1Le mobilier d’usage militaire (ou militaria) découvert dans les sites militaires des provinces frontalières nord-occidentales de l’Empire est étudié depuis de nombreuses décennies. Ces travaux ont permis d’isoler un ensemble d’objets qui participent de l’équipement militaire. Parmi les ensembles les plus connus, on peut citer, à titre d’exemple, les camps de Feldberg, Saalburg ou Zugmantel qui ont fait l’objet de publications par J. Oldenstein en 1976, puis par M. Schleiermacher en 2000. Plus récemment, on s’est rendu compte que ces militaria se rencontraient également sur des sites « civils » des provinces non frontalières. C’est notamment le cas pour les villes d’Avenches/Aventicum (VOIROL, 2000, p. 7-92) et d’Augst/Augusta Raurica (DESCHLER-ERB et alii, 2001 ; MARTIN-KILCHER, 1985, p. 146-203) en Germanie Supérieure, qui ont livré des militaria en abondance. Le mobilier d’Avenches a fait l’objet d’une publication très complète par A. Voirol en 2001. Pour Augst, on peut citer plusieurs publications : en 1998 et 1999, E. Deschler-Erb a publié les militaria des Ier-IIe siècles, potentiellement en lien avec un campement militaire à proximité de la ville. En 1985, S. Martin-Kilcher s’est concentrée sur le mobilier du IIIe siècle. En 2001, le colloque ROMEC XIII a également été consacré à la question de la présence de l’équipement militaire en contexte civil.
2La présence de ce mobilier en contexte civil permet d’avancer plusieurs questions. La première, bien qu’elle paraisse simple, est de savoir s’il est réellement en lien avec la présence de soldats dans la ville. S’agit-il plutôt de vétérans ? Et surtout, la nature de ces objets est-elle toujours militaire ?
3Ce sujet de recherche reste peu développé pour ce qui concerne les territoires de la Gaule Intérieure. Cet état s’explique par la rareté du mobilier militaire dans les contextes civils, dû principalement à un éloignement géographique de la zone du limes rhète-germanique où sont traditionnellement concentrés les camps. Toutefois, lorsque que des militaria sont abondamment concentrés dans un site civil, il devient envisageable d’établir une corrélation avec une possible occupation militaire. L’étude de ce type d’objets apporte donc de nouveaux indices quant à la nature, le fonctionnement et l’organisation de l’armée dans les provinces non-frontalières de la Gaule.
4L’apport de données inédites est à ce stade indispensable à l’amélioration des connaissances au sujet des militaria en contextes civils. Vue par ce prisme, l’étude des militaria en provenance de la ville d’Autun/Augustodunum, chef-lieu de Éduens situé en Lyonnaise, revêt une importance particulière. Le site d’Augustodunum a fait l’objet de nombreuses fouilles – dès le XIXe siècle jusqu’à nos jours – qui ont livré une des plus grandes collections de militaria en contexte civil après ceux d’Augusta Raurica. Cette collection englobe les armes offensives et défensives, l’équipement personnel du soldat, ainsi que le harnachement des chevaux. Le mobilier militaire daté du début du Haut-Empire, de la période augustéenne à la fin du IIe siècle, représenté par quarante-six individus, a déjà fait l’objet d’une publication par B. Fort et Y. Labaune en 2008, attestant une présence militaire dans la ville à cette époque. Cette étude a permis de mettre en évidence le lien entre la présence militaire attestée à Bibracte au moment de son abandon progressif et les débuts de l’occupation du site d’Autun (FORT, LABAUNE, 2008, p. 142-157), sans continuité évidente avec les militaria de la fin du Haut-Empire, et plus précisément du IIIe siècle.
5Ces militaria, bien qu’ils aient été en partie repérés par Y. Labaune dans son DEA en 2000 puis surtout par M. Kasprzyk dans son travail de doctorat en 2005, n’ont à ce jour fait l’objet d’aucune publication de synthèse. C’est de cette collection inédite de cent cinquante-cinq individus datés de la seconde moitié du IIIe siècle que traite donc cette étude.
- 1 Cet article reprend en grande partie les données acquises au cours d’un travail de master intitulé (...)
6L’étude des militaria de cette période a donc pour but de fournir de nouveaux éléments de réponse à la question d’une éventuelle présence militaire dans la ville pendant la seconde moitié du IIIe siècle1.
7La ville d’Autun est située en Saône-et-Loire, au portes du Morvan, à 86 km au sud-ouest de Dijon. Elle occupe une place privilégiée de carrefour naturel entre les bassins de la Loire, de la Saône et du Rhône et se développe principalement sur la rive droite de l’Arroux (PINETTE, 1987, p. 52). Il s’agit du chef-lieu du territoire des Éduens, situé à 25 km de l’oppidum de Bibracte, dans la province de Lyonnaise, et à 187 km au nord-ouest de Lyon-Lugdunum, la capitale de province. (fig. 1).
Fig. 1. Carte de la Gaule au IIIe siècle. Villes : Autun-Augustodunum, Avenches-Aventicum, Augst-Augusta Raurica, Reims-Durocortorum. Fond de carte : M. Kasprzyk (Inrap).
8L’occupation antique est recouverte en partie par la ville actuelle. La ville du Haut-Empire s’étend sur une superficie de 200 ha et est entourée d’une enceinte longue de 6 km, dotée de cinquante-quatre tours circulaires et de quatre portes. La parure monumentale n’est pas en reste puisque la ville comporte deux théâtres, un amphithéâtre, un forum et de nombreuses institutions comme une schola, une école de gladiateurs, des temples et des palais, sont mentionnés dans les textes. La ville comporte également un sanctuaire suburbain dit de la Genetoye – sur la rive gauche de l’Arroux – où se développent un fanum ainsi qu’un théâtre (cf. fig. 10 [10]) et un vaste quartier artisanal (PINETTE, 1987, p. 52). De 2013 à 2021, le quartier extra muros de la Genetoye a fait l’objet de fouilles programmées annuelles, dans le cadre d’un programme commun de recherche initié et coordonné par Yannick Labaune (SAVA). Ces campagnes de fouilles se sont concentrées sur le fanum, le théâtre du Haut-du-Verger (fig. 10 [10]) et le quartier artisanal.
9Le corpus compte actuellement 155 objets ou lots d’objets datant de la toute fin du Haut-Empire et plus précisément du IIIe siècle (fig. 2). Ces éléments ont été repérés au sein des collections d’instrumentum du musée Rolin et du Service archéologique de la Ville d’Autun (SAVA) qui regroupent le mobilier découvert à Augustodunum et ses alentours depuis le XIXe siècle jusqu’aux fouilles les plus récentes. L’avantage de ce corpus est qu’il n’a pas encore été publié de manière synthétique. Certains objets ont toutefois été pris en compte de manière éparse dans certaines publications. En 1986, A. Rebourg, mentionne dans Archéologie à Autun et dans l’Autunnois, treize militaria dont trois cuirasses à écailles, une garde, un pommeau, trois pontets et cinq bouterolles issues des fouilles des années 1980. En 1987, le catalogue d’exposition Autun-Augustodunum, rédigé sous la direction de M. Pinette, mentionne quatre éléments d’armement, une fibule ainsi que douze éléments de harnachement, sous la forme de notices, sans faire de lien entre eux. En 1993, la C.A.G. d’Autun dresse un inventaire exhaustif du mobilier militaire connu à l’époque, sans toutefois proposer d’interprétation (REBOURG, 1993). En 2000, dans son mémoire de D.E.A. sur Le mobilier métallique des collections anciennes du musée Rolin, Y. Labaune identifie plusieurs militaria. En 2005, dans leur article sur L’os et le bois de cerf à Autun, I. Rodet-Belarbi et P. Chardron-Picault mentionnent huit éléments de fourreaux et de poignées d’épées en os, là aussi sans faire de lien entre eux. Le premier, M. Kasprzyk propose en 2005 de lier les militaria datables du IIIe siècle à une éventuelle présence de militaires dans la ville dans le courant de ce siècle. Notre étude vient donc prendre le relais en proposant cette fois une synthèse exhaustive sur le sujet, justifiée par la grande richesse de cette collection. Elle permet de compléter les connaissances archéologiques concernant Augustodunum dans un premier temps et puis plus généralement sur le mobilier militaire du IIIe siècle, moins connu que celui des périodes antérieures et postérieures.
Fig. 2. Décompte récapitulatif du mobilier.
10Il existe trois principales catégories au sein desquelles sont réparties les militaria en fonction de leur nature et de leur utilité. Ces catégories reflètent tous les aspects du métier de soldat. La première, qui est aussi la plus évidente, englobe l’armement offensif (épées, poignards, lances, éléments d’artillerie, etc.) et défensif (cuirasse, bouclier, casque, etc.). La seconde catégorie comprend l’équipement personnel du soldat ou fourniment divers (fibules, ceinturon, baudrier, appliques, boucles, etc.). La troisième catégorie englobe tout le harnachement de la monture (chanfrein, mors, selles, phalères, appliques et pendeloques de harnais, boucles et éléments de jonction de sangles, etc.). Cette dernière catégorie pose plusieurs problèmes d’attribution puisque que le harnachement du cheval n’est pas l’apanage des soldats. Toutefois, le coût de l’entretient d’une monture ainsi que la récurrence de ce type de mobilier dans les camps militaires justifie leur présence au sein du corpus, sans omettre une certaine réserve. Une dernière catégorie regroupe d’autres équipements militaires tels que les piquets de tente ou les dolabres, mais elle n’est pas représentée au sein de notre corpus (fig. 3).
Fig. 3. Décompte des différentes catégories de mobilier : armement, équipement personnel, harnachement.
11L’armement comprend 51 individus, dont quarante-quatre font partie de la catégorie offensive et sept de la catégorie défensive (fig. 4 ; n° 101, pl. 1 ; nos 201-204, pl. 2 ; nos 301-319, pl. 3 ; nos 401-415, pl. 4 ; n° 501, pl. 5 ; nos 601-605, pl. 6 ; nos 701-706, pl. 7).
Fig. 4. Décompte récapitulatif de l’armement.
12Parmi les armes offensives on dénombre : le fer de lance n° 201, la lame de spatha (épée longue) en fer n° 501, la lame d’épée courte en fer n° 101, le pugio (poignard) en fer n° 601, les quatre pommeaux de spathae nos 301 et 401 à 403, et les cinq gardes de spathae en os nos 202, 302 et 303, 404 et 602, les dix pontets de fourreaux de spathae – quatre en os et six en alliage cuivreux – nos 304 à 308, 405 à 406 et 603 à 605, et les vingt-et-une bouterolles de spathae en os nos 203, 309 à 319 et 407 à 415.
13La pointe de lance en fer n° 201 est incomplète. Elle a une longueur de 35,5 mm pour 8 mm d’épaisseur. La section de la flamme est lenticulaire. Ses tranchants convergent vers la pointe qui n’est pas conservée. L’épaulement est fortement marqué et la douille reste très fragmentaire. La surface de l’objet présente un état de corrosion fortement avancé. Ce fer de lance a été mis au jour sur le site de la rue des Pierres (fig. 10 [2]), dans un niveau d’abandon daté de la fin du IIIe siècle. Il était associé à la garde de spatha n° 202, à la bouterolle de spatha n° 203, à l’écaille de cuirasse n° 204, à la fibule en arbalète n° 205 et à l’applique de harnais n° 206, toutes datables de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 122, n° 6).
14Les lances ont été utilisés pendant toute l’Antiquité, voire au-delà, sans variation majeure de forme. Lorsqu’il s’agit de découvertes hors contexte stratigraphique, il est très malaisé de proposer une datation (FEUGÈRE, 1996, p. 144 ; LABAUNE, 2000, p. 153). Au Haut-Empire, elles font partie intégrante de l’armement du fantassin et il semble qu’elles soient par la suite de plus en plus utilisées par les cavaliers sous une forme plus courte (FEUGÈRE, 1996, p. 129).
15Le fer de lance d’Autun est facilement datable de la fin du IIIe siècle grâce à son contexte de découverte et aux objets auxquels il était associé.
16Il s’agit d’un fragment de lame de spatha d’une longueur de 40 cm, conservé de la pointe à la partie médiane. La lame est large de 3,6 cm environ. Ses bords sont presque parallèles. La pointe est courte, de forme ogivale. La section de la lame est lenticulaire. Elle présente une cassure faisant suite à une torsion à environ 90° au niveau de la partie médiane, ce qui ne nous permet pas de connaître sa longueur exacte, mais elle semble conservée sur sa moitié environ. La surface de l’objet est très corrodée, empêchant sa lecture complète. Elle a été découverte en 2014 dans le théâtre du Haut-du-Verger (fig. 10, [10]), dans un niveau de remblai et de démolition daté de la seconde moitié du IIIe siècle (FERREIRA, 2014, vol. 2, p. 260, p. 370 ; TISSERAND, PERRUCHE, 2014, vol. 2, p. 351). Une monnaie de Victorin découverte dans un petit foyer de l’aditus confirme la datation des derniers niveaux d’occupation et d’abandon du bâtiment (FERREIRA, 2014, vol. 2, p. 370). La spatha était associée à la fibule en arbalète n° 504 ainsi qu’à la boucle de ceinturon ou de baudrier n° 505.
17Des exemplaires similaires sont attestés dans les camps du limes rhète-germanique, à Zugmantel et à Niederbieber où ils sont datés respectivement des années 250/253 et 185 à 250/253. D’autres spécimens sont également connus en Allemagne, à Straubing avec une datation des années 233 à 260 ; à Xanten, dans un contexte de la seconde moitié du IIIe siècle ; à Chmielow-Piaskowy en Pologne, dans une tombe du milieu du IIIe siècle, ou encore à Calès-Mézin (Lot-et-Garonne) dans un contexte des années 150 à 275/300 (MIKS, 2007 p. 85, pl. 67, A524, pl. 61, A700, pl. 68, A801, pl. 66, A103, pl. 68, A91).
18La forme et les dimensions de la spatha d’Autun permettent de l’attribuer au type Straubing-Nydam, variante Straubing, qui est très usitée au court du IIIe siècle. Bien que seule la moitié soit conservée, il est possible de restituer sa longueur totale car les lames de spathae de ce siècle mesurent en moyenne 70 cm de long (MIKS, 2007, p. 21 fig. 2). Ce type aurait fait son apparition au cours du IIe siècle et s’inspirerait des épées sarmates du nord de la zone Pontique (ibid., p. 80).
19L’épée courte n° 101, en fer, est totalement conservée, de la pointe à la soie. La lame est de forme triangulaire allongée et ses bords sont convergents. Elle présente une section lenticulaire tandis que la soie est rectangulaire. L’épaulement de la lame est horizontal. La soie comporte une perforation circulaire à l’extrémité, destinée à accueillir un rivet de fixation pour les éléments de poignée. Cette épée mesure 42,1 cm de la pointe à la soie, 4,8 cm de largeur et 1,5 cm d’épaisseur. Elle a été découverte en août 1897 dans un puits romain fouillé dans la Caserne Changarnier (fig. 10, [1]) où elle était associée au mors en fer n° 102, aux appliques et au bouton de harnais en alliage cuivreux nos 103a-g à 105, datés typologiquement de la deuxième moitié du IIIe siècle, ainsi qu’à un vase métallique daté de la fin du IIIe siècle.
20Une épée courte similaire de 37 cm de longueur est connue dans le dépôt du Kastell de Künzing, où elle est datée du IIIe siècle (HERRMANN, 1969, p. 129, Abb. 2). Un autre exemplaire de 34,5 cm provient de l’établissement rural de Druten-Klepperhei en territoire batave (NICOLAY, 2007, p. 331, pl. 20, type C, 58.1). Enfin, une autre épée courte de 55 cm de longueur a été découverte à Londres (BREEZE et alii, 1976, tab. 1).
21L’épée courte d’Autun peut être datée de la seconde moitié du IIIe siècle grâce aux comparaisons ainsi qu’à son contexte de découverte et au mobilier auquel elle était associée.
22Le poignard ou pugio n° 601, en fer, est presque intégralement conservé. Sa lame trapue présente un fort amincissement en partie centrale, ainsi qu’une arrête longitudinale très prononcée. La poignée en fer est en partie conservée. Elle est constituée de deux éléments distincts rivetés à la soie. Au niveau de la soie, la poignée présente une section losangique, ce qui est caractéristique de ce type de poignards. Il est possible de fournir une estimation de sa taille, autour de 30 à 35 cm de longueur, pour une largeur de 8,4 cm. Son lieu de découverte précis est inconnu.
23Les poignards sont très largement utilisés au cours du Haut-Empire. Leur forme générale s’inspire des poignards de type ibérique des IIe et Ier siècles av. J.-C. En comparaison avec ceux du Haut-Empire, les poignards tardifs ont une forme plus trapue avec une taille fortement marquée et mesurent généralement entre 28 et 30 cm.
24Des poignards similaires ont été découverts dans le dépôt du fort de Künzing en Rhétie, qui contenait cinquante et une lames et vingt-neuf fourreaux, démontrant ainsi l’usage fréquent de ce type d’armes au cours du IIIe siècle (HERMANN, 1969, p. 133, fig. 2 ; MARTIN-KILCHER, 1985, fig. 22,1 ; STEPHENSON, 1999, p. 77, fig. 37 ; LABAUNE, 2000, p. 152, 36 ; BISHOP, 2006, p. 154, fig. 95.3, p. 157 ; BISHOP, COULSTON, 2006, p. 164). D’autres exemplaires datés du IIIe siècle sont présents dans des sites de Grande-Bretagne, du Rhin et du Danube. Ils présentent des dimensions plus larges et plus massives que les poignards des périodes précédentes. C’est notamment le cas pour celui découvert à Copthall Court à Londres et dont les dimensions sont très similaires à celles de l’exemplaire d’Autun, soit une lame de 8 cm de largeur pour 30 cm de longueur (BISHOP, COULSTON, 2006, p. 164). Ce type est également présent dans le sud-est de l’Empire, à Zeugma et à Doura-Europos. L’exemplaire de Zeugma provient d’une couche de démolition/incendie datée du milieu du IIIe siècle (DIEUDONNÉ-GLAD et alii, 2013, p. 250, 1412 ; p. 252). Celui de Doura-Europos est très fragmentaire, mais présente les mêmes caractéristiques que l’exemplaire d’Autun (JAMES, 2004, p. 148, fig. 87, 522).
