• 1  J.-J. Durré, « Australie : une loi oblige à briser le secret de la confession », Cathobel, 9 sept. (...)

1Alors que plusieurs pays remettent en cause le secret sacramentel de la confession, par exemple l’Australie1, le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) s’est interrogé longuement sur le rapport qui existe entre la célébration du sacrement de réconciliation et les abus perpétrés dans l’Église.

• 2  Les violences sexuelles dans l’Église catholique : France 1950-2020, rapport de la Commission indé (...)

4C’est dans ses recommandations 8 et 43 que le rapport est apparu le plus audacieux, remettant partiellement en cause le sacrement de confession dans une de ses dimensions essentielles, celle du secret. La recommandation se retrouve ainsi deux fois dans le rapport : « Relayer, de la part des autorités de l’Église, un message clair indiquant aux confesseurs et aux fidèles que le secret de la confession ne peut déroger à l’obligation, prévue par le code pénal et conforme, selon la commission, à l’obligation de droit divin naturel de protection de la vie et de la dignité de la personne, de signaler aux autorités judiciaires et administratives les cas de violences sexuelles infligées à un mineur ou à une personne vulnérable2. »

• 3  Ibid., recommandation n^o 8, p. 51.
• 4  V. can. 983 § 1 : « Le secret sacramentel est inviolable ; c’est pourquoi il est absolument interd (...)

6Certes, la commission ne souhaite pas recommander l’abandon du secret de confession mais rappeler qu’il se limite strictement au temps du sacrement de pénitence3 et qu’il ne s’applique pas dans le cas d’abus sexuel infligé à un mineur ou à une personne vulnérable que le Code pénal oblige à signaler aux autorités compétentes. C’est sur ce point essentiel que se cristallise la tension la plus importante entre le droit de l’Église, qui tient que le sceau sacramentel est inviolable quelle que soit la situation4, et le rapport de la CIASE dont la lecture des normes étatiques françaises ferait obligation au confesseur de dénoncer les délits sexuels commis à l’encontre de mineurs.

• 5  Conférence des évêques de France, « Résolutions votées par les évêques de France en Assemblée plén (...)

8Le 8 novembre 2021, la Conférence des évêques de France rendait publiques les décisions qu’elle prenait en réponse au rapport de la CIASE. Il n’y a pas de réponse directe donnée à la recommandation préconisée sur le secret de la confession si ce n’est la création, parmi les huit décidées, d’une commission « Confession et accompagnement spirituel »5.

• 6  « “Le secret de la confession est supérieur aux lois de la République”, dit M^gr Éric de Moulins-Be (...)
• 7  A. Berthelier, « Secret de la confession : le patron des évêques de France convoqué par Darmanin » (...)

9Médiatiquement, la déclaration de M^gr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, sur le secret de confession, a initié un débat non indemne de tension avec les instances étatiques. Dans une interview donnée le 6 octobre 2021 sur France info, soit le lendemain de la remise du rapport de la CIASE, il répondait ainsi au constat du journaliste Marc Fauvelle6 « ce que vous dites c’est que le secret de la confession aujourd’hui, est plus fort que les lois de la République » : « Le secret de la confession s’impose à nous, et en ce sens-là, il est plus fort que les lois de la République. » La phrase crée la polémique et les instances de l’État interviennent au plus haut niveau, notamment Gérald Darmanin7, ministre de l’Intérieur, également en charge des cultes ou encore le président de la République, Emmanuel Macron. La question est même débattue dans l’enceinte de l’Assemblée nationale lors des questions au Gouvernement.

• 8  Sauf mention contraire, tous les canons cités sont ceux du Code de 1983 actuellement en vigueur.

11Défini au canon 983 §18, pratiquement inchangé par rapport au canon 889 du Code de 1917, le secret sacramentel « interdit au confesseur de trahir en quoi que ce soit un pénitent, par des paroles ou d’une autre manière, et pour quelques causes que ce soit ».

• 9  Grat. Dist. I ; De paenit., c. 89.
• 10  G. Dumeige, Textes doctrinaux du magistère de l’Église sur la foi catholique, Paris, Éditions de l (...)

