est de 5 cm. Les 24 mesures enregistrées varient de 3,6 et 6,7 cm, de manière semble-t-il assez aléatoire, et aucun groupe ne se dégage. L’amplitude est de 3,1 cm.

83Sur les quatre individus où les mesures sont possibles, l’encoche aval est systématiquement plus longue que celle amont, avec un écart variant de 0,6 à 1,5 cm. Si l’on prend en compte les mesures moyennes des encoches amont et aval, le chevauchement des tegulae en œuvre est de l’ordre de 5 cm.

Les marques

84Seuls trois fragments de tegula possèdent des marques tracées à l’aide d’un outil, les marques étant donc très rares sur le corpus de tuiles du site (Fig. 31). Deux d’entre elles sont placées sur la partie amont du plateau et une sur la partie verticale du rebord. Les demi-cercles digités régulièrement observés dans les études de TCA sont ici totalement absents. Les interprétations de ces marques sont nombreuses : comptage de lots ou de production, marque de tâcherons, marque de séchage, d’ateliers… (Brodribb 1987 : 104 ; Goulpeau et Le Ny 1989 : 113-117 ; Charlier 1995 ; Charlier 1999 : 164 ; Rebuffat 2000 : 165). Les trois marques présentées ici ne permettent de privilégier aucune de ces interprétations.

Fig. 31 - Marques présentes sur certaines tegulae.

Fig. 31 - Marques présentes sur certaines tegulae.

N. Holzem, Inrap

5.3.5.2. Le calcul des NMI des tegulae

Par les longueurs des bords

85Après remontage, toutes les longueurs de rebords de tegulae provenant des carrés-témoins 3 et 9 ont été mesurées puis additionnées. 123 rebords de tegulae ont ainsi pu être mesurés. Ils représentent 1 667,7 cm linéaires de rebords. Pour obtenir le NMI, cette somme a été divisée par 2 (= 833,85) – chaque tuile entière comportant deux bords –, puis divisée une fois de plus par la longueur d’une tegula entière de ce lot (4 exemplaires ici). À partir de la longueur moyenne des tegulae (cf. 6.3.5.1), les carrés 3 et 9 totalisent 24 NMI. La faible amplitude de longueur observée entre les différentes tegulae entière homogénéise les résultats. Avec ces longueurs des bords de tegulae, les deux carrés-témoins présentent donc en moyenne 12 individus par mètre carré.

Par le poids

86Le calcul du nombre d’individus en utilisant le poids se heurte au faible nombre d’exemplaires entiers permettant une pesée. Cependant, l’ensemble des dimensions enregistré suggère une bonne homogénéité du lot et donc une bonne probabilité de représentativité de ces poids. Les quatre individus entiers ont des poids compris entre 4 et 4,5 kg, pour une moyenne d’environ 4,2 kg. Ces quatre poids rapportés à ceux de l’ensemble des fragments de tegulae pesé sur le terrain permettent d’obtenir différents NMI. Les valeurs obtenues sont comprises entre 11 et 14 pour les carrés 3 et 9. Les variations entre NMI sont légèrement plus importantes que celles obtenues à partir des longueurs (supra). Cependant, l’ensemble du lot, avec ses 665,9 kg de tegulae, totalise un NMI de160, soit une moyenne de 12 individus au mètre carré. Cette valeur apparaît donc identique à celle obtenue par les longueurs.

Par le nombre d’encoches

87Sur les carrés 3 et 9, 86 restes ou remontages de tegulae ont d’une à quatre encoches, pour un total de 105 encoches. La tegula a la caractéristique de posséder quatre encoches parfaitement reconnaissables. L’étude des encoches issues des carrés 3 et 9 a permis d’identifier leurs emplacements initiaux (latéralisation) : amont/aval et gauche/droite. Des disparités importantes ont été observées d’un carré à l’autre et d’une encoche à l’autre. Sur les deux carrés-témoins, les parties aval des tegulae sont les mieux représentées, avec 31 encoches aval gauche et 29 aval droite contre 19 encoches amont gauche et 26 amont droite. L’encoche amont gauche est largement sous-représentée sur le carré 3, avec un rapport proche d’1 pour 2 par rapport à l’encoche aval gauche, par exemple. Ce constat peut être également fait sur le carré 9, mais dans une moindre mesure.

88L’encoche aval gauche est la mieux représentée sur le carré 3, avec 15 individus. Sur le carré 9, l’encoche aval droite rassemble le plus d’individus (18). L’addition par type des encoches des carrés 3 et 9 tend à réduire les écarts numériques, au moins pour les encoches aval. En général, les amplitudes entre les valeurs sont importantes et le calcul du nombre d’individus à partir des encoches apparaît donc plus approximatif que les méthodes utilisant les longueurs ou le poids. Cependant, cette méthode suggère un nombre d’individus bien plus important et pouvant atteindre 18 individus par m2 au lieu des 12 obtenus par le poids ou les longueurs.

5.3.6. Les imbrices

89Les 841 restes d’imbrex recueillis représentent environ 13 % du corpus et 11 % (85,4 kg) du poids total de tuiles pesées (Fig. 24). Les imbrices découvertes sont donc peu nombreuses et très fragmentées. Les recollages ont permis d’obtenir quatre individus présentant une largeur complète, mais ce n’est pas le cas pour la longueur. Sans individu complet, le calcul de NMI est par conséquent impossible. Sur les quatre individus comportant un profil complet, il est impossible de différencier la partie aval de celle amont. En outre, deux sont surcuits et présentent de fortes déformations. Les deux imbrices restantes ont des largeurs de 12,3 et 13,8 cm, des hauteurs de 5 à 6,2 cm et des épaisseurs comprises entre 1,1 et 2,3 cm. Elles ont un profil en arc brisé plus ou moins marqué (Fig. 32). Dans quelques cas, la face inférieure des imbrices a conservé des traces de mortier, prouvant leur utilisation en toiture ici comme couvre-joint de tegulae. Par ailleurs, des fragments de mortier de chaux ayant une forme convexe ont été découverts. Ils sont caractéristiques de joints employés pour le scellement d’imbrices sur les joints de rebords de tegulae (Coutelas 2009 : 83-84). Dans l’ensemble, la faible représentation des imbrices dans le corpus est remarquable, mais en fait assez couramment observée. La mise en œuvre de ce type de tuile sur le toit reste, comme pour de nombreux corpus de TCA antiques, théorique et basée sur de rares exemples de toitures effondrées et conservées.