25Quatre pommeaux de spathae en os ont été identifiés au sein du corpus d’Autun (pl. 3, n° 301 ; pl. 4, nos 401-403).
II.1.5.1. Deux pommeaux à tête d’aigle (pl. 3, n° 301 ; pl. 4, n° 401)
- Le pommeau n° 301 se distingue par sa forme cylindrique et son décor très travaillé, rappelant une tête d’aigle stylisée en partie supérieure et un décor d’enroulements superposés et facettés en partie inférieure. Il semble remplir à la fois la fonction de fusée et de pommeau, les deux étant indissociables dans la masse de l’objet. Il est constitué de trois fragments mesurant respectivement 4 cm pour 1,5 cm, 4,1 cm pour 1,5 cm et 3,2 pour 1,7 cm. Au vue des parallèles et de la provenance, il semble bien s’agir d’un seul et même objet.
26Il provient du site de la Maison de retraite (fig. 10, [8]) où il a été découvert en 1985, dans des couches de remblai du trottoir du portique monumental datées de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 203, nos 1-3).
27Un exemplaire remarquablement similaire à ce pommeau a été découvert dans le camp de Nida-Heddernheim, dans des niveaux du IIIe siècle, où il était associé à une spatha de type Straubing-Nydam, variante Nydam (RADDATZ, 1992-1993, p. 141, Anm. 22, Abb. 7,1 ; MIKS, 2007, pl. 63, A162 ; pl. 155, A162 ; REIS, 2010, pl. 91, 186).
- Le second pommeau n° 401 est plus fragmentaire mais un décor de plumes sculptées subsiste, rappelant celui du pommeau n° 301. Il provient du site voisin du Pavillon Saint-Louis (fig. 10, [9]), dans un contexte similaire. Il mesure 2,5 cm sur 1,3 cm (KASPRZYK, 2005, pl. 211, n° 5 ; RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, p. 173, fig. 20c).
28L’iconographie nous offre des parallèles remarquables tel que l’ensemble sculpté des Tétrarques de Venise, daté des années 300, conservé à Venise mais provenant de Constantinople d’où il a été ramené pendant les croisades. Il représente les quatre Tétrarques. Les personnages portent au côté gauche des épées dont les pommeaux figurent des têtes d’aigles sculptées (KASPRZYK, 2005, Annexe 2). Le sarcophage de la chasse au lion conservé au Palazzo Pallavicini Rospigliosi à Rome, daté des années 250, constitue également un bon élément de comparaison. Sur ce dernier, on aperçoit deux personnages portant au côté gauche des épées dont les pommeaux sont similaires à ceux des Tétrarques de Venise (MIKS, 2007, pl. 333, D). Ces représentations de pommeaux sont stylistiquement très similaires aux exemplaires d’Autun.
II.1.5.2. Deux pommeaux à tête de lion (pl. 4, nos 402-403)
- Le pommeau n° 402 est une pièce remarquable figurant une tête de lion sculptée à la gueule ouverte. Il a été réalisé dans une diaphyse de radius de bœuf (RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, p. 173). Le canal médullaire est comblé par un bouchon de forme ovoïde en os. Trois petites perforations circulaires ont été effectuées sur les côtés et sur le dessus, au niveau de la gueule du lion. Il doit s’agir des trous de fixation de la soie.
- Le pommeau n° 403 est quant à lui très fragmentaire mais son décor incisé rappelle fortement celui du précédent puisqu’on distingue ce qui semble être la gueule et plus précisément les dents pointues d’un fauve.
29Ces deux exemplaires proviennent du site du Pavillon Saint-Louis (fig. 10, [9]), dans des couches de remblai du trottoir du portique monumental datées de la fin IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 211, nos 3-4 ; RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, p. 173, fig. 20b).
30Il n’existe actuellement aucun parallèle réellement satisfaisant mais le riche décor et la forme de ces deux objets permettent de les définir comme des pommeaux de spathae car ils semblent plus proches des pommeaux de ce type d’épées que de ceux des gladii, ou épées courtes, généralement de forme ovoïde simple (KASPRZYK, 2005, Annexe 2).
31Ces quatre pommeaux sont datables de la fin du IIIe siècle, principalement par leurs contextes de découverte mais également grâce aux parallèles typologiques. Par ailleurs, ils proviennent de deux sites voisins où ils étaient directement associés à de nombreux autres éléments de poignées et de fourreaux de spathae en os (REBOURG, 1986, pl. 59, n° 189 ; KASPRZYK, 2005, pl. 203, n° 4).
32On dénombre cinq gardes en os dans le corpus (pl. 2, n° 202 ; pl. 3, nos 302-303 ; pl. 4, n° 404 ; pl. 6, n° 602).
II.1.6.1. Les gardes de type Niederbieber-Vimose (pl. 3, n° 302 ; pl. 4, n° 404)
33Les deux gardes nos 302 et 404, sculptées dans un os large dont le canal médullaire est conservé, peuvent être rattachées à ce type. Leur forme générale est semblable à un chapiteau ionique inversé et leurs bases comportent deux profondes rainures parallèles. La n° 302 provient des sites de la Maison de retraite (fig. 10, [8]) et la n° 404 du Pavillon Saint-Louis [9], dans le niveau de remblai du trottoir du portique monumental, daté de la fin du IIIe siècle (REBOURG, 1986, pl. 59, n° 189 ; KASPRZYK, 2005, pl. 203, n° 4, pl. 211, n° 6).
34Un parallèle a été découvert dans un dépôt de rivière à Nida-Heddernheim où il est associé à une spatha de type Straubing-Nydam ainsi qu’à un pommeau/fusée à « tête d’aigle », similaire à l’exemplaire n° 301 du corpus d’Autun (MIKLER, 1997, p. 118, pl. 1, 3 ; MIKS, 2007, pl. 168, A474 ; Reis, 2010, pl. 91, n° 187). Un autre parallèle est connu dans le camp de Niederbieber où il est daté entre les années 180/185 et 250/259 (OLDENSTEIN, 1976, p. 240, pl. 10, n° 14 ; VON CARNAP-BORNHEIM, 1994, p. 372, Abb. 8, 6 ; MIKS, 2007, pl. 168, B200.2).
35Le type Niederbieber-Vimose est généralement daté de la deuxième moitié du IIe jusqu’au milieu du IIIe siècle, au moment de l’abandon du limes rhète-germanique vers 250-253, voire jusqu’à la fin du IIIe siècle (MIKS, 2007, p. 172).
II.1.6.2. Les garde de type Bad Cannstatt (pl. 2, n° 202,)
36La garde de spatha n° 202 est sculptée dans un os large dont le canal médullaire est conservé. Sa forme ovoïde avec une base rectangulaire comportant deux rainures horizontales profondes ainsi que deux « tétons » en reliefs, accompagnés de deux perforations circulaires destinées à accueillir des rivets de fixation, la rattache au type Bad Cannstatt.
37Elle provient du site de la rue des Pierres (fig. 10, [2]), dans un niveau d’abandon de la fin du IIIe siècle où elle était associée au fer de lance n° 201, à la bouterolle de spatha n° 203, à l’écaille de cuirasse n° 204, à la fibule en arbalète n° 205 et à l’applique de harnais n° 206 (RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, fig. 27). Des exemplaires similaires ont été découverts dans le camp de Strasbourg (Bas-Rhin), dans un tumulus daté de la deuxième moitié du IIe siècle à Omal (Belgique), dans un niveau de portique daté des années 120/130-150 à Wroxeter (Angleterre), et à Bad Cannstatt (Allemagne) dans un contexte du milieu du IIe siècle (FORRER, 1927, p. 256, n° 9, pl. 75 ; MIKLER, 1997, p. 119, pl. 2, nos 14-15 ; MIKS, 2007, pl. 164, A703.2, pl. 167-168, A548, A704, B100.19, B178.15, B275.3, B332.1).
38Le type Bad-Cannstatt est généralement daté de la période flavienne à la première moitié du IIIe siècle (Miks, 2007, p. 170). Le contexte de découverte de l’exemplaire d’Autun relève la durée d’utilisation de ce type jusqu’à la fin du IIIe siècle au moins.
II.1.6.3. Les gardes de type Rheingörnheim (pl. 6, n° 602)
39La garde n° 602, sculptée dans un os large dont le canal médullaire est conservé, appartient au type Rheingörnheim. Elle présente une forme rectangulaire avec des coins supérieurs très arrondis, sur une base rectangulaire comportant deux rainures horizontales profondes. Elle est agrémentée d’un décor incisé de rainures formant un triangle à tête inversée. Sa provenance précise n’est pas connue (PINETTE, 1987, p. 253, 519).
40Un exemplaire similaire a été découvert à Avenches, dans l’insula 23, dans un contexte daté des années 40-80, mais comprenant aussi quelques monnaies du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl. 6, n° 44).
41Le type Rheingörnheim est généralement daté entre le milieu du Ier et le début du IIe siècle mais son utilisation s’est prolongée de manière moins intensive jusqu’au courant du IIIe siècle (MIKS, 2007, p. 169). Bien qu’une certaine réserve demeure quant à la datation de ce spécimen, il a très bien pu être utilisés au cours du IIIe siècle, d’où sa présence au sein du corpus.
II.1.6.4. La garde de type Zugmantel (pl. 3, n° 303)
42Le fragment de garde n° 303 est plat, de forme ovale et présente une ouverture également ovale en son centre, destinée au passage de la soie, ce qui le rattache au type Zugmantel. Son épaisseur, très fine, est néanmoins inhabituelle pour ce type de garde, ce qui laisse penser qu’il pourrait s’agir d’une chute de fabrication.
43Il provient du site de la Maison de retraite (fig. 10, [8]), dans le niveau de remblai du trottoir du portique monumental du Cardo maximus, daté de la fin du IIIe siècle.
44Un exemplaire similaire est a été découvert à Augst dans un contexte très perturbé daté des années 350 à 700, mais il s’agirait d’un élément résiduel plus ancien (DESCHLER-ERB, 1998, p. 175, pl. 41, 4005). D’autres exemplaires sont connus à Lyon (GUILLAUD, 2017, pl. 3, nos 15-16) et à Mayence (MIKLER, 1997, p. 14, pl. 2, n° 13), tandis que des gardes similaires en alliage cuivreux sont connues dans les camps du limes, à Saalburg et Zugmantel (OLDENSTEIN, 1976, pl. 9, nos 1-2).
45Selon H. Mikler, ce type de plaques en os pourrait être un élément de garde de poignard ou de glaive. Il aurait pu être utilisé comme âme des pièces similaires en alliage cuivreux et aux bords recourbés comme celles découvertes à Saalburg et Zugmantel par exemple (MIKLER, 1997, p. 14).
46Manifestement ce type de garde semble avoir été utilisé pendant une longue période, dès le milieu du Ier et jusqu’au IIIe siècle. L’exemplaire d’Autun peut être facilement daté du milieu du IIIe siècle principalement grâce à son contexte de découverte.
II.1.7.1. Les pontets de type Nydam mit Horizontalbohrung (pl. 4, nos 405-406 ; pl. 6, n° 603,)
47Trois pontets en os peuvent être rattachés au type Nydam mit Horizontalbohrung. De forme rectangulaire, ils sont arqués et présentent un amincissement en partie centrale. Leur surface est lisse, avec un décor de deux rainures longitudinales sur les longs côtés. Les deux extrémités sont triangulaires et amincies afin de permettre la fixation sur le fourreau. Sur la face arrière, fixée contre le fourreau, un décrochement rectangulaire permet le passage de la sangle du baudrier ou de la ceinture. Les pontets nos 405 et 406 comportent deux perforations transversales de part et d’autre du vide afin d’assurer une fixation supplémentaire. Seul l’exemplaire n° 603 est entièrement conservé. Il mesure 59 mm de longueur pour 8,7 mm de largeur et 4 mm d’épaisseur.
48La provenance précise du pontet n° 603 n’est pas connue, tandis que les pontets nos 405 et 406 ont été découverts sur le site du Pavillon Saint-Louis (fig. 10, [9]), dans le remblai du portique monumental du cardo maximus, daté du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 212, nos 9-10 ; RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, p. 172, fig. 19i-j).
49Des exemplaires similaires ont été découverts à South Shields, Londres et Caerleon (ALLASON-JONES, MIKET, 1984, p. 41, 2.22 ; MACGREGOR, 1985, p. 165 ; CHAPMAN, 2005, p. 20, Bf01) et dans le Nord-Est de la Gaule à Bavay (MICKLER, 1997, Liste 3, p. 166, 3). Un fabriquat est notamment connu sur le site du camp militaire de Niederbieber, sur le limes (VON CARNAP-BORNHEIM, 1994, p. 352 ; MIKLER, 1997, Liste 3, p. 166, 12).
50Le type Nydam mit Horizontalbohrung est daté du IIe à la deuxième moitié du IIIe siècle. Il est principalement utilisé durant la première moitié du IIIe siècle (MIKS, 2007, p. 313). Les contextes de découverte des pontets nos 405 et 406 permettent d’étirer l’utilisation de ce type jusqu’à la fin du IIIe siècle.
II.1.7.2. Les pontets de type Khisfine variante A (pl. 3, n° 304)
51Le pontet n° 304, en os poli ou en ivoire, appartient au type Khisfine variante A. De forme rectangulaire et de section carrée, il comporte deux perforations circulaires traversantes aux deux extrémités ainsi qu’une encoche rectangulaire au dos destinée à attacher le fourreau au ceinturon. L’extrémité inférieure prend la forme d’une volute tandis que l’extrémité supérieure est arrondie. Il provient du site de la Maison de retraite (fig. 10, [8]), dans le remblai du trottoir du portique monumental du cardo maximus, daté du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 60, n° 190).
52Des exemplaires similaires ont été découverts notamment à Augst et à Avenches dans des contexte de la seconde moitié du IIIe siècle, à Vimose dans un contexte de la deuxième moitié du IIe à la première moitié du IIIe siècle et à Khisfine dans un contexte du milieu du IIIe siècle au début du IVe siècle (VON CARNAP-BORNHEIM, 1991, p. 91, 302, Abb. 5,79, Typental.6, a ; DESCHLER-ERB, 1998, p. 328, pl. 42, 4013 ; VOIROL, 2000, p. 68, pl. 6, 46 ; ORTISI, 2001, p. 49, Abb. 32.1 ; MIKS, 2007, pl. 234, A349, B13.26, B15.2, B142.1, pl. 235, B308.192).
53Le type Khisfine variante A est daté du début du IIe jusqu’à la fin du IVe siècle (MIKS, 2007, p. 308). Manifestement, le contexte de découverte de l’exemplaire autunois permet de dater son utilisation dans le courant de la fin du IIIe siècle.
II.1.7.3. Le pontet de type Laschenkopfbügel variante B ou Carnap IIID2 (pl. 6, n° 604)
54Le pontet n° 604, en alliage cuivreux, présente une section trapézoïdale et est terminé par des coudées à angle droit à chaque extrémité. Bien qu’elle soit incomplète, la partie inférieure comporte des éléments décoratifs moulurés, ce qui la rattache au type Laschenkopfbügel variante B. Sa provenance précise n’est pas connue.
55Des exemplaires similaires ont été découverts principalement au Maroc, sur les sites de Banasa, Thamusida et Volubilis (BOUBE-PICCOT, 1994, p. 166, pl. 39.93, nos 344-345 ; p. 167, pl. 39.93, nos 346-347 ; p. 171, pl. 40, n° 363, p. 167, pl. 39, n° 350 ; p. 167f, pl. 39.94, n° 351 ; p. 168, pl. 39, n° 352, p. 164, nos 336-339 ; p. 166, nos 340-343 ; p. 170, n° 361 ; MIKS, 2007, pl. 233, B20.7-B20.11 ; B283.4-B283.6 ; B311.8-B311.16).
56Le type Laschenkopfbügel, variante B (Carnap Typ III D2) est daté du début de la deuxième moitié du IIe jusqu’à la première moitié du IVe siècle (MIKS, 2007, p. 305).
II.1.7.4. Les pontets de type Zapfenkopfbügel (pl. 3, nos 305-308 ; pl. 6, n° 605)
57Ces cinq pontets sont en alliage cuivreux. Ils prennent une forme rectangulaire fine et allongée, de section rectangulaire plate ou trapézoïdale. L’extrémité supérieure se termine par un bouton profilé à trois niveaux tandis que l’extrémité inférieure est généralement en forme de cœur très stylisé. Les quatre pontets nos 305 à 308 ont été découverts sur le site de la Maison de retraite (fig. 10, [8]), dans le remblai du trottoir du portique monumental du cardo maximus, daté de la fin du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 60, 191, 192 ; KASPRZYK, 2005, pl. 202, n° 9). Le pontet n° 605 a été découvert sur le site du Boulevard Frédéric Latouche [6], dans une domus à pavement (LABAUNE, 2011, p. 43-45 ; KASPRZYK, HOSTEIN, 2012, p. 533).
58Ce type est très répandu puisque de nombreux exemplaires ont été découverts dans les camps du limes, notamment Niederbieber, Zugmantel, Stockstadt, mais aussi à Vimose, Nida-Heddernheim, à Banasa et Volubilis et à Doura-Europos (OLDENSTEIN, 1976, p. 241, pl. 12-13 ; VON CARNAP-BORNHEIM, 1991, p. 79, pl. 23 ; pl. 14, 100 Fundliste, 101 Fundliste ; BOUBE-PICCOT, 1994, p. 168f, p. 169, pl. 40 ; JAMES, 2004, p. 151, Abb. 89, p. 151ff ; MIKS, 2007, pl. 220-223).
59Le type des Zapfenkopfbügel (Carnap Typ IIIC1) est daté du troisième quart du IIe siècle à la fin du IIIe siècle. Il est toutefois principalement utilisé durant la première moitié du IIIe siècle (MIKS, 2007, p. 297).
