Crise économique et relations du travail en Argentine
Texte intégral
1Le pays traverse une période de forte inflation, avec un taux interannuel de plus de 90%. Les réserves de la Banque centrale sont en train de diminuer dangereusement en raison de l’absence de revenus en devises étrangères, ce qui complique le développement productif (essentiellement pour l’importation d’énergie) et l’exécution des échéances de la dette envers le Fonds monétaire international renégociées par le gouvernement actuel. Dans ce contexte, le gouvernement péroniste a nommé à la mi-août un nouveau Ministre de l’économie afin d’engager un ajustement économique qui, en termes budgétaires, impliquera une réduction significative du budget consacré au logement et à l’éducation, à la santé, au développement productif, aux travaux publics ainsi qu’aux transports.
2L’inflation a également affaibli le pouvoir d’achat des retraités, qui sont les grands perdants de la conjoncture actuelle. Depuis le début de l’année, leurs revenus ont augmenté de 29,2% alors que l’inflation était de 36,2% (jusqu’à aujourd’hui). Pour mesurer à quel point la situation est critique, signalons que le panier de base, qui marque le seuil de pauvreté, est fixé à 32 257 pesos. La pension de retraite minimale, qui est perçue par 47% des bénéficiaires, est de 37 525 pesos. Le lancement de la nouvelle formule de calcul des retraites destinée à actualiser les pensions de retraite insuffisantes pour préserver les revenus face à la hausse de l’inflation, a conduit le gouvernement à accorder deux primes extraordinaires aux pensions de retraite les plus basses ; mais cela est loin d’être suffisant pour affronter la crise économique.
3Concernant le salaire minimum, depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuel gouvernement péroniste, le salaire a augmenté (à partir d’avril 2022), de 131%, soit moins que l’augmentation de l’inflation cumulée jusqu’en avril qui s’établit à 150%. Cela implique donc un différentiel de salaire de 19%.
4La plupart des négociations salariales en 2022 se sont déroulées dans un contexte d’inflation croissante et de dévaluation de la monnaie. Selon les données de la dernière enquête sur les salaires en Argentine (Institut national des statistiques et des recensements - INDEC), au cours des huit premiers mois de l’année, l’indice des salaires INDEC a augmenté d’environ 29%, tandis que les prix et les tarifs ont enregistré une hausse de 32,3% au cours de cette même période. De même, si l’on compare d’une année sur l’autre, l’inflation aurait atteint 51,4% en août 2021, tandis que l’augmentation des salaires était légèrement inférieure, à 49,1%, toujours selon l’INDEC.
5Dans ce contexte économique, la négociation collective se concentre donc exclusivement sur l’augmentation des salaires.
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6En ce qui concerne le conflit collectif, compte tenu de la configuration consolidée du marché du travail national (chômage structurel et emploi non déclaré), la gestion du chômage n’est pas entre les mains des syndicats ; elle est assurée essentiellement par des organisations sociales composées de citoyens qui bénéficient des programmes sociaux de l’État1.
7Les revenus provenant de ces programmes sociaux ont perdu en pouvoir d’achat à cause de l’inflation et les organisations sociales ont organisé de nombreuses manifestations publiques pour demander une revalorisation. C’est là d’ailleurs une nouvelle tendance qu’il faut souligner : alors que les syndicats étaient auparavant le moteur traditionnel des conflits sociaux, ils ont été supplantés par les organisations sociales, en raison de la diminution du nombre de travailleurs inscrits et de l’augmentation des emplois non déclarés.
Notes
1 J. P. Mugnolo, « Les relations collectives du travail », RDCTSS, Actualités juridiques internationales, n°2021/3.
Haut de pagePour citer cet article
Référence papier
Juan Pablo Mugnolo, « Crise économique et relations du travail en Argentine », Revue de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 3 | 2022, 244-245.
Référence électronique
Juan Pablo Mugnolo, « Crise économique et relations du travail en Argentine », Revue de droit comparé du travail et de la sécurité sociale [En ligne], 3 | 2022, mis en ligne le 21 octobre 2022, consulté le 09 juillet 2025. URL : http://journals.openedition.org/rdctss/4564 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdctss.4564
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