Fig. 32 - Profils de deux imbrices.

Fig. 32 - Profils de deux imbrices.

G. Poitevin, Inrap

5.3.7. Synthèses

90L’examen des restes des tuiles du site a exclusivement reconnu des tegulae et des imbrices. La proportion de fragments non identifiés, 32 % des restes pour seulement 7 % du poids, ne permet pas d’envisager la présence d’un autre type de TCA (brique, tubulure…). Ceci confirme donc que ces tuiles sont donc initialement bien issues d’une toiture, celle de l’édifice étudié. Leur lieu de découverte à l’intérieur du bâtiment, la présence de joints de mortier et les traces d’usures caractéristiques contribuent à justifier cette interprétation.

91La stratigraphie, l’étendue de l’US et la quantité de tuiles mettent en lumière une récupération ancienne et partielle. En effet, l’érosion du site ne permet pas d’expliquer totalement l’absence de tuile sur une vaste surface du bâtiment. Lors de la fouille, l’US 2011 avait déjà été interprétée comme un dépôt de récupération et non comme le résultat de l’effondrement de la toiture. Visuellement, les tuiles étaient très fragmentées et aucune organisation ne se dégageait. L’étude détaillée de ces TCA confirme cette première interprétation. Les tuiles complètes sont extrêmement rares et peu de remontages constatés au sein des carrés-échantillons, avec une sous-représentation de certaines parties de tuile telles que l’encoche amont gauche des tegulae et peut-être des imbrices. La proportion en NR ou en poids de chacun des types à l’intérieur des 20 carrés fouillés de cette US varie fortement. Toutes ces constatations permettent d’émettre deux hypothèses :

  • soit la couverture de tuile a pu faire l’objet d’une récupération partielle directement sur le toit. Les éléments jugés non réutilisables ont été jetés sur le sol et ont progressivement formé l’US 2011 ;

  • soit l’US 2011 peut être le résultat du tri des matériaux une fois la toiture effondrée de manière volontaire ou non.

92Si les récupérateurs ont eu le choix, dans le premier cas de figure, le nombre de tuiles intactes récupérables est logiquement plus important que dans le second.

  • 35 Longueur × largeur × hauteur.

93Les dimensions, les caractéristiques techniques et la pâte de ces tuiles suggèrent la présence d’un lot homogène au moins de tegulae, issue d’une même production. La tegula-type est rectangulaire et mesure 36,1 × 28,4 cm, avec des épaisseurs aval et amont respectivement de 2,3 cm et 2 cm. Le rebord a un profil interne oblique, avec un sommet présentant une oblique vers l’intérieur et un sillon longitudinal extérieur marqué. Hors déformation liée à la cuisson, le flanc externe du rebord externe est vertical. L’encoche amont consiste en une découpe plate ou oblique du rebord sur 5 cm en moyenne. L’encoche aval est formée par un décrochement et un biseau mesurant en moyenne 5,4 × 3 × 2,4 cm35. Le décrochement est de 0,9 cm. D’après les études réalisées par J.-F. Nauleau sur les tegulae provenant des Pays de la Loire (2013 : § 124-136), ces dimensions moyennes correspondraient à des productions tuilières s’échelonnant du début du iie au tout début du iiie s.

  • 36 Les tuiles en terre cuite ont pu remplacer une couverture réalisée à partir de matériaux périssable (...)
  • 37 Évolutions techniques, des dimensions, des pâtes.

94Les tuiles étudiées enrichissent le corpus régional. Cependant l’absence de datation précise demeure un problème pour son insertion dans une typo-chronologie locale. Les récupérations de matériaux interviennent au mieux à partir de 250 ap. J.-C. Elles permettent donc de situer la constitution de l’ensemble (US 2011) vers la seconde moitié du iiie s. Mais cela ne date pas la fabrication et la mise en œuvre des tuiles à la construction (couverture). D’autre part, le bâtiment est édifié au cours de la seconde moitié du ier s., soit environ deux siècles avant son abandon et la récupération de ses matériaux de construction. Il est impossible de savoir si les tuiles ont été mises en œuvre dès l’origine ou durant son fonctionnement, à l’occasion d’une réfection ou d’un changement de type de couverture36, par exemple lors de l’agrandissement de la période 2, phase C. Sur le long terme, l’approvisionnement auprès d’un seul atelier est en revanche envisageable, mais signifierait que sa production n’aurait connu aucune évolution37. Il n’est bien sûr pas possible de rattacher cette production à un atelier connu, compte tenu des lacunes documentaires en la matière : un atelier à Blois, hors de l’agglomération antique (Provost 1988 : 85 ; Ferdière 2008 : corpus en lien en ligne, s.v. Blois) reste hypothétique mais un four de tuilier (première moitié du ier s.) a en revanche été mis au jour à la sortie occidentale de l’agglomération antique de Suèvres (Couderc et al. 2016 : 120-127).

5.4. La récupération des parements

95Dans les pièces A et C, les US 2012 et 2009 recouvrent partiellement les tuiles des US 2011 et 2010 (Fig. 8 : US 2012 et 2009). Elles sont composées de sable limoneux brun-gris, contenant de nombreux fragments de mortier de chaux blanc et contiennent également quelques pierres calcaires et de rares fragments de TCA. Les 24 restes de céramiques découverts offrent une datation large, comprenant le iie s. et le début du iiie s.

96La caractéristique principale de ces deux US est donc de contenir une forte quantité de nodules de mortier. Ces fragments ont conservé à quelques reprises les empreintes de moellons réguliers. Ils sont parfois lissés et tirés au fer. Le mortier de ces US est identique à celui conservé sur les maçonneries du bâtiment. Il n’est mélangé avec aucun autre liant, comme celui du blocage interne (mortier gris et limon) ou des fondations (limon). Il provient donc assurément et exclusivement de l’arrachage des parements. La faible quantité de moellons retrouvés dans les deux US prouve que le démantèlement des parements a été suivi d’un tri. Les déchets ont été rejetés à l’intérieur du bâtiment, alors que les moellons ont été emportés. Ces deux US sont donc interprétés comme les dépôts de démolition consécutifs à la récupération partielle des maçonneries.