60Les bouterolles sont des garnitures placées à l’extrémité des fourreaux d’épées. Elles peuvent être fabriquées en métal ou en os. Les vingt-et-une bouterolles nos 203, 309 à 319 et 407 à 415 découvertes à Autun sont toutes en os. Parmi cette série, on distingue deux grands types : les bouterolles rectangulaires ou Kastenörtbander (nos 203, 309-317, 407-415) et les bouterolles circulaires ou Volutenörtbander (nos 318-319), plus rares. La plupart du temps, les bouterolles en os sont constituées de deux parties : une face extérieure qui comporte souvent un décor incisé et/ou ajouré, ainsi qu’une petite plaquette. La plaquette s’insérait dans deux rainures verticales incisées au dos de la face extérieure et servait à la fixation de la bouterolle sur le fourreau par pincement du cuir.
61La série de vingt-et-une bouterolles découvertes à Autun est d’autant plus exceptionnelle que leurs contextes de découvertes sont connus et précisément datés.
II.1.8.1. Les bouterolles rectangulaires en os de type Kastenortbänder
62• Variante A1 (pl. 2, n° 203 ; pl. 3, n° 309 ; pl. 4, nos 407-409)
Les fragments de bouterolles nos 203, 309 et 407-409 présentent des caractéristiques permettant de les rattacher à la variante A1. En os, de forme rectangulaire, elles comportent chacune un décor de deux peltes ajourées et affrontées de part et d’autre d’une nervure verticale centrale en relief. Bien que les traces de cette nervure ne soient conservées que sur le fragment n° 309, il est plus que probable que les quatre autres bouterolles présentaient à l’origine cette même rainure. Au dos, un système d’attache de deux rainures permettait d’y glisser une plaquette rectangulaire en os.
63La bouterolle n° 203 provient du site de la rue des Pierres (fig. 10, [2]), dans un niveau d’abandon daté de la fin du IIIe siècle. Elle était associée au fer de lance n° 201, à la garde de spatha en os n° 202, à l’écaille de cuirasse n° 204, à la fibule en arbalète n° 205 et à l’applique de harnais n° 206 (KASPRZYK, 2005, pl. 122, n° 4 ; ibid., Catalogue, p. 96, îlot III, n° 13). La bouterolle n° 309 provient du site de la Maison de retraite [8], dans le remblai du trottoir du cardo maximus, daté de la fin du IIIe siècle (ibid., pl. 202, n° 4). Les bouterolles nos 407 à 409 proviennent quant à elles du site voisin du Pavillon Saint-Louis [9], dans le même niveau de remblai du trottoir daté de la fin du IIIe siècle (ibid., pl. 212, nos 1, 3, 5).
64• Variante A2 (pl. 3, n° 310 ; pl. 4, n° 410)
Les deux bouterolles nos 310 et 410 sont caractéristiques de la variante A2. En os, elles présentent un décor de deux spirales incisées et affrontées de part et d’autre d’une nervure verticale centrale en relief. La bouterolle n° 310 provient du site de la Maison de retraite [8] (REBOURG, 1986, p. 61, n° 194 ; KASPRZYK, 2005, pl. 202, n° 2) tandis que la n° 410 provient du site du Pavillon Saint-Louis [9] (ibid., pl. 212, n° 2), dans le même niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle.
65• Variante B1 (pl. 3, n° 313)
La bouterolle n° 313 est caractéristique des bouterolles rectangulaires variante B1. En os, elle présente un décor en relief constitué d’un ovale central ainsi que de deux peltes ajourées et affrontées de part et d’autre d’une nervure verticale centrale, elle aussi en relief.
66Cette bouterolle provient du site de la Maison de retraite [8], dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus, daté de la fin du IIIe siècle.
67• Variante B2 (pl. 3, nos 311-312)
Les deux bouterolles nos 311 et 312 présentent les caractéristiques de la variante B2. En os, elles comportent un décor en relief constitué d’un ovale ainsi que deux spirales incisées et affrontées de part et d’autre d’une arrête centrale pour la n° 311 et d’une nervure en relief pour la n° 312.
68Ces deux bouterolles proviennent du site de la Maison de retraite [8], dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 61, n° 193 ; KASPRZYk, 2005, pl. 202, nos 5-6).
69• Variante B indéterminée (pl. 4, n° 411)
La bouterolle n° 411 n’est représentée que par un petit fragment mais on distingue nettement une portion de décor caractéristique de la variante B des bouterolles rectangulaires. En os, cette bouterolle présente le départ d’un décor constitué d’un ovale central et d’une nervure verticale, tous deux en relief. Malheureusement, il n’est pas possible de préciser le rattachement au sous-type B1 ou au B2.
70Elle provient du site du Pavillon Saint-Louis (fig. 10, [9]), dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 216, n° 6 ; RODET-BELARBI, CHARDRON-PICAULT, 2005, p. 173, fig. 20a).
II.1.8.2. Bouterolles rectangulaires à perforations circulaires (pl. 3, nos 314-315)
71Les deux bouterolles nos 314 et 315 n’ont pas pu être rattachées à un type connu. En os, elles sont de forme rectangulaires et comportent un décor de deux perforations circulaires disposées de part et d’autres de trois nervures centrales en relief. La bouterolle n° 314 présente un décor de petits guillochis au niveau de sa partie supérieure tandis qu’on retrouve ce décor sur la partie inférieure de la bouterolle n° 315.
72Elles proviennent du site de la Maison de retraite [8], dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 202, n° 3).
II.1.8.3. Bouterolle rectangulaire sans décor (pl. 4, n° 412)
73La bouterolle n° 412 correspond au type des Kastenörtbander, sans variante connue. En os, elle ne comporte aucun décor sur sa face externe, hormis un ressaut sur le long côté. Elle n’est conservée que sur la moitié. Elle provient du site du Pavillon Saint-Louis [9], dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 212, n° 4).
II.1.8.4. Bouterolles rectangulaires fragmentaires (pl. 4, nos 413-414)
74Les fragments nos 413 et 414 ont pu être identifiés comme deux bouterolles distinctes de type Kastenörtbander. Toutefois, leur état n’a pas permis de reconnaître une variante précise. Leurs petites dimensions et leurs formes laissent penser qu’il pourrait s’agir en réalité de chutes de fabrication, de tels fragments ne pouvant s’obtenir que par sciage des extrémités des bouterolles et non par cassure. Ces deux chutes proviennent du site du Pavillon Saint-Louis (fig. 10, [9]), dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, pl. 212, nos 7-8).
II.1.8.5. Plaquettes de bouterolle rectangulaire de type Kastenörtbander C (pl. 3, nos 316-317 ; pl. 4, n° 415)
75Les trois plaquettes de bouterolles rectangulaires nos 316, 317 et 415 sont caractéristiques du type C. En os, elles sont plates, de forme trapézoïdale, moins larges en partie inférieure et comportent un décor de deux nervures incisées sur les longs côtés. La plaquette n° 316 offre un décor profilé de volutes en parties inférieure et supérieure. La plaquette n° 415 comporte quant à elle un décor plus simple de guillochis en relief le long de sa partie inférieure. La plaquette n° 317, très fragmentaire, ne présente aucun décor supplémentaire. Le type C regroupe toutes les plaquettes de bouterolles trapézoïdales isolées et qui ne peuvent donc pas être rattachées au type A ou B de manière certaine (MIKS, 2007, p. 368). Les plaquettes nos 316 et 317 proviennent du site de la Maison de retraite [8] et la plaquette n° 415 provient du site du Pavillon Saint-Louis [9], dans le même niveau de de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (Kasprzyk, 2005, pl. 202, n° 6).
76Ces plaquettes étaient destinées à être insérées à l’arrière de la bouterolle, au niveau des deux rainures verticales, pour fermer l’extrémité du fourreau par pincement du cuir (MIKS, 2007, p. 367).
II.1.8.6. Bouterolles circulaires en os de type Volutenortbänder (pl. 3, nos 318-319)
77• Variante A (pl. 3, n° 318)
La bouterolle circulaire n° 318 correspond au type des Volutenortbänder A. En os, elle comporte un décor de deux peltes ajourées affrontées de part et d’autre d’une nervure centrale verticale en relief.
78Elle provient du site de la Maison de retraite (fig. 10, [8]) dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 61, n° 197 ; KASPRZYK, 2005, pl. 202, n° 1).
II.1.8.7. Plaquette de bouterolle circulaire en os (pl. 3, n° 319)
79La plaquette de bouterolle n° 319 est caractéristique des plaquettes de fermeture de bouterolle circulaire. En os, elle est plate et présente de forts arrondis au niveau des parties supérieure et inférieure ainsi que deux rainures verticales incisées au niveau des longs bords.
80Elle provient du site de la Maison de retraite [8], dans le niveau de remblai du portique du cardo maximus daté de la fin du IIIe siècle. Cette plaquette correspond au niveau des proportions à la bouterolle n° 318 qui provient du même site, dans les mêmes niveaux. Il pourrait s’agir du même objet.
81De nombreux exemplaires similaires sont connus dans tous l’Empire et font l’objet d’une datation assez précise en fonction des variantes connues. Une bouterolle est attestée à Reims (Marne) dans un niveau daté des années 220 à 280/290 (SCHÜLTZ, 2009, Annexe 4, p. 4 03, pl. VII, OI 807). À Augst, des exemplaires sont datés de la première moitié du IIIe siècle, tandis que d’autres sont datés des années 250 jusqu’à 270 (MARTIN-KILCHER, 1985, p. 185, Abb. 27, 4 ; DESCHLER-ERB, 1998, pl. 42-43, 4015-4027 ; MIKS, 2007, pl. 249, B13.50, pl. 264-266, B13.57-B13.60, B13.63-B13.65). Sur le camp de Nida/Heddernheim, les bouterolles de ce type sont datées du milieu du IIIe siècle jusqu’à 253/254 (OBMAN, 1997, p. 93, pl. 4, nos 23-23a, 25-27, 29-30 ; MIKS, 2007, pl. 249, B99.24-B99.25, pl. 262, B99.36-B99.37, pl. 265, B99.40 ; pl. 267, B99.41-B99.42 ; Reis, 2010, pl. 92, n° 200, pl. 93, nos 204-208). Les bouterolles rectangulaires (Kastenortbänder) et circulaires (Volutenortbänder) en os sont généralement datées du dernier tiers du IIe au IIIe siècle, mais sont principalement utilisées dans le courant du IIIe siècle (MIKS, 2007, p. 367 ; Artefact : BOF-4008).
82Les bouterolles découvertes à Autun sont facilement datables de la période comprise entre le milieu et la fin du IIIe siècle, grâce à leurs contextes de découverte bien documentés ainsi qu’à la typologie. Tous ces objets, excepté le n° 203 découvert sur le site de la rue des Pierres (fig. 10, [2]), proviennent de deux sites voisins, le Pavillon Saint-Louis [9] et la Maison de retraite [8], dans le même niveau de remblai du portique du cardo maximus, daté stratigraphiquement de la fin du IIIe siècle.
83Parmi les armes défensives, six lots de cuirasses à écailles nos 204, et 701 à 705a-c ainsi que la paragnathide de casque n° 706 ont été recensées à Autun.
84La cuirasse à écailles ou lorica squamata est généralement composée d’écailles en alliage cuivreux, plus ou moins rectangulaires, et plus rarement en fer. Les écailles sont superposées et attachées les unes aux autres par des agrafes métalliques puis cousues sur un plastron de cuir ou de tissu (DESCHLER-ERB, 1999, p. 38). Ce type de cuirasses présente de multiples avantages : son coût de fabrication est relativement faible et elle est plus facile à fabriquer et à réparer (VOIROL, 2000, p. 17). À partir de l’époque antonine, les écailles ne sont plus liées entre elles uniquement par rangées verticales, mais également par rangées horizontales (BISHOP, COULSTON, 1993, p. 117). Bien que les typologies, notamment celle de M. Von Groller, soient basées sur la position et le nombre des perforations des écailles, celles-ci ne représentent pas de bons éléments de datation. En revanche, leur mode d’attache est beaucoup plus pertinent typologiquement (ROBINSON, 1975, p. 154). Étant donné qu’aucun élément d’attache n’a pu être identifié à Autun et dans un souci de hiérarchisation, nous nous sommes référé ici à la classification de M. Von Groller, basée sur les écailles de cuirasses découvertes à Carnuntum (BISHOP, COULSTON, 2006, p. 97, fig. 54.1).
85Les loricae squamatae sont généralement attestées par des fragments allant d’une écaille à de véritables portions de cuirasses. À Autun, six lots de cuirasses à écailles (nos 204, 701-705a-c) ont été recensés.
II.2.1.1. Les cuirasse de type Von Groller IV (pl. 7, n° 701)
86Le lot n° 701 correspond au type Von Groller IV (BISHOP, COULSTON, 2006, p. 97, fig. 54 ; KASPRZYK, 2005, Annexe 2). Il s’agit d’un fragment de cuirasse constitué d’une quarantaine d’écailles en alliage cuivreux dont certaines sont encore reliées par des agrafes métalliques. Les écailles sont rectangulaires et mesurent en moyenne 20 mm de hauteur pour 16 mm de largeur. Chaque écaille comporte trois paires de perforations circulaires disposées verticalement, une au niveau du petit côté supérieur et les deux autres au niveau des longs côtés.
87Cette cuirasse provient du site du 43-45 rue de la Grille (fig. 10, [4]), dans une couche d’abandon datée de la fin du IIIe siècle. Elle était associée à la cuirasse n° 702 (REBOURG, 1986, p. 33, 79a ; KASPRZYK, 2005, pl. 148, n° 67, Catalogue, p. 110, îlot VII, 4).
II.2.1.2. Les cuirasses de type Von Groller VIII (pl. 2, n° 204 ; pl. 7, nos 702-705a-c)
88Les cinq lots nos 204 et 702 à 705a-c appartenant à des cuirasses en alliage cuivreux correspondant au type Von Groller VIII (BISHOP, COULSTON, 2006, p. 97, fig. 54 ; KASPRZYK, 2005, Annexe 2). Les cuirasses de ce type sont composées d’écailles rectangulaires dont les coins inférieurs sont, la plupart du temps, biseautés. Elles comportent chacune quatre perforations circulaires au niveau du bord supérieur et deux paires de perforations verticales au niveaux des longs côtés.
89Le lot n° 703 est constitué de deux écailles rectangulaires très fragmentaires aux bords inférieurs biseautés. Elles sont accrochées ensembles par une agrafe métallique et mesurent en moyenne 31 mm de hauteur pour 28 mm de largeur. L’écaille la plus complète comporte une perforation losangique, sûrement intervenue après la fabrication. Le lieu de découverte précis de ce lot n’est pas connu. Le lot n° 704 est constitué d’une écaille de forme rectangulaire aux coins inférieurs biseautés et mesurant 30 mm sur 27 mm de largeur. Elle présente deux perforations horizontales au niveau du bord supérieur et inférieur. Le lot n° 705a-c est constitué de trois écailles rectangulaires aux bords inférieurs biseautés et mesurant en moyenne 37 mm de hauteur pour 29 mm de largeur. Elles présentent également quatre perforations au niveau du bord supérieur et au moins deux paires de perforations réparties verticalement au niveau du bas des bords latéraux. Une agrafe métallique est conservée sur l’écaille n° 705c.
90Les lots nos 704 et 705a-c proviennent de la domus ornée de mosaïques du Jardin du 13 rue Naudin [5], dans un niveau d’abandon daté de la fin du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 79, n° 237 ; KASPRZYK, 2005, pl. 134, n° 2). Ils étaient associés à des imitations de monnaies datées de la deuxième moitié du IIIe siècle (ibid., p. 104, îlot V, n° 10). Bien que leurs dimensions diffèrent, il est possible que les écailles trouvées au 13 rue Naudin [5] appartiennent à la même cuirasse. Le lot n° 204 est constitué d’une seule écaille rectangulaire aux bords inférieurs biseautés mesurant 35 mm par 31 mm. Cette écaille présente quatre perforations au niveau du bord supérieur, deux paires de perforations réparties verticalement en bas des bords latéraux et au moins deux perforations horizontales au niveau du bord inférieur. Elle a été découverte sur le site de la rue des Pierres [2], dans un niveau d’abandon incendié datant de la fin du IIIe siècle. Elle était associée au fer de lance n° 201, à la garde de spatha en os n° 202, à la bouterolle de spatha en os n° 203, à la fibule n° 205 et à l’applique de harnais n° 206 (KASPRZYK, 2005, pl. 122, n° 4 ; ibid., Catalogue, p. 96, îlot III, n° 13). Le lot n° 702 comprend une écaille rectangulaire, aux bords inférieurs biseautés, de 30 mm de hauteur pour 26 mm de largeur. Elle présente quatre perforations au niveau du bord supérieur et deux paires de perforations disposées verticalement au niveau du bas des bords latéraux. Cette écaille provient de la domus du 43-45 rue de la Grille [4], dans un niveau d’abandon daté de la fin du IIIe siècle. Elle était associée à la cuirasse n° 701, beaucoup plus complète, ainsi qu’à des imitations de monnaies datées de la seconde moitié du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 33, 79b ; KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 110, îlot VII, n° 4). Il est probable qu’il ne s’agisse que d’une seule et même cuirasse mais sans connexion on ne peut en être assuré.
91À Avenches, cinq cuirasses similaires ont été découvertes dans le théâtre antique, fortifié et occupé par une garnison du début du IIIe siècle au milieu du IVe siècle (MATTER, FREY-KUPPER et alii, 1999, p. 147 ; MATTER, 2009, pl. 21, nos 13-19, Abb. 169.14). Une cuirasse à écailles datée du IIIe siècle a été découverte dans le camp de légionnaires de Carpow en Grande-Bretagne (BISHOP, COULSTON, p. 171, fig. 109, n° 1). D’autres exemplaires sont attestés à Doura-Europos, avec un terminus ante quem de 256 (JAMES, 2004, p. 125-136).