12Les textes du magistère de l’Église sont constants pour ce qui regarde le caractère absolu du sceau sacramentel. Cette obligation du secret apparaît déjà chez Léon I9 qui maintient le caractère secret de la confession faite au prêtre. Le 4^e concile du Latran (1215) au chapitre 21 confirme avec force et détermination le caractère absolu du secret : « Celui qui ose révéler le péché qui lui a été découvert au tribunal de la pénitence, nous décidons que non seulement il sera déposé de la charge sacerdotale mais encore envoyé dans un monastère rigoureux pour y faire perpétuelle pénitence10. »

• 11  « On suivra toujours les prescriptions des lois civiles en ce qui concerne le fait de déférer les (...)
• 12  Les violences sexuelles…, op. cit., p. 308.

13Même dans le cadre de la collaboration requise avec les instances de l’État et le signalement possible par les instances de l’Église, encouragé notamment par la circulaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 3 mai 2011, la réserve concernant le respect intangible du sceau sacramentel est toujours précisée11. Le rapport de la CIASE ne manque pas d’ailleurs de le relever12.

• 13  François, Motu proprio Vos estis lux mundi : www.vatican.va/content/francesco/fr/motu_proprio/docu (...)
• 14  Les violences sexuelles…, op. cit., p. 456. Ce canon prévoit que certaines catégories de personnes (...)

14Encore récemment, le motu proprio Vos estis lux mundi13 qui oblige les clercs et religieux à dénoncer certaines catégories de délits prend bien le soin de préserver le sceau sacramentel dès l’article 3. Le rapport de la CIASE en prend acte : « Dans l’article 3 du motu proprio Vos estis lux mundi du 7 mai 2019, le pape François a d’ailleurs rappelé le secret de la confession, en conditionnant les signalements à effectuer auprès de la justice étatique au respect du canon 1548 § 214. »

• 15  M. Piacenza, « Note de la Pénitencerie apostolique sur l’importance du for interne et l’inviolabil (...)

15Dans ce texte15, approuvé en forme simple par le Pontife romain, la Pénitencerie insiste sur la configuration du prêtre agissant dans le sacrement in personna Christi capitis et sur le sceau du secret que le confesseur doit défendre usque ad sanguinis effusionem.

• 16  M. Piacenza, op. cit.
• 17  Ce positionnement est ancien, Saint Augustin le synthétisait ainsi au v^e siècle : « Ce que je sais (...)

16Ce secret n’est pas d’abord un devoir de loyauté envers le pénitent, dans la juste confidentialité qui lui est due, mais le respect inviolable de cette actualisation du salut où le prêtre est dépositaire d’une réalité divine qui le dépasse et dont il n’est que le serviteur. « Le prêtre prend connaissance des péchés non ut homo sed ut Deus au point qu’il “ignore” simplement ce qui lui a été dit en confession, parce qu’il ne l’a pas écouté en tant qu’homme, mais précisément au nom de Dieu. Le confesseur pourrait même “jurer”, sans aucun préjudice pour sa conscience, “ne pas savoir” ce qu’il sait seulement en tant que ministre de Dieu16 » dit le texte de la Pénitencerie17.

• 18  “Discorso di Giovanni Paolo II ai membri della penitenzieria apostolica e ai padri penitenzieri de (...)

19Le pape Jean-Paul II rappelait lors d’un discours le 12 mars 1994 aux membres de la Pénitencerie apostolique18 que le prêtre ne peut pas prendre l’initiative de reparler de la confession avec le pénitent « sauf explicite consentement du pénitent et mieux encore si ce consentement n’est pas demandé », c’est-à-dire lorsque ce mouvement vient entièrement du pénitent sans sollicitation.

• 19  M. Piacenza, op. cit.