5.5. La récupération du blocage interne des murs

97L’US 2007 est conservée sur les trois quarts du bâtiment et comble définitivement cet espace semi-excavé. Apparue sous la terre végétale, elle recouvre les US 2012, 2009 (cf. 6.4) et l’arasement des murs. Elle est composée de mortier de chaux grisâtre mêlé à du limon argileux brun et contient également trois restes de céramique dont la datation est au iie s. ou au début du iiie s. Composés de sable et de graviers issus de la couche basale des limons de plateaux, les fragments de mortier sont identiques au liant utilisé dans le blocage interne des murs. L’US contient en outre quelques pierres et de rares fragments de TCA. À l’image du processus décrit pour l’US 2012 (supra, 6.4), l’US 2007 résulte du démantèlement du blocage interne des maçonneries pour la récupération de ses matériaux. En effet, la quantité de pierres contenue dans l’US paraît faible par rapport à celle nécessaire pour l’édification des parties détruites. La récupération de matériaux des élévations du bâtiment s’est arrêtée au niveau des sols extérieurs.

5.6. Conclusion pour la période 2

98L’épisode de démantèlement paraît intervenir après 250 (cf. supra). Cette imprécision chronologique se répercute également sur l’étude des tuiles (cf. 6.3). En effet, sans datation fiable, il est malaisé de replacer les observations réalisées sur les tegulae au sein de la typo-chronologie en cours d’élaboration pour la partie nord des Gaules.

99Les phases de récupération des divers matériaux suggèrent la mise en œuvre d’un processus opérationnel précis et méthodique pour le démantèlement du bâtiment. Chaque phase de démolition est suivie d’un tri des matériaux. Ces derniers sont stockés sur place en attendant leur transport. Aucun type de matériaux n’est épargné ou négligé. L’organisation stricte du travail a totalement nettoyé ce bâtiment des traces de son occupation antérieure. Sa démolition du bâtiment devait répondre à un besoin quantitativement important de divers matériaux : bois (?), fer, tuiles (de couverture ou fragmentaires en matériau de construction), moellons, pierres de tout calibre… Ces matériaux ont donc dû être recyclés sous leurs formes initiales ou transformés par des équipes spécialisées (Nin et Leguilloux 2003 : 152). La démolition, le tri et le transfert représentent donc les premières étapes d’un circuit plus complexe. Le commanditaire de ces récupérations peut être le propriétaire de l’établissement rural dont dépendait cette grange, désirant la construction d’un nouvel édifice en économisant le coût des matériaux. Nuria Nin et Martine Leguilloux évoquent aussi la possibilité de chantiers illégaux de récupérations au détriment des bâtiments publics ou privés (Nin et Leguilloux 2003 : 151-152).

100La récupération des matériaux de cet édifice marque la fin de l’occupation de cette partie de l’établissement rural. Les signes de fréquentation des lieux qui suivent sont ténus et absents pour l’Antiquité tardive, se résumant à quelques artéfacts médiévaux, modernes et contemporains découverts dans les labours entamant la partie supérieure des dépôts de démolition antiques.

6. Étude de la céramique antique (M.-P. Chambon)

6.1. Présentation du corpus

101Diagnostic et fouille confondus, la céramique du site se compose de 341 restes de céramique (NR) pour 19 individus (NMI), un corpus peu important et de qualité médiocre. Cet ensemble est réparti en 33 US dont 10 sont rattachées à des faits. Sur les 33 assemblages, 15 ont livré moins de dix tessons. Les trois lots numériquement les plus importants renferment une quarantaine à une cinquantaine de fragments. La céramique est globalement peu altérée, peu érodée, mais le taux de fragmentation est très élevé. Un seul vase a pu être partiellement restitué (Fig. 33 : iso. 1). Ce corpus se compose d’une large majorité de fragments de panse, avec 289 tessons sur 341, soit près de 85 % de l’effectif total. Seuls 16 éléments de formes ou de décor ont été isolés et numérotés (de 1 à 16) sur l’ensemble du corpus.

Fig. 33 - Le mobilier en céramique.

Fig. 33 - Le mobilier en céramique.

M.-P. Chambon, Inrap

6.2. Les principales catégories céramiques identifiées

102La vaisselle gallo-romaine est classée traditionnellement en trois grandes catégories : la céramique fine, la céramique commune et les amphores de grand commerce (Fig. 34). La céramique à pâte sableuse de faciès protohistorique (résiduelle) et la céramique médiévale et/ou moderne ne sont pas traitées ici. La céramique protohistorique peut provenir du site laténien proche découvert lors du diagnostic (cf. 1).

Fig. 34 - Répartition des principales catégories céramiques.

NR

NR%

NMI

NMI%

Céramique fine

35

10,8%

3

16,7%

Céramique commune

246

76,4%

15

83,3%

Amphores de grand commerce

16

5%

0

0%

Indéterminé

8

2,5%

0

0%

Céramique résiduelle protohistorique (?)

17

5,3%

0

0%

Totaux

322

100%

19

100%

M.-P. Chambon, Inrap

6.2.1. La vaisselle fine

103Dans le corpus des céramiques fines, la terra nigra est en position largement dominante, avec 54,3 % des restes, soit 19 restes (NR) pour 2 individus (NMI). Elle est représentée par des assiettes à lèvre rectangulaire de type Menez 7/16 de Gaule centrale (Fig. 33 : iso. 2) (Menez 1985) et des fragments de forme fermée en céramique brune fumigée.

104En comparaison, la sigillée est peu présente, avec 7 restes (NR) et sans aucun individu (NMI). Elle est représentée par des formes ouvertes dont des fragments de coupe à décor moulé de type Drag. 37 de Gaule centrale, datées du iie s. d’après leurs caractéristiques techniques. Un fragment de sigillée précoce des ateliers lézoviens a également été identifié.