92Le seul élément du corpus reconnu comme appartenant à un casque est une paragnathide ou couvre-joue en alliage cuivreux étamé. Cette paragnathide est constituée d’une tôle en alliage cuivreux épousant la forme de la joue. Au niveau du bord inférieur, elle présente un fort arrondi ainsi qu’une perforation circulaire destinée à la fermeture du casque. La partie supérieure est droite et comporte une cassure à l’emplacement où devait se trouver une charnière. Cette paragnathide provient du site du 52 rue de la Grille [3], dans la Maison d’Anacréon, dans des niveaux d’abandon datés de la fin du IIIe siècle (PINETTE, 1987, p. 253, 517). Son contexte de découverte permet de proposer une utilisation dans le courant de la seconde moitié à la fin du IIIe siècle.
93Aucun parallèle satisfaisant n’a été trouvé, mais les casques de la seconde moitié du IIIe siècle sont très mal connus et l’exemplaire d’Autun nous permet donc d’un peu mieux cerner ce type d’objet.
94L’équipement personnel comprend principalement les objets liés à la parure vestimentaire, parfois utilitaires, tels que les fibules et les éléments de ceinturons (boucles, appliques, etc.) et qui font partie intégrante de l’équipement du soldat. On dénombre à Autun vingt-trois individus (fig. 5). Il s’agit principalement d’objets en alliage cuivreux, parfois étamés. La parure du soldat peut parfois être confondue avec celle du cheval. Par souci d’homogénéité et devant la difficulté d’identification de certains objets en l’absence de contexte, les appliques ont été regroupées avec la parure du cheval.
Fig. 5. Décompte récapitulatif de l'équipement personnel.
95Les fibules en forme d’arbalète ou Armbrustscharnierfibeln sont aisément reconnaissables. On distingue deux grands types : le type Böhme 28 avec collerette de séparation entre le pied et l’arc (BÖHME, 1972, pl. 16-20, nos 699-821) et le type Riha 6.4 sans collerette (RIHA, 1979, p. 166-168, pl. 49-51, 70, 1430-1449 ; RIHA, 1994, p. 145-147, pl. 36-37, 2716-2728). Elles sont généralement constituées d’un pied court facetté doté d’une gouttière faisant office de porte-ardillon, d’un arc a profil en forme de D et d’un bras tubulaire perpendiculaire au niveau de la tête, abritant la charnière de l’ardillon. En fonction des variantes, l’arc peut être de section carrée, rectangulaire, trapézoïdale ou rubané. Les bras et la tête peuvent être agrémentés de boutons terminaux. La plupart du temps ces fibules sont en alliage cuivreux parfois étamé et bien plus rarement en or. L’occurrence de grandes séries dans les camps du limes rhète-germanique, quatre-vingt-six exemplaires à Saalburg et quarante-cinq exemplaires à Zugmantel, permet de reconnaître la fonction militaire de ces fibules (BÖHME, 1972, pl. 16-21, 695-822 ; RIHA, 1979, p. 167 ; RIHA, 1994, p. 145). Vingt fibules de ce type ont été recensées à Autun.
III.1.1.1. Type Böhme 28 (pl. 8, nos 801-802)
96Les deux fibules nos 801 et 802 correspondent au type Böhme 28. En alliage cuivreux, elles présentent toutes les deux une surface étamée, un arc de section trapézoïdale ainsi qu’une petite collerette de séparation entre le pied et le départ de l’arc. La fibule n° 801 est dans un état de conservation exceptionnel. Les provenances précises de ces individus sont malheureusement inconnues.
97Des exemplaires présentant les mêmes caractéristiques sont attestées sur les sites militaires du limes rhète-germanique, à Saalburg, à Zugmantel (BÖHME, 1972, pl. 16-20) et à Lauriacum (JOBST, 1975, pl. 28, n° 209), dans des contextes datés du début de la deuxième moitié du IIIe siècle.
III.1.1.2. Type Riha 6.4 (pl. 2, n° 205 ; pl. 5, nos 502-504 ; pl. 8, nos 803-816)
98Dix-huit fibules en alliage cuivreux présentant les caractéristiques du type Riha 6.4 ont été recensées. Contrairement au type Böhme 28, les fibules de type Riha 6.4 sont dépourvues de collerette.
III.1.1.3. Type Riha 6.4.1 (pl. 8, 803)
99La fibule n° 803 correspond à la variante Riha 6.4.1 (KASPRZYK, 2005, pl. 299, n° 12). Elle présente un arc de section rubanée. Sa provenance précise est inconnue.
III.1.1.4. Type Riha 6.4.2 (pl. 5, n° 502 ; pl. 8, nos 804-80,)
100Les sept fibules nos 502 et 804 à 809 correspondent à la variante Riha 6.4.2. Elles présentent un arc de section carrée. La fibule n° 502 provient du site du théâtre extra muros du Haut-du-Verger théâtre (fig. 10, [10]) à la Genetoye (KASPRZYK, 2005, pl. 299, n° 10), d’où proviennent également les fibules nos 503 variante 3 et 504 variante 7, la spatha n° 501 et la boucle de ceinturon n° 505. La fibule n° 809 a été découverte au lieu-dit du Champ Simon [14] (PINETTE, 1987, p. 130, n° 323). Les provenances précises des cinq fibules nos 804 à 808 sont malheureusement inconnues.
III.1.1.5. Type Riha 6.4.3 (pl. 2, n° 205 ; pl. 5, n° 503 ; pl. 8, nos 810-814)
101Les sept fibules nos 205, 503 et 810 à 814 correspondent à la variante 6.4.3 (KASPRZYK, 2005, pl. 122, n° 3 ; pl. 299, nos 4, 7, 10, pl. 300, nos 1, 4). Elles présentent un arc de section trapézoïdale. La fibule n° 205 provient d’un niveau d’abandon incendié daté de la fin du IIIe siècle sur le site de la rue des Pierres [2]. De ce niveau provenaient également le fer de lance n° 201, la garde de spatha en os n° 202, la bouterolle de spatha en os n° 203, l’écaille de cuirasse n° 204 et l’applique de harnais n° 206 (ibid., pl. 122, n° 6). La fibule n° 503 provient quant à elle du site du théâtre extra muros du Haut-du-Verger à la Genetoye théâtre [10] (ibid., pl. 299, n° 10), d’où proviennent également les fibules nos 502 variante 2 et 504 variante 7, la spatha n° 501 et la boucle de ceinturon n° 505. Les provenances précises des cinq fibules nos 810 et 811 à 814 sont malheureusement inconnues.
III.1.1.6. Type Riha 6.4.4 (pl. 8, nos 815-816)
102Les deux fibules nos 815 et 816 correspondent à la variante Riha 6.4.4. Elles présentent un arc de section rubanée avec une nervure centrale. La fibule n° 815 a été découverte sur le site du Boulevard Mazagran – Parking Leclerc [7], dans une recharge du trottoir du cardo daté de la fin du IIIe siècle, à l’instar des objets des sites du Pavillon Saint-Louis [9] et de la Maison de retraite [8] (LABAUNE coord., 2017, p. 217, fig. 2, 8, M1049). En revanche, la provenance de la fibule n° 816 n’est pas précisément connue (PINETTE, 1987, p. 178-179, n° 329b ; KASPRZYK, 2005, pl. 299, nos 3, 9).
III.1.1.7. Type Riha 6.4.7 (pl. 5, n° 504)
103La fibule n° 504 correspond à la variante Riha 6.4.7. Elle présente un arc de section hexagonale ainsi qu’un bras tubulaire comportant deux boutons terminaux de forme ovoïde. Des traces de métal blanc subsistent sur la surface. Elle a été découverte sur le théâtre du Haut-du-Verger dans le quartier de la Genetoye théâtre [10] (LABAUNE coord., 2014, p. 350, 2001.4) d’où proviennent également les fibules nos 502 et 503, la spatha n° 501 ainsi que la boucle de ceinturon n° 505.
- 2 Renseignement oral de Michel Kasprzyk, provenant de ses recherches en cours sur la répartition des (...)
104Les fibules de type Riha 6.4 sont principalement datées de la fin de la première moitié/milieu du IIIe siècle jusqu’au tout début de l’époque tétrarchique. Une distinction doit être établie par rapport au type Böhme 28. En effet, on retrouve les fibules à collerettes en grandes quantités sur les sites militaires de la zone du limes rhète-germanique, principalement à Saalburg, Zugmantel et Niederbieber (BÖHME, 1972, pl. 16-20, 699-821) ou bien encore à Doura-Europos au moment de la chute de la ville vers 256 (FRISCH, TOLL, 1949, pl. XI-XIII). En revanche, les fibules sans collerette sont quasiment absentes de ces camps tandis qu’elles sont très présentes en Gaule intérieure. C’est le cas notamment sur des sites civils où une présence militaire est attestée plus tardivement au cours de la seconde moitié du IIIe siècle comme par exemple à Augst (RIHA, 1979, p. 166-168, pl. 49-51, 70, 1430-1449 ; RIHA, 1994, p. 145-147, pl. 36-37, 2716-2728) ou bien à Avenches (MAZUR, 1998, p. 52, pl. 18-19, 26, 280-284 ; MAZUR, 2010, p. 65, 702). La présence de la collerette est donc un critère important de datation entre les fibules produites avant la chute du limes rhète-germanique et celles produites après. À l’exception de quelques exemplaires sporadiques, les fibules de type Böhme 28 et Riha 6.4 sont assez peu représentées en Germanie libre, région où l’armée romaine n’est pas implantée2. Leur caractère militaire ne fait donc aucun doute. Les fibules en arbalète préfigurent les fibules cruciformes massives qui font leur apparition à la toute fin du IIIe siècle et plus généralement au début du IVe siècle.
105Dans son ensemble, la série de vingt fibules en arbalète d’Autun est datable de la seconde moitié à la fin du IIIe siècle.
106La boucle de ceinturon n° 505 est particulièrement intéressante puisqu’il s’agit du seul exemplaire de ce type d’équipement recensé au sein du corpus. En alliage cuivreux, elle prend la forme d’un D présentant un aplatissement en partie centrale, ainsi que deux méplats de part et d’autre de l’axe de l’ardillon. La section de l’axe est circulaire. L’ardillon n’est pas conservé. Cette boucle a été découverte dans un niveau de démolition incendié daté de la seconde moitié du IIIe siècle, dans le théâtre extra muros du Haut-du-Verger à la Genetoye [10] (LABAUNE coord., 2013, vol. 2, p. 236 6001.48). Les trois fibules en arbalète nos 502, 503 et 504 ainsi que la spatha n° 501 ont également été découvertes au niveau du théâtre (KASPRZYK, 2005, pl. 299, n° 10 ; LABAUNE coord., 2014, p. 350, 2001.4).
107Ce type de boucle est attesté le long du limes rhète-germanique sur les camps de Saalburg, Zugmantel, Feldberg, Niederbieber, Wiesbaden, Osterburken, Pfünz (OLDENSTEIN, 1976, pl. 74-76). Des exemplaires sont aussi connus à Doura-Europos avec un terminus ante quem de 256 (JAMES, 2004, p. 77, fig. 37, nos 58-59).
108Deux appliques de baudrier en alliage cuivreux ont été identifiées au sein de notre corpus.
III.1.3.1. Applique rectangulaire à décor de rinceaux ajourés (pl. 8, n° 817)
109L’applique n° 817 est rectangulaire. En alliage cuivreux, elle comporte un décor ajouré de végétaux ou de rinceaux. Le système d’attache est assuré par un rivet à tête plate au revers ainsi que par une charnière moulée sur le petit côté et dans laquelle subsiste un fragment d’axe. La provenance précise de cette applique est inconnue (KASPRZYK, 2005, pl. 302, n° 1).
110On retrouve ce type d’appliques dans les camps du limes rhète-germanique (OLDENSTEIN, 1976, pl. 62, nos 790-797, pl. 63, nos 804-808, pl. 64, nos 816-820), dans des camps en Grande-Bretagne (BISHOP, COULSTON, 1993, p. 120, nos 1-3 ; ALLASON-JONES, 1996, p. 193, fig. 10, n° 40) ainsi qu’à Doura Europos avec un terminus ante quem daté de 256 (JAMES, 2004, p. 81, 76, 87-88).
III.1.3.2. Applique rectangulaire à décor alphabétique ajouré (pl. 8, n° 818)
111L’applique n° 818 présente des caractéristiques similaires à l’applique n° 817. Elle est constituée d’une tôle rectangulaire en alliage cuivreux plate et comporte un décor ajouré en forme de S. Le système d’attache est assuré par une charnière latérale quadrangulaire, réalisée par enroulement, sur le petit côté conservé. Sa provenance précise est inconnue (KASPRZYK, 2005, pl. 302, n° 2). En l’absence d’autres parallèles réellement satisfaisants, on peut toutefois rapprocher cette applique de la première.
112La datation de ces deux appliques de baudrier en alliage cuivreux est comprise entre l’époque Antonine et la fin du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, Annexe 2, pl. 302, nos 1-2).
113Cette catégorie regroupe tous les objets liés à l’équipement du cheval. Elle comprend les éléments qui permettent le contrôle de la monture (mors, sangles, anneaux, selles, etc.) et les éléments décoratifs (phalères, appliques de harnais, pendeloques diverses, etc.) (fig. 6). La plupart du temps, les éléments de décor sont en alliage cuivreux tandis que ceux concernant le contrôle de la monture sont en alliage cuivreux et dans une moindre mesure en fer. La parure du cheval peut parfois être confondue avec celle du soldat et des usages peuvent être ubiquistes ; les principaux critères de distinction étant la taille et le poids des objets, ainsi que le contexte archéologique. Ce dernier n’est pas systématiquement connu et dans un soucis d’homogénéité, toutes les appliques ont été regroupées dans le harnachement.
Fig. 6. Décompte récapitulatif du harnachement.
114Quatre-vingt-un éléments liés au harnachement ont été recensés (fig. 6).
115Cinq mors ou éléments de mors ont pu être identifiés de manière certaine. Ils sont tous métalliques, en fer et/ou en alliage cuivreux.
IV.1.1.1. Mors à phalères latérales circulaires et bélières (pl. 9, nos 901-902)
116Le mors n° 901 est dans un état de conservation exceptionnel. Cette pièce massive, de 28 cm de longueur, est constituée de fer et d’alliage cuivreux. Le canon continu, en fer, est de section carrée et comporte deux protubérances rectangulaires en partie centrale. Ses extrémités se terminent par des boucles repliées chacune reliées à un anneau massif, de section circulaire, en alliage cuivreux. De part et d’autres du canon sont insérées deux phalères circulaires en alliage cuivreux. Ces phalères sont convexes et présentent une dépression centrale autour d’un orifice circulaire ainsi qu’une bélière rectangulaire et un œillet circulaire sur le bord. Aux revers de ces deux phalères, on observe deux pièces en fer insérées de part et d’autre du canon. Elles sont en forme de losanges aux extrémités pointues et repliées vers l’intérieur du mors.
117Le mors n° 902 n’est attesté que par une simple phalère latérale en alliage cuivreux. Elle se présente sous la forme d’un disque décoré de cercles concentriques en creux, avec une bélière et un œillet latéral (LABAUNE, 2000, pl. 93, n° 2). Malgré ses dimensions réduites, cette phalère présente les mêmes caractéristiques que les deux phalères du mors n° 901. Les provenances précises des mors nos 901 et 902 sont inconnues.
118Un mors de ce type, associé à un harnais daté du IIIe siècle, est attesté à Feurs (Allier) (FEUGÈRE, 1983, 9-10) tandis qu’un autre exemplaire daté autour des années 200 à 300 provient du site de Mâlain (Côte-d’Or ; ROUSSEL, 1988, p. 95, pl. 29). Deux autres mors présentant les mêmes caractéristiques ont également été découverts à Thamusida au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, 505). À ce jour, la nature militaire de ce type de mors reste à définir puisqu’on observe que les lieux de découverte des éléments de comparaison sont des sites civils.
IV.1.1.2. Mors simple (pl. 1, n° 102)
119Le mors n° 102, en fer, présente une forme « simple ». Il est constitué d’un canon lisse et continu, courbé, d’une longueur de 17 cm. Ses extrémités sont aplaties et repliées en boucles, auxquelles sont reliées des anneaux de sections circulaires. Ce mors a été découvert dans le puits romain de la Caserne Changarnier (fig. 10, [1]), fouillé en 1897 (BULLIOT, 1897, p. 392, n° 3 ; PINETTE, 1987, p. 228, 448 ; KASPRZYK, 2005, pl. 275, n° 4). Il était associé à dix appliques de harnais nos 103a-g à 105 et à l’épée courte n° 101 ainsi qu’à un vase en alliage cuivreux de type Schnabelkanne caractéristique de la fin du Haut-Empire (KASPRZYK, 2005, Annexe 2).
IV.1.1.3. Phalère latérale de mors (pl. 9, n° 903)
120La phalère n° 903, en alliage cuivreux, est de forme circulaire bombée avec une dépression et une perforation circulaire centrale. Elle comporte une protubérance latérale rappelant vaguement une feuille de lierre. L’absence de système de fixation autre que la perforation centrale laisse penser à une phalère latérale de mors. Sa provenance précise est inconnue. Bien qu’elle ne comporte pas le même système de fixation, une phalère similaire a été découverte à Avenches, où elle était associée à du mobilier céramique daté du Ier au IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl. 18, n° 183).
IV.1.1.4. Applique latérale en forme de tige à bélière (pl. 9, n° 904)
121L’applique latérale de mors n° 904, en alliage cuivreux, présente une forme allongée de section lenticulaire, aux extrémités légèrement évasées. Elle comprend deux bélières de part et d’autre des bords longs, en partie centrale. La première bélière est de forme ovoïde et comporte un décor ajouré de peltes affrontées. La seconde bélière est constituée d’un simple œillet de section lenticulaire. La provenance précise de cette applique est inconnue.
122Une pièce similaire de plus petites dimensions est attestée à Doura-Europos, avec un terminus ante quem de 256 (JAMES, 2004, p. 97, 328). Un relief daté du IIIe siècle, provenant de Bishapur en Iran, représente un cheval portant un harnachement sassanide très proche du harnachement romain. Sur cette représentation, on aperçoit une pièce similaire au niveau de la bouche du cheval (ibid., p. 63 fig. 32, D). Malgré la présence du motif de pelte, très commun, cette représentation nous offre une piste de réflexion quant à l’influence orientale du harnachement sassanide sur le harnachement romain.
