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D’enclos en villa. Vivre au bord de la baie des Veys, de La Tène au Bas-Empire

From enclosure to villa. Living on the Bay of Veys, from the La Tène to the Roman period
François Coupard, Vincent Carpentier, Delphine Barbier-Pain, Marie-France Dietsch-Sellami et Catherine Dupont

Résumés

La baie des Veys, dont l’incision forme l’isthme du Cotentin, à la rencontre des départements de la Manche et du Calvados, est devenue au cours de l’Antiquité une zone de grand passage à la frontière des cités unelle et bajocasse. Des années 1980 à nos jours, l’exploration archéologique de ce secteur, essentiellement accomplie dans le cadre préventif, a mis en lumière l’histoire ancienne de cet espace dont la première mise en valeur agricole remonte au Néolithique et à l’âge du Bronze. Cependant, le peuplement et l’organisation de ce territoire connaissent un essor remarquable au cours du second âge du Fer et du Haut-Empire qui a surtout affecté – semble-t-il – les plateaux surplombant la baie. Diagnostiqué puis fouillé de 2006 à 2013, le site du Tuilley, à Isigny-sur-Mer, est inscrit au cœur de cet espace et présente un environnement archéologique documenté sur quelque 21,5 ha. À l’unisson des autres occupations étudiées dans la région, on y observe le déploiement de plusieurs habitats enclos au cours de La Tène moyenne et finale, puis le prolongement de cette occupation sous des formes différentes aux deux premiers siècles de notre ère, une grande villa romaine établie face à la mer, dotée d’une grande galerie panoramique longue de 71 m, à laquelle est associée un petit établissement agricole établi en contrebas. Abandonnée vers la fin du iie ou le début du iiie s. au plus tard, la villa du Tuilley est ensuite exploitée en carrière et entièrement démantelée au cours des iiie-ive s., probablement à la faveur d’un programme de construction présidant à la naissance de la petite agglomération portuaire d’Isigny-sur-Mer dont l’existence n’est à ce jour attestée qu’à partir du Moyen Âge. Les occupations laténiennes et romaines du site du Tuilley témoignent par ailleurs de l’évolution qu’a connue l’interaction des riverains avec la baie et l’espace maritime en général. Au cours de La Tène, les habitats enclos ne montrent aucun signe de relation spécifique avec la côte. Cette situation change clairement à l’époque romaine, avec la construction d’une grande villa de bord de mer, comparable à de nombreux établissements côtiers à travers l’ensemble des provinces de l’Empire, et l’apparition des premiers témoins de pratiques halieutiques et de consommation des produits de la mer.

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Texte intégral

Les auteurs adressent en outre leurs remerciements à Benjamin Hérard et Laurent Paez-Rézende (Inrap Grand-Ouest), ainsi qu’à Gadea Cabanillas de la Torre (DRAC Bretagne, UMR 6566 CReAAH) et Guillaume Varennes (DRAC Pays de la Loire, UMR 6566 CReAAH) pour leur relecture attentive et leurs précieux conseils.

  • 1 Nous suivrons ici l’usage recommandé par Philippe Leveau (et al., 1999) en réservant l’italique au (...)

1Les fouilles conduites à Isigny-sur-Mer à l’occasion des projets d’aménagement du site du Tuilley ont permis de lever le voile sur l’occupation littorale de l’estuaire de la baie des Veys, frontière des départements de la Manche et du Calvados, du second âge du Fer à l’Antiquité tardive. À la suite des premières traces d’anthropisation, puis du déploiement des habitats enclos sur les plateaux au cours du second âge du Fer, cet espace littoral offrant de nombreuses ressources, agricoles et vivrières, fut peu à peu colonisé et aménagé au début de notre ère grâce à la construction d’un important réseau de voies de communication. Au ier s. apr. J.-C., la proximité de la mer et les paysages de la baie semblent avoir attiré de riches notables, venus établir leur résidence en surplomb de l’agglomération actuelle d’Isigny-sur-Mer, dont le développement s’inscrit au cours du Moyen Âge. Les témoins de ces occupations mis au jour lors des diagnostics et des fouilles menées de 2006 à 2013 par l’Inrap, consistent en une série d’établissements enclos fondés à partir de La Tène D1 auxquels a succédé, au début du Haut-Empire, une grande villa1 de bord de mer, démantelée au cours des iiie-ive s. Formant une séquence d’occupation continue longue de plus de six siècles, enrichie par des données paléoenvironnementales inédites pour ce secteur encore peu documenté de la Normandie occidentale, ces découvertes alimentent une première réflexion sur l’histoire locale du peuplement, de la mise en valeur des littoraux riverains de la Manche et des interactions avec l’espace maritime, avant et après la conquête romaine.

1. La baie des Veys, des premiers éleveurs néolithiques aux premiers grands aménagements de l’Antiquité

2La baie des Veys, dont l’incision forme l’isthme du Cotentin, est un large estuaire à la rencontre des actuels départements du Calvados et de la Manche (fig. 1-2). Quatre petits fleuves s’y jettent après avoir irrigué le parc naturel régional des Marais du Cotentin et du Bessin : la Douve et la Taute près de Carentan, et la Vire et l’Aure à Isigny-sur-Mer. Ce vaste espace ouvert sur la mer recouvre aujourd’hui 270 km² de terrains sableux de type Wadden, dont une part importante (environ 40 km²) fut autrefois conquise sur la mer. Il abrite un panel d’activités, certaines héritées du Moyen Âge au moins : agricoles (élevage laitier et avicole, foin, cueillettes : Villand, 1975 ; Vivier, 1994, 1997), conchylicoles (parcs à huîtres, bouchots), touristiques ou de loisirs (tourisme vert, plaisance, pêche, gabions)… Au cœur de la baie, l’agglomération portuaire d’Isigny-sur-Mer est un ancien bourg médiéval établi sur le cours inférieur de l’Aure qui, avec la Vire, est l’un des deux principaux chenaux de la baie des Veys. Son nom apparaît dans l’écrit au milieu du xiie s. sous sa forme vieux-française Ysini (Hippeau, 1883, p. 151). Elle fut très vraisemblablement fondée au cours du premier Moyen Âge, tandis que la mise en valeur agricole de la baie n’est que tardivement attestée par les textes au regard de ses débuts réels que l’on peut situer au cours des xie-xiie s. au moins, à travers notamment les premières mentions de di[s]cs, cordons artificiels élevés par les paysans contre la mer (Delisle, 1851, p. 289, 292 sq. ; Villand, 1988 ; Musset, 1997). La création des dics s’est poursuivie tout au long du Moyen Âge dans la baie des Veys, dans le contexte d’un vaste mouvement de mise en valeur des zones humides littorales à l’échelle du nord-ouest européen (Carpentier, 2007b, t. 1, p. 141-142). Ces ouvrages médiévaux ont précédé les grandes entreprises modernes d’assèchement de la baie dont l’achèvement n’intervint qu’au xixe s., à la suite de l’érection de puissantes digues dotées d’écluses et de portes à flots. Par la suite, quelque 23 000 ha de polders furent créés entre 1856 et 1972 dans les basses vallées de la Vire et de l’Aure, converties en prairies dédiées à l’élevage bovin et à l’économie des produits laitiers, grande spécialité d’Isigny du xviiie s. à nos jours (Verger, 2005, p. 265 sq. ; Poncet, 2019). Cette poldérisation a présidé, au cours du xxe s., à une importante mutation paysagère en lien avec l’évolution des pratiques d’élevage et l’urbanisation des communes riveraines de la baie (Brunet, 1992). Cette évolution récente a largement effacé les traces archéologiques des activités économiques ou agricoles antérieures, notamment des salines attestées à partir de la fin du Moyen Âge (Carpentier et al., 2012, p. 68-69).

Figure 1 : La baie des Veys, formant l’isthme du Cotentin à la rencontre des départements du Calvados et de la Manche (encadré), correspond à un vaste estuaire situé au débouché maritime des marais du Bessin-Cotentin. Cet espace accueille de nombreuses activités en rapport avec un paysage de polders, fortement anthropisé, qui fut constitué après 1850 en retrait de larges digues dressées contre la mer depuis le Moyen Âge. / Figure 1: The Bay of Veys, forming the Cotentin isthmus where the departments of Calvados and Manche meet (inset), is a vast estuary located at the maritime outlet of the Bessin-Cotentin marshes. This area is home to a wide range of activities associated with a highly anthropised polder landscape, which was created after 1850 as a retreat from the wide dykes that had been built against the sea since the Middle Ages.

Figure 1 : La baie des Veys, formant l’isthme du Cotentin à la rencontre des départements du Calvados et de la Manche (encadré), correspond à un vaste estuaire situé au débouché maritime des marais du Bessin-Cotentin. Cet espace accueille de nombreuses activités en rapport avec un paysage de polders, fortement anthropisé, qui fut constitué après 1850 en retrait de larges digues dressées contre la mer depuis le Moyen Âge. / Figure 1: The Bay of Veys, forming the Cotentin isthmus where the departments of Calvados and Manche meet (inset), is a vast estuary located at the maritime outlet of the Bessin-Cotentin marshes. This area is home to a wide range of activities associated with a highly anthropised polder landscape, which was created after 1850 as a retreat from the wide dykes that had been built against the sea since the Middle Ages.

D’après Verger, 2005, p. 264.

Figure 2 : Représentation figurée du site d’Isigny au xviiie s., avant les grands travaux de la baie des Veys. Extrait de la carte topographique du diocèse de Bayeux, par l’abbé Outhier. / Figure 2: Diagram of the Isigny site in the 18th century, before the major works in the Baie des Veys. Extract from the topographical map of the diocese of Bayeux, by Abbé Outhier.

Figure 2 : Représentation figurée du site d’Isigny au xviiie s., avant les grands travaux de la baie des Veys. Extrait de la carte topographique du diocèse de Bayeux, par l’abbé Outhier. / Figure 2: Diagram of the Isigny site in the 18th century, before the major works in the Baie des Veys. Extract from the topographical map of the diocese of Bayeux, by Abbé Outhier.

Paris, BnF Richelieu, Cartes & Plans, Coll. D’Anville, Gallica.fr, <https://gallica.bnf.fr/​ark:/12148/​btv1b53052839r>. Consulté le 30 août 2023.

3Au cours des années 1980 et surtout 1990, les prospections, sondages et fouilles préventifs de l’Afan ont peu à peu mis en lumière l’histoire ancienne de cet espace, antérieurement à sa récente domestication (fig. 3).

Figure 3 : Carte présentant l’ensemble des opérations archéologiques (désignées par leur numéro d’enregistrement par la DRAC Normandie) réalisées à ce jour dans le contexte de la baie des Veys. / Figure 3: Map showing the archaeological operations (designated by their DRAC Normandie registration number) carried out to date in the Baie des Veys.

Figure 3 : Carte présentant l’ensemble des opérations archéologiques (désignées par leur numéro d’enregistrement par la DRAC Normandie) réalisées à ce jour dans le contexte de la baie des Veys. / Figure 3: Map showing the archaeological operations (designated by their DRAC Normandie registration number) carried out to date in the Baie des Veys.

DAO F. Coupard, Inrap ; SIG G. Léon, Inrap ; données DRAC Normandie 2023.