105La céramique fine et engobe blanc est peu représentée, avec 4 restes (NR), sans individu identifié en NMI, des fragments qui appartiennent sans doute à des amphorettes. Les gobelets de type Beuvray sont peu présents, avec 4 restes et 1 seul individu. Un bord de lèvre en gouttière et des fragments de décor de chevrons ont été identifiés. Ces deux dernières productions sont très fréquentes dans les répertoires du ier s. ap. J.-C. dans le Val de Loire (Couvin 2005).

6.2.2. La vaisselle commune

106Les deux tiers du corpus correspondent à de la céramique commune (Fig. 35).

Fig. 35 - Composition de la vaisselle commune.

NR

NR%

NMI

NMI%

Brune ligérienne

94

38,20%

3

20%

Commune en mode A

70

28,50%

4

26,60%

Commune en mode B

68

27,60%

6

40%

Non tournée

4

1,60%

1

6,70%

Commune indéterminée

10

4,10%

1

6,70%

Totaux

246

100%

15

100%

M.-P. Chambon, Inrap

107Le lot de céramique brune ligérienne se compose :

  • d’amphores régionales, dont un modèle à lèvre plate qui se rapproche de ceux du ier s. (Fig. 33 : iso. 12) (Barthélemy-Sylvand, Chambon et Couvin 2005 : 166, Fig. 10) et une imitation d’amphore sud-gauloise 4 datée des iie et iiie s. (Barthélemy-Sylvand, Chambon et Couvin 2005 : 170, fig. 17) ;

  • de dolia dont les caractéristiques techniques rappellent les productions de l’atelier de Mougon ;

  • de fragments de pot à cuire ou à réserve de type dérivé de Besançon du ier s. (Fig. 33 : iso. 8) (Chambon et Simon 2014).

  • La céramique en cuisson A ou oxydante se compose :

  • de cruches à surface lissée, dont un col à lèvre plate (Fig. 33 : iso. 7) proche des modèles flaviens et plusieurs fonds annulaires (Fig. 33 : iso. 14) ;

  • de pots à pâte plus ou moins sableuse, voire grossière (Fig. 33 : iso. 9 et iso. 3) ;

  • d’une jatte à panse hémisphérique, assise annulaire et bord légèrement rentrant à lèvre arrondie se terminant en bec vers l’intérieur (Fig. 33 : iso. 1). La pâte est de couleur beige jaunâtre, de texture mi-fine et micacée, revêtue d’un engobe orangé. La surface est altérée et aucun revêtement n’est visible. Par certains aspects, cette forme rappelle les productions bituriges à engobe micacé des iie-iiie s. (Chambon 2007).

108La céramique en cuisson B ou réductrice se compose :

  • de pot à lèvre étirée de type blésois, du ier et de la première moitié du iie (Fig. 33 : iso. 6) (Couvin 2012), de pot à lèvre arrondie qui pourrait être plus tardif, sans doute des iie-iiie s. (Fig. 33 : iso. 4) (Chambon et Simon 2014) ;

  • d’un vase à anse (cruche, pichet ou amphorette) (Fig. 33 : iso. 11) ;

  • d’une jatte à bord rentrante, à surface partiellement lustrée, datant du iie, voire du début du iiie s. (Fig. 33 : iso. 16) (Chambon 2005 ; Chambon et Simon 2014).

6.2.3. Les amphores d’importation lointaine

109Elles sont peu nombreuses, mais d’origine variée, avec des amphores à huile de Bétique, à vin ou autres de Tarraconaise, de Lyon et de Narbonnaise. Malgré la faiblesse des effectifs, deux origines dominent : la Bétique, avec une probable amphore à huile de type Dr. 20 (ier-iie s. ap. J.-C.) et le sud de la Gaule (Narbonnaise et Lyon). Ces circuits commerciaux sont classiques pour le Haut-Empire en région Centre-Val de Loire (BarthÉlemy-Sylvand, Chambon et Couvin 2005). Une amphore vinaire Pascual 1 de Tarraconaise peut être datée du début de la période romaine (tournant de l’ère). Ce type de contenant est peu fréquent dans le Val de Loire. Le fragment d’amphore italique est quant à lui résiduel.

6.3. Le répertoire

110La nature des assemblages, dont la cohérence chronologique est rarement assurée, est ici une entrave. Toutes les grandes catégories céramiques sont toutefois représentées avec une relative variété typologique : vaisselle fine, vaisselle commune, vase de stockage. Les vases identifiés ne présentent aucune particularité et sont conformes à ce que l’on observe dans le secteur blésois pour le Haut-Empire sur des sites de consommation en contexte rural.

7. L’instrumentum (D. Lusson et S. Bigot)

111Le corpus de l’instrumentum se compose exclusivement d’objets métalliques : fer, base cuivre et plomb. Le monnayage a été identifié et déjà décrit par Michel Barret, Inrap (cf. supra, 6) (cf. Poitevin et al. 2017 : 118-120). Ce mobilier métallique concerne donc ici le bâtiment étudié (Fig. 36). Le protocole de quantification et de classement fonctionnel des mobiliers d’instrumentum utilisé est celui d’A. Bryant et al. (2013 : 14-19).

Fig. 36 - Instrumentum de la période antique : iso. 1, US 2003, clef, fer ; iso. 2, US 2003, mors de filet, fer.

Fig. 36 - Instrumentum de la période antique : iso. 1, US 2003, clef, fer ; iso. 2, US 2003, mors de filet, fer.

Photographies/DAO S. Bigot, Inrap ; dessins/DAO D. Lusson, Inrap

7.1. L’instrumentum par domaines d’activités

112Le corpus, provenant du bâtiment et ses abords immédiats, concerne 117 restes (en NR) pour 53 individus (en NMI) et un poids total de 911 g. Ces objets sont issus d’US de sol, extérieurs et intérieurs, de démolition, récupération et abandon. La distribution par matière montre une nette prédominance pour les éléments en fer, avec 113 restes et 52 individus estimés, mais qui doit être pondérée par la forte proportion de clous. Seulement trois restes d’objets en alliage à base de cuivre, pour un individu estimé, sont décomptés.

113Hormis les monnaies (exclues ici), cinq domaines sont identifiés : domestique, immobilier, production, transport, et inclassable (Fig. 37).