123Soixante-seize éléments décoratifs ont été identifiés parmi les objets liés au harnachement, parmi lesquels six phalères en alliage cuivreux ont été reconnues.
IV.2.1. Phalères de harnais (pl. 10)
124Les phalères prennent le plus souvent la forme d’un disque métallique de formes et ornementations variées. Elles sont généralement en alliage cuivreux et fabriquées par coulage. La face visible est ornée de motifs divers tandis que le revers supporte le système de fixation assuré par des anneaux, des passants, des rivets ou des perforations. Elles sont utilisées comme éléments de jonction entre les différentes lanières de cuir du harnais du cheval et sont principalement placées sur le poitrail, les épaules et/ou la croupe (BISHOP, 1988, p. 106-107 ; DESCHLER-ERB, 1999, p. 60, fig. 62 ; VOIROL, 2000, p. 21). Les phalères peuvent également être portées par le soldat comme décoration militaire et sont disposées sur un baudrier de cuir au niveau de la poitrine. Cette utilisation est plus minoritaire.
IV.2.2. Phalères à « trompettes celtiques » (pl. 10, nos 1001-1002)
125Les deux phalères nos 1001 et 1002 correspondent au type Nicolay C (NICOLAY, 2007, p. 371, pl. 60). Elles sont circulaires et comportent un décor végétal ajouré dit de « trompettes celtiques ». Les deux phalères sont fragmentaires. La partie centrale de la phalère n° 1001 est manquante, son système de fixation n’est pas conservé. La seconde phalère n° 1002 n’est conservée que sur la moitié mais présente deux petites perforations circulaires, peut-être quatre à l’origine, réparties sur le pourtour de l’objet. Ces perforations étaient sans doute destinées à fixer l’objet sur du bois ou du cuir. Elle présente également un décor supplémentaire de deux paires de cercles concentriques répartis de part et d’autre de la bande du pourtour de l’objet. La phalère n° 1001 a été découverte en 1866 au moment des travaux du chemin de fer (fig. 10, [17]) (PINETTE, 1987, p. 228, 449b). La provenance de la phalère n° 1002 est quant à elle inconnue.
126Un exemplaire similaire, daté du courant du IIIe siècle, est attesté sur le camp de Zugmantel, dans le zone du limes rhète-germanique (OLDENSTEIN, 1976, pl. 87, 1131 ; BISHOP, COULSTON, 2009, p. 156, n° 3). Quatre phalères ont été découvertes en position sur un harnais de cheval, dans une tombe à Brigetio en Hongrie (LABAUNE, 2000, p. 128, n° 5). Quatre autres exemplaires proviennent d’un contexte de tombe à char à Volubilis au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 113-114, n° 105). Enfin, un exemplaire a été découvert à Doura Europos en Syrie, avec un terminus ante quem de 256 (JAMES, 2004, p. 75, 27). J. Nicolay date ce type des IIe-IIIe siècles (NICOLAY, 2007, p. 49).
127La phalère n° 1003, en alliage cuivreux, est circulaire et comporte un décor ajouré de rinceaux ou de « rayons stylisés ». Le système d’attache n’est pas conservé mais on observe le départ d’une tige au niveau du bouton central. Elle a été découverte au niveau du chemin de fer [17] (PINETTE, 1987, p. 228, 449a).
128Une phalère présentant un décor similaire est attestée à Avenches, où elle était associée à un faux antoninien de Valérien daté de 253 et à un antoninien de Postume daté de 260 ainsi qu’à de la céramique datée des années 50 à 250 (VOIROL, 2000, p. 78, 179). Un autre exemplaire a été découvert dans la tombe d’un officier de Silistra en Mésie inférieure avec un terminus ante quem de 276 (MARTIN-KILCHER, 1993, p. 300-301, 312, fig. 14 ; PETCULESCU, 1991, p. 208 ; VASILIEV, 1974, p. 27-43). Ce type est présent au niveau du limes rhète-germanique sur le camp de Pfünz (OLDENSTEIN, 1976, pl. 89, 1155), mais également sur des sites civils à Aquilée (BUORA, 2001, pl. 3, 8), au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, 109) et à Doura-Europos dans un contexte daté du milieu du IIIe siècle (JAMES, 2004, p. 75, 19, 20).
129La phalère n° 1004, en alliage cuivreux, est circulaire et légèrement convexe. Elle présente un décor périphérique ajouré rappelant des « feuilles de lierre » ainsi qu’une perforation circulaire centrale. Sa provenance précise est inconnue. Une phalère similaire, datée entre la toute fin du IIe et le milieu du IIIe siècle, a été découverte dans la zone du limes rhète-germanique à Zugmantel (OLDENSTEIN, 1976, pl. 90, 1159).
130La phalère n° 1005 est fragmentaire. Elle est en alliage cuivreux et présente un décor ajouré de type végétal ou de volutes. Le système d’attache n’est pas conservé. Sa provenance précise est inconnue. Malgré le caractère fragmentaire de cet objet, on peut le rapprocher d’une phalère à décor ajouré trouvé à Volubilis au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, pl. 34, n° 104). Chr. Boube-Piccot propose de dater ce type des années 200 à 300 ap. J.-C.
- 3 Mention sur une étiquette du xixe siècle au dos de l’objet.
131La phalère n° 1006, en alliage cuivreux, est de forme circulaire avec un décor de cercles concentriques en creux. Le système d’attache est fragmentaire. Seul les départs de deux tiges circulaires massives sont conservés au revers. Il pourrait s’agir soit de rivets à têtes plates, soit des restes d’un passant pour une lanière de cuir. Cette phalère a été découverte en 1840, le long de la « grande voie centrale » (fig. 10, [18])3. De nombreuses phalères similaires ont été découvertes à Vimose au Danemark sur des restes de baudrier en cuir daté du IIIe siècle (BISHOP, COULSTON, p. 162, pl. 7, a). Elles sont considérées comme des phalères de baudrier et non de harnachement de cheval. Dans un soucis d’uniformité et en l’absence de contexte précis, cette phalère figure avec les autres mais le doute demeure.
132Les appliques de harnais posent de nombreux problèmes d’attribution. Quand leur contexte de découverte n’est pas connu, il est difficile de les distinguer précisément du harnachement et/ou de l’équipement personnel. On retrouve les mêmes motifs pour le harnachement et pour l’équipement personnel. Le principal critère de distinction est la dimension de l’objet mais le plus souvent l’incertitude demeure. Soixante-huit appliques ont été recensées à Autun.
IV.2.7.1. Appliques circulaires convexes (pl. 1, nos 103a-g ; pl. 2, n° 206 ; pl. 11, nos 1101-1108)
- 4 Renseignement de C. Linguanotto et Y. Labaune. Collection Voirin, intégrée aux fonds du musée Rolin (...)
- 5 N° 206, pl. 2 : Rue des Pierres (fig. 10, [2]), dans un niveau incendié de la fin du iiie siècle, 1 (...)
133Les vingt appliques nos 103a-g, 206 et 1101 à 1108, bien que de dimensions variées, correspondent toutes au type Nicolay B1 (NICOLAY, 2007, p. 381, pl. 70). En alliage cuivreux, elles sont de forme circulaire, convexes, sans décor, et comportent deux rivets à têtes plates au revers (PINETTE, 1987, p. 228-229, nos 450b-c ; LABAUNE, 2000, p. 134, pl. 96, nos 25, 28, 30 ; KASPRZYK, 2005, pl. 275, n° 3). Les sept appliques nos 103a-g proviennent du puits romain de la Caserne Changarnier (fig. 10, [1]). Elles étaient associées au bouton de harnais n° 105, au mors n° 102, à l’épée courte n° 101 et à un vase en alliage cuivreux daté de la fin du IIIe siècle (PINETTE, 1987, p. 229, n° 450d ; lABAUNE, 2000, pl. 96, n° 31 ; KASPRZYK, 2005, pl. 275, n° 2). L’applique n° 1105 a été découverte sur le site de la rue des Marbres [15], dans une couche de remblai, à la fin du XIXe siècle. L’applique n° 206 provient du site de la rue des Pierres [2], dans un niveau d’abandon daté de la fin du IIIe siècle. Elle était associée au fer de lance n° 201, la garde de spatha n° 202, la bouterolle de spatha n° 203, l’écaille de cuirasse n° 204 et la fibule en arbalète n° 205 (KASPRZYK, 2005, pl. 122, n° 6). L’applique n° 1108 a été découverte sur le site du Lycée militaire [12] vers la fin des années 1990, mais son contexte stratigraphique est inconnu à ce jour4. Quand les provenances sont connues, les appliques sont issues de contextes datables du courant du IIIe siècle5.
134Des exemplaires similaires ont été découverts notamment à Avenches, dans des contextes datés du milieu du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl.14, 125-134b ; pl. 15, 135b-143) et jusque sur les sites de Volubilis et Doura-Europos (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 167, nos 223-225 ; JAMES, 2004, p. 95, fig. 43, nos 314-315). Un harnais de cheval comportant des appliques circulaires a été découvert dans un dépôt daté entre le IIe et le IIIe siècle sur le site rural de Thervay (FORT et alii, 2009, p. 440-443). D’autres appliques ont été découvertes sur les sites militaires du limes rhète-germanique (OLDENSTEIN, 1976, pl. 56, nos 694-695 ; SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 9, nos 8-10, 12-15, 17-22). Ce type est daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52, p. 381, pl. 70, Type B1, période 3). S’agissant du type le plus couramment découvert sur les sites civils ruraux comme urbains à cette période, sa nature militaire, bien que réelle, n’est pas systématique.
IV.2.7.2. Applique circulaire à umbo (pl. 1, n° 104)
135L’applique n° 104 correspond au type Nicolay B4 (Nicolay, 2007, p. 383, pl. 72). En alliage cuivreux, elle est de forme circulaire et comporte une bosse centrale rappelant un umbo ainsi que deux rivets à têtes plates au revers. Elle provient du puits romain de la caserne Changarnier [1] où elle était associée à d’autres militaria datés de la fin du IIIe siècle (nos 101-105) (BULLIOT, 1897 p. 392 ; LABAUNE, 2000 p. 96, n° 31 ; KASPRZYK, 2005 pl. 275, n° 2).
136Deux autres appliques de ce type ont été découvertes à Avenches dans un contexte daté du milieu du IIe au tout début du IVe siècle et par la céramique des Ier-IIIe siècles (VOIROL, 2000, pl. 17, nos 166-167). Moins courantes que les appliques circulaires simples, elles sont tout de même présentes dans de nombreuses régions de l’Empire, de la Germanie à l’Afrique du nord, la plupart du temps dans des contextes du IIIe siècle : à Zugmantel, Saalburg, Niederbieber (OLDENSTEIN, 1976, pl. 49, nos 542-557), Volubilis et Banasa (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 164, n° 226, p. 261, n° 432 ; BISHOP, COULSTON, 1993, p. 152, n° 17). Ce type est généralement daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52).
137Par bien des aspects les boutons de harnais sont similaires aux appliques. Ils sont en général de plus petites dimensions (2,5 à 1,5 cm) que les appliques et ne comportent qu’un seul rivet au revers.
138Actuellement, cinq boutons ont pu être identifiés pour deux types distincts. Ils sont tous en alliage cuivreux et de forme circulaire.
IV.2.8.1. Boutons circulaires simples (pl. 11, nos 1109-1112a-b)
139Les quatre boutons nos 1109 à 1112a-b sont en alliage cuivreux. Ils sont circulaires, convexes, avec un rivet, et leurs provenances précises sont inconnues (LABAUNE, 2000, pl. 96, n° 25). Les deux boutons nos 1112a et b étaient associés à l’applique circulaire n° 1107 (ibid., pl. 96, n° 30).
140Ce type de boutons est très commun sur la plupart des sites aux IIe et IIIe siècles. De très nombreux exemplaires sont attestés à Avenches et la plupart sont associés à du mobilier daté du Ier au IIIe siècle (VOIROL, 2000, p. 62, pl. 20, nos 207-234). Sur le site rural de Thervay, plusieurs autres exemplaires ont été mis au jour dans un dépôt daté des IIe-IIIe siècles. Ils étaient associés à un harnais de cheval comportant d’autres types d’appliques (FORT et alii, 2009, p. 440-443). Ce type est également attesté dans la zone du limes rhète-germanique, dans les camps de Zugmantel, Saalburg, Feldberg et Niederbieber (OLDENSTEIN, 1976, pl. 47-48, nos 516-527 ; SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 10, n° 2), à Bliesbruck dans un contexte de la fin du IIe au milieu du IIIe siècle (WILMOUTH, 2014, vol. 4, 716-717, 802, 805), à Dury dans un dépôt de bronze daté des années 220-250 (QUEREL, FEUGÈRE, 2000, 56, fig. 147, 179-180), à Aquilée (FEUGÈRE et alii, Artefacts : APH-4048, 2-3), à l’Escala-Ampurias (ibid., Artefacts : APH-4048, 101-102) et jusqu’à Doura-Europos (JAMES, 2004, p. 95, fig. 43, nos 290-294). La fabrication des boutons de harnais coulés pour le décor du harnachement est attestée jusqu’au IIIe siècle. Ils sont ensuite réutilisés comme appliques de ceinturons à partir du IVe siècle. Ce changement de fonction de l’objet serait dû à l’effondrement du limes vers le milieu du IIIe siècle (FEUGÈRE et alii, Artefacts : APH-4048).
IV.2.8.2. Bouton circulaire à umbo (pl. 1, n° 105)
141Le bouton circulaire n° 105 se démarque par la présence d’une « bosse » centrale. Il s’agit du type Nicolay B4 (NICOLAY, 2007, pl. 72, 41.5). Il provient du puits romain de la caserne Changarnier (fig. 10, [1]) où il était associé à sept appliques circulaires nos 103a-g, au mors n° 102, à l’épée courte n° 101 et à un vase en alliage cuivreux daté de la fin du IIIe siècle (PINETTE, 1987, p. 229, 450d ; LABAUNE, 2000, pl. 96, n° 31 ; KASPRZYK, 2005, pl. 275, n° 2).
142Des exemplaires sont attestés dans les camps du limes rhète-germanique, à Zugmantel, Saalburg et à Niederbierber dans un contexte daté des années 180/185 à 250/253 (OLDENSTEIN, 1976, pl. 49, nos 558-563). Ce type est daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52).
143Étant donné la présence d’autres appliques circulaires, ainsi que celle du mors, il semble que ce bouton appartienne à un seul et même harnais de tête. S’agissant d’une découverte ancienne, aucune autre information quant à la disposition des objets n’est connue.
IV.2.9.1. Applique circulaire à peltes ajourées (pl. 13, n° 1319)
144L’applique n° 1319 appartient au type Nicolay B9 (NICOLAY, 2007, p. 386, pl. 75). En alliage cuivreux, elle est de forme circulaire plate avec un décor central ajouré de quatre peltes et comporte deux rivets à têtes plates au revers. Sa provenance est inconnue (LABAUNE, 2000, pl. 97, n° 42).
145Deux exemplaires similaires ont été découverts à Augst, dans un niveau d’incendie du triclinium de la Maison de la « mosaïque des gladiateurs » (insula 30), dans un contexte daté des années 270/275. Elles étaient associées aux restes d’un baudrier comprenant une épée, une applique peltiforme, ainsi qu’à une fibule en forme d’arbalète et plusieurs antoniniens de Victorin et Tetricus (MARTIN-KILCHER, 1985, p. 181, Abb. 24,1-24,2). Un autre exemplaire daté des années 220 à 250 est attesté dans un dépôt de bronzier à Dury en France (QUEREL, FEUGÈRE, 2000, p. 56, fig. 147, 177). Ce type est également attesté le long du limes rhète-germanique à Zugmantel (OLDENSTEIN, 1976, pl. 69, n° 905) et Saalburg (ibid., pl. 55, 674) et jusqu’en Maurétanie Tingitane à Volubilis (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 167, 229). Toutefois, il reste assez rare par rapport aux appliques plus simples (circulaires, coquillages, peltes, etc.). On le retrouve dans des contexte militaires et civils du milieu du IIe siècle au début du IVe siècle.
146L’attribution de l’applique n° 1319 peut être mixte car on la retrouve aussi bien sur un baudrier que sur du harnachement.
IV.2.9.2. Applique ovale peltes ajourées (pl. 13, n° 1320)
147L’applique n° 1320, appartient au type Nicolay B9 (NICOLAY, 2007, p. 386, pl. 75). En alliage cuivreux, elle présente une forme ovale assez massive (3,6 cm) avec un décor central mouluré et ajouré de quatre peltes, ainsi que quatre rivets à têtes plates au revers. Sa provenance précise est inconnue (PINETTE, 1987, p. 229, 450e ; LABAUNE, 2000, pl. 97, n° 43).
148Une applique similaire a été découverte à Champagnole, dans le Jura. Elle ornait un mors massif daté des années 200 à 300 (LENG, 1990). Toutefois son système d’attache à bélières diffère de celle d’Autun, permettant de l’exclure des éléments de mors et de la classer dans les appliques de harnais. Un autre parallèle provient du camp de Marienfels, dans la zone du limes rhète-germanique (OLDENSTEIN, 1976, pl. 90, 1165). D’après les parallèle et le système de fixation, ce type peut être daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52).
IV.2.9.3. Appliques en forme de coquillage ou pelte » classique » (pl. 12, nos 1201a-b-1216)
- 6 Inscription manuscrite sur étiquette de la fin du xixe.
- 7 Renseignement de C. Linguanotto et Y. Labaune. Collection Voirin, intégrée aux fonds du musée Rolin (...)
149Les appliques nos 1201a-b à 1216 appartiennent au type Nicolay B5 (LABAUNE, 2000, pl. 134, n° 38 ; NICOLAY, 2007, p. 384, pl. 73). Elles prennent la forme de « coquillages » bombés ou peltes en alliage cuivreux et comprennent deux rivets à têtes plates au revers. Les appliques nos 1201a et b portaient la mention manuscrite « Jardin Lorrain » (fig. 10, [13]) (PINETTE, 1987, p. 229, h)6. L’applique n° 1203 a été découverte sur le site du Lycée militaire [12], malheureusement le contexte stratigraphique n’est pas connu7.