4Les plus anciens témoins d’occupation de la baie des Veys remontent en effet au Néolithique et à l’âge du Bronze, sur la foi des découvertes enregistrées à l’occasion des diagnostics, trop nombreuses pour être énumérées ici (silex et vase campaniformes à Carentan ; tessons du début du premier âge du Fer à Saint-Pellerin…). Le Cotentin est en effet connu depuis la fin du xixe s. pour être l’une des régions de France les plus riches en vestiges de l’âge du Bronze (Taboué, 1999, p. 9 ; Marcigny, 2012). Les données paléoenvironnementales, polliniques en particulier, confirment l’ancienneté du peuplement de la baie des Veys en révélant dans les marais de Carentan de premières traces de rudéralisation susceptibles de traduire l’existence d’un élevage prénéolithique dès le début du Boréal (9000 à 8500 BP environ ; Clet-Pellerin et al., 1977 ; Clet-Pellerin, 1986 ; Clet-Pellerin et Verron, 2004). Le plus ancien défrichement véritable intervient quant à lui aux alentours de 4700 BP, en association avec des traces de piétinement laissées par du bétail. Puis, les premières céréales font leur apparition vers 4000 BP dans les diagrammes polliniques de la baie et du marais de Carentan, à l’unisson de la côte ouest du Cotentin ou de la vallée de la Seine. C’est d’ailleurs à cette même époque que renvoient les rares occupations côtières connues dans la région avant la protohistoire récente, dans le havre de la Vanlée ou sur l’île Tatihou pour s’en tenir au Cotentin (Billard et al., 1995 ; Marcigny et Ghesquière, 2003). L’élevage est ensuite clairement attesté vers 3800 BP dans la baie du Mont-Saint-Michel, de même qu’en général sur tout le littoral du Cotentin, probablement sur d’anciens schorres découverts par la mer. En revanche, les premiers champs cultivés ne s’y développent véritablement qu’à partir des environs de 2000 BP alors qu’ils sont déjà attestés vers 4900-3900 BP dans le Calvados ou la basse Seine. En l’état des données, ces écarts indiquent peut-être un rôle prédominant de l’élevage dans les économies agricoles du littoral occidental de la Normandie, qui se serait maintenu jusqu’au début de notre ère (2000 BP). Dans cette hypothèse, la discrétion des composantes végétales associées à la céréaliculture à partir de leur apparition, vers 4000 BP, ne saurait donc être considérée comme le signe d’une activité négligeable ou inexistante de ces sociétés sur les milieux côtiers, sachant par ailleurs que l’élevage laisse des traces beaucoup moins évidentes que la céréaliculture au sein des diagrammes palynologiques (Carpentier, 2007b, t. 2, p. 186-189).

5Les données archéologiques relatives à l’occupation locale sont relativement nombreuses à ce jour, avec un total de 18 opérations d’archéologie préventive conduites depuis les années 1980-1990 entre Isigny-sur-Mer et Carentan, sur les communes de Saint-Hilaire-Petitville, Catz, Saint-Pellerin et Les Veys (fig. 3). Les grands travaux routiers préalables à la mise en 2×2 voies de la RN 13, puis de la RN 174, sur des linéaires formant deux transversales E-O et N-S entre les cours de la Vire et de la Douve, ont livré les informations les plus nombreuses et les plus importantes en termes de superficies explorées et décapées. Plus ponctuelles, les autres opérations ont majoritairement concerné des emprises de lotissements.

6Les données les plus anciennes ne sont toutefois pas antérieures au premier âge du Fer. Elles consistent en deux enclos curvilignes sur le tracé de la déviation routière de Saint-Jean-de-Daye (Flotté, 2009). Le reste de l’information met surtout en lumière un moment singulier dans l’histoire locale du peuplement et de l’organisation du territoire au cours du second âge du Fer, à travers la création de fossés parcellaires et de voies de communication dont le déploiement s’observe par la suite au cours des deux à trois premiers siècles de notre ère. Sur les 18 opérations recensées, 7 renvoient en effet à des fouilles d’établissements protohistoriques ou antiques. À Saint-Pellerin « La Fourchette II » (Besnard-Vauterin, 1995, op. no 768), Les Veys « La Campagne » (Allart, 1994, op. no 762), « Le Haut Clos » (Besnard-Vauterin, 1994, op. no 634), et « Le Haut de Delasse » (Lepaumier, 2013, op. no 3136), il s’agit à chaque fois d’enclos fossoyés laténiens dont l’occupation s’interrompt dans le cours du ier s. av. J.-C. (Besnard-Vauterin, 2000). Une parcellisation antique est en outre attestée sur les deux premiers sites, témoignant d’une continuité directe de l’occupation agraire au cours des premiers siècles de notre ère au moins. De même, à Saint-Pellerin « RN 174 » (Paez-Rézende, 2011, op. no 2848), il s’agit là encore d’un enclos fossoyé laténien dont l’occupation s’est prolongée jusqu’au ier voire iie s. apr. J.-C. Enfin, à Saint-Hilaire-Petitville « Résidence du Marais » (Le Gaillard, 2007, op. no 1574) ainsi qu’à Saint-Pellerin « La Fourchette I » (Allart, 1995, op. no 769 ; Allart et Hincker, 2000), ont été mis au jour plusieurs enclos fossoyés antiques, occupés au cours des ier-iie s. apr. J.-C. Une fréquentation laténienne est toutefois attestée sur le premier, tandis que le second a été réoccupé au cours du haut Moyen Âge.

7L’Antiquité est en outre documentée par plusieurs sites dont celui d’une grande villa du Haut-Empire mise au jour à Osmanville, au nord-est d’Isigny, sur le tracé de la déviation de la RN 13 (Dufour, 1993). Par ailleurs, les fouilles conduites à Saint-Pellerin sur le tracé de la RN 174 (Paez-Rézende, op. cit.), ont permis d’étudier une section de la voie antique reliant Bayeux et Saint-Côme-du-Mont, bien conservée entre les cours de la Vire et de la Douve, et reprise à Saint-Hilaire-Petitville par le tracé actuel de la route départementale. Cette voie fut établie dans le courant du ier ou du iie s. apr. J.-C., alors même que plusieurs habitats se développaient dans ce même secteur, sans doute en concomitance ou dans le fil des voies principales évoquées plus haut. Les fouilles de Saint-Pellerin et de Saint-Hilaire-Petitville « Résidence du Marais », le long du tracé de la route départementale RD 544 (Le Gaillard, 2007), semblent de plus démontrer que la route contemporaine est liée à une nouvelle trame parcellaire qui s’est surimposée, en la masquant, à une trame antérieure dont l’origine antique est très probable. Au-delà du iiie s. de notre ère, quelques occurrences d’occupations romaines tardives ou mérovingiennes attestent la pérennité du peuplement local et sans doute aussi de ces axes viaires fondés au début de notre ère. On les trouve notamment à Isigny, sur le site de la villa du Tuilley, à Saint-Pellerin « La Fourchette », ainsi qu’en plusieurs points de la baie des Veys (Lautridou, 2022).

8La densité des opérations archéologiques menées à ce jour, notamment à l’occasion des grands travaux routiers des années 1990-2000, consacre ainsi l’importance historique des premiers ensembles parcellaires documentés dans ce secteur. Ceux-ci sont associés à sa mise en valeur agricole, de même qu’au déploiement d’un semis d’habitats d’ampleur inédite au cours du second âge du Fer et plus précisément à partir de La Tène moyenne. Les voies et principaux chemins n’apparaissent en revanche qu’au cours des deux premiers siècles de notre ère, sans qu’aucun antécédent antérieur à la conquête romaine n’ait à l’heure actuelle été identifié. Il demeure toutefois possible que certains tronçons de ces voies aient repris des axes de cheminement plus anciens, tout en les masquant.

9Au cours de l’Antiquité, la baie devint une zone de grand passage à la frontière de deux cités : celle des Unelles à l’ouest, dont le chef-lieu était Cosedia ou Alauna (Coutances et Valognes), et celle des Bajocasses à l’est, avec pour chef-lieu Augustodurum (Bayeux) [Fichet de Clairfontaine et al., 2004 ; fig. 4]. Selon la tradition, cette frontière, plus tard pérennisée par la carte des diocèses de Coutances et Bayeux, aurait épousé les contours naturels de la baie, en l’occurrence le cours de la Vire. Il s’agissait en outre d’une zone de circulation, située au point de convergence entre deux grandes voies romaines (Bertin, 1975 ; Allinne et Léon, 2018). La première, venant de l’est après avoir desservi les cités de Lisieux et Bayeux, aurait poursuivi en direction de l’ouest vers celles de Valognes et de Cherbourg (Taboué, 1999). La seconde, arrivant du sud depuis Avranches, aurait rejoint la voie précédente à hauteur d’un carrefour occupé par l’agglomération secondaire de Crouciatonnum, qui eut peut-être un temps le statut de civitas et que la tradition et l’analyse d’un milliaire retrouvé à Sainte-Mère-Église situent tantôt à Carentan, tantôt à Saint-Côme-du-Mont, deux petites agglomérations antiques de la baie, proches l’une de l’autre (Vipard, 1990 ; Fichet de Clairfontaine, 2004, p. 469-470). Les données relatives à ces deux sites tendraient toutefois à favoriser l’identification de Carentan, la seule des deux correspondant à un port, établie à la distance précise de Sainte-Mère-Église indiquée par le milliaire qu’on y a retrouvé (IX miles romains soit 13,3 km environ ; Vipard, 1990, p. 254). Ce site constitua de plus un important carrefour stratégique au Moyen Âge, fortifié au milieu du xiiie s. Divers objets protohistoriques et romains y furent exhumés au xixe s., à l’occasion de travaux de réfection du port, ainsi que deux pirogues monoxyles attribuables à l’âge du Bronze en comparaison avec une pirogue similaire découverte en 1845 près de Carentan, dans laquelle avait été recueillie une hache à ailerons : Sauvage, 1948 ; Langlois, 2014). En dernière occurrence, on a également mis au jour en 1982, au nord de Carentan, une voie antique qui reliait en droite ligne l’agglomération à la mer (Churin, 1986).

Figure 4 : Carte contextualisant la baie des Veys au sein des territoires de cités et du réseau de communication terrestre antiques de la Basse-Normandie. Peuples et toponymes antiques en italique. / Figure 4: Map showing the context of the Bay of Veys within the territories of the ancient cities and land communication network of Lower Normandy. Ancient peoples and place names in italics.

Figure 4 : Carte contextualisant la baie des Veys au sein des territoires de cités et du réseau de communication terrestre antiques de la Basse-Normandie. Peuples et toponymes antiques en italique. / Figure 4: Map showing the context of the Bay of Veys within the territories of the ancient cities and land communication network of Lower Normandy. Ancient peoples and place names in italics.

DAO G. Léon et F. Coupard, Inrap.

10Ainsi, un réseau viaire local relié aux principaux chefs-lieux économiques et politiques de la région et autorisant le franchissement de la baie des Veys, aurait été mis en place à l’époque romaine, sans doute au prix de très lourds travaux que seule l’armée était à même d’accomplir. La traversée de la baie et de ses deux chenaux principaux, le Petit et le Grand Vey (le mot vey est une forme ancienne du français gué), constituait un facteur clef pour les échanges entre cités. Le passage du Grand Vey, long de 7,5 km environ et encore redouté au xvie s., nécessitant l’aide de passeurs (ou de passeuses, surnommées les « cavales »), évitait en effet un large détour par les localités de Marchésieux et de Pont-Hébert, situées à une quinzaine de kilomètres plus au sud (Hubert, 1990 ; Brunet, 1998 ; Canu, 2011, p. 519).