20La doctrine discute sur le point de savoir si le pénitent peut autoriser le confesseur à dire ce qu’il a appris par le biais de la confession. Tout dépend ici de ce que le sceau sacramentel est censé protéger. Si c’est le pénitent, rien ne l’empêcherait dès lors que la permission du pénitent est expresse, absolument libre et n’a pas été révoquée. S’il s’agit de protéger le sacrement lui-même comme un lieu d’une absolue confidentialité, l’action étant celle de Dieu lui-même envers le pénitent, le secret doit demeurer même avec l’accord du pénitent. Le canon 1550 § 2, 2° apporte un élément supplémentaire important puisqu’il rend incapables de témoigner, lors d’un procès, les prêtres sur « quoi que ce soit19 » qu’ils aient appris à l’occasion de la confession sacramentelle « même si leur pénitent demande qu’ils parlent ». Le « quoi que ce soit » est entendu de manière large, c’est-à-dire non seulement les péchés rapportés mais tous faits ou éléments que le prêtre n’aurait appris qu’à l’occasion de la confession sacramentelle.

• 20  Ibid.

21Le développement du texte de la Pénitencerie à ce sujet rappelle ainsi la norme : « Le sceau ne relève donc pas non plus de la volonté du pénitent, qui une fois célébré le sacrement, n’a pas le pouvoir de relever le confesseur de l’obligation du secret, parce que ce devoir vient directement de Dieu20. »

• 21  V. De Paolis, D. Cito, Le sanzioni nella Chiesa: commento al Codice di diritto canonico, Libro VI, (...)

23Selon la doctrine, le sceau sacramentel s’étend à « tous les péchés aussi bien du pénitent que d’autres personnes, connus par la confession du pénitent, aussi bien mortels que véniels, secrets ou publics, en tant qu’ils sont manifestés en vue de l’absolution, et donc connus du confesseur en vertu du savoir sacramentel21 ».

• 22  Ce canon n’existe pas en droit oriental. Est-ce à dire que le confesseur est en droit de demander (...)

25Rappelons au passage que le confesseur ne doit pas demander le nom des complices ou des personnes mentionnées dans la confession (c. 97922).

• 23  Rappelons au passage que le confesseur, comme le directeur spirituel, ne peut s’exprimer dans un c (...)
• 24  Ce canon trouve notamment sa source dans l’instruction suivante : Congrégation du Saint-Office, « (...)
• 25  Il est possible de se reporter au commentaire suivant du canon : B. Gonçalves, « For interne et au (...)
• 26  Ibid., p. 121.

26Le Code précise par ailleurs qu’il est également interdit au prêtre d’utiliser des connaissances acquises en confession qui portent préjudice au pénitent, et ce, même si tout risque d’indiscrétion est exclu (c. 984, § 1)23. Cela vaut notamment pour tout ce qui regarde les actes de gouvernement d’une autorité qui ne peut jamais utiliser la connaissance des péchés d’une personne acquise à l’occasion d’une confession sacramentelle (c. 984, § 224). C’est pour maintenir la liberté de ceux qui doivent gouverner que le canon 985 pose le principe que tant le maître des novices que son adjoint ou encore un supérieur de séminaire ou d’une institution d’éducation n’entendront pas la confession sacramentelle de leurs sujets à moins que, dit le texte, « dans des cas particuliers, ceux-ci ne le demandent spontanément ». Le canon 630 § 4 applique également la même discipline au supérieur d’un institut de vie consacrée envers ses propres sujets25. Il faut relever que si le sujet de cette autorité est libre de poser une telle demande, le supérieur sollicité est en droit non seulement d’évaluer la nature du « cas particulier » et également d’estimer ne pas avoir à y donner suite. Il en va de la liberté de l’autorité qui gouverne26.

• 27  Congrégation des causes des saints, Sanctorum Mater, art. 101 § 1 : www.vatican.va/roman_curia/con (...)

27Par ailleurs, le canon 1550 § 2, 2° déclare le prêtre incapable de témoigner sur tout ce qu’il a pu apprendre dans le cadre de la confession sacramentelle. Cette incapacité provient du fait que la source de sa connaissance échappe au for externe en considération du canon 983. Ce même canon écarte aussi de manière absolue tout élément qui pourrait être rapporté par un tiers appris à l’occasion de la confession. Cette inaptitude du confesseur se retrouve dans d’autres procès, notamment les enquêtes menées qui regardent la cause des saints27.