Fig. 37 - Répartition de l’instrumentum antique par domaine et catégorie.

Domaine

Catégorie

Objet

NR

NMI

PDR

Domestique

Ameublement

Clous de menuiserie et de décoration

64

42

369

Production

Divers production

Scories, goutte

10

0

15

Transport

Équipement de l'animal

Mors de filet

1

1

158

Immobilier

Gros-œuvre

Clous de construction, crochet

5

4

153

Inclassable

Éléments d’assemblage et de serrurerie

Clef, penture

2

2

92

Indéterminée

Tôle, tige, plaque

35

4

124

Total

117

53

911

D. Lusson, Inrap

114– Le domaine de la production réunit les déchets issus du travail de forge, avec 10 fragments de scories et deux gouttes ou gouttelettes en alliage cuivreux. Retrouvées sur un niveau de sol du bâtiment, ces dernières proviennent probablement d’une zone de travail du bronze située à proximité de la grange.

115– Le domaine domestique est illustré uniquement par des pièces liées à l’ameublement. Ce sont 64 restes et 42 individus, des clous en fer de menuiseries dotés de têtes plates rondes ou carrées, et un clou décoratif (Guillaumet 2003 : 49-51, 135).

116– Le transport est illustré par un élément lié à l’équipement des équidés, avec la présence d’un mors de filet brisé à canon articulé au centre, en fer, pesant 158 g (Fig. 36 : iso. 2). L’objet est constitué de deux bandes latérales de sections carrées et torsadées. Ces dernières se terminent par des anneaux circulaires pour permettre le passage des rênes. Une bande possède un anneau, l’autre deux. Ce type de mors existe depuis la période romaine et perdure encore de nos jours. Des exemplaires similaires proviennent des collections antiques du musée du Vieil-Évreux (Eure) (Halbout, Pilet et Vaudour 1987 : 106, 238-239).

117– Le domaine de l’immobilier rassemble cinq éléments de gros œuvre dont une partie est issue de l’amas de métaux de la pièce B (cf. 6.2). Quatre restes de clous de construction munis de têtes hémisphériques pleines sont inventoriés (Guillaumet 2003 : 49-51). Par la forme de leurs têtes, ils jouent aussi un rôle décoratif dans la construction. Un crochet en fer est également identifié.

118– Parmi les inclassables, les éléments d’assemblage d’huisserie ou de menuiserie mobile et de serrurerie sont au nombre de deux.

    • 38 Volets et portes.

    Un fragment de ferrure ou de penture a été mis au jour dans le tas de métaux découvert dans l’espace B (cf. 6.2). L’objet, de forme rectangulaire, possède encore un emplacement pour un rivet de fixation sur une extrémité. Installées sur les battants38, les ferrures ont essentiellement de renfort dans l’assemblage de pièces de bois (Halbout, Pilet et Vaudour 1987 : 60-62, 199-200 ; Feugère, Thauré et Vienne 1992 : 36-37 ; Guillaumet 2003 : 136-137 ; Demarest 2007 : 176-177).

  • L’amas de métaux contient également une clef complète (Fig. 36 : iso. 1). L’objet, de grande dimension (long. : 118 mm), est composé d’un anneau de section rectangulaire perforé à chaud à son extrémité, d’une tige de section carrée (7 mm), d’un panneton en forme de L doté de deux bouterolles parallèles à la tige et muni de trois dents perpendiculaires au panneton et à la tige (Halbout, Pilet et Vaudour 1987 : 64-74 ; Feugère, Thauré et Vienne 1992 : 24-30). Il s’agit d’une clef de Type 05-01 (Guillaumet et Laude 2009 : 42-46) dite à soulèvement et dents tournées vers le haut, correspondant aux serrures en applique fonctionnant par soulèvement de lames de ressort et translation. Ce type de clefs est en usage en Gaule exclusivement à l’époque romaine et est particulièrement abondant dans l’Est de la France. Une clef identique a par exemple été retrouvée dans un contexte du haut-Empire sur le site antique du “Grand Herbage” à Sées (Orne) (Demarest 2007 : 178-179) et un autre exemplaire similaire a été découvert dans un contexte archéologique attribuable au iiie s. de la pars rustica de la villa des “Petites Vallées” à Ymonville (Eure-et-Loir) (Poitevin et al. 2020 : 142, fig. 91 : iso. 125). La grande dimension de cette clef renverrait à une porte ou bien un gros coffre ou une armoire, sans doute de ce bâtiment.

119De nombreuses tiges, plaques et tôles en fer et alliage base cuivre sont également décomptées et classées en “indéterminée” (35 restes, 4 individus et 124 g).

7.2. Synthèse sur l’instrumentum antique

120Le corpus restreint, très localisé au sein et aux abords du bâtiment antique, ne permet pas de travailler sur la répartition spatiale de l’instrumentum. En effet, une grande partie des objets provient d’un dépôt sans doute lié à de la récupération de matériaux métalliques en vue de leur recyclage. De même, il apparaît malaisé de distinguer les activités liées à l’utilisation initiale du bâtiment ou bien à sa destruction. Les domaines et catégories représentées suggèrent la présence, dans un environnement proche, d’un habitat, par la présence probable d’éléments d’ameublement, ainsi que d’activités de production, et une fréquentation par des équidés est attestée (mors) (Fig. 38). Ce faisceau d’activités conforterait l’hypothèse de l’insertion de la grange à proximité des autres bâtiments de l’établissement rural auquel elle appartient. La comparaison de cet ensemble avec d’autres paraît peu pertinente au regard de ce faible corpus.

8. Bilan et discussion

121L’emprise de fouille n’a permis d’appréhender, d’un établissement rural sans doute proche, qu’un unique bâtiment (grange). Si les limites sud et peut-être ouest semblent bien circonscrites (fossé d’enclos), en revanche, celles à l’est et au nord restent à établir. Une partie du site antique a été probablement détruite lors de la construction de la ligne ferroviaire jouxtant l’emprise au nord. Au-delà de cette voie ferrée, des restes de céramique et de TCA gallo-romaines sont visibles en surface des champs sur quelques milliers de mètres carrés.