2. Les vestiges du site du Tuilley

Vue d’ensemble et historique des découvertes

11Les premières investigations archéologiques menées sur le site du Tuilley remontent à 1988, à l’occasion d’un suivi de travaux réalisé par Pascal Couanon (SRA de Normandie) [fig. 5]. Immédiatement au sud de la villa romaine, à l’emplacement d’un futur parking de centre commercial, fut mise au jour une fosse-dépotoir comblée de matériaux de construction et de céramique du Haut-Empire. Dix-huit ans plus tard, en 2006, la parcelle contiguë au nord de ce parking fit l’objet d’un projet de lotissement instruit par la municipalité d’Isigny-sur-Mer. À la suite d’un diagnostic positif réalisé par Benjamin Hérard (Inrap), le SRA de Normandie prescrivit une première opération de fouille confiée à Vincent Carpentier (Inrap ; Carpentier, 2007a), au nord du terrain investigué en 1988. Cette fouille, complétée par une série de sondages ouverts hors des emprises initiales, mit en évidence, vers le sommet du versant dominant le bourg et le port d’Isigny-sur-Mer, trois établissements ruraux distincts datés de La Tène et du Haut-Empire.

Figure 5 : Plan général des interventions archéologiques préventives menées sur la commune d’Isigny-sur-Mer de 2005 à 2013 (noms des responsables et années d’intervention entre parenthèses). En bleu et vignettes grises, diagnostic et fouilles du « Tuilley » (B. Hérard, 2005 et V. Carpentier, 2007, 2009) ; en mauve et vignettes vertes, diagnostic et fouilles du « Bourg » (L. Paez-Rézende, 2012 et F. Coupard, 2013 pour les deux fouilles) ; en rose, diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 5: General plan of the preventive archaeological work carried out in the commune of Isigny-sur-Mer from 2005 to 2013 (names of the people responsible and years of work in brackets). In blue and grey vignettes, evaluation and excavations of the ‘Tuilley’ (B. Hérard, 2005 and V. Carpentier, 2007, 2009); in mauve and green vignettes, diagnosis and excavations of the ‘Bourg’ (L. Paez-Rézende, 2012 and F. Coupard, 2013 for both excavations); in pink, diagnosis of the ‘Coudriaux’ (F. Coupard, 2013).

Figure 5 : Plan général des interventions archéologiques préventives menées sur la commune d’Isigny-sur-Mer de 2005 à 2013 (noms des responsables et années d’intervention entre parenthèses). En bleu et vignettes grises, diagnostic et fouilles du « Tuilley » (B. Hérard, 2005 et V. Carpentier, 2007, 2009) ; en mauve et vignettes vertes, diagnostic et fouilles du « Bourg » (L. Paez-Rézende, 2012 et F. Coupard, 2013 pour les deux fouilles) ; en rose, diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 5: General plan of the preventive archaeological work carried out in the commune of Isigny-sur-Mer from 2005 to 2013 (names of the people responsible and years of work in brackets). In blue and grey vignettes, evaluation and excavations of the ‘Tuilley’ (B. Hérard, 2005 and V. Carpentier, 2007, 2009); in mauve and green vignettes, diagnosis and excavations of the ‘Bourg’ (L. Paez-Rézende, 2012 and F. Coupard, 2013 for both excavations); in pink, diagnosis of the ‘Coudriaux’ (F. Coupard, 2013).

DAO F. Coupard, Inrap.

12Le plus ancien correspond à un enclos quadrangulaire ceinturé par un fossé d’enceinte, doublé à hauteur de sa façade sud, dont l’occupation a été datée de La Tène moyenne et finale. Une série de creusements mis au jour à l’intérieur de l’enceinte y traduit la présence de quelques édifices sur poteaux, implantés à l’intérieur de petits espaces compartimentés par de petits fossés et/ou de clôtures légères.

13Le deuxième établissement reconnu correspond quant à lui à une grande villa du Haut-Empire, dont les parties résidentielles se déploient en retrait d’une galerie de façade longue d’une soixantaine de mètres implantée au sommet du versant, face à la mer vers le nord. L’arrière de la villa s’étendait hors emprise vers le sud, à l’emplacement du centre commercial bâti à la fin des années 1980 et du dépotoir identifié en 1988. Toutefois, les vestiges de cet établissement, du fait qu’ils étaient situés hors de l’emprise initialement projetée du lotissement, ne furent pas fouillés en 2006. Les données acquises permettaient cependant de comprendre, à partir de vestiges de fondation, l’organisation d’un ensemble de pièces situées en arrière de la galerie, organisées de part et d’autre d’un vaste atrium central qu’encadraient deux ailes latérales. L’une de ces pièces aux dimensions variables, dans l’aile est, abritait un hypocauste. De plus, divers aménagements ponctuels dont des foyers, de petits fours et des bacs à chaux, semblaient avoir été réalisés dans l’emprise de certaines de ses pièces, après son abandon.

14Un troisième établissement enfin fut mis au jour et fouillé au nord et en contrebas de la villa où, dans le prolongement de la galerie, des fossés de clôture délimitaient l’aile orientale d’une vaste cour fermée. Or, c’est sur la rive est du fossé de fermeture de cette cour que fut mis au jour un petit habitat antique, implanté au sein d’un parcellaire loti à structure quadrillée souple. Il comprenait un édifice à fondations de pierre environné de fours, de fosses, d’un puits chemisé en pierre et de petits bâtiments sur poteaux. Plusieurs dépotoirs associés à cet habitat ont livré un abondant vaisselier céramique couvrant le iie et les premières décennies du iiie s. apr. J.-C., ainsi que quelques objets en rapport avec l’économie domestique et agricole de cet établissement, à l’ombre de la grande résidence.

15En 2008, l’extension du projet d’aménagement vers le sud de la parcelle conduisit le SRA à prescrire une seconde fouille, centrée cette fois sur la villa (Carpentier, 2009a). Les substructions se sont avérées fortement arasées, sans doute par suite de la récupération systématique des pierres de taille après démantèlement intégral des murs, dont ne subsistaient que les semelles de fondation. D’après leur largeur et leur profondeur cependant, ces dernières étaient sans doute destinées à supporter des élévations conséquentes. Une série de sondages ouverts à travers le sol des pièces en retrait de la galerie de façade permit d’observer la présence de fossés antérieurs à l’édifice, attribués sur la foi d’un petit lot de tessons au second âge du Fer. Leur orientation concordait par ailleurs avec celle des vestiges de même époque mis au jour à quelques dizaines de mètres plus au nord en 2006. Sur ces fossés laténiens furent creusés d’autres fossés parcellaires, antérieurs eux aussi à la villa et attribuables quant à eux au tout début de l’époque romaine. Par la suite, un petit groupe de fours à chaux accolés, à hauteur de l’angle nord-est de la villa, se rattache à une phase de construction antérieure à l’un de ses murs au moins et postérieure aux fossés cités plus haut. Cette seconde campagne de fouille a permis de caractériser les vestiges de la villa et d’en établir la datation à partir d’un petit lot céramique, le site ayant subi une récupération très poussée de tous les matériaux après son abandon. Il en résulte que le chantier de construction de cette villa fut mis en route à la fin du ier s. apr. J.-C. et que son occupation a ensuite perduré jusqu’à son abandon, au début du iiie s. Peu de temps voire immédiatement après, la grande résidence devint une carrière de matériaux de construction, qui fut fréquentée et vraisemblablement utilisée ainsi jusqu’au ive s. au moins.

16En 2013, enfin, à la suite d’un nouveau diagnostic mené par Laurent Paez-Rézende (Inrap), consécutif à une reprise d’aménagement portant sur les terrains limitrophes à l’ouest de la villa, une troisième opération de fouille fut prescrite et confiée à François Coupard (Inrap ; Coupard, 2013a). Il s’agissait d’achever d’une part l’étude de l’aile occidentale de la villa, extérieure aux emprises de 2006-2008, et d’autre part de mener celle de l’enclos de l’âge du Fer identifié lui aussi en 2006. Cette fouille a également concerné deux potentielles crémations funéraires. Le plan de l’établissement du second âge du Fer identifié en 2006 fut ainsi complété, de même que celui de la villa. D’autres vestiges antiques furent en outre mis au jour au nord et à l’ouest de cette dernière : une série de fosses et de trous de poteau, ainsi que les fondations en dur d’un petit édifice. Enfin, un quatrième établissement fut identifié à 180 m au nord-ouest des précédents. Il s’agissait d’un autre habitat enclos du second âge du Fer, au plan quasiment complet, déterminé là encore par une enceinte fossoyée quadrangulaire enserrant un ensemble de fosses et de trous de poteau.

17Cette succession d’interventions archéologiques menées de 1988 à 2013 délivrent in fine le plan d’un vaste gisement laténien et romain couvrant quelque 13 500 m² de surface cumulée, au sein d’un environnement archéologiquement documenté qui se monte à 215 000 m² en incluant les diagnostics. Une première occupation domestique y a été fondée à La Tène moyenne, puis le site fut occupé et transformé en continu jusqu’au Bas-Empire, à travers deux formes d’aménagement successives : d’abord des enclos d’habitat, classiques du second âge du Fer, puis une grande villa romaine à caractère monumental, doublée d’un habitat plus modeste et contemporain de celle-ci accolé au fossé de clôture de la cour qui la prolongeait en contrebas vers le nord.

Les vestiges pré- et protohistoriques

Des témoins d’occupation discrets de l’âge du Bronze final à La Tène A (xive au ve s. av. J.-C.)

18Les plus anciens vestiges d’occupation identifiés au cours des différentes investigations archéologiques menées sur ce site consistent en un potentiel monument de l’âge du Bronze (fig. 6). Celui-ci, mis au jour lors du diagnostic mené au lieu-dit « Les Coudriaux », en 2013, prend la forme d’un fossé curvilinéaire (Coupard, 2013b). Une fosse située dans l’aire interne déterminée par le fossé a livré quelques tessons de Plain Ware évoquant le Bronze final, en comparaison avec les grandes urnes, dont certaines à vocation funéraire, découvertes à Agneaux ou sur l’île Tatihou, dans le département de la Manche (Marcigny et Ghesquière, 2003), mais aussi dans celui du Calvados à Fontenay-le-Marmion ou dans l’emprise des deux enceintes de Mondeville « L’Étoile » et « ZI Sud » (Giraud, 2006 ; Chancerel et al., 2006, p. 111-138). Ces céramiques renvoient aux Bucket-Urns de tradition Deverel-Rimbury dont l’attribution est établie au Bronze moyen ou au début du Bronze final (Burgess, 1987).

Figure 6 : Monument funéraire de l’âge du Bronze identifié lors du diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 6: Bronze Age funerary monument identified during the ‘Coudriaux’ survey (F. Coupard, 2013).

Figure 6 : Monument funéraire de l’âge du Bronze identifié lors du diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 6: Bronze Age funerary monument identified during the ‘Coudriaux’ survey (F. Coupard, 2013).

DAO F. Coupard, Inrap.

19Outre ce probable monument du Bronze final, on a également recueilli à proximité de l’enclos laténien no 2 (décrit infra) les restes d’un vase brisé en connexion dans le comblement d’une petite fosse circulaire (1 m de diamètre et 20 cm de profondeur environ), au sein d’un assemblage réunissant au moins 9 individus céramiques distincts ainsi que de probables fragments de faune (la taille des restes interdit une détermination plus précise). Or, ce vase, dont les fragments tapissaient intégralement le fond de la fosse sous forme de larges plaques, offre des caractéristiques propres aux productions régionales des viie-ve s. av. J.-C. (Besnard-Vauterin, 2020). Ces éléments ténus montrent donc bien une occupation antérieure au second âge du Fer, qui reste toutefois extrêmement discrète.

Aux iie-ier s. av. J.-C. : deux enclos domestiques et quelques témoins funéraires

20Les vestiges suivants mis au jour lors de ces fouilles renvoient quant à eux au second âge du Fer (fig. 7). Ils consistent notamment en deux enclos domestiques quadrangulaires, tous deux créés vers le milieu du iie s. av. J.-C.