• 28  Pour autant, le canon 2369 distinguait des peines différentes selon la personne qui trahissait le (...)

30On relèvera que dans le Code de 1983 le canon 983 § 1 parle de sigillum pour le confesseur, alors que pour l’interprète et les autres tiers, il est seulement question de secretum au canon 983 § 2. Cette nuance, qui n’existait pas au canon 889 du code pio-bénédictin28, veut insister sur la qualité du secret auquel est tenu le confesseur et qui implique pour lui une peine plus grave en cas de trahison.

• 29  Congrégation pour la doctrine de la foi, « Normes sur les délits réservés à la Congrégation pour l (...)

31L’obligation du secret ne touche pas, bien sûr, le pénitent, qui est le maître du secret et pourrait donc parler de ses péchés à l’extérieur. En revanche, la divulgation par un pénitent des conseils que lui a donnés son confesseur ou de ce que celui-ci lui a dit, n’est pas illicite en soi, mais n’est pas nécessairement opportune. Dans certaines circonstances (utilisation des médias, mépris pour le sacrement), une telle divulgation par des moyens de communication peut même constituer un délit sanctionné sévèrement, comme on peut le lire au canon 1386 § 3 et à l’article 4 6° des normes sur les délits réservés à la Congrégation pour la doctrine de la foi29.

• 30  Il y a violation directe dès lors que le pécheur est identifiable, ce qui est le cas si le confess (...)

34La violation du secret par le confesseur est directe lorsqu’il y a révélation à la fois du péché et du pécheur30, même si le pénitent n’est pas connu des personnes à qui le confesseur révèle ce secret. La violation est indirecte en cas d’attitudes ou de révélations de détails et de circonstances qui sont susceptibles de révéler ou de faire suspecter qu’une personne a commis un péché précis. La peine varie selon la nature du délit (c. 1386), la violation directe ou indirecte, et selon la qualité de qui a enfreint l’obligation à laquelle il est assujetti.

• 31  Ces normes ont été actualisées le 11 octobre 2021. V. Congrégation pour la doctrine de la foi, « N (...)

37L’article 4, 5° des normes actuelles du motu proprio Sacramentorum sanctitatis tutela du 30 avril 200131 réserve le délit du canon 1386 § 1, c’est-à-dire la violation directe ou indirecte du sceau sacramentel, à la compétence du Dicastère pour la doctrine de la foi, s’il doit être jugé au for externe. La violation du seul secret reste par contre de la compétence des ordinaires.

• 32  Cela signifie que la commission du délit suffit à ce que la peine prévue s’applique ipso facto.
• 33  Cela signifie que l’autorité compétente doit porter formellement une sentence pour que la peine pr (...)

38La violation directe du sceau sacramentel par le confesseur (si elle est faite en pleine connaissance et délibérément) est punie, en droit canonique latin, de l’excommunication latae sententiae32 réservée au Siège apostolique (c. 1386 § 1). La violation indirecte du sceau sacramentel par le confesseur sera punie selon la gravité du délit d’une peine ferendae sententiae33 (c. 1386 § 1).

• 34  CIASE, Annexe 11, « Liste des auditions des réunions plénières » : www.ciase.fr/medias/Ciase-Rappo (...)
• 35  M. de Fournas, « Pédocriminalité dans l’Église : que dit la loi française à propos du secret de la (...)
• 36  On pourra se reporter utilement à plusieurs ouvrages et articles à ce sujet, notamment B. Du Puy-M (...)

40Maître Edmond-Claude Frety, auditionné par la CIASE34 en sa qualité notamment de membre de l’association des victimes Parler et revivre, déclare qu’« il n’y a pas, dans la loi pénale, un texte légal disant expressément que les ministres du culte ont un secret professionnel inviolable et absolu35 ». Cette affirmation est exacte, mais se contenter de ce simple constat ne serait pas suffisant pour rendre compte de la réalité juridique française à ce sujet36.