150De nombreux autres exemplaires sont attestés sur des sites civils. Onze appliques similaires proviennent d’Avenches, dans des contextes du milieu du IIe au début du IVe siècle et plus généralement du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl. 15, 135 ; pl. 16, 145-153). Des exemplaires sont également attestés à Aquilée (GSCHWIND, 1998, Abb. 3, nos 1-7) ainsi qu’à Volubilis (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 171, nos 230-231). Ce type est également attesté sur des sites militaires en Germanie, le long du limes rhète-germanique (BUORA, 2001, p. 49 ; SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 8, nos 10-13 ; OLDENSTEIN, 1976, pl. 57, nos 696-699). Un atelier de production d’appliques en forme de coquillage a été identifié à Blandain en Belgique (DUFRASNES, 2007, p. 14-15). Le type Nicolay B5 est daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52). Les appliques en forme de peltes se déclinent en plusieurs variantes, plates, stylisées, ajourées, etc.
IV.2.9.4. Appliques ovales (pl. 13, nos 1301-1303 ; une non représentée)
151Les appliques nos 1301 à 1303, ainsi que l’applique non représentée, appartiennent au type Nicolay B10 (NICOLAY, 2007, p. 387, pl. 76). Elles sont en alliage cuivreux, de forme ovale, plates, avec deux rivets à têtes plates au revers. Deux d’entre-elles comportent un décor supplémentaire sur l’avers. L’applique n° 1302 présente une arrête centrale en relief et l’applique n° 1303, une ligne incisée courant sur tout le pourtour. Leurs provenances précises sont inconnues (lABAUNE, 2000, p. 133-134, pl. 96, nos 33-35).
152Huit appliques similaires sont attestées à Avenches, dans des contextes allant du milieu du IIe à la deuxième moitié du IIIe siècle (CASTELLA, 1999, p. 349-350, pl. 168, n° 1759 ; VOIROL, 2000, p. 58, pl. 16, nos 154-161). Ce type est très présent le long du limes rhète-germanique, à Saalburg, Zugmantel ainsi que dans la villa de Wange en Belgique (SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 10, nos 4, 6-9, 11, 12). Quelques exemplaires ont été trouvés en France, sur le forum de Bavay (FEUGÈRE et alii, Artefacts APH-4026, 4-5), à Lyon (ibid., Artefacts APH-4026, 17) et à Mâlain (ROUSSEL, 1988, pl. 29, n° 253). D’autres ont été découverts, à Doura-Europos (JAMES, 2004, p. 95, fig. 43, n° 313) et au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, pl. 56, nos 240-242). Ces appliques assez communes sont datées de la deuxième moitié du IIe à la fin du IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52, n° 62).
IV.2.9.5. Appliques peltiformes « stylisées » (pl. 13, nos 1304-1313)
153Le corpus comporte actuellement dix appliques peltiformes variées en alliage cuivreux. Elles sont plates et prennent la forme d’une pelte fortement stylisée, très semblable à un champignon, avec un pied et deux échancrures semi-circulaires qui outrepassent la forme de la pelte « classique ». Le système d’attache est assuré par un ou deux rivets circulaires au revers, en fonction de la dimension de l’objet. Plusieurs variantes peuvent être distinguées.
IV.2.9.6. Applique peltiforme ajourée (pl. 13, n° 1304)
154L’applique n° 1304 appartient à une variante du type Nicolay B9 (NICOLAY, 2007, p. 385, pl. 74). Elle est en alliage cuivreux, plate et comporte deux rivets à têtes plates au revers. Elle se démarque des appliques peltiformes simples par la présence d’un décor ajouré de deux petites peltes affrontées. Sa provenance précise est inconnue (PINETTE, 1987, p. 228-229, 450f ; LABAUNE, 2000, pl. 97, n° 41).
155Deux exemplaires similaires sont attestés dans la zone du limes rhète-germanique à Zugmantel (OLDENSTEIN, 1976, pl. 54, n° 648) ainsi qu’à Thamusida (BOUBE-PICCOT, 1980, fig. 506). Ce type est daté de la fin du IIe au IIIe siècle et principalement du courant du IIIe siècle.
IV.2.9.7. Applique peltiforme à « queue d’ogive » (pl. 11, n° 1305)
156L’applique n° 1305 appartient au type Nicolay B9 (NICOLAY, 2007, p. 385, pl. 74). Toutefois, elle se distingue des appliques peltiformes simples par la présence d’une excroissance ogivale au niveau de la queue. Elle est en alliage cuivreux, plate et comporte deux rivets à têtes plates au revers. Sa provenance précise est inconnue (LABAUNE, 2000, pl. 97, n° 40).
157Comme pour les appliques peltiformes simples, cette variante est attestée en Gaule intérieure, dans la zone du limes rhète-germanique, à Feldberg et Steinturm (SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 7, n° 27 ; OLDENSTEIN, 1976, pl. 53, nos 638, 640), à Aquilée (FEUGÈRE et alii, Artefacts APH-4008, 1-5), ainsi qu’à Thamusida (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 359, n° 621) dans des contextes datés de la fin du IIe jusqu’au début du IVe siècle.
IV.2.9.8. Appliques peltiformes simples (pl. 13, nos 1306-1313)
158Les appliques nos 1306 à 1313 appartiennent au type Nicolay B9 (NICOLAY, 2007, p. 385, pl. 74). Elles sont en alliage cuivreux, en forme de pelte ou de « champignon », sans autre élément décoratif distinctif et comportent généralement deux rivets à têtes plates au revers. Leurs provenances précises ne sont pas connues, excepté pour l’applique n° 1313 qui provient du site du Faubourg Saint-Jean [16] (PINETTE, 1987, p. 228-229, n° 450g).
159Un exemplaire similaire est attesté à Augst où il provient du niveau d’incendie du triclinium de la Maison de la mosaïque aux gladiateurs, dans un contexte daté des années 270/275. Il était associé à un baudrier comportant une épée, deux appliques circulaires ajourées, ainsi qu’à une fibule en forme d’arbalète et des antoniniens de Victorin et Tetricus (MARTIN-KILCHER, 1985, p. 181, Abb. 24). Une découverte effectuée dans la tombe 7 de Mangolding près de Regensburg permet d’affirmer qu’elles étaient aussi utilisées comme réemploi pour l’ornementation du cingulum (FISCHER, 1990, pl. 126, B2 ; GSCHWIND, 1998, p. 121). La plupart des autres découvertes montrent que ces appliques ornaient principalement le harnachement des chevaux (Buora, 2001, p. 48 ; SCHLEIERMACHER, 2000, p. 167-193). Ce type est présent dans la zone du limes rhète-germanique à Zugmantel (OLDENSTEIN, 1976, pl. 53, n° 637), Niederbieber (ibid., pl. 53, n° 624), Kapersburg (ibid., pl. 53, n° 625), Saalburg (ibid., pl. 53, nos 627-628, 633), en passant par les provinces de Germanie jusqu’au Maroc (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 172, n° 238, p. 253, n° 457, p. 270, n° 458). Selon J. Oldenstein, ce type est principalement utilisé pendant la première moitié du IIIe siècle (OLDENSTEIN, 1976, p. 181). J. Nicolay étend cette datation du milieu du IIe jusqu’à la fin du IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52), tandis que I. Radman-Livaja date la fin de son utilisation comme réemploi au début du IVe siècle (RADMAN-LIVAJA, 2004, p. 117).
IV.2.9.9. Applique ovale à umbo (pl. 13, n° 1314)
160L’applique n° 1314 correspond au type Nicolay B17 (NICOLAY, 2007, p. 52-54). En alliage cuivreux, elle se caractérise par une forme ovale ainsi qu’une sorte d’umbo central. Elle comporte deux rivets d’attache au revers. Bien que le type B17 regroupe les appliques hexagonales à motifs de vulves, l’applique n° 1314 s’en rapproche par sa forme, faisant penser à une variante probable. Cette applique provient d’un niveau de démolition daté des années 330 à 425, sur le site de la domus de l’Atac [11]. De ce même niveau provient également la pendeloque n° 1323 (BAUDRY, 2022, p. 320, 331, M-108).
161Ce type est très présent sur les sites militaires. Des appliques similaires ont été retrouvées notamment sur le camp d’Oedenburg (Haut-Rhin) où elles sont datées des IIIe-IVe siècles (ZAGERMANN, 2003, p. 100-101, nos 9-15). J. Nicolay propose quant à lui une datation entre le milieu du IIe et le IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52-54).
162En considérant le caractère secondaire du dépôt de l’applique n° 1314 dans un niveau de démolition daté des IVe-Ve siècles, il est possible de proposer une utilisation dans le courant du IIIe siècle (BAUDRY, 2022, p. 319, 331, M-112).
IV.2.9.10. Appliques hexagonales à motif de vulve (pl. 13, nos 1315-1316)
163Les appliques nos 1315 et 1316 appartiennent au type Nicolay B17 (NICOLAY, 2007, p. 390, pl. 79). Elles sont en alliage cuivreux, de forme hexagonale avec un motif central de vulve en relief et comportent deux rivets à têtes plates au revers. Leur provenance précise est inconnue (PINETTE, 1987, 229, 450i ; LABAUNE, 2000, pl. 93, n° 44). Il n’est pas rare que ces appliques soient agrémentées de pendants en forme de phallus stylisés.
164Un exemplaire similaire, avec pendant, a été découvert à Avenches, dans un contexte daté du milieu du IIe à la fin du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl. 18, n° 186). Ces appliques sont également connues dans la zone du limes rhète-germanique, à Saalburg (OLDENSTEIN, 1976, pl. 34, nos 267, 269-270), Zugmantel (ibid., pl. 34, n° 271 ; SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 6, nos 1-3, 5), Niederbieber (OLDENSTEIN, 1976, pl. 34, nos 268, n° 272), Feldberg (SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 6, n° 4). Un autre exemplaire daté du IIIe siècle est connu à Siscia (RADMAN-LIVAJA, 2004, pl. 74, n° 537) tandis qu’à Doura-Europos une applique est datée par un terminus ante quem de 256 (JAMES, 2004, p. 95, nos 202-203). Les appliques hexagonales à motif de vulve sont datées du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52). Selon J. Oldenstein, ce type est principalement utilisé au cours du IIIe siècle (OLDENSTEIN, 1976, p. 137).
IV.2.9.11. Applique rectangulaire à bords concaves (pl. 13, n° 1317)
165L’applique n° 1317 appartient au type Nicolay B8 (NICOLAY, 2007, p. 385, pl. 74). Elle est en alliage cuivreux, ses bords sont concaves à champs biseautés et ses coins en pointes. Elle comportait, à l’origine, deux rivets à têtes plates au revers. Sa provenance précise n’est pas connue.
166Deux exemplaires similaires sont attestés à Avenches, où l’un d’eux est directement associé à du mobilier daté du milieu du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl. 17, n° 164). Une autre applique associée à un harnais de cheval daté du IIIe siècle est connue à Feurs (FEUGÈRE, 1983, fig .16, n° 37). Sur le site de l’établissement rural de Thervay, un autre exemplaire associé à un harnais de cheval a été mis au jour dans un dépôt daté des IIe-IIIe siècles (FORT et alii, 2009, p. 440-443). D’autres appliques sont connues à Volubilis et Thamusida (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 330, n° 574 ; BOUBE-PICCOT, 1994, p. 172, n° 246 ; BISHOP, COULSTON, 2009, p. 152, n° 16). Elles sont également présentes sur les sites militaires de la zone du limes rhète-germanique, à Zugmantel, Saalburg et Feldberg (Oldenstein, 1976, pl. 59, nos 733-736). Ce type est daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52). Il est très répandu dans de nombreuses provinces de l’Empire même s’il est moins courant que les appliques circulaires, en forme de coquillage, etc.
IV.2.9.12. Applique à « trompettes celtiques » (pl. 13, n° 1318)
167L’applique n° 1318 appartient au type Nicolay B15 (NICOLAY, 2007, p. 389, pl. 78). Elle est en alliage cuivreux. Elle prend la forme de deux « trompettes celtiques » affrontées et ajourées. Elle comportait à l’origine, deux rivets à têtes plates au revers. Sa provenance précise est inconnue.
168Plusieurs exemplaires sont attestés dans les camps de la zone du limes rhète-germanique, à Saalburg, Pfünz, Faimingen (OLDENSTEIN, 1976, pl. 69, nos 897-900 ; BUORA, 1996, pl. 1, n° 12) et à Carnuntum (ibid., pl. 1, n° 11). Ce type est également présent dans le camp de Vindolanda (BIDWELL, 1985, p. 120, n° 21) ainsi qu’à Thamusida et à Tocolosida (BOUBE-PICCOT, 1980, p. 311, n° 257, p. 189, n° 326). Il est daté du milieu du IIe au IIIe siècle (NICOLAY, 2007, p. 52). Ce motif, typique de la zone du limes rhète-germanique, est de forte inspiration germanique et rappelle celui des phalères à « trompettes celtiques ». Il est caractéristique de l’équipement militaire et des pièces de harnais au IIIe siècle (FEUGÈRE, Artefacts APH-4022).
IV.2.9.13. Applique phallique (pl. 13, n° 1321)
169L’applique n° 1321 appartient au type Nicolay B-varia (NICOLAY, 2007, p. 391, pl. 80). Elle est en alliage cuivreux, prend la forme d’un phallus stylisé et comporte deux petits rivets au revers. Sa provenance précise est inconnue (LABAUNE, 2000, pl. 95, n° 20).
170Trois exemplaires analogues ont été découverts à Avenches, dont un qui était associé à du mobilier daté de la fin du Ier au milieu du IIIe siècle (VOIROL, 2000, pl.18, 180). Une applique est attestée à Tihany, sur un harnais dans une tombe de cheval (PALAGYI, 1990, p. 23, Kat. 2.14, 3.10). De nombreux autres exemplaires sont attestés dans la zone du limes rhète-germanique, à Saalburg, Zugmantel, Feldberg, etc. (SCHLEIERMACHER, 2000, pl. 10, n° 20 ; OLDENSTEIN, 1976, pl. 30, n° 203). Onze exemplaires ont également été découverts dans la villa de Wange (Belgique), incendiée au cours du IIIe siècle (LODEWIJCKX, 1993, p. 78 ; VOIROL, 2000, p. 26).
171Les principales fonctions des pendeloques sont décoratives et apotropaïques. Elles pouvaient décorer les harnais des chevaux comme les extrémités des tabliers de lanières des soldats. Deux pendeloques ont pu être identifiées à ce jour au sein du corpus.
IV.2.10.1. Pendeloque phallique (pl. 13, n° 1322)
172La pendeloque dite « phallique » n° 1322 est en alliage cuivreux. Elle prend la forme d’un cœur allongé et prolongé par un phallus stylisé à son extrémité inférieure. Le système de fixation est assuré par une bélière en partie supérieure. Elle correspond au type Nicolay B3 (NICOLAY, 2007, pl. 91, B3). Sa provenance précise est inconnue (LABAUNE, 2000, pl. 95, n° 20).
173Une pendeloque similaire a été découverte à Augst, au niveau de l’insula 22, dans un contexte daté des années 230 à 270 (DESCHLER-ERB, SCHWARZ, 1993, p. 15, fig. 15, n° 2). Plusieurs autres exemplaires proviennent des camps du limes rhète-germanique (OLDENSTEIN, 1975, pl. 34, nos 261, 262, 264, 266, 267) et des camps de Bretagne (WACHER, MCWHIRR, 1982, p. 113, fig. 38, n° 117 ; ALLASON-JONES, MIKET, 1984, n° 660 ; FRÈRE, 1984, p. 34, fig. 12, n° 88), ainsi qu’à Aquilée (FEUGÈRE, Artefacts : PDH-4032, 4-5) et à Doura-Europos (JAMES, 2004, fig. 45, nos 357-359). La plupart du temps, ces pendeloques sont raccordées à des appliques hexagonales à motif de vulve et/ou de simples boutons hémisphériques (FEUGÈRE, Artefacts : PDH-4032).
174D’après M.C. Bishop, ce type peut être daté des IIe et IIIe siècles (BISHOP, 1992, p. 99, fig. 17, n° 9). S. Deschler-Erb et P.-A. Schwarz proposent une datation de la première moitié du IIIe siècle pour les pendeloques à boutons et de la seconde moitié du IIIe siècle pour les pendeloques à appliques hexagonales (DESCHLER-ERB, SCHWARZ, 1993, p. 177).
IV.2.10.2. Pendeloque foliacée (pl. 13, n° 1323)
175La pendeloque n° 1323 correspond à la variante 7 du groupe 1 du classement établi par J. Nicolay (NICOLAY, 2007, p. 57). Elle est constituée d’une fine tôle en alliage cuivreux. De forme foliacée simple en partie supérieure, elle se termine en partie inférieure par un lest en forme de goutte. Le système d’attache, fragmentaire ici, est généralement assuré par un crochet replié sur lui-même. Cette pendeloque a été découverte sur le site de la domus de l’Atac (fig. 10, [11]), en position secondaire, dans un niveau de démolition daté entre les années 330 et 425 et d’où provient également l’applique n° 1314 (BAUDRY, 2022, p. 319-320, 331, M-112, M-108).
176Les pendeloques foliacées sont présentes à Augst dès le milieu du Ier siècle et leur utilisation se prolonge jusqu’au début du IIe siècle (DESCHLER-ERB, 1999, p. 170, n° 592 ; NICOLAY, 2007, p. 57). Bien que la datation de la pendeloque n° 1323 soit plus ancienne que celles des autres éléments du corpus, elle provient du même niveau de démolition tardif que l’applique n° 1314 qui est quant à elle datable du milieu du IIe au IIIe siècle, ce qui pourrait éventuellement indiquer une utilisation plus tardive (BAUDRY, 2022, p. 320, 331, M-108).
177Les lieux de découvertes des objets ne sont que rarement connus. Environ 53 % des objets ou lots d’objets n’ont pas de provenance connue (82 NMI). À cela on peut ajouter 6 % d’objets qui ont une provenance connue sans toutefois avoir de contexte précis (10 NMI). Ces objets sont issus de collections anciennes constituées au moment des grandes excavations menées au xixe siècle dans de nombreux quartiers de la ville (92 NMI) (fig. 7).