Figure 7 : Plan général des vestiges du second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des diagnostics et fouilles du « Tuilley » (enclos no 1, en bas à droite) et de « La Campagne » (enclos no 2, en haut à gauche). / Figure 7: General plan of the Late Iron Age remains (in blue) uncovered during surveys and excavations at ‘Tuilley’ (enclosure no. 1, bottom right) and ‘La Campagne’ (enclosure no. 2, top left).

Figure 7 : Plan général des vestiges du second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des diagnostics et fouilles du « Tuilley » (enclos no 1, en bas à droite) et de « La Campagne » (enclos no 2, en haut à gauche). / Figure 7: General plan of the Late Iron Age remains (in blue) uncovered during surveys and excavations at ‘Tuilley’ (enclosure no. 1, bottom right) and ‘La Campagne’ (enclosure no. 2, top left).

DAO F. Coupard, Inrap.

L’enclos laténien no 1

21Le premier enclos, révélé en 2006 et complété en 2013, couvre une superficie de 1 500 m² environ, à mi-pente et en surplomb de l’agglomération actuelle d’Isigny (fig. 8). Ses fossés de ceinture ont connu plusieurs étapes de réfection. Le fossé sud a été doublé, tandis que le remplissage complexe de la façade ouest indique au moins quatre phases de creusement successives, peut-être dues au positionnement de l’enclos à mi-pente (soit une altitude moyenne de 17 m NGF). Les épisodes pluvieux ont pu en effet causer un ravinement important, provoquant le colmatage rapide du fossé en contrebas. Le mobilier exhumé des fossés d’enceinte se rapporte exclusivement à La Tène D1, avec des marqueurs chronologiques échelonnés de la seconde moitié du iie s. av. J.-C. jusqu’au milieu du ier s. av. J.-C. Cet enclos semble par conséquent avoir été occupé un siècle au plus. Son espace interne a été compartimenté au moyen de petits fossés. Quatre groupements de trous de poteau y ont été identifiés, appartenant à deux modestes bâtiments rectangulaires, interprétés comme des greniers. D’autres groupements de trous de poteau, dans la partie sud de l’enclos, suggèrent en outre l’existence d’une ou deux autres constructions supplémentaires dont la fonction n’est pas claire. Par ailleurs, une fosse au remplissage stratifié a livré des carporestes carbonisés qui attestent sa fonction de silo.

Figure 8 : Plan de l’enclos laténien no 1, site du « Tuilley », et proposition de restitution de bâtiments. L’étoile rouge indique l’emplacement du prélèvement palynologique en colonne (fossé 105). / Figure 8: Plan of La Tène enclosure no. 1, ‘Tuilley’ site, and proposed reconstruction of the buildings. The red star indicates the location of the palynological sampling column (ditch 105).

Figure 8 : Plan de l’enclos laténien no 1, site du « Tuilley », et proposition de restitution de bâtiments. L’étoile rouge indique l’emplacement du prélèvement palynologique en colonne (fossé 105). / Figure 8: Plan of La Tène enclosure no. 1, ‘Tuilley’ site, and proposed reconstruction of the buildings. The red star indicates the location of the palynological sampling column (ditch 105).

DAO F. Coupard, Inrap.

L’enclos laténien no 2

22À 300 m au nord-ouest du précédent, un autre enclos quasiment complet a pu être étudié en 2013 (fig. 9). Son enceinte grossièrement quadrangulaire couvre une surface approximative de 1 500 m². Une carrière d’époque moderne a recoupé le tracé de ce fossé d’enclos au niveau d’une interruption liée à la présence d’une entrée à l’ouest. Les angles nord-est et nord-ouest de cet enclos, extérieurs à l’emprise de l’aménagement, n’ont pu être fouillés.

Figure 9 : Plan de l’enclos laténien no 2, site de « La Campagne », et proposition de restitution de ses aménagements internes. Les cercles rouges indiquent l’emplacement des fours. / Figure 9: Plan of the La Tène enclosure no. 2, ‘La Campagne’ site, and proposed reconstruction of its internal layout. The red circles indicate the location of the ovens.

Figure 9 : Plan de l’enclos laténien no 2, site de « La Campagne », et proposition de restitution de ses aménagements internes. Les cercles rouges indiquent l’emplacement des fours. / Figure 9: Plan of the La Tène enclosure no. 2, ‘La Campagne’ site, and proposed reconstruction of its internal layout. The red circles indicate the location of the ovens.

DAO F. Coupard, Inrap.

23L’intérieur de l’enclos était subdivisé au nord par de petits fossés, peut-être destinés à recevoir une clôture ou une palissade, de sorte à réserver un espace au sein duquel une série de fosses et de trous de poteau indiquent la présence d’un ou plusieurs bâtiments. Un accès vers cette zone était aménagé entre le fossé interne et l’enceinte. Il est prolongé par deux petits fossés parallèles évoquant un cheminement bordé de part et d’autre par des palissades, qui aboutit sur un ensemble de trous de poteau évoquant la présence d’un petit porche d’entrée.

24Plusieurs structures de combustion ont également été mises au jour au sein de cet espace séparé (fig. 10). Elles se rattachent à un type de four domestique désormais classique pour l’âge du Fer dans la plaine de Caen et le Bessin, doté d’une chambre hémisphérique creusée en sape, ici dans la paroi du fossé d’enclos vers l’ouverture duquel étaient rejetés les résidus de curage calcinés. Parmi les trois fours découverts dans cet enclos, un seul ne se situe pas à l’intérieur du compartiment. Implanté en bordure du cheminement menant à l’entrée intérieure, il a été creusé vers l’extérieur depuis le fossé d’enclos. À proximité immédiate se déploie une série de trous de poteau dessinant un rectangle d’environ 20 m² qui semble pouvoir être interprété comme un grenier.

Figure 10 : Vue de deux des fours découverts dans l’emprise de l’enclos laténien no 2. / Figure 10: View of two of the ovens discovered in the area of the La Tène enclosure no. 2.

Figure 10 : Vue de deux des fours découverts dans l’emprise de l’enclos laténien no 2. / Figure 10: View of two of the ovens discovered in the area of the La Tène enclosure no. 2.

Cliché F. Coupard, Inrap.

25Tout comme cela a été constaté au sujet de l’établissement précédent, le dédoublement du fossé d’enceinte, au sud, atteste d’une probable réfection de cet enclos. La céramique recueillie ici permet d’attribuer ce deuxième établissement à La Tène D1, avec un assemblage similaire à celui de l’enclos 1.

Parcellaire associé

26Les fossés mis au jour sur le plateau qui sera plus tard occupé par la villa ont été interprétés comme des structures parcellaires, formant un petit réseau qui se positionne à une trentaine de mètres de distance de l’enclos 1, à une altitude moyenne de 19 m NGF (fig. 11). Il est possible que le creusement de ces fossés ainsi que la mise en culture du plateau aient accéléré la sédimentation et le colmatage des fossés d’enclos situés en contrebas, expliquant ainsi leurs réfections et curages répétés.

Figure 11 : Plan général et projections supposées des vestiges parcellaires attribuables au second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des interventions menées sur les sites du « Tuilley » et des « Coudriaux ». / Figure 11: General plan and presumed projections of Late Iron Age field systems (in blue) uncovered during work at the ‘Tuilley’ and ‘Coudriaux’ sites.

Figure 11 : Plan général et projections supposées des vestiges parcellaires attribuables au second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des interventions menées sur les sites du « Tuilley » et des « Coudriaux ». / Figure 11: General plan and presumed projections of Late Iron Age field systems (in blue) uncovered during work at the ‘Tuilley’ and ‘Coudriaux’ sites.

DAO F. Coupard, Inrap.

27D’autres vestiges parcellaires ont été mis au jour à l’occasion des diagnostics successifs réalisés dans les parages du site du Tuilley, mais leur datation est souvent restée hasardeuse en l’état des données. Celui mené en 2013 au lieu-dit « Les Coudriaux » (Coupard, 2013b), sur une surface de 97 000 m², a toutefois livré quelques indices sur l’emprise agraire protohistorique, à travers la présence d’un important réseau parcellaire dont la trame quadrillée souple respecte grossièrement des axes N-S/E-O. Or, ce réseau a pu être attribué à la protohistoire à partir du mobilier présent en petites concentrations dans le comblement des fossés. Une de ces zones en particulier semble révéler la présence d’une occupation enclose supplémentaire en dehors de l’emprise investiguée, sous l’actuel chemin dit « des Perruques ». On relève en outre vers ce secteur la présence de plusieurs petits bâtiments sur poteaux évoquant des greniers, associés à quelques tessons de facture protohistorique. Une fosse enfin a livré du mobilier céramique du premier âge du Fer (Hallstatt C ?), ce qui conduirait à placer ces vestiges avant les enclos du Tuilley.

Deux crémations

28Deux potentielles incinérations ont également été exhumées à hauteur de l’enclos no 1, espacées de 9 m environ l’une de l’autre (fig. 12). Toutes deux consistent en des dépôts de vases dont l’un, de forme balustre, a conservé des restes osseux. Ceux-ci ont manifestement fait l’objet d’une sélection des fragments les plus grands parmi les vestiges du bûcher. Toutes les parties du corps cependant y sont représentées, hormis les extrémités. La position des restes dans la céramique indique que leur collecte a commencé par les éléments de plus grande taille, que l’on retrouve au fond du réceptacle, suivis des fragments issus des membres inférieurs en remontant vers le crâne. Le démontage de l’amas osseux n’a laissé entrevoir aucun espace vide ni effet de contention tandis que l’absence de résidus de combustion conduit à supposer un nettoyage des pièces osseuses. Le vase cinéraire correspond à une forme largement diffusée à travers toute la Gaule à la fin de l’âge du Fer, et attestée en Basse-Normandie aux iie et ier s. av. J.-C., sur des sites de la Manche ou du Calvados (Renault, 1997 ; Le Goff, 2002 ; Giraud, 2007 ; Giazzon, 2012 ; Jahier, 2012). Ce vase semble donc contemporain de l’enclos no 1 au sein duquel il a été mis au jour.

Figure 12 : Vestiges des deux crémations en urnes attribuables au second âge du Fer mis au jour au sein de l’enclos no 1 du « Tuilley ». / Figure 12: Remains of two cremations in urns attributable to the Second Iron Age uncovered in enclosure no. 1 at ‘Tuilley’.

Figure 12 : Vestiges des deux crémations en urnes attribuables au second âge du Fer mis au jour au sein de l’enclos no 1 du « Tuilley ». / Figure 12: Remains of two cremations in urns attributable to the Second Iron Age uncovered in enclosure no. 1 at ‘Tuilley’.

Clichés et DAO F. Coupard, Inrap.

29Le second vase a été trouvé en position debout, conservé sur 12 cm de hauteur et enfoui à 1,20 m sous la surface actuelle (17,40 m NGF). Les limites du creusement n’ont pu être reconnues. Le sédiment formant le contenu de cette urne, identique à l’encaissant, n’a livré aucun reste osseux, mais ce dépôt évoque malgré tout lui aussi un geste funéraire dont la datation est vraisemblablement contemporaine du premier dépôt.

Les vestiges antiques

L’occupation antérieure à la villa (fin ier s. av.-début ier s. apr. J.-C.) et le chantier de construction (seconde moitié-dernier tiers du ier s. apr. J.-C.)

30À la suite de cette occupation laténienne furent creusés plusieurs fossés dont le tracé a été reconnu sous l’emprise même de la villa ainsi qu’à l’ouest de celle-ci (fig. 13). Leur comblement a livré des éléments céramiques caractéristiques de la fin du ier s. av. et des premières décennies du ier s. apr. J.-C. Quoique la nature exacte de ces fossés demeure difficile à préciser, la présence de céramiques dans leur comblement suggère l’existence d’une occupation domestique toute proche, très probablement extérieure à l’emprise et donc située au sud, vers le parking exploré en 1988. Deux de ces fossés forment à l’est de la villa un angle qui indique peut-être la présence d’un autre enclos, antérieur à celle-ci. Les autres fossés paraissent davantage correspondre à des limites parcellaires, le tout évoquant une occupation agricole dont la configuration serait très proche de celle des enclos laténiens mis au jour à proximité.