122Cet établissement rural est en tout cas implanté dans une région fertile qui connaît un maillage dense d’habitat à l’époque romaine, la Petite Beauce. L’habitat gaulois découvert à quelques dizaines de mètres au sud illustre cette mise en valeur du terroir dès la fin de la période laténienne (cf. 1) (Cherdo et al. 2017). Pour l’établissement antique concerné ici, les éléments de datation les plus anciens suggèrent une installation au début du ier s. ap. J.-C., une origine laténienne n’apparaissant pas envisageable en tout cas dans ce secteur du site. L’établissement se localiserait légèrement en retrait de la voie desservant cette partie du plateau blésois, à 200 m à l’ouest (Poitevin et al. 2014 : 72-75). Cette voie secondaire permet de rejoindre rapidement les grands axes routiers de la rive nord de la Loire reliant les principales cités de la région, tels Orléans et Tours, ou plus proche, Blois.

123Après une première phase d’occupation, mal cernée et dont les vestiges matériels sont tenus, une grange est construite dans la seconde moitié du ier s. Malgré ses faibles dimensions, la construction est soignée : décaissement pour une assise à peu près plane, parements réguliers, utilisation de mortiers aux caractéristiques techniques différentes, toiture en tuiles… L’origine des matériaux est locale. La grange est implantée sur le socle calcaire affleurant et sur les rebords d’un petit talweg. Cette topographie assure un environnement sain au bâtiment, l’accès à des terres limoneuses et potentiellement fertiles. Les travaux de récupération de matériaux ne permettant pas d’identifier la vocation initiale du bâtiment, les hypothèses se fondent donc sur la bibliographie. Ces granges plurifonctionnelles sont généralement établies dans la pars rustica des fermes, plus rarement dans la pars urbana ou de manière isolée. Ainsi, la partie résidentielle pourrait être envisagée au nord du secteur fouillé, sur les parcelles où du mobilier (céramique) et des matériaux construction (TCA) ont été repérés. Entrevue par la fouille de cet édifice, la durée d’occupation de cet établissement rural – ou en tout cas de cette grange - est relativement courte, du ier à la seconde moitié du iiie s., sans trace de persistance dans l’Antiquité tardive. Cette caractéristique chronologique, si elle s’étend aux autres parties de l’établissement, traduirait un faible dynamisme économique. Si c’est le cas, l’établissement dans son ensemble pourrait être qualifié de ferme, au mieux de petite villa (Gandini 2008).

124La céramique, banale, témoigne d’approvisionnements réalisés en majorité de manière locale. Les importations sont peu nombreuses mais variées, s’inscrivant dans des circuits commerciaux classiques du Haut-Empire. Ces céramiques présentent une relative variété typologique et fonctionnelle, habituelle pour un habitat rural. Dans l’ensemble, elles sont conformes aux assemblages blésois durant le haut-Empire sur des sites de consommation.

125Les activités réalisées au sein de l’établissement sont difficiles à restituer. La découverte de la grange ne permet pas à elle seule de percevoir toutes les activités qui pouvaient prendre place dans cette partie de l’exploitation. La grange, bâtiment plurifonctionnel, a au moins pu servir de stockage des denrées agricoles, mais aussi comme resserre de matériel agricole. Mais, l’absence de donnée incite à la prudence. Le mors de filet atteste la présence et l’entretien de chevaux sur le site, non formellement dans la grange (dépôt métallique de récupération). Les gouttelettes d’alliage cuivreux suggèrent le travail de ces métaux à proximité, mais peut-être seulement lors de la phase de récupération. Par ailleurs, les fosses d’extraction de calcaire, observées au diagnostic, et les matériaux mis en œuvre pour la construction de la grange révèlent que ce secteur du plateau blésois a connu une intense exploitation de son sous-sol.

Conclusion

126Réalisés en 2014 et 2015, le diagnostic archéologique et la fouille préventive menés au “Parc des Châteaux” à La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher) ont donné l’occasion de récolter de nouvelles informations sur un établissement rural gallo-romain inédit (ier-iiie s. ap. J.-C.), dans ce secteur du plateau de Petite Beauce et proche de l’agglomération secondaire de Blois. Sur cette partie du site, les aménagements semblent être des créations ex nihilo, ou tout du moins sans rapport avec l’établissement protohistorique le plus proche.

127La fouille a finalement révélé la présence d’un bâtiment de type grange appartenant à la partie agricole de l’établissement, dont la partie résidentielle se développe en dehors de l’aire étudiée, vers le nord. L’édifice documente l’introduction de la maçonnerie au cours de la seconde moitié du ier s. Cet exemplaire de grange à vocation plurifonctionnelle renseigne une nouvelle fois ce type de bâtiment rural emblématique de la Beauce gallo-romaine et répandu à travers les Gaules. Dans un second temps, son évolution architecturale permet une réflexion typo-chronologique, notamment du passage du plan classique à celui dit en “croix”, principalement identifié en Beauce.

128La fouille des dépôts de démolition a permis de suivre étape par étape le chantier de récupération de la grange. Elle a permis une réflexion sur le démantèlement et la récupération des matériaux au cours du iiie s. L’organisation stricte de la chaîne opératoire du chantier de démolition met en relief un pan de l’économie antique basé sur une économie de moyen. En effet, la démolition vise à réutiliser, transformer et recycler la majorité des matériaux. Les remblais contenaient un intéressant lot de tuiles, dont l’étude détaillée alimente ainsi le corpus en cours d’élaboration en région Centre-Val de Loire.

129Les nombreuses opérations archéologiques menées à Blois et sur le plateau bordant au nord la Loire confortent l’importante base documentaire accumulée depuis près de quarante ans. Ces informations permettront l’étude de l’évolution de ce terroir rural et de ses relations avec l’agglomération secondaire de Blois. Les résultats obtenus pourront être mis en parallèle avec les constats établis sur le terroir a priori similaire de Mer, situé à quelques kilomètres à l’est.

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Poitevin G., Bigot S., Chambon M.-P., Di Napoli F., Froquet-Uzel H., Millet S. et Pont-Tricoire C. - La Chaussée-Saint-Victor, Loir-et-Cher. Le Parc des Châteaux : Projet de zone d’activité, Rapport Final d’Opération de diagnostic archéologique, Inrap CIF, Orléans, SRA Centre.