• 37  Ce sont les articles 226-13 et 226-14 de l’actuel Code pénal qui lui ont succédé.

41L’article 378 de l’ancien Code pénal, abrogé par la loi n^o 92-1336 du 16 décembre 199237, définissait ainsi les personnes tenues au secret professionnel : « Les médecins, chirurgiens et autres officiers de santé, ainsi que les pharmaciens, les sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou profession ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu’on leur confie […] ».

• 38  « Secret professionnel des avocats : faut-il une nouvelle loi pour renforcer sa protection ? », Vi (...)

44La jurisprudence a alors inclus les ministres du culte et également d’autres professions comme celle des avocats38.

• 39  Cass. crim., 30 nov. 1810 : S. 1811, 1, p. 49.

45En droit français, les ministres des cultes sont tenus au secret professionnel selon une jurisprudence déjà ancienne et constante de la Cour de cassation initiée par un arrêt du 30 novembre 181039, soit quelques mois à peine après la promulgation du Code pénal le 3 juin 1810.

• 40  Cass. crim., 4 déc. 1891 : S. 1892, 1, p. 473.
• 41  T. corr. Bordeaux, 27 avr. 1977 : Gaz. Pal. 1977, 1, p. 506. L’arrêt précise que tout ce qui a été (...)
• 42  TGI Basse Terre, 14 oct. 1985 : Gaz Pal. 1986, 1, p. 12 : « Le secret du ministre du culte ne s’at (...)
• 43  CA Montpellier, 19 oct. 1999 : JurisData n^o 1999-113307. L’arrêt de la cour rappelle au passage qu (...)

46S’il concernait au départ uniquement le secret de confession, le secret fut étendu finalement à toutes connaissances acquises dans le cadre du ministère, comme on peut le lire par exemple dans un arrêt de la Cour de cassation du 4 décembre 189140. Même après la séparation des Églises et de l’État, les tribunaux de la République ont maintenu cette obligation en la délimitant précisément, comme en témoigne une décision du tribunal correctionnel de Bordeaux du 27 avril 197741 ou encore un arrêt du tribunal de grande instance de Basse Terre du 14 octobre 198542 (le prêtre choisi comme médiateur n’est pas tenu au secret professionnel). La cour d’appel de Montpellier, dans un arrêt du 19 octobre 199943, applique également l’obligation du secret professionnel aux « bergers spirituels » des témoins de Jéhovah.

• 44  « La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit (...)

47La jurisprudence actuelle, malgré la rédaction nouvelle de l’actuel article 226-1344 qui sanctionne celui qui manque au devoir de confidentialité auquel il est astreint, a repris à son compte la jurisprudence selon laquelle les ministres des divers cultes sont astreints au secret professionnel, aussi bien pour les faits appris dans le cadre étroit de la confession, que pour ceux venus à leur connaissance en raison même de leur qualité de ministre du culte (à l’exclusion de toute autre qualité, par exemple celle d’ami, de parent, ou de médiateur).

• 45  Cass. crim., 17 déc. 2002 : Bull. n^o 231 p. 845.

48Ainsi, la chambre criminelle de la Cour de cassation a encore rappelé en 2002, « l’obligation imposée aux ministres du culte de garder le secret des faits dont ils ont connaissance dans l’exercice de leur ministère45 ».

• 46  Gazette du Palais, 7-8 nov. 2001, p. 47, note A. Damien.

49Dans une affaire devenue célèbre, dite affaire Pican du nom de l’évêque mis en cause, le tribunal correctionnel de Caen, dans sa sentence du 4 septembre 200146, a introduit une nuance concernant les conditions dans lesquelles une confidence est effectivement faite au ministre du culte ou est parvenue jusqu’à lui.

• 47  Circulaire relative au secret professionnel des ministres du culte et aux perquisitions et saisies (...)