Figure 13 : Plan des vestiges en creux (en jaune) et des bacs à chaux (en rouge) associés à la phase d’occupation initiale de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 13: Plan of the features (in yellow) and lime pits (in red) associated with the initial occupation phase of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).

Figure 13 : Plan des vestiges en creux (en jaune) et des bacs à chaux (en rouge) associés à la phase d’occupation initiale de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 13: Plan of the features (in yellow) and lime pits (in red) associated with the initial occupation phase of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).

DAO F. Coupard, Inrap.

31Plus tard ont été implantés plusieurs fours à chaux ainsi que deux bacs à chaux composant un ensemble fonctionnel homogène, immédiatement antérieur à la mise en place du bâti de la villa (fig. 14). Des particules de chaux se sont étalées et diffusées en abondance alentour et l’on note que l’absence de toute trace de ce matériau dans le remplissage des fossés exhumés sous la villa confirme que ces derniers étaient déjà obstrués au moment de l’utilisation de ces installations. Les dimensions de ces fours à chaux sont tout à fait comparables à celles relevées sur des installations similaires mises au jour sur divers sites de même époque, et notamment en Basse-Normandie sur celui de la villa de Touffréville (Calvados), dans des niveaux qui correspondent manifestement à la ou l’une des phases de construction initiale(s) de cet établissement (Coulthard, 1999 a et b). Ces « fours en fosse » de Touffréville ont été implantés en divers endroits, à proximité des bâtiments pour la construction desquels on utilisait la chaux ainsi mise en œuvre. Ce même site a également livré plusieurs exemples de bacs rectangulaires destinés à l’extinction de la chaux vive, en rapport avec ces mêmes fours, de même que des aires de stockage de chaux éteinte et de gâchage de mortier. Ainsi, de même qu’à Touffréville, ces vestiges identifiés au Tuilley sont sans doute à mettre en rapport avec le chantier de construction de la villa. Leur utilisation peut être située d’après la céramique et la chronologie relative, vers le dernier quart du ier s. apr. J.-C. jusqu’au début du suivant.

Figure 14 : Vue de l’un des bacs à chaux qui ont précédé la construction de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 14: View of one of the lime pits that preceded the construction of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).

Figure 14 : Vue de l’un des bacs à chaux qui ont précédé la construction de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 14: View of one of the lime pits that preceded the construction of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).

Cliché V. Carpentier, Inrap.

Occupation initiale de la villa du Tuilley (fin ier-iie s. apr. J.-C.)

32La quasi-totalité des fondations identifiées en 2008 et 2013 se rapporte aux aménagements initiaux de la villa du Tuilley (fig. 15). Certaines ont recoupé les fours à chaux et autres aménagements décrits plus haut.

Figure 15 : Plans des vestiges de la villa du « Tuilley » après réaménagements, et de l’habitat rural associé pour les iie-iiie s. apr. J.-C. En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 15: Plans of the ‘Tuilley’ villa after redevelopment, and of the adjoined rural settlement from the 2nd-3rd centuries AD. In red, architectural features; in yellow, the dug-out features.

Figure 15 : Plans des vestiges de la villa du « Tuilley » après réaménagements, et de l’habitat rural associé pour les iie-iiie s. apr. J.-C. En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 15: Plans of the ‘Tuilley’ villa after redevelopment, and of the adjoined rural settlement from the 2nd-3rd centuries AD. In red, architectural features; in yellow, the dug-out features.

DAO F. Coupard, Inrap.

33Pour autant qu’on puisse en juger à partir de ses seules substructions, le plan de la villa offre une grande cohérence et semble résulter d’un schéma initial peu voire non remanié par la suite. Il s’organise de manière assez classique autour d’un atrium à la périphérie duquel se répartit un ensemble de pièces en enfilade, formant un double système de galerie. La façade nord de l’édifice, tournée vers la baie des Veys, affiche un net caractère monumental avec une longueur reconnue de 71 m (soit deux arpents romains). On constate l’organisation symétrique des pièces et galeries à partir de la moitié de la longueur de l’édifice. Du nord au sud, la villa couvrait plus de 23 m de long, ses limites n’ayant pas été reconnues en 1988 lors de la construction du parking. Dans l’hypothèse d’un arpent du nord au sud, soit un peu plus de 35 m pour le double en façade est-ouest, à hauteur de la galerie, la superficie totale de la résidence atteindrait 2 500 m² au total (deux arpents carrés).

34À lui seul, l’atrium présente des dimensions supérieures à 23 × 10 m. Trois pièces situées vers le nord-ouest de la galerie, dans l’aile est, ainsi qu’une quatrième située dans l’aile opposée, ont été dotées de sols suspendus en béton de tuileau (suspensura) surmontant un système de chauffage par hypocauste, largement répandu par ailleurs dans les provinces gauloises et notamment dans des ensembles balnéaires (Bouet, 2003a, p. 188-190 et catalogue, p. 549 sq. ; 2003b ; fig. 16). Même si ces dernières n’ont pas nécessairement fonctionné simultanément, la présence de ces quatre pièces chauffées, réparties dans les deux ailes de la villa, attestent de son opulence. S’y ajoutent l’importante surface couverte par l’ensemble de l’édifice ainsi que les ultimes vestiges de matériaux architecturaux qui ont échappé à la récupération : fragments d’enduits peints, verre à vitre réservé à des constructions au statut élevé (Fontaine et Foy, 2005 ; Vipard, 2009), ou encore plaques de schiste taillées en opus incertum, bien connues sur les sites antiques de Bretagne (Langouët et Quesnel, 2000 ; Daré, 2008 ; Devals, 2010, p. 109).

Figure 16 : Vue d’ensemble des vestiges de la salle à hypocauste découverte dans l’emprise de la villa du « Tuilley » (iie- iiie s. apr. J.-C.). / Figure 16: Overall view of the hypocaust discovered on the site of the ‘Tuilley’ villa (2nd-3rd century AD).

Figure 16 : Vue d’ensemble des vestiges de la salle à hypocauste découverte dans l’emprise de la villa du « Tuilley » (iie- iiie s. apr. J.-C.). / Figure 16: Overall view of the hypocaust discovered on the site of the ‘Tuilley’ villa (2nd-3rd century AD).

Cliché F. Coupard, Inrap.

35Le mobilier céramique recueilli permet d’inscrire l’occupation de cette résidence entre le dernier tiers du ier et la fin du iie voire le début du iiie s. apr. J.-C. Son plan et ses dimensions autorisent à la rattacher au groupe des grandes villas résidentielles répertoriées à ce jour dans les corpus régionaux. Par ailleurs, son implantation au sommet d’un plateau dominant la baie, face à la mer, en retrait d’une longue galerie de façade encadrée de tours et probablement surmontée d’un étage au moins si l’on tient compte de la puissance de ses fondations -1 m environ contre 0,60 à 0,80 m par exemple pour les fondations de la galerie de façade de la villa de Nort-sur-Erdre, en Loire-Atlantique, a priori non porteuse d’un étage (Devals, 2010, p. 94-95), évoquent d’assez près les caractères propres aux grandes villae maritimae dont les modèles italiques se sont répandus à travers les provinces, entre autres sur les côtes de la Bretagne actuelle (Lafon, 2001 ; voir par exemple celle de Mané-Vechen à Plouhinec, Morbihan : Provost, 2007). Il n’existe de ce fait aucune raison que de telles résidences n’aient pas aussi été construites sur les côtes de l’actuelle Normandie.

36Au nord et à l’ouest de la résidence se développe un réseau de fossés de délimitation cohérent, indiquant l’existence de cours contemporaines de la résidence. À un peu plus de 22 m à l’ouest de celle-ci, a été mis au jour un second édifice à fondations en dur, couvrant une surface d’environ 65 m². Celui-ci s’inscrit dans un angle formé par des fossés de fermeture de la cour, à hauteur de sa rive est. Le mode de construction de cet édifice est comparable, toute proportion gardée, à celui de la villa. L’emploi d’un mortier de chaux y est avéré par la présence de restes de ce matériau dans chacune de ses tranchées de fondation. Les artéfacts exhumés dans cette partie du site comprennent des fragments de tegulae et imbreces, de la terre cuite, ainsi qu’un petit instrumentum en bronze et surtout, un abondant vaisselier céramique dont la datation couvre le iie et les premières décennies du iiie s. apr. J.-C. L’épicentre de cette occupation est de toute évidence l’édifice rectangulaire fondé en dur, qui était environné d’un certain nombre d’annexes, fosses détritiques et silos, une petite cave ou plutôt un simple cellier (Adrian et al., 2014, p. 370), trois petits édifices sur poteaux de type grenier ainsi qu’un puits chemisé en pierre. Ces divers équipements renvoient à un établissement rural relativement classique et dépourvu de caractère ostentatoire, sans commune mesure avec la partie résidentielle de la villa qui le surplombe.

37Il pourrait s’agir d’un petit établissement agricole inféodé à la villa, sans toutefois que ses fonctionnalités, vraisemblablement autonomes (puits, cellier et silos, greniers, dépotoirs…), son inscription au sein d’un parcellaire loti, ou son positionnement sur la limite extérieure de la ou de l’une des cours adjacentes à la partie résidentielle de la villa, ne permettent d’y voir nécessairement une dépendance directe de celle-ci. Bien qu’elle s’avère impossible à confirmer sur la foi de nos seules données, l’hypothèse d’un habitat groupé de paysans associé à un parcellaire loti nous semble peut-être ici plus convaincante ; elle recoupe par ailleurs un certain nombre de cas observés à travers toute la Gaule par Pierre Ouzoulias ou Philippe Leveau notamment (Ouzoulias, 2006), et notamment en Bretagne (Simier et al., 2022). Cette identification ne contredit en rien l’idée d’un lien étroit avec la villa qui surplombe l’habitat en question, dans la mesure où la petite et moyenne paysannerie joua très communément son rôle dans l’agriculture productiviste antique, comme colons d’un domaine ou comme saisonniers (Leveau, 2022, p. 167).

Abandon et réaménagements tardifs (iiie-ive s. apr. J.-C.)

38L’abandon de la villa n’a pas entraîné celui de l’espace qu’elle occupait, ce dont témoignent divers éléments mobiliers plus tardifs recueillis à la surface du remblai qui coiffe une partie de ses fondations (fig. 17). La présence de ces vestiges est à mettre au compte de la réorganisation partielle des ruines de l’édifice, à travers l’implantation de trous de poteau, de plusieurs fosses comblées de terre et de fragments de tuiles, et aussi quelques reprises de maçonnerie limitées, manifestement postérieures au démantèlement des murs. On relève notamment l’implantation tardive d’un nouveau mur, positionné contre l’une des anciennes fondations de l’aile est, qui paraît avoir été partiellement reprise en opus spicatum à cette occasion. On observe d’autre part, au cours de cette même phase tardive, le prolongement de deux anciens murs de refend appartenant à la galerie intérieure, aboutissant désormais à une nouvelle terminaison absidiale. On note enfin que les trous de poteau et les fosses implantés à cette époque ont traversé l’épaisseur des remblais recouvrant en partie les fondations de la villa sans qu’une trace de pédogenèse ne soit visible à leur surface. Il est très probable que ces aménagements témoignent d’une occupation tardive au cours de laquelle furent menés le tri et la récupération des matériaux aux dépens des ruines, qui étaient donc accessibles et sans doute à l’air libre. Cette occupation peut être située, sur la foi de quelques témoins céramiques recueillis à la surface des remblais tardifs, dans le cours des iiie-ive s. apr. J.-C.