Poitevin et al. 2017

Poitevin G., Gardère P., Chambon M.-P., Lusson D., Hulin G. et Barret M. - La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher), ZA le Parc des Châteaux : La grange antique de la ZA le Parc des Châteaux, Rapport Final d’Opération de fouille archéologique, Inrap CIF, Orléans, SRA Centre-Val de Loire.

Poitevin et al. 2020

Poitevin G., Aunay C., Barret M., Béranger D., Bonnaire E., Cambou D., Coussot C., Dufour J.-Y., Liard M., Roux-Capron E. et Yvernault F. - La pars rustica de la villa antique des Petites Vallées à Ymonville, Eure-et-Loir, 74e Suppl. à la RACF, FERACF, Joué-Lès-Tours, 215 p. (Établissements ruraux laténiens et gallo-romains du centre de la Gaule ; 4).

Poitevin et al. 2024

Poitevin G., Le Berre G., Braguier S., Di Napoli F., Fourré A., Gardère P., Lusson D., Poulain N. et Marsollier B. - Deux établissements ruraux protohistorique et antique inédits sur le plateau nord blaisois, Rapport Final d’Opération de fouille archéologique, Inrap CIF, Orléans, SRA Centre-Val de Loire.

Poitevin, Josset et Morisse 2021

Poitevin G., Josset D. et Morisse V. - Blois (Loir-et-Cher), rue du Bourg Neuf, Rapport de diagnostic archéologique, Inrap CIF, Orléans, SRA Centre - Val de Loire.

Provost 1988

Provost M. - Le Loir-et-Cher. 41, Carte Arch. De la Gaule, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Paris, 159 p.

Rebuffat 2000

Rebuffat R. - Les briques du complexe fortifié de Jublains, in : Boucheron P., Broise H. et Thébert Y. (dir.), La brique antique et médiévale : production et commercialisation d’un matériau, Actes du Colloque international (Saint-Cloud, 16-18 novembre 1995), organisé par le Centre d'histoire urbaine de l'École normale supérieure de Fontenay, Saint-Cloud et l'École française de Rome, De Boccard, Paris : 161‑169.

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Robert S. - Étude morphologique du parcellaire et de la voirie de la région de Beaugency (Loiret, Loir-et-Cher), in : Chouquer G. (dir.), Formes Paysage 1, Étude sur les parcellaires, Errance, Paris : 138‑147.

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Robert S. - Sources et techniques de l’archéogéographie, Coll. Annales Littéraires de l’Université de Franche-Comté, série Environnement, Société et Archéologie no 15, Presses Universitaires de Franche-Comté, Besançon, 246 p.

Roy et al. 2023

Roy G., Aunay C., Bébien-Dabek C., Bouillon J., Braguier S., Chaudriller S., Gardère P., Jaffrot E., Kepper A.-G. de, Lusson D., Morisse V., Pactat I., Troubady M. et Yvernault F. - La Chaussée-Saint-Victor, Loir-et-Cher. Occupation en bord de Loire de l’Antiquité à la fin de la période moderne, Rapport Final d’Opération de fouille archéologique, Inrap CIF, Orléans, SRA Centre-Val de Loire.

Soyer 1971

Soyer J. - Les voies antiques de l’Orléanais Civitas Aurelianorum, Bull. de la Soc. archéologique et historique de l’Orléanais no hors-série, Orléans, 184 p.

Watteaux 2003

Watteaux M. - Le plan radio-quadrillé des territoires non planifiés, Études Rurales, 167-168 | 2003, [En ligne], mis en ligne le 01 janvier 2005. URL : http://journals.openedition.org/etudesrurales/8024. Consulté le 20 février 2025.

Zeippen et Halbardier 2006

Zeippen L. et halbardier B. - La villa de Mageroy et la pisciculture, Dossiers d’Archéologie, 315 : p. 76‑77.

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Notes

1 Toutes deux à une soixantaine de kilomètres.

2 US appartenant à des faits et US indépendantes comprises.

3 Dont 7 US issues du diagnostic et contenant de la céramique.

4 341 restes (NR) pour 19 individus (NMI).

5 US 1236 et 2034.

6 US 2001, 2004 et 2005.

7 US 2053.

8 US 1176, 2005 et 2006.

9 US 2005, 2006, 2008 et 2017.

10 US 2005.

11 US 2003.

12 US 1230 et 2005.

13 US 1178 et 2005.

14 Les surfaces concernant les pièces expriment des surfaces utiles.

15 Calcaire de Beauce.

16 Les granges du corpus ont des longueurs comprises entre 9 et 16 m, des largeurs comprises entre 8 et 15 m. Les moyennes de ces dimensions sont 14,5 × 14 m, pour une surface moyenne de 200 m2.

17 Bâtiment 1 : 11,6 × 9,2 m, pour une surface de 107 m2.

18 Par la suite, abrégé : TCA.

19 Représentant un NMI de 9.

20 Répartie dans les US 1212, 2007, 2011, 2012, 2013, 2048 et 2047.

21 ISO 102 : US 2034 ; ISO 101 : US 2013.

22 Sesterce ; Commode (à partir de 192) ; atelier : Rome ; métal : cuivre ; diam. : 29 mm ; poids : 23,84 g ; identification : M. Barret, Inrap.

23 Antoninien ; Étruscille (250) ; atelier : Rome ; métal : billon ; diam. : 21 mm ; poids : 2,93 g ; identification : M. Barret, Inrap.

24 Étude menée par Guillaume Hulin, Inrap.

25 US 2011 et 2010.

26 Fragments de TCA servant à la constitution de remblai ou sols, mortier de tuileau, éléments de blocage…

27 Équivalente à l’US 2011.

28 Disposition et chevauchement.

29 Longueur recouvrement × largeur recouvrement.

30 Entre 9 et 12 cm.

31 Les pentes des toitures antiques semblent comprises entre 17 et 23 degrés, soit entre 30 et 43 %.

32 Estimée à environ 2 000 individus, soit environ 8,3 tonnes de tegulae, pour un poids moyen par tegulae de 4,175 kg.

33 Analyse réalisée sur la majorité des tuiles. Description : Jérôme Bouillon, céramologue, Inrap.

34 Présence-absence.

35 Longueur × largeur × hauteur.

36 Les tuiles en terre cuite ont pu remplacer une couverture réalisée à partir de matériaux périssables : chaume, bardeaux…

37 Évolutions techniques, des dimensions, des pâtes.