52Comme la sentence du tribunal de Caen n’a pas été frappée de recours, cette analyse n’a pas été confirmée ou infirmée par une juridiction supérieure. Il s’agit donc d’une décision d’espèce qui indique clairement que « les conditions dans lesquelles un ministre du culte a appris une information ne sont pas indifférentes à la qualification de “secret professionnel” de celle-ci, et, par voie de conséquence, à l’étendue de l’obligation de révélation du dit ministre du culte », comme l’évoque la circulaire relative au secret professionnel des ministres du culte et aux perquisitions et saisies dans les lieux de culte du 11 août 200447.

• 48  Directives pour le traitement des cas d’abus sexuels commis par des clercs à l’égard de mineurs : (...)

53Aujourd’hui, en l’état, s’il est certain que les faits appris à l’occasion de la célébration du sacrement de pénitence sont couverts par le secret professionnel, ce n’est certainement pas le cas pour ceux découverts à l’occasion d’une enquête canonique48 ou de toute autre investigation.

• 49  Les violences sexuelles…, op. cit., § 0092, p. 48 ; § 1105, p. 393 ; § 1326, p. 457.

58L’article 223-6 alinéa 2 du Code pénal est cité trois fois49 dans le rapport de la CIASE. Il est ainsi rédigé :

• 51  Cela exclut par ex. l’utilisation de cet article pour sanctionner une personne ne s’étant pas oppo (...)
• 52  L’élément moral de l’infraction comporte donc la connaissance du péril et la décision de s’absteni (...)
• 53  C’est ainsi que la responsabilité d’une directrice diocésaine de l’enseignement catholique a été r (...)
• 54  C. Roca, « Secret de la confession, secret professionnel et atteintes sexuelles sur mineurs », Pet (...)

60Dans le premier cas, appelé aussi omission de porter secours, la norme réclame que le comportement contre lequel il convient d’agir soit une infraction51 (délit ou crime), que ce comportement soit effectivement connu et qu’il soit effectivement possible d’agir52, non seulement au moment de la commission de l’infraction, mais encore en amont s’il y a des motifs sérieux de croire que l’infraction sera commise53. L’intervention personnelle doit être volontaire et ne pas présenter de risque pour la personne tenue par l’obligation ou pour les tiers. À ce sujet, la doctrine considère que seul un risque équivalent au danger encouru par la victime justifie de ne pas agir54.

• 55  Il faut relever que le péril n’est pas le danger. Tout péril est un danger mais tout danger n’est (...)
• 56  Pour mémoire, un délit formel est celui qui est constitué indépendamment du résultat. C’est aussi (...)
• 57  V. par ex. Cass. crim., 11 avr. 1964, n^o 63-92.812 : www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007 (...)

61Concernant la non-assistance à personne en péril55, il s’agit d’un délit formel56. La jurisprudence de la Cour de cassation réclame que le péril soit grave, imminent et constant57 apprécié in concreto au moment où la personne qui doit porter secours en a connaissance. Comme dans le premier cas, l’intervention ne doit pas présenter de risque pour la personne tenue par l’obligation ou pour les tiers. Le mode d’action peut être personnel ou par un tiers, comme appeler les secours, voire le cumul de ces deux moyens selon la situation. L’action doit non seulement exister mais également être efficace au regard des moyens dont dispose celui qui doit agir. C’est la connaissance du péril et le refus d’intervenir qui constituent l’élément moral du délit.

• 58  Précit. note 47.

67La circulaire du 11 août 200458 de la Chancellerie intervient dans le cadre compliqué de la perquisition de plusieurs officialités. Pour éviter les difficultés rencontrées et les litiges inutiles, la Chancellerie la rédige afin de donner des repères concernant les saisies à opérer dans les lieux de culte et en profite également pour préciser la question relative au secret professionnel des ministres du culte. La circulaire synthétise la jurisprudence sur la question et arrive à la conclusion qu’« il apparaît donc que l’absence de dénonciation par une personne tenue au secret professionnel de mauvais traitements ou de privation infligés à des mineurs de 15 ans ou à une personne vulnérable ne puisse être sanctionnée pénalement, et que, là encore, le signalement de tels faits aux autorités soit une simple faculté, ouverte par l’article 226-14 du Code pénal ».