Figure 17 : Plan des vestiges associés à l’abandon et aux réaménagements tardifs de la villa du « Tuilley » (iiie- ive s.). En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 17: Plan of the features dating to the abandonment and late redevelopment of the ‘Tuilley’ villa (3rd-4th c.). In red, architectural features; in yellow, dug-out features.

Figure 17 : Plan des vestiges associés à l’abandon et aux réaménagements tardifs de la villa du « Tuilley » (iiie- ive s.). En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 17: Plan of the features dating to the abandonment and late redevelopment of the ‘Tuilley’ villa (3rd-4th c.). In red, architectural features; in yellow, dug-out features.

DAO F. Coupard, Inrap.

39Il s’avère difficile de caractériser plus finement cette ultime période de fréquentation. S’agissait-il d’un habitat à proprement parler ou d’une autre forme d’occupation, plus opportuniste, liée à la récupération des matériaux ? On relève l’absence de structure domestique telle qu’un foyer ou un silo. En revanche, une structure rattachée à cette phase évoque un possible aménagement funéraire. Une fosse oblongue a en effet été creusée en sape sous l’un des murs du nouvel édifice doté d’une terminaison absidiale, puis recouverte au moyen d’un assemblage de pierres et d’une grande tuile complète, qui ont par la suite versé à l’intérieur, semble-t-il à la suite de sa réouverture. Ces caractéristiques suggèrent qu’il pourrait s’agir d’une inhumation, qui aurait été pillée ou du moins, vidée de son contenu à une époque inconnue, ce qui expliquerait l’absence de restes osseux comme de tout autre mobilier. Une telle hypothèse nous évoque bien entendu divers cas de réutilisation de ruines antiques, notamment de villas, à des fins funéraires ou religieuses, attestés dans la littérature régionale pour l’Antiquité tardive et surtout le haut Moyen Âge (Le Maho, 2004 ; Delacampagne et Hincker, 2004). La présence d’un édifice remanié et doté d’une terminaison absidiale interroge également. En effet, de telles pièces à absides ne sont pas rares dans les plans de villas des provinces gauloises et en particulier dans les complexes balnéaires, jusqu’au cours du Bas-Empire (Bouet, 2003a, catalogue, et 2003b). Dans le cas présent cependant, cette abside semble plutôt liée à la période d’abandon de la villa reconvertie en carrière. Il est possible que certaines parties en aient été maintenues en élévation au cours des iiie-ive s. Quant aux autres aménagements rattachés à cette phase tardive, ils renvoient à des constructions de terre et de bois, peut-être des abris rudimentaires érigés directement sur les ruines de la villa tandis que ses matériaux architecturaux (tuiles, blocs de taille, verre à vitre…), étaient systématiquement démontés, triés à hauteur de la grande nappe de remblais formée au pied de la galerie de façade, puis récupérés, le tout à la manière d’un vaste chantier de démolition.

40Selon le scénario qui paraît donc le plus vraisemblable, l’ancienne résidence du Haut-Empire fut donc abandonnée vers le début du iiie s. et devint, sans doute très rapidement, une carrière de matériaux de construction exploitée au profit d’autres lieux, assurément peu éloignés, mais extérieurs à l’emprise de nos investigations, qui furent réaménagés ou construits ex nihilo au cours du Bas-Empire. Ce faisant, une partie des ruines de l’ancienne résidence a été colonisée par quelques constructions rudimentaires, peut-être de simples abris, ainsi que par un nouvel édifice doté d’une terminaison en abside, qui a peut-être accueilli une tombe, vidée de son contenu. Quelle qu’ait pu être la configuration exacte de cette nouvelle occupation, elle s’est très clairement accompagnée d’une réduction considérable de l’espace habité au cours du Bas-Empire, sinon d’une reconversion totale et radicale de l’ancienne résidence en un chantier de récupération de matériaux. Il est possible que le propriétaire de la villa ait lui-même commandé la reconversion de son fonds en carrière, y trouvant ainsi une nouvelle source de revenus ? Quoi qu’il en soit, le site semble n’avoir plus connu aucun réaménagement au-delà du ive s. et son démantèlement fut sans doute relativement rapide, sans que l’on sache au profit de qui et de quel(s) autre(s) site(s) ? Peut-être la réponse à cette question se trouve-t-elle dans le sous-sol et les origines mêmes de la petite agglomération médiévale d’Isigny-sur-Mer, qui aujourd’hui encore demeurent assez obscures.

3. Face à la mer, du second âge du Fer à l’Antiquité : un même lieu, deux manières d’habiter

41Les découvertes survenues dans le secteur de la baie des Veys font bien remonter sa première anthropisation au Ve millénaire. Les modèles d’évolution hydrosédimentaire proposés pour ces périodes montrent que les cours d’eau formaient alors des chenaux assez larges et faiblement encaissés, qui débordaient régulièrement pour inonder la plaine alluviale (Lespez, 2012 ; Beauchamp, 2018). Toutefois, la véritable colonisation agricole des plateaux ne se manifeste qu’à partir du Subatlantique, vers la fin de l’âge du Bronze et au cours de l’âge du Fer, par l’atterrissement des fonds de vallée par des apports limoneux issus de l’érosion des sols. Au second âge du Fer, la multiplication des habitats enclos, dont ceux mis au jour sur le site du Tuilley, témoigne de l’essor démographique et de la structuration des espaces agricoles qui l’accompagne. Les taux de pollens arboréens chutent alors sous la barre des 20 %, attestant d’importantes ouvertures liées au défrichement et à la mise en culture des plateaux tandis que le fond de vallée et le pourtour de la vaste baie des Veys enregistrent également d’importantes mutations (Lespez et Germain, 2010).

42À l’échelle resserrée du site, une étude palynologique menée par D. Barbier-Pain (Inrap), sur le comblement de l’un des fossés ceinturant l’enclos no 1 (no 105 ; fig. 8 et 18). Celle-ci a révélé, pour La Tène moyenne à finale, un environnement végétal plutôt ouvert, avec couvert forestier dégradé et restreint, dans un contexte général fortement anthropisé. Les activités agropastorales sont en outre attestées par les carporestes carbonisés découverts au sein d’une fosse silo du même enclos (M.-F. Dietsch-Sellami, Inrap). Il s’agit principalement de semences nettoyées dont 96 % de céréales au nombre desquelles l’orge vêtue (Hordeum vulgare) à hauteur de 37 %, le blé amidonnier (Triticum dioccum) à 27 %, et l’avoine cultivée (Avena sativa) à 8,7 %. Dans la mesure où coexistent ici, au sein d’un même silo, une céréale de printemps, l’avoine cultivée, avec deux céréales exigeant (l’amidonnier) ou supportant (l’orge vêtue) un semis automnal, il semble s’agir d’un mélange réalisé a posteriori de l’utilisation du stock, peut-être à partir de grains non retirés du silo. On y remarque également la présence de féverole en faible quantité, alors que les légumineuses, pois et féverole, sont extrêmement abondantes sur les sites de la plaine de Caen pour la même période ; avec toute la prudence requise, ceci pourrait peut-être indiquer l’existence de systèmes culturaux sensiblement différents d’un pays à l’autre de l’actuelle Normandie (Zech-Matterne et al., 2013). Quoi qu’il en soit, l’enclos no 1 du Tuilley est bien le premier site laténien de Basse-Normandie à avoir livré des restes d’avoine cultivée. Sa culture est toutefois attestée à l’est de la région depuis la transition du Bronze final IIIb au Hallstatt ancien, sur le site de Malleville-sur-le-Bec, dans l’Eure, qui correspond quant à lui à son occurrence européenne la plus occidentale en l’état des connaissances pour cette période. On en recense par la suite plusieurs attestations dans la plaine de Caen du Hallstatt C à La Tène finale, mais plus aucune à l’époque romaine. Elle réapparaît ensuite sur plusieurs sites au cours du Moyen Âge, avec des taux de représentation plus importants (Ruas et Zech-Matterne, 2012, p. 326, 334 ; Lepaumier, 2015).

Figure 18 : Vue en coupe du fossé 105 de l’enclos laténien no 1 du « Tuilley » qui a fait l’objet d’une étude palynologique sur colonne de sédiment. / Figure 18: Sectional view of ditch 105 of the Latenian enclosure no. 1 at ‘Tuilley’, where we conducted a palynological study of a sediment column.

Figure 18 : Vue en coupe du fossé 105 de l’enclos laténien no 1 du « Tuilley » qui a fait l’objet d’une étude palynologique sur colonne de sédiment. / Figure 18: Sectional view of ditch 105 of the Latenian enclosure no. 1 at ‘Tuilley’, where we conducted a palynological study of a sediment column.

Cliché V. Carpentier, Inrap.

43Ce que l’on perçoit des habitats du second âge du Fer à Isigny-sur-Mer et alentour suggère donc l’existence d’une économie agricole tournée vers l’autosuffisance, au sein d’un réseau local regroupant un semis de « fermes » encloses, à la morphologie (dimensions, installations, mobilier) récurrente. On peut dès lors se demander si ce réseau d’établissements, dont l’essor se manifeste assez clairement à partir de La Tène moyenne, n’a pas également mis à profit d’autres ressources, liées notamment à l’exploitation du littoral, en particulier la pêche, ou au commerce maritime à travers la Manche, à l’image de ce qui a pu être observé au nord du Cotentin sur le site littoral d’Urville-Nacqueville (Lefort et al., 2015).

44L’absence constatée de restes de poisson sur les occupations laténiennes d’Isigny-sur-Mer n’autorise guère à évacuer cette ou ces options, ce type de restes n’étant par ailleurs généralement pas conservé dans la région en raison de l’acidité des sols. Cependant, les fosses dépotoirs de l’établissement gallo-romain mis au jour en bas de pente ont bien livré quelques rares restes d’ichtyofaune ainsi que des coquilles de mollusques marins, habituellement pêchés et consommés sur les côtes de la Manche et acheminés vers les sites de l’intérieur à cette période, en plaine de Caen notamment, soit à une trentaine de kilomètres dans les terres (Carpentier, 2009b ; Mougne et Dupont, 2015). Or, ces coquilles ont été retrouvées ici en volumes très limités, en particulier pour un site si proche de la côte. Il reste que ces quantités restreintes peuvent correspondre à des rejets de repas échelonnés dans le temps, dont seule une fraction se retrouve dans les dépotoirs. On peut affirmer sans trop de risque qu’en l’absence de toute trace de mortier ou de peinture et eu égard aux espèces présentes, il ne s’agit clairement pas d’éléments décoratifs tels qu’en ont été retrouvés sur plusieurs villas de l’Ouest français (Boislève et al., 2012), mais plutôt de restes alimentaires. Concernant les mollusques marins présents sur le site, on note que trois espèces seulement semblent avoir été consommées ici et qu’il s’agit de grands individus, conformément au schéma régional établi pour l’Antiquité : l’huître plate (Ostrea edulis), la moule (Mytilus edulis) et la coque (Cerastoderma edule). Or, ces trois espèces proviennent très vraisemblablement de la baie où elles étaient accessibles dès le niveau moyen de l’estran, quasi quotidiennement, et sans qu’il soit besoin de moyens techniques particuliers pour la collecte.