Fig. 7. Proportions des provenances connues et inconnues.
178Seuls dix-huit sites de découverte ont pu être identifiés (75 NMI). Sur ces dix-huit sites, onze ont livré des objets issus de contextes archéologiques connus et donc de niveaux précisément datés par la stratigraphie et le mobilier (63 NMI). Cette part représente 41 % du total des objets du corpus. Pour la plupart il s’agit de fouilles plus récentes, menées à partir des années 1980 (fig .8).
Fig. 8. Décompte récapitulatif des objets découverts en fonction des sites/contextes connus.
179Parmi les sites de découverte, plusieurs grands contextes se dégagent : les zone d’artisanat (49 %), les zone d’habitat (25 %), les puits (16 %), un édifice de spectacle (7 %), la voirie (3 %) (fig. 9).
Fig. 9. Caractérisation des contextes de découvertes par catégories.
180Si on se réfère à l’état actuel de la recherche archéologique dans la ville d’Autun, c’est le contexte artisanal qui a livré le plus d’objets. Il s’agit des sites voisins du Pavillon Saint-Louis [9] et de la Maison de retraite [8] d’où provient un ensemble de trente-quatre militaria dont trente en os, issus du remblai du trottoir bordant le cardo, daté de la fin du IIIe siècle. Ce lot, principalement composé de bouterolles, de pontets et de gardes de spathae, résulte d’une activité de production de tabletterie spécialisée, localisée et limitée dans le temps. Il est remarquable car aucune concentration similaire, révélatrice d’une telle production, n’est mentionnée sur les autres grands sites de comparaison comme Augst ou Avenches.
181Le second grand contexte le plus représenté est l’habitat. Il a livré dix-sept objets liés à l’armement et à l’équipement personnel. Il s’agit plus précisément de six lots de cuirasses à écailles, d’une paragnathide de casque, d’un fer de lance, d’une garde et d’une bouterolle de spatha en os, d’une fibule en arbalète, de deux appliques et d’une pendeloque de harnachement. Ils sont issus de niveaux d’abandons et d’incendies datés de la fin du IIIe siècle dans des habitations, témoignant de destructions majeures. Il s’agit ici de domus luxueuses, ce qui pose la question du rôle militaire des élites éduennes.
182Le troisième contexte est le puits romain de la Caserne Changarnier [1] qui renfermait un ensemble de onze objets dans un niveau daté de la fin du IIIe siècle. Il s’agit d’une petite épée, d’un mors, de huit appliques et d’un bouton de harnais.
183Le quatrième grand contexte est le théâtre extra muros du Haut-du-Verger à la Genetoye [10]. Il a livré cinq objets qui proviennent de niveaux de démolition de la fin du IIIe siècle. Il s’agit de trois fibules en arbalète, d’une boucle de ceinturon et d’une lame de spatha. Leur présence n’est pas anecdotique puisqu’à Avenches, la présence d’une garnison est attestée dans le théâtre, ce qui pourrait également être le cas à Autun (MATTER, 2009).
184Enfin, le cinquième contexte identifié est le système de voirie antique et plus précisément les remblais des trottoirs en bordure de voie. Deux objets proviennent de ce contexte mais ne peuvent être rattachés à l’ensemble de militaria en os des sites du Pavillon Saint-Louis [9] et de la Maison de retraite [8] car découverts sur d’autres portions de la voie antique.
185L’examen de la carte de répartition des éléments du corpus montre une distribution relativement homogène dans la ville antique. Trois grands contextes se démarquent cependant : les îlots d’habitation – en général des domus luxueuses –, les ateliers-boutiques le long de cardo maximus et le théâtre extra muros (fig. 10).
Fig. 10. Carte de répartition des militaria à Autun-Augustodunum. Sites localisables : [1] Caserne Changarnier ; [2] Rue des Pierres ; [3] 52 rue de la Grille ; [4] 43-45 rue de la Grille ; [5] 13 rue Naudin ; [6] Boulevard Frédéric Latouche – Parking de l’Hexagone ; [7] Boulevard Mazagran – Parking Leclerc ; [8] Maison de retraite ; [9] Pavillon Saint-Louis ; [10] Théâtre du Haut-du-Verger ; [11] Atac ; [12] Lycée militaire ; [13] Jardin lorrain ; [14] Champ Simon. Sites non localisables : [15] Rue des Marbres ; [16] Faubourg Saint-Jean ; [17] Travaux du chemin de fer (1866) ; [18] Grande voie centrale (1840). Fond de carte : SAVA. SIG : Loïc Androuin.
186Cette répartition des découvertes semble mettre en évidence une occupation militaire relativement diffuse dans la ville, en l’absence de lieu de casernement connu par les archéologues.
187En ce qui concerne les zones qui n’ont pas livré de militaria, cette absence peut s’expliquer par la rareté des opérations archéologiques dans certaines parties de la ville ainsi que par le manque de contextes pour les découvertes anciennes qui représentent 54 % du corpus. Le déficit observé dans l’extrémité sud pourrait s’expliquer également par un développement plus tardif de l’occupation de cette partie de la ville.
188Quand la provenance des éléments de harnachement est connue, il n’est pas rare qu’ils soient associés à des éléments d’armement, comme c’est le cas pour les sites de la caserne Changarnier [1] et celui de la rue des Pierres [2]. La répartition de l’équipement personnel suit le même schéma. Quand les provenances sont connues, certaines fibules ainsi qu’une boucle de ceinturon sont associées à des éléments d’armement. C’est notamment le cas sur les sites de la rue des Pierres [2] et celui du théâtre de la Genetoye [10]. L’armement, quant à lui, est principalement présent dans la moitié nord de la ville. On note également une forte concentration au centre de l’agglomération, au niveau du croisement du cardo maximus et du decumanus maximus, sur les sites du Pavillon Saint-Louis [9] et de la Maison de retraite [8] (fig. 10).
189De cette répartition se dégagent plusieurs ensembles remarquables.
190Parmi les sites ayant livrés les ensembles les plus notables on compte : le puits romain de la Caserne Changarnier [1], au nord de la ville antique, fouillé au XIXe ; la domus de la rue des Pierres [2], un peu plus à l’est ; la domus du 52 rue de la Grille [3], ou Maison des Auteurs grecs, et la domus du 43-45 rue de la Grille [4] ou Maison à l’enseigne au nord-ouest ; la domus du 13 rue Naudin [5] ; la domus du Boulevard Frédérique Latouche – Parking de l’hexagone [6] et les sites du Pavillon Saint-Louis [9] et de la Maison de retraite [8] au centre de la ville antique, le long du cardo maximus ; le site du Boulevard Mazagran - Parking Leclerc [7] au nord-est ; et enfin le théâtre extra muros du sanctuaire de la Genetoye au nord-ouest [10].
191Le site de la Caserne Changarnier [1] se trouve au nord-ouest de la ville, à proximité de l’enceinte du Haut-Empire, au niveau des îlots I 10-13, II 10-13 et III 10-11. La nature de cette occupation n’a pas été déterminée. Onze éléments du corpus y ont été découverts en août 1897, dans un puits romain de la cour de l’Infirmerie. Sa localisation exacte est inconnue. L’épée courte en fer n° 101, le mors en fer n° 102, les sept appliques circulaires simples en alliage cuivreux nos 103a-g, l’applique et le bouton circulaire à umbo en alliage cuivreux nos 104 et 105, ont été découverts dans son comblement. Ils étaient associés à un vase en bronze type Schnabelkann, typologiquement daté du IIIe siècle (KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 163-164).
192Le site de la rue des Pierres [2] est au nord-ouest de la ville, à l’ouest de la Caserne Changarnier [1], à proximité de l’enceinte du Haut-Empire, au niveau de l’îlot III 13. Il a été fouillé une première fois en 1972 par A. Demongeot puis en 1987 par A. Rebourg. L’occupation semble avoir été artisanale pendant tout le Haut-Empire puis le site est abandonné vers la fin du IIIe siècle comme en témoignent les niveaux d’abandons. C’est de ces niveaux que proviennent six objets du corpus : le fer de lance n° 201, la garde de spatha en os n° 202, la bouterolle de spatha rectangulaire en os n° 203, l’écaille de cuirasse en alliage cuivreux n° 204, la fibule en arbalète en alliage cuivreux n° 205 et l’applique circulaire simple en alliage cuivreux n° 206 (KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 96).
193Le site du 52 rue de la Grille [3] se trouve à l’ouest de la ville et au nord du site du 43-45 rue de la Grille [4], au niveau de l’îlot VI 5. En 1965, six pièces d’une riche domus ont été dégagées, dont une pièce à abside pavée d’une mosaïque représentant Anacréon. Dans le niveau d’abandon, la paragnathide en alliage cuivreux étamé n° 706 est découverte. G. Vuillemot mentionne d’ailleurs que les objets étaient « enrobés de cendre » (VUILLEMOT et alii, 1966, p. 34). Seize monnaies de Gallien à Tetricus I et II y ont également été découvertes. En 1990, P. Chardron-Picault a fouillé une parcelle mitoyenne, située au nord de la fouille de 1965. Cette fouille a permis de mettre au jour plusieurs nouveaux panneaux de la mosaïque d’Anacréon dans la salle à abside. La domus est incendiée à la fin du IIIe siècle et les matériaux font l’objet de récupérations à l’époque tétrarchique (PINETTE, 1987, p. 253, n° 517 ; KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 106).
194Le site du 43-45 rue de la Grille [4] se trouve au sud du site du 52 rue de la Grille [3], au niveau de l’îlot VII 4. En 1985, à l’occasion d’une fouille de sauvetage, A. Rebourg a observé une portion du trottoir d’un cardo secondaire ainsi qu’une pièce. Dans la partie nord de l’îlot, plusieurs pièces ont été fouillées, dont un petit péristyle entouré d’une salle sur hypocauste. Dans son dernier état, cette salle est pavée d’un sol incrusté de marbre. La domus est abandonnée à l’époque tétrarchique et fait l’objet d’épandages de déchets dans la première moitié du IVe siècle. Dans les niveaux d’abandons, le fragment de cuirasse n° 701, constitué d’une quarantaine d’écailles, ainsi que l’écaille isolée n° 702 ont été découvertes. Dans ces mêmes niveaux, des monnaies de Claude II, Tetricus et Dioclétien ont été retrouvées (REBOURG, 1986, p. 11-35 ; REBOURG dir., 1993, p. 110-111, n° 236 ; KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 110).
195Le site du 13 rue Naudin [5] se trouve dans la partie nord de la ville, au sud du site de la Caserne Changarnier [1], au niveau de l’îlot V 10. Il s’agit d’un îlot d’habitat aisé abandonné à l’époque tétrarchique. Entre 1961 et 1964, J. Duverne et M. Bernard ont dégagé plusieurs pièces d’habitat comprenant un chauffage à hypocauste ainsi qu’une mosaïque. Dans les niveaux d’abandon ont été découverts les quatre écailles de cuirasse nos 704 et 705a-c ainsi qu’une imitation d’antoninien d’Aurélien et deux antoniniens de la seconde moitié du IIIe siècle (REBOURG, 1986, p. 78-79 ; REBOURG dir., 1993, p. 111, n° 238 ; KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 104).
196Le site du parking du Boulevard Frédéric Latouche [6] est au centre de la ville antique, le long du cardo maximus, au niveau de l’îlot XI 9. Un diagnostic archéologique y a été mené en 2010 sous la direction de Y. Labaune (SAVA). Il a permis d’observer une portion d’une domus à pavement pourvue de thermes privés et d’un ensemble monumental composé d’une double cour à portique de 50 m par 20 m chacune. Ces cours ont été restaurées entre la fin du IIIe et le début du IVe siècle. Le pontet en alliage cuivreux n° 605, typologiquement datable du IIIe siècle, y a été découvert (LABAUNE, 2011, p. 43-45 ; KASPRZYK, HOSTEIN, 2012, p. 533).
197Le site du Boulevard Mazagran [7] se trouve à l’est de la ville antique, le long du decumanus maximus, au niveau de l’îlot IX-X 12, au sud-ouest de la porte Saint-André et au nord-est du forum présumé. En 2016, un diagnostic archéologique y a été mené sous la direction de Y. Labaune, dans le cadre d’un projet d’extension d’un parking. Il a permis de mettre en évidence plusieurs états d’occupation. Au cours du Ier siècle, l’îlot est occupé par des activités artisanales de bronziers et de forges. Au début du IIe siècle, les activités artisanales sont rejetées en bordure de rue, probablement dans des ateliers-boutiques. Au cœur de l’insula émerge une domus luxueuse qui subit des restaurations à la fin du IIe et au début du IIIs siècle. Malgré la formation de terres noires entre la fin du IIIe et le début du IVe siècle, la fréquentation de l’îlot perdure et s’intensifie pendant la seconde moitié du IVe siècle. La fibule en arbalète en alliage cuivreux n° 815 a été découverte dans un niveau de terres noires et de recharges scellant le trottoir du decumanus. Deux monnaies de Constantin et de Valentinien proviennent également de ce trottoir (LABAUNE, 2017, p. 18-19, p. 73).
198En 1985, A. Rebourg a mené une fouille sur les sites voisins de la Maison de retraite [8] et du Pavillon Saint-Louis [9]. Ils se trouvent au centre de la ville antique, au niveau du croisement du cardo maximus et du decumanus maximus, sur les îlot XII 8 et XI 8. Cette fouille a pu mettre en évidence une portion du trottoir du cardo maximus attenante à des ateliers-boutiques. Dans les niveaux de remblais du trottoir, datés de la fin du IIIe siècle, ont été découverts pas moins de trente-quatre militaria typologiquement datables de cette période. Tous ces objets sont attribuables à des éléments de spathae (pommeaux, gardes, pontets, bouterolles). Ils sont tous en os, excepté les quatre pontets en alliage cuivreux nos 305 à 308. On décompte donc les quatre pommeaux en os nos 301 et 401 à 403, les trois gardes en os nos 302, 303 et 404, les sept pontets en os et en alliage cuivreux nos 304 à 308 et 405 à 406 et les vingt bouterolles nos 309 à 319 et 407 à 415. Ces deux sites comptabilisent non seulement la plus grande concentration d’objets du corpus (trente-quatre individus) mais également la plus grande concentration d’objets en os (trente individus).
199Malgré l’état de conservation exceptionnel de ces objets, seuls les cinq individus nos 304, 312, 316, 402 et 415 sont complets tandis que tous les autres sont fragmentaires. Parmi ces derniers, les deux éléments nos 413 et 414 ont pu être identifié de manière certaine comme des déchets de fabrication. Les autres, incomplets, correspondraient donc potentiellement à des rejets de fabrication tandis que les objets complets auraient été destinés à la vente.
200L’hypothèse la plus vraisemblable serait l’existence d’un atelier-boutique de production de militaria en os le long d’une artère commerciale majeure entre le milieu et la fin du IIIe siècle. Les rejets de cette production seraient venus combler le remblai du trottoir à la fin du IIIe siècle. Il semble bien que le contexte de découverte ne soit pas lié à leur utilisation mais plutôt à leur production puisqu’ils n’étaient associés à aucun autre élément de spathae de type lames (KASPRZYK, 2005, Catalogue, p. 128-133) et ne présentaient aucune trace de montage. À notre connaissance, aucun autre ensemble présentant les mêmes caractéristiques n’est connu ailleurs. En dehors de ces objets, seule une autre bouterolle en os n° 203 a été découverte à Autun, sur le site de la rue des Pierres [2]. Elle était associée à d’autres militaria, dans un contexte d’incendie d’une domus à la fin du IIIe siècle. Cette bouterolle nous livre un indice non pas de fabrication mais bien d’utilisation de ce type d’objets dans la ville à cette époque. On ne peut toutefois en conclure qu’elle soit issue de l’atelier de la Maison de retraite [8] et du Pavillon Saint-Louis [9].
201D’autres militaria en os similaires à ceux d’Autun et datés de la seconde moitié du IIIe siècle ont été découverts notamment à Avenches et à Augst (DESCHLER-ERB, 1998, T. 42-43). Cependant les contextes de découvertes semblent plus être liés à une utilisation et à de la perte qu’à des traces d’un artisanat de tabletterie.
202Une telle production de militaria en os pendant la seconde moitié du IIIe siècle n’est donc pas anodine car elle doit s’adapter à une forte demande locale. Il s’agit donc d’un indice majeur de la présence militaire à Augustodunum à cette époque.
203Le sanctuaire de la Genetoye est situé à l’extérieur de l’enceinte du Haut-Empire, au nord-ouest de la ville antique. Ce sanctuaire compte un temple de type fanum ainsi qu’un théâtre inclus dans un quartier artisanal.
204En 1870, J.-G. Bulliot mentionne, dans cette zone, la découverte de deux traits de catapulte. D’après M. Kasprzyk, ces « deux traits de catapulte (sont) clairement identifiables au vu de la description de Bulliot qui les trouve beaucoup trop massifs pour des carreaux d’arbalète » (Kasprzyk, 2005, p. 167). Malheureusement ces deux objets n’ont pas été retrouvés au moment de l’étude. En 1876, la fibule en arbalète n° 503 a été recueillie à l’emplacement du théâtre (ibid., Catalogue, p. 166, pl. 299, n° 10). En 1976, une seconde fibule du même type, n° 502, y a été découverte, probablement lors des sondages menés par J.-P. Guillaumet et G. Vuillemot la même année (ibid., p. 166, pl. 282, n° 1). De 2013 à 2016, une campagne de fouilles menée par F. Ferreira, dans le cadre du Projet collectif de recherche de la Genetoye sous la direction de Y. Labaune, a permis de mettre au jour trois militaria : la boucle de ceinturon en alliage cuivreux n° 505, découverte en 2013 dans une couche de démolition (TISSERAND, PERRUCHE, 2013, pl. 3, 6001.48) ainsi que la fibule en arbalète n° 504 et la spatha n° 501, découvertes en 2014, également dans un niveau de démolition (TISSERAND, PERRUCHE, 2014, p. 348-349, pl. 1, 2001.4, pl. 2, 16a-c).