38 Volets et portes.

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Table des illustrations

Titre Fig. 1 - Localisation de la fouille sur la carte des cités et voies antiques.
Crédits D’après J. Vilpoux, C. Cribellier, E. Roux, 2012, PCR “Agglomérations secondaires antiques en région Centre”
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 477k
Titre Fig. 2 - Contexte topographique (a), transects (b) et géologique (c) du site.
Légende Interpolation d’après le RGEalti®-IGN ; carte géologique de Blois no 428 BRGM
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 371k
Titre Fig. 3 - Contexte archéologique gallo-romain dans l’environnement du site.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 227k
Titre Fig. 4 - Plan général des vestiges.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 134k
Titre Fig. 5 - Périodisation des vestiges de la fouille et diagramme stratigraphique.
Crédits B. Marsollier, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 292k
Titre Fig. 6 - Plan des vestiges de la période 1, phase A de la fouille et du diagnostic.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 114k
Titre Fig. 7 - Plan des vestiges de la période 1, phase B.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 96k
Titre Fig. 8 - Coupes stratigraphiques des fondations du bâtiment, état 1 selon les axes indiqués sur le plan en bas à gauche.
Crédits B. Marsollier, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 175k
Titre Fig. 9 - Principales dimensions du bâtiment, état 1.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 66k
Titre Fig. 10 - Détail de la fondation F509, vue en plan.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 235k
Titre Fig. 11 - Exemple de bloc employé dans la fondation de F514.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 191k
Titre Fig. 12 - Bloc utilisé pour renforcer l’angle de la maçonnerie formé par les murs F513/521.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 223k
Titre Fig. 13 - Détail des assises du mur F510, vue latérale.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 198k
Titre Fig. 14 - Détail du parement et blocage du mur F519, vue verticale.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 211k
Titre Fig. 15 - Détail du mortier (blanc) du parement du mur F520, vue verticale.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-15.jpg
Fichier image/jpeg, 205k
Titre Fig. 16 - Plan et coupes des poteaux de la structure 2 et leur localisation sur le plan du bâtiment, en haut à gauche.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-16.jpg
Fichier image/jpeg, 147k
Titre Fig. 17 - Détail des ornières du chemin F525, vue oblique de l’ouest.
Crédits Équipe Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-17.jpg
Fichier image/jpeg, 193k
Titre Fig. 18 - Plan des vestiges de la période 1, phase C.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-18.jpg
Fichier image/jpeg, 89k
Titre Fig. 19 - Principales dimensions du bâtiment, état 2.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-19.jpg
Fichier image/jpeg, 82k
Titre Fig. 20 - Plan et profils des fondations du bâtiment, état 2 (espace D).
Crédits B. Marsollier, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-20.jpg
Fichier image/jpeg, 146k
Titre Fig. 21 - Hypothèses A et B de restitution du plan du bâtiment, état 2.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-21.jpg
Fichier image/jpeg, 106k
Titre Fig. 22 - Plan des vestiges de la période 2.
Crédits B. Marsollier, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-22.jpg
Fichier image/jpeg, 90k
Titre Fig. 23 - Plan du bâtiment maçonné avec les photographies géoréférencées de l’US 2011 (TCA).
Crédits G. Poitevin, Inrap ; Y. Lozahic, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-23.jpg
Fichier image/jpeg, 455k
Titre Fig. 24 - Distribution du pourcentage des NR et des poids par catégories de tuile.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-24.jpg
Fichier image/jpeg, 47k
Titre Fig. 25 - Répartition des tuiles de l’US 2011, par NR/m² et par kg/m² ; découpage des classes selon la méthode des seuils naturels de Jenks.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-25.jpg
Fichier image/jpeg, 187k
Titre Fig. 26 - Macro-photo de pâte de tegula (x 12,5).
Crédits B. Pradat, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-26.jpg
Fichier image/jpeg, 183k
Titre Fig. 28 - Profils types de tegula (a) et d’encoches aval (b et c).
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-27.jpg
Fichier image/jpeg, 30k
Titre Fig. 29 - Encoche aval et gorge types de tegulae.
Crédits N. Holzem, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-28.jpg
Fichier image/jpeg, 230k
Titre Fig. 31 - Marques présentes sur certaines tegulae.
Crédits N. Holzem, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-29.jpg
Fichier image/jpeg, 435k
Titre Fig. 32 - Profils de deux imbrices.
Crédits G. Poitevin, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-30.jpg
Fichier image/jpeg, 20k
Titre Fig. 33 - Le mobilier en céramique.
Crédits M.-P. Chambon, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-31.jpg
Fichier image/jpeg, 114k
Titre Fig. 36 - Instrumentum de la période antique : iso. 1, US 2003, clef, fer ; iso. 2, US 2003, mors de filet, fer.
Crédits Photographies/DAO S. Bigot, Inrap ; dessins/DAO D. Lusson, Inrap
URL http://journals.openedition.org/racf/docannexe/image/7554/img-32.jpg
Fichier image/jpeg, 175k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Grégory Poitevin, Stéphanie Bigot, Marie-Pierre Chambon, Philippe Gardère et Dorothée Lusson, « Construction, occupation et déconstruction de la grange gallo-romaine du “Parc des Châteaux” à La Chaussée-Saint-Victor (Loir-et-Cher) »Revue archéologique du Centre de la France [En ligne], Tome 64 | 2025, mis en ligne le 06 mai 2025, consulté le 18 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/racf/7554

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Auteurs

Grégory Poitevin

Inrap, UMR 7324 CITERES-LAT

Stéphanie Bigot

Inrap, UMR 5138 ArAr

Marie-Pierre Chambon

Inrap, UMR 1041 ArScAn

Philippe Gardère

Inrap, UMR 7324 CITERES-LAT

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Dorothée Lusson

Inrap, UMR 7324 CITERES-LAT

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