45Les traces matérielles en lien avec la fréquentation et la mise en valeur de la baie faisant encore cruellement défaut avant le Moyen Âge ou l’époque moderne, ces quelques données réunies pour l’Antiquité représentent à ce jour les plus anciennes attestations probables de pratiques halieutiques régulières au sein des riverains de la baie des Veys, alors même que l’on sait que les ressources vivrières du littoral de la Manche ont bien été investies dès la préhistoire en d’autres secteurs (Daire et al., 2018). Il est tout aussi remarquable qu’aucune trace de briquetage salicole n’ait été enregistrée sur ce site, pourtant proche de l’emplacement des salines médiévales attestées par les textes. Si des exploitations salicoles ont pu avoir été implantées au cours du second âge du Fer plutôt en contrebas du plateau, au bord même de la baie, l’absence de toute trace de briquetage au sein des habitats alentour pose question au regard de ce que l’on connaît des sites de même époque, ceux de la plaine de Caen notamment (Carpentier et al., 2012). Ces réflexions esquissent un premier portrait, encore lacunaire, des relations unissant les occupations de ce secteur au rivage et à la mer en général, qui ne pourra être affiné qu’au prix de nouvelles recherches et découvertes.

46Les données archéologiques réunies dans l’environnement du site du Tuilley montrent que le mouvement de croissance agraire et de développement des habitats amorcé au second âge du Fer s’est prolongé sans hiatus apparent au cours des deux premiers siècles de notre ère. Nombre d’établissements enclos étudiés sur le pourtour de la baie des Veys ont vu leur occupation perdurer jusqu’au ier ou iie s. apr. J.-C., par exemple à Saint-Pellerin ou à Saint-Hilaire-Petitville (op. cit.), et nombre d’occupations antiques conservent encore la morphologie des enclos fossoyés de tradition gauloise, une réalité qui par ailleurs a été constatée à de nombreuses reprises dans l’ouest de la France (Naas, 2008). La romanisation s’y est matériellement traduite par des modifications somme toute discrètes, telles que la présence accrue de biens matériels issus des réseaux d’échanges du monde romain, tuiles, outillage agricole, céramiques et verre… Toutefois, là comme ailleurs, de nouvelles formes d’établissements se sont déployées après la conquête et notamment des villas, à partir surtout de la seconde moitié du ier s. apr. J.-C. Celle du Tuilley offre des caractères architecturaux qui, joints à son implantation, suggèrent qu’il pourrait s’agir d’une luxueuse villégiature de bord de mer, dotée d’une monumentale galerie de façade, longue de 71 m, offrant un panorama sur la mer en surplomb du bourg d’Isigny.

47Les premières villae maritimae sont nées sur le littoral italien au cours des trois premiers quarts du iie s. av. J.-C. (Lafon, 2001, p. 41 sq.). Ces établissements remplissaient à la fois des fonctions économiques, en tant que centres de domaines agricoles, et résidentielles avec des aménagements parfois très luxueux quoiqu’en majorité plus ordinaires, parfois au contact direct de la mer dont les ressources piscicoles, conchylicoles ou salicoles, mais aussi les dimensions entrecroisées, paysagères, économiques et sociologiques, symboliques et mythologiques, hygiéniques et hédonistes (thermalisme, bains de mer), étaient clairement recherchées et mises en valeur aux côtés des pratiques agricoles plus traditionnelles. Nombre de ces villas maritimes de première génération du Latium méridional ou du golfe de Naples, affichaient un caractère ostentatoire avec de larges galeries de façade tournées vers la mer, longues de 50 à 90 m, encadrées de pavillons d’angle avec avant-corps symétriques (id., p. 53-54). Les nombreuses villas littorales érigées à travers tout le monde romain, du nord-ouest de la Gaule à la côte atlantique et à l’ensemble du bassin méditerranéen, offrent des plans et dimensions comparables (tabl. I).

Tableau I : Divers exemples de villas de bord de mer ou d’estuaire à grande galerie de façade mis au jour dans l’ouest de la France et dans l’ensemble du monde romain. /
Table I: Examples of seaside and estuary villas with large front galleries discovered in western France and throughout the Roman world.

Numéro de site Type d’intervention Responsable d’opération Année Lieu-dit Commune
471 Fouille Couanon P. 1988 Square Mangeon Carentan
594 Fouille Dufour M. 1992 Déviation de la RN 13 Osmanville
634 Diagnostic Besnard-Vauterin C.-C. 1994 Déviation de la RN 13 Carentan-Isigny-sur-Mer Catz
685 Diagnostic Lepert T. 1993 Déviation de la RN 13 Carentan-Isigny-sur-Mer Les Veys
762 Diagnostic Allart E. 1994 La Campagne Les Veys
763 Diagnostic Besnard-Vauterin C.-C. 1994 Le Haut Clos Les Veys
768 Fouille Besnard-Vauterin C.-C. 1994 La Fourchette 2 Saint-Pellerin
769 Fouille Allart E. 1994 La Fourchette 1 Saint-Pellerin
770 Diagnostic Broine E. 1994 Cantepie Les Veys
1505 Diagnostic Flotté D. 2004 Les Résidences du Marais Saint-Hilaire-Petitville
1574 Fouille Le Gaillard L. 2005 Les Résidences du Marais, Rue du Mesnil Saint-Hilaire-Petitville
1708 Diagnostic Langlois G. 1989 Déviation de la RN 13 - section Saint-Côme-du-Mont - Carentan Saint-Hilaire-Petitville
2171 Diagnostic Besnard-Vauterin C.-C. 1994 Aire de Cantepie Les Veys
2268 Diagnostic Hérard B. 2005 Le Tuilley, Parcelles D10 et D240 Isigny-sur-Mer
2382 Fouille Carpentier V. 2007 Le Tuilley Isigny-sur-Mer
2384 Fouille Carpentier V. 2009 Le Tuilley Isigny-sur-Mer
2400 Diagnostic Tournier F. 2006 Place du Grand Valnoble Carentan
2410 Diagnostic Flotté D. 2008 RN 174 - Section Porte Verte/RN 13 -Tronçon RD 148/RN 13 Les Veys
2676 Suivi de travaux Couanon P. 1982 Surveillance de travaux d’un gazoduc dans le secteur Anctoville-Sainte-Mère-Église Sainte-Mère-Église
2771 Diagnostic Carpentier V. 2009 Rue du Mesnil, Rue du Manoir Saint-Hilaire-Petitville
2848 Fouille Paez-Rezende L. 2010 RN 174/RN 13 Les Veys
3034 Diagnostic Paez-Rezende L. 2011 Rue de l’Église, Lieu-dit Le Haut de Delasse Les Veys
3136 Fouillle Lepaumier H. 2011 Rue de l’Église, Lieu-dit Le Haut de Delasse Les Veys
3195 Diagnostic Paez-Rezende L. 2012 Le Bourg Isigny-sur-Mer
3322 Fouille Coupard F. 2013 Le Tuilley, La Campagne Isigny-sur-Mer
3344 Diagnostic Jahier I. 2013 Pôle Laitier Osmanville
3348 Diagnostic Paez-Rezende L. 2013 Rue de la Mare Saint-Hilaire-Petitville
3455 Diagnostic Coupard F. 2013 Les Coudriaux Isigny-sur-Mer
3886 Diagnostic Chevet P. 2017 Abords de l’église Notre-Dame Carentan
4085 Diagnostic Le Gaillard L. 2018 Projet de zone artisanale Saint-Hilaire-Petitville

V. Carpentier, Inrap.

48Il s’agissait pour beaucoup de villégiatures de plaisir ou de repos pour les élites impériales qui n’y séjournaient qu’occasionnellement, à l’image d’ailleurs des grandes villas balnéaires érigées sur la côte normande au xixe-début du xxe s. (Rouillard, 1984). Quelques-unes ont été identifiées sur les côtes bretonnes. La façade nord de la villa de Ploufragan (Côtes-du-Nord), tournée vers la baie de Saint-Brieuc, mesure ainsi environ 60 m elle aussi (Ferrette, 2010), tandis que la cour intérieure de celle de Mané-Véchen prà Plouhinec (Morbihan), ouverte à l’ouest sur la ria d’Étel, est large d’environ 51,50 m au total (Provost, 2007). On trouve d’autres exemples convergents sur les côtes méridionales de l’Angleterre, par exemple la villa d’East Wear Bay (Folkestone), dans le Kent, fouillée dans la première moitié du xxe s., dont la galerie de façade mesure 55 m environ (Blamangin et al., 2020, p. 95, fig. 5). Il n’est guère douteux que les côtes normandes aient également accueilli des villas de bord de mer. Du point de vue de sa surface bâtie (estimée), celle du Tuilley peut être rangée quant à elle au nombre des plus grandes connues dans la région, dotées d’un plan en U que détermine sa longue galerie de façade tournée vers la mer, prolongée par deux ailes symétriques disposées en retour de part et d’autre. Ses élévations correspondaient vraisemblablement à des portiques à étage(s), surplombant la cour située en contrebas vers le nord (fig. 19). La mer est ici éloignée de la résidence, qui est « avant tout conçue comme un objet que l’on regarde de loin, non comme une réalité dans laquelle on vit » (Lafon, 2001, p. 300). Les thermes, d’où l’on pouvait probablement voir la mer, sont l’une des caractéristiques fondamentales de ces établissements dans la mesure où ils pallient l’éloignement du rivage.

Figure 19 : Profil orographique montrant la position surplombante et l’importance de la vision panoramique sur la mer et la baie des Veys dans le projet architectural de la villa littorale du « Tuilley ». / Figure 19: Orographic profile showing the overhanging position and the importance of the panoramic view of the sea and the Bay of Veys in the architectural design of the coastal villa of ‘Tuilley’.

Figure 19 : Profil orographique montrant la position surplombante et l’importance de la vision panoramique sur la mer et la baie des Veys dans le projet architectural de la villa littorale du « Tuilley ». / Figure 19: Orographic profile showing the overhanging position and the importance of the panoramic view of the sea and the Bay of Veys in the architectural design of the coastal villa of ‘Tuilley’.

DAO F. Coupard, Inrap ; image et données Google Earth, 2023.

49La construction de la villa du Tuilley semble avoir inauguré, à l’aube de notre ère, un lien nouveau et particulier avec la côte dont l’héritage peut être retracé par la suite jusqu’à l’ère contemporaine à travers l’histoire portuaire et maritime d’Isigny-sur-Mer et de la baie. Ce site s’inscrit au sein non d’un no man’s land, mais d’un espace largement désenclavé au cours des deux premiers siècles de notre ère grâce à la création d’un nouveau réseau de voies. L’une d’elles a notamment été archéologiquement observée à Saint-Pellerin, sur le tracé la RN 174 (Paez-Rézende, op. cit.). Reliant les agglomérations de Bayeux et Saint-Côme-du-Mont, elle fut établie, apparemment ex nihilo, dans le courant du ier ou du iie s. apr. J.-C. Le cœur des zones humides du Cotentin fut également aménagé pour la circulation et les échanges. En témoigne la découverte à Étienville (Manche), au cœur des marais de la presqu’île, d’un pont long sur pilotis associé à une voie antique qui assurait le franchissement de la Douve au sud de Valognes, avec une architecture sans équivalent à ce jour dans le monde romain (Jeanne et al., 2020).