205En se basant sur des clichés aériens de R. Goguey, M. Kasprzyk a mis en évidence la présence « au nord de la zone […] (d’) un large fossé » effectuant « un retour vers le sud de la zone et (qui) englobe le théâtre ». Bien que la « fonction de ce fossé reste énigmatique » et en l’absence de diagnostic archéologique, M. Kasprzyk émet l’hypothèse « que ce fossé date de la fin de l’Âge du Fer ou de l’époque romaine ». Il rejette la possibilité d’un mur de péribole puisqu’on en perd la trace au niveau du fanum et avance la théorie d’un fossé défensif d’un éventuel camp de légionnaire. Il questionne la présence des militaria de la fin du Haut-Empire découverts dans le théâtre en les mettant en lien avec de possibles « travaux liés au siège d’Autun » (KASPRZYK, 2005, p. 167-168).
- 8 Militaria découverts dans le théâtre d’Avenches : dix fers de lance, un pontet en os, cinq éléments (...)
206La présence de ces cinq militaria datés de la seconde moitié du IIIe siècle dans les niveaux de démolition du théâtre peut être mise en parallèle avec un phénomène similaire, de plus grande importance, observé à Avenches à la même époque. Le théâtre d’Avenches a fait l’objet d’une fortification pendant le dernier tiers du IIIe siècle. Elle est matérialisée par un élargissement des axes routiers, deux fossés d’enceintes, de nombreuses monnaies du Bas-Empire et une collection de vingt-quatre militaria datés du derniers tiers du IIIe au milieu du IVe siècle (MATTER, 1999, p. 147-198, p. 171, fig. 22 ; VOIROL, 2000, Catalogue ; BLANC, 2004, p. 131 ; MATTER, 2009, fig. 168, p. 200, Abb. 169, pl. 21)8.
207Les théâtres antiques sont, par leurs formes et leurs structures, faciles à transformer et à fortifier. Malgré l’absence de preuves tangibles de fortifications au niveau du théâtre de la Genetoye, la présence de ces militaria dans des niveaux de démolitions datés de la fin du IIIe siècle ap. J.-C. se révèle être un indice, si ce n’est d’une occupation, au moins d’une fréquentation de l’édifice par des soldats à cette période. En comparant le cas d’Avenches avec celui d’Autun, il ne semble pas invraisemblable que ce dernier a pu faire l’objet d’un traitement similaire en réponse à une situation d’urgence. De nombreuses questions restent en suspens quant à la nature de cette fréquentation militaire. À ce stade, il est impossible de déterminer s’il s’agissait d’une garnison ou bien de soldats impliqués dans le siège de 269/270. Les indices dont nous disposons orientent vers une occupation éphémère de l’édifice de spectacle.
208Vers 260, devant l’incapacité de l’empereur Gallien à maintenir son autorité sur l’intégralité de son vaste Empire, le général Postume, basé en Gaule, se fait acclamer par son armée. Il se revendique comme empereur romain légitime en adoptant la même titulature, prend le contrôle des Gaules et assure la défense du limes rhète-germanique. Il créé l’empire des Gaules en établissant sa domination sur un vaste territoire comprenant les provinces des Bretagnes, des Germanies, de la Rhétie et plus tard de l’Hispanie. L’empire des Gaules se maintient jusqu’au printemps 274 environ, au moment de la reconquête de son territoire par Aurélien (CHRISTOL, 1997, p. 139, 141, p. 146-147, p. 161-162).
209Entre 298 et 311, les Panégyriques latins et un siècle plus tard Ausone, rapportent que la ville d’Autun-Augustodunum est mise à sac après un siège de sept mois durant l’hiver 269/270. En revanche, seul Ausone mentionne qu’il s’agit des troupes de l’empereur gaulois Victorin (269-271), un des successeurs de Postume (GALLETIER, 1949, p. 82-100 ; GALLETIER, 1952, p. 54-74 ; CHRISTOL, 1997, p. 161 ; HOSTEIN, 2012, p. 124, 20). La réflexion autour d’une occupation militaire d’Autun durant la seconde moitié du IIIe siècle en lien avec ces militaria semble donc pertinente.
210Le siège d’Autun ne doit pas éclipser d’autres épisodes militaires s’étant déroulés à la même époque et qui ont sûrement touché la ville, comme par exemple la reconquête d’Aurélien en 274. En 298, Eumène mentionne la présence des légions de l’empereur Constance Chlore hivernant avec ses troupes en territoire éduen, mais n’indique pas qu’elles aient stationnées dans la ville. Elles auraient été chargées de la restauration des abductions en eau de la ville (GALLETIER, 1949, p. 121-138).
- 9 Cf. supra : Le théâtre de la Genetoye (fig. 10, [10]) : une présence militaire ?
211Bien qu’aucune preuve archéologique directe ne soit connue, on ne peut nier l’importance et l’influence supposée d’un siège de sept mois sur la ville. La présence d’une garnison à cette époque est vraisemblable. Malgré l’absence de traces archéologiques de casernement dans la ville, il est possible que les soldats aient été logés de manière éparse dans les différentes habitations civiles ou bien au niveau du théâtre de la Genetoye [(fig. 10, 10])9.
212A. Hostein transpose d’ailleurs une expression de Dion Cassius à la ville d’Autun en la comparant à un « camp retranché » (HOSTEIN, 2012, p. 123, 16 ; DION CASSIUS, LXXIV (LXXV), 6, 4-4). Il est également possible que des vétérans aient pris part aux combats. Ammien Marcelin mentionne beaucoup plus tard, en 356, la participation des vétérans établis en civitas aeduorum au sauvetage de la ville contre une attaque des Alamans. Ils seraient venus en aide à la garnison urbaine alors submergée (AMMIEN MARCELLIN, XVI, 2, 1-4).
213Devant ces arguments, la présence de militaria de la seconde moitié du IIIe siècle en lien avec le siège d’Autun est probable. Il s’agit d’un indice d’une présence militaire réelle, qu’elle soit rattachée au siège de 269/270 ou non.
214Bien que l’or ne soit pas l’apanage des militaires, les donativa, souvent en or, concernent principalement ces derniers (LORIOT, 2003, p. 63). Les occurrences des découvertes d’aurei sont extrêmement rares. La présence de ce type de monnayage datant de la seconde moitié du IIIe siècle à Autun est une donnée assez remarquable pour être mentionnée.
215L’absence de contexte précis dû à des découvertes anciennes ne permet que l’énoncé d’une liste exhaustive. Sept aurei sont attestés à Autun même :
216Il s’agit d’un aureus de Salonine (254-268) (ReBOURG, 1993, p. 194, 908 ; PINETTE, 1987, p. 249, 511 ; CALLU, LORIOT, 1990, p. 268, 591) et de deux aurei de Postume (260-269), l’un simple (REBOURG, 1993, p. 196, 930) et l’autre monté en bague (PINETTE, 1987, p. 251, 523a ; REBOURG, 1993, p. 195, 926).
217Un possible dépôt monétaire de trois autres aurei de Salonine, Postume et Victorin (269-271) doit être mentionné (PINETTE, 1987, p. 249, 511-513 ; CALLU, LORIOT, 1990, p. 272, 1a).
218En 1614, un dépôt de thésaurisation comportant entre autres quatre aurei, dont un de Gallien marquant un terminus post quem de 260, aurait été découvert intra muros (LORIOT, 1985, p. 603-608 ; KASPRZYK, 2005, vol. 2, p. 154).
219Deux aurei ont également été mis au jour dans l’arrondissement d’Autun. Un multiple de Gallien a été trouvé à Monthelon, à 6 km de la ville (CALLU, LORIOT, 1990, p. 269, 599) et un aureus de Tetricus monté en bague a été découvert à Laizy au lieu-dit de la Chassagne, à 13 km de la ville (ibid., p. 270, 604).
220Trois dépôts monétaires significatifs sans aurei ont également été découverts à Autun. Les deux premiers proviennent des sites voisins du 52 rue de la Grille (fig. 10, [3]) ; TURCAN, 1966, p. 31-42 ; KASPRZYK, 2005, vol. 2, p. 106) et du 47 avenue du Général de Gaulle (Gallia Informations, 1996, p. 139 ; KASPRZYK, 2005, vol. 2, p. 106). Le premier est un dépôt de monnaies allant de Gallien à Tetricus II tandis que le second est une bourse contenant des monnaies de Tetricus II. Le troisième dépôt, et non des moindres, a été découvert en 2010 sur le site du Faubourg d’Arroux. Il s’agit d’un panier en vannerie souple contenant 110 000 monnaies environ. « La majorité des pièces est constituée par des imitations assez grossières de la deuxième moitié du IIIe siècle ap. J.-C. reprenant souvent des éléments du petit monnayage Tetricus. […] On trouve également quelques rares émissions officielles. L’ensemble du dépôt est homogène et a dû être constitué en une seule fois. » (ALIX, 2014, vol. 2, p. 550).
221D’après A. Hostein, certains de ces aurei auraient été distribués au cours de donativa aux soldats de l’Empire gaulois. Selon son hypothèse, la bague sertie de l’aureus de Postume ainsi que l’aureus de Victorin pourraient avoir appartenu à des militaires qui auraient été placés en garnison à Autun afin de surveiller la ville après le siège de l’hiver 269/270 et la victoire de Victorin. (HOSTEIN, 2005, p. 141, note 38). D’après Cl. Brenot et j. Metzger, les bagues ornées d’aurei sont relativement rares pour les périodes autres que le IIIe siècle (BRENOT, METZGER, 1992, p. 343). Ce type de bijoux apparaît à partir de l’époque sévérienne et se maintient jusqu’aux première années du IVe siècle (ibid., p. 348-352). La fabrication de ces bijoux serait à attribuer à différents ateliers d’orfèvres : Lyon, Rouen et en ce qui nous concerne, Autun. Il s’agirait d’une nouvelle forme de thésaurisation qui serait liée à un phénomène local, politique et idéologique. Ils disparaissent d’ailleurs en Gaule à la fin du IIIe siècle, au moment de la chute de l’Empire gaulois (ibid., p. 358). La présence de ces objets à Autun pourrait être un indicateur de la fréquentation de la ville par des militaires haut gradés à cette même époque. A. Hostein théorise également sur la présence de troupes de Claude II dans la ville peu avant le siège. Il cite l’ampleur de certaines « découvertes monétaires originales sur le territoire éduen [qui] permettent d’envisager que des hommes de Claude II ont pu être envoyés pour aider les insurgés à tenir le siège avant l’arrivée d’une armée de secours » (LE GENTILHOMME, 1942, p. 23-102 ; HOSTEIN, 2012, p. 123).
222Il convient toutefois de modérer l’hypothèse des aurei d’Autun comme étant des donativa puisque rien n’exclut une autre provenance. On constate toutefois une augmentation de cette pratique dans le courant du IIIe siècle en Gaule, ce qui, selon M. Amandry, expliquerait le nombre relativement élevée d’aurei découverts à Autun pour cette période (AMANDRY, 2017, p. 221). De plus, la présence d’un monnayage d’une telle importance, qui plus est frappé par un empereur gaulois dans une ville connue pour sa fidélité envers Rome, est un indice supplémentaire en faveur de la présence de soldats liés au siège de la ville par Victorin. Les occurrences d’aurei de la seconde moitié du IIIe siècle à Autun et ses alentours directs nous renseignent donc sur une présence militaire potentielle dans la ville à cette époque.
223Les 155 individus mis en lumière par cette étude et répartis dans les différentes catégories de l’armement, de l’équipement personnel et du harnachement ont permis de mettre en évidence une présence militaire dans la ville d’Autun-Augustodunum dans le courant de la seconde moitié du IIIe siècle ap. J.-C.
224Chacun des objets issus de cet ensemble peut être comparé à des types similaires utilisés principalement par l’armée romaine dans le Nord-Est de la Gaule pendant cette période. Une certaine réserve doit tout de même être observée quant à la nature strictement militaire de certains objets, particulièrement pour le harnachement (harnachement du cheval).
225À Autun, les militaria des années 250 à 300 ne présentent aucune similarité avec ceux des périodes antérieures et postérieures, pour lesquelles les découvertes sont beaucoup moins abondantes. Il n’y a aucune continuité, tant par le nombre que par la chronologie, entre les quarante-six militaria du début du Haut-Empire étudiés par B. Fort, Y. Labaune et N. Tisserand (FORT et alii, 2008, p. 141-157) et les vingt-huit militaria du début du Bas-Empire, étudiés par M. Kasprzyk dans sa thèse (KASPRZYK, 2005, vol. 1, p. 155 ; vol. 2, pl. 295, n° 5 ; pl. 300, 5-12 ; pl. 300bis, 1-13 ; pl. 302, 3-15 ; pl. 303, 1-4).
226Notre corpus s’insère parfaitement dans la situation politique et territoriale trouble de l’époque incarnée par la « crise du IIIe siècle » qui s’accompagne d’un accroissement de la fréquentation militaire dans les sites civils du Nord-Est de la Gaule, en réponse à la chute du limes vers 250/253 et aux troubles politiques et économiques internes à l’Empire. Les vestiges militaires constituent un baromètre de la situation de l’époque dans laquelle ils évoluent.
227Le corpus d’Autun est contemporain du déclin de la ville et de sa rétractation, comme on l’observe également à Avenches (MAZUR, 1998, p. 5-104 ; MATTER et alii, 1999, p. 147-198 ; VOIROL, 2000, p. 7-92 ; MATTER, 2009, p. 414 ; MAZUR, 2010, p. 27-108) ou à Augst (RIHA, 1979, p. 222 ; MARTIN-KILCHER, 1985, p. 147-204 ; DESCHLER-ERB, SCHWARZ, 1993, p. 173-183 ; RIHA, 1994, p. 226 ; DESCHLER-ERB, 1998, p. 423). Quand les contextes de découverte des objets sont connus, il s’agit généralement de niveaux de destruction et/ou d’abandon de la fin du IIIe siècle.
228La situation d’Autun n’est pas anecdotique et s’insère dans un contexte plus global. La forte présence de nombreux militaria de cette période dans les villes du Nord-Est de la Gaule, telles que Augst-Augusta Raurica ou Avenches-Aventicum, atteste une présence militaire sur les sites civils et coïncide avec un contexte politique instable, souvent mentionné par les chroniqueurs de l’époque mais peu perceptible archéologiquement en ce qui concerne la ville d’Autun-Augustodunum.
229Cette présence militaire ne semble donc pas ponctuelle et participe à un certain sentiment d’insécurité global, propre à cette époque. Il est difficile de développer au-delà de ce constat, au risque de tomber inévitablement dans la conjecture.
Pl. 1. Ensemble du site de la Caserne Changarnier. 101 : épée courte (fer) ; 102 : mors (fer) ; 103a-g-104 : appliques de harnais (alliage cuivreux) ; 105 : bouton de harnais (alliage cuivreux).
Pl. 2. Ensemble du site de la rue des Pierres. 201 : fer de lance (fer) ; 202 : garde de spatha (os) ; 203 : bouterolle de spatha (os) ; 204 : écaille de cuirasse (alliage cuivreux) ; 205 : fibule (alliage cuivreux) ; 206 : applique circulaire (alliage cuivreux).
Pl. 3. Ensemble du site de la Maison de retraite. 301 : pommeau (os) ; 302-303 : gardes (os) ; 304 : pontet (os) ; 305-308 : pontets (alliage cuivreux) ; 309-315, 318 : bouterolles (os) ; 316-317, 319 : plaquettes de bouterolle (os).
Pl. 3-1. Ensemble du site de la Maison de retraite. 301 : pommeau (os) ; 302-303 : gardes (os) ; 304 : pontet (os) ; 305-308 : pontets (alliage cuivreux) ; 309 : bouterolle (os).
Pl. 3-2. Ensemble du site de la Maison de retraite. 310-315, 318 : bouterolles (os) ; 316-317, 319 : plaquettes de bouterolle (os).
Pl. 4. Ensemble du site du Pavillon Saint-Louis. 401-403 : pommeaux (os) ; 404 : garde (os) ; 405-406 : pontets (os) ; 407-412 : bouterolles (os) ; 413-414 : chutes de fabrication de bouterolles (os) ; 415 : plaquette de bouterolle (os).
Pl. 5. Ensemble du site du théâtre du Haut-du-Verger. 501 : spatha (fer) ; 502 : fibule (alliage cuivreux) ; 503 : fibule (alliage cuivreux) ; 504 : fibule (alliage cuivreux) ; 505 : boucle de ceinturon (alliage cuivreux).
Pl. 6. Armes offensives. 601 : pugio (fer) ; 602 : garde (os) ; 603 : pontet (os) ; 604-605 : pontets (alliage cuivreux).
Pl. 7. Armes défensives. 701-705 : écailles de cuirasse (alliagev cuivreux) ; 706 : paragnathide (alliage cuivreux).
Pl. 8. Fibules et applique de ceinturon/baudrier. 801-816 : fibules (alliage cuivreux) ; 817-818 : appliques de ceinturon/baudrier (alliage cuivreux).
Pl. 9. Mors et éléments de mors. 901 : mors (fer et alliage cuivreux) ; 902 : phalère latérale de mors (alliage cuivreux) ; 903 : phalère latérale de mors (alliage cuivreux) ; 904 : applique latérale de mors (alliage cuivreux).
Pl. 10. Phalères. 1001 : phalère (alliage cuivreux) ; 1002 : phalère (alliage cuivreux) ; 1003 : phalère (alliage cuivreux) ; 1004 : phalère (alliage cuivreux) ; 1005 : phalère (alliage cuivreux) ; 1006 : phalère (alliage cuivreux).
Pl. 11. Appliques et boutons de harnais circulaires. 1101-1108 : appliques de harnais (alliage cuivreux) ; 1109-1112a-b : boutons de harnais (alliage cuivreux).
Pl. 12. Appliques de harnais ‘coquillages’. 1201a-b-1216 : applique de harnais (alliage cuivreux).
Pl. 13. Appliques et pendant de harnais divers. 1301-1321 : appliques de harnais (alliage cuivreux) ; 1322-1323 : pendants de harnais (alliage cuivreux) ; 1324-1325 : appliques de harnais circulaire moulurée (alliage cuivreux).