50Alors que de nombreux sites paraissent avoir été désertés vers la fin du iie s., celui du Tuilley fait exception avec des témoins de fréquentation, certes discrets, jusqu’au ive s. Quoique ténus, ces témoins montrent qu’en dépit de l’abandon de la villa vers la fin du iie s. pour sa partie résidentielle, ou le début du iiie s. pour l’habitat paysan situé en contrebas, le site ne fut pas à proprement parler abandonné. Au contraire, le bâti de l’ancienne résidence fut intégralement démantelé en vue de la récupération systématique des matériaux, certainement dans le but d’ériger d’autres constructions dont on ignore la nature ou l’emplacement. Il est toutefois bien probable que le village d’Isigny ait connu à cette époque une évolution notable, peut-être même sa fondation initiale, dont les constructions ultérieures auraient toutefois masqué les traces. Le fait est que la plupart des villas de la région furent ainsi reconverties en carrières, et un certain nombre d’entre elles réoccupées sous des formes différentes, le plus souvent un établissement rural relevant du modèle désormais classique pour le nord de la Gaule (Van Ossel, 1992), mais aussi des réutilisations à des fins religieuses ou funéraires, déjà évoquées plus haut. Celle du Tuilley a manifestement connu le même sort, passant du statut de résidence élitaire à celui de structure productive (une carrière en l’occurrence). Et il est probable que, conformément à un schéma qu’a mis par ailleurs en lumière Paul Van Ossel entre Seine et Rhin (2010), lui ait succédé par la suite non un nouvel établissement rural, mais une petite bourgade, établie sur la rive même de la baie, à l’emplacement même de ce qui deviendra au Moyen Âge l’agglomération portuaire d’Isigny-sur-Mer.

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Notes

1 Nous suivrons ici l’usage recommandé par Philippe Leveau (et al., 1999) en réservant l’italique aux termes latins attestés dans l’épigraphie (villa maritima; pars urbana), et les caractères romains au vocabulaire archéologique (villa de bord de mer/maritime/estuarienne ; partie résidentielle, etc.).

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : La baie des Veys, formant l’isthme du Cotentin à la rencontre des départements du Calvados et de la Manche (encadré), correspond à un vaste estuaire situé au débouché maritime des marais du Bessin-Cotentin. Cet espace accueille de nombreuses activités en rapport avec un paysage de polders, fortement anthropisé, qui fut constitué après 1850 en retrait de larges digues dressées contre la mer depuis le Moyen Âge. / Figure 1: The Bay of Veys, forming the Cotentin isthmus where the departments of Calvados and Manche meet (inset), is a vast estuary located at the maritime outlet of the Bessin-Cotentin marshes. This area is home to a wide range of activities associated with a highly anthropised polder landscape, which was created after 1850 as a retreat from the wide dykes that had been built against the sea since the Middle Ages.
Crédits D’après Verger, 2005, p. 264.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 853k
Titre Figure 2 : Représentation figurée du site d’Isigny au xviiie s., avant les grands travaux de la baie des Veys. Extrait de la carte topographique du diocèse de Bayeux, par l’abbé Outhier. / Figure 2: Diagram of the Isigny site in the 18th century, before the major works in the Baie des Veys. Extract from the topographical map of the diocese of Bayeux, by Abbé Outhier.
Crédits Paris, BnF Richelieu, Cartes & Plans, Coll. D’Anville, Gallica.fr, <https://gallica.bnf.fr/​ark:/12148/​btv1b53052839r>. Consulté le 30 août 2023.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 853k
Titre Figure 3 : Carte présentant l’ensemble des opérations archéologiques (désignées par leur numéro d’enregistrement par la DRAC Normandie) réalisées à ce jour dans le contexte de la baie des Veys. / Figure 3: Map showing the archaeological operations (designated by their DRAC Normandie registration number) carried out to date in the Baie des Veys.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap ; SIG G. Léon, Inrap ; données DRAC Normandie 2023.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 959k
Titre Figure 4 : Carte contextualisant la baie des Veys au sein des territoires de cités et du réseau de communication terrestre antiques de la Basse-Normandie. Peuples et toponymes antiques en italique. / Figure 4: Map showing the context of the Bay of Veys within the territories of the ancient cities and land communication network of Lower Normandy. Ancient peoples and place names in italics.
Crédits DAO G. Léon et F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 911k
Titre Figure 5 : Plan général des interventions archéologiques préventives menées sur la commune d’Isigny-sur-Mer de 2005 à 2013 (noms des responsables et années d’intervention entre parenthèses). En bleu et vignettes grises, diagnostic et fouilles du « Tuilley » (B. Hérard, 2005 et V. Carpentier, 2007, 2009) ; en mauve et vignettes vertes, diagnostic et fouilles du « Bourg » (L. Paez-Rézende, 2012 et F. Coupard, 2013 pour les deux fouilles) ; en rose, diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 5: General plan of the preventive archaeological work carried out in the commune of Isigny-sur-Mer from 2005 to 2013 (names of the people responsible and years of work in brackets). In blue and grey vignettes, evaluation and excavations of the ‘Tuilley’ (B. Hérard, 2005 and V. Carpentier, 2007, 2009); in mauve and green vignettes, diagnosis and excavations of the ‘Bourg’ (L. Paez-Rézende, 2012 and F. Coupard, 2013 for both excavations); in pink, diagnosis of the ‘Coudriaux’ (F. Coupard, 2013).
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 646k
Titre Figure 6 : Monument funéraire de l’âge du Bronze identifié lors du diagnostic des « Coudriaux » (F. Coupard, 2013). / Figure 6: Bronze Age funerary monument identified during the ‘Coudriaux’ survey (F. Coupard, 2013).
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 676k
Titre Figure 7 : Plan général des vestiges du second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des diagnostics et fouilles du « Tuilley » (enclos no 1, en bas à droite) et de « La Campagne » (enclos no 2, en haut à gauche). / Figure 7: General plan of the Late Iron Age remains (in blue) uncovered during surveys and excavations at ‘Tuilley’ (enclosure no. 1, bottom right) and ‘La Campagne’ (enclosure no. 2, top left).
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 546k
Titre Figure 8 : Plan de l’enclos laténien no 1, site du « Tuilley », et proposition de restitution de bâtiments. L’étoile rouge indique l’emplacement du prélèvement palynologique en colonne (fossé 105). / Figure 8: Plan of La Tène enclosure no. 1, ‘Tuilley’ site, and proposed reconstruction of the buildings. The red star indicates the location of the palynological sampling column (ditch 105).
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 841k
Titre Figure 9 : Plan de l’enclos laténien no 2, site de « La Campagne », et proposition de restitution de ses aménagements internes. Les cercles rouges indiquent l’emplacement des fours. / Figure 9: Plan of the La Tène enclosure no. 2, ‘La Campagne’ site, and proposed reconstruction of its internal layout. The red circles indicate the location of the ovens.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 763k
Titre Figure 10 : Vue de deux des fours découverts dans l’emprise de l’enclos laténien no 2. / Figure 10: View of two of the ovens discovered in the area of the La Tène enclosure no. 2.
Crédits Cliché F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 395k
Titre Figure 11 : Plan général et projections supposées des vestiges parcellaires attribuables au second âge du Fer (en bleu) mis au jour lors des interventions menées sur les sites du « Tuilley » et des « Coudriaux ». / Figure 11: General plan and presumed projections of Late Iron Age field systems (in blue) uncovered during work at the ‘Tuilley’ and ‘Coudriaux’ sites.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 720k
Titre Figure 12 : Vestiges des deux crémations en urnes attribuables au second âge du Fer mis au jour au sein de l’enclos no 1 du « Tuilley ». / Figure 12: Remains of two cremations in urns attributable to the Second Iron Age uncovered in enclosure no. 1 at ‘Tuilley’.
Crédits Clichés et DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 850k
Titre Figure 13 : Plan des vestiges en creux (en jaune) et des bacs à chaux (en rouge) associés à la phase d’occupation initiale de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 13: Plan of the features (in yellow) and lime pits (in red) associated with the initial occupation phase of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 521k
Titre Figure 14 : Vue de l’un des bacs à chaux qui ont précédé la construction de la villa du « Tuilley » (fin ier-début iie s. apr. J.-C.). / Figure 14: View of one of the lime pits that preceded the construction of the ‘Tuilley’ villa (late 1st-early 2nd century AD).
Crédits Cliché V. Carpentier, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 743k
Titre Figure 15 : Plans des vestiges de la villa du « Tuilley » après réaménagements, et de l’habitat rural associé pour les iie-iiie s. apr. J.-C. En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 15: Plans of the ‘Tuilley’ villa after redevelopment, and of the adjoined rural settlement from the 2nd-3rd centuries AD. In red, architectural features; in yellow, the dug-out features.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-15.jpg
Fichier image/jpeg, 731k
Titre Figure 16 : Vue d’ensemble des vestiges de la salle à hypocauste découverte dans l’emprise de la villa du « Tuilley » (iie- iiie s. apr. J.-C.). / Figure 16: Overall view of the hypocaust discovered on the site of the ‘Tuilley’ villa (2nd-3rd century AD).
Crédits Cliché F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-16.jpg
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Titre Figure 17 : Plan des vestiges associés à l’abandon et aux réaménagements tardifs de la villa du « Tuilley » (iiie- ive s.). En rouge, les vestiges architecturaux en dur ; en jaune, les structures en creux. / Figure 17: Plan of the features dating to the abandonment and late redevelopment of the ‘Tuilley’ villa (3rd-4th c.). In red, architectural features; in yellow, dug-out features.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-17.jpg
Fichier image/jpeg, 540k
Titre Figure 18 : Vue en coupe du fossé 105 de l’enclos laténien no 1 du « Tuilley » qui a fait l’objet d’une étude palynologique sur colonne de sédiment. / Figure 18: Sectional view of ditch 105 of the Latenian enclosure no. 1 at ‘Tuilley’, where we conducted a palynological study of a sediment column.
Crédits Cliché V. Carpentier, Inrap.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-18.jpg
Fichier image/jpeg, 745k
Titre Figure 19 : Profil orographique montrant la position surplombante et l’importance de la vision panoramique sur la mer et la baie des Veys dans le projet architectural de la villa littorale du « Tuilley ». / Figure 19: Orographic profile showing the overhanging position and the importance of the panoramic view of the sea and the Bay of Veys in the architectural design of the coastal villa of ‘Tuilley’.
Crédits DAO F. Coupard, Inrap ; image et données Google Earth, 2023.
URL http://journals.openedition.org/rao/docannexe/image/9602/img-19.jpg
Fichier image/jpeg, 389k
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Pour citer cet article

Référence électronique

François Coupard, Vincent Carpentier, Delphine Barbier-Pain, Marie-France Dietsch-Sellami et Catherine Dupont, « D’enclos en villa. Vivre au bord de la baie des Veys, de La Tène au Bas-Empire »Revue archéologique de l'Ouest [En ligne], 40 | 2024, mis en ligne le 14 décembre 2024, consulté le 16 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/rao/9602 ; DOI : https://doi.org/10.4000/11w2q

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Auteurs

François Coupard

Inrap Grand-Ouest/UMR 6566 CReAAH. Centre archéologique de basse Normandie, Bd de l’Europe, 14540 Bourguébus,

Articles du même auteur

Vincent Carpentier

Inrap Grand-Ouest/UMR 6273 CRAHAM-Centre Michel de Boüard. Centre archéologique de Basse-Normandie, Bd de l’Europe, 14540 Bourguébus,

Articles du même auteur

Delphine Barbier-Pain

Palynologue, Inrap DST, Cellule CEVE/UMR 6566 CReAAH. Université de Bretagne Sud, Laboratoire Géo-Océan, Campus de Tohannic, Centre Yves-Coppens, CS 60573, 56017 Vannes Cedex,

Marie-France Dietsch-Sellami

Carpologue, Inrap DST, Cellule CEVE/UMR 5059 Centre de bio-archéologie et d’écologie, Université de Montpellier. Centre archéologique de Campagne, Domaine de Campagne, 24260 Le Bugue,

Articles du même auteur

Catherine Dupont

Malacologue, CNRS, UMR 6566 CReAAH. Université de Rennes 1, Campus Beaulieu, Bât. 24-25, 263 Avenue Général-Leclerc, CS 74205, 35042 Rennes Cedex,

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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