Les abus sexuels dans l’Église catholique allemande : perspectives historiques et résultats
Résumés
Le scandale des abus sexuels sur les enfants concerne l’Église catholique dans le monde entier et donc également l’Église allemande. Plusieurs rapports montrent à quel point les agressions par des clercs, mais aussi la dissimulation de ces actes par les dirigeants de l’Église, étaient répandues en Allemagne. Après une grande étude nationale publiée en 2018, plusieurs évêques ont commandé des études relatives à leurs diocèses. Après un aperçu des recherches sur ces questions, nous présentons les principaux résultats d’une étude sur l’histoire des abus sexuels au sein du diocèse de Münster, présentée au public en juin 2022. La question est posée de savoir dans quelle mesure les historiens peuvent contribuer à mettre en lumière les conditions structurelles des actes d’abus et de leur dissimulation.
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- 1 Th. Großbölting, Die schuldigen Hirten. Geschichte des sexuellen Missbrauchs in der katholischen K (...)
- 2 A. Liedhegener, Ch. Kösters, « Katholisch sein, katholisch bleiben? Wie Glauben und Kirche in Deut (...)
1Le scandale des abus sexuels ébranle l’Église catholique dans le monde entier et la communauté des fidèles en Allemagne n’y échappe pas. Depuis plus de dix ans, le sujet des « bergers coupables1 » vient inlassablement hanter les consciences catholiques. Pour certains observateurs, il s’agit même de la plus grande crise depuis la Réforme. Le nombre effarant de départs de membres de l’Église leur donne d’ailleurs raison : en 2021, 360 000 personnes ont officiellement quitté l’Église catholique, soit un tiers de plus que le record précédent, en 2019. Pour la première fois, les membres des Églises protestante et catholique se retrouvent donc en minorité en Allemagne2.
- 3 H. Dreßing et al., Sexueller Missbrauch an Minderjährigen durch katholische Priester, Diakone und (...)
- 4 B. Frings et al., Macht und sexueller Missbrauch in der katholischen Kirche. Betroffene, Beschuldi (...)
2Dans un premier temps, les évêques et les autorités ecclésiastiques ont tenté de minimiser le nombre de cas d’abus. Mais de nombreuses études aujourd’hui disponibles montrent à quel point les comportements abusifs de membres du clergé étaient répandus dans les paroisses. Citons tout d’abord l’étude quantitative interdiocésaine, de grande envergure, menée en 2018 par un groupe de recherche dirigé par l’expert psychiatre Harald Dreßing et baptisée « étude MHG3 ». Des études concernant des diocèses spécifiques ont depuis été publiées, commandées par les évêques locaux et rédigées pour la plupart par des cabinets d’avocats. Depuis peu, les diocèses allemands confient des études locales non seulement à des juristes, mais aussi à des historiens issus d’universités publiques, qu’ils soient généralistes ou experts en histoire de l’Église jouissant d’une formation théologique. Un premier travail de recherche à caractère résolument historique, portant sur l’histoire des abus sexuels commis par des membres du clergé dans le diocèse de Münster, a été publié en juin 20224. La démarche méthodologique et les résultats de cette étude, à laquelle l’auteur de cet article a participé de façon significative, seront présentés ci-après. Auparavant, il convient de retracer les étapes importantes de l’histoire des scandales et des réponses qui y ont été apportées en Allemagne.
1. Le scandale des abus sexuels et l’Église catholique en Allemagne
- 5 Th. Großbölting, op. cit., p. 57-67 ; V. aussi D. Reisinger, Ch. Röhl, Nur die Wahrheit rettet. De (...)
- 6 Pour un aperçu de l’histoire de l’enquête internationale, V. D. Cahill, P. Wilkinson, Child Sexual (...)
3Le scandale des abus qui secoue l’Église catholique dans le monde entier se profile dès les années 19805. À l’époque, les premières enquêtes menées aux États-Unis rapportaient de nombreux cas d’abus sur mineurs commis par des prêtres catholiques, sans toutefois que la Conférence des évêques américaine ou le Vatican se penche de plus près sur ce problème. Dans les années 1990, l’attention de la communauté internationale se concentrait sur l’Irlande, où le soutien de l’État à la dissimulation des abus entraîna la chute de la coalition gouvernementale en 1994. Cinq ans plus tard, l’État irlandais retirait à l’Église son pouvoir d’investigation et mettait en place une commission gouvernementale, qui allait recueillir pas moins de 1 800 témoignages au cours des neuf années suivantes. D’autres études concernant différents diocèses virent le jour par la suite. En 2002, le Boston Globe publia une série d’articles traitant de la dissimulation des abus sexuels sur mineurs par l’archevêque de Boston. C’est de cette affaire que traite brillamment le film Spotlight, sorti en salles en 2015 et lauréat de deux Oscars6.
- 7 Entretien avec le cardinal Lehmann : « Der Papst hat das Heft in der Hand », Der Spiegel, 23.06.20 (...)
4Et en Allemagne ? Là aussi, des cas isolés avaient été relayés par les médias dans les années 1990, mais sans grand écho. Ce n’est qu’après les révélations du Boston Globe que les questions se sont faites plus pressantes. Dans un entretien accordé au Spiegel, le président de la Conférence épiscopale allemande de l’époque, le cardinal Karl Lehmann, évêque de Mayence, soulignait les différences quantitatives et qualitatives entre les États-Unis et l’Allemagne, où il n’y avait tout au plus que des cas « isolés ». Le constat posé aux États-Unis ne pouvait être transposé en Allemagne : « Pourquoi vouloir imiter les Américains, alors que la situation est différente ?7 » Voilà comment l’Église catholique allemande a initialement géré la crise : lorsque des questions étaient soulevées, on verrouillait le débat pour calmer les esprits.
- 8 « So entschuldigt sich der Rektor für den Missbrauch », Die Welt, 28.01.2010 : www.welt.de/vermisc (...)
- 9 U. Raue, Bericht über Fälle des sexuellen Missbrauchs an Schulen und anderen Einrichtungen des Jes (...)
- 10 « Bistümer melden Dutzende Verdachtsfälle auf Kindesmissbrauch », Der Spiegel, 06.02.2010 : www.sp (...)
- 11 M. Katsch, Damit es aufhört. Vom befreienden Kampf der Opfer sexueller Gewalt in der Kirche, Berli (...)
5La banalisation et la minimisation de la part de l’Église en Allemagne n’ont finalement pris fin qu’avec l’intervention, début 2010, du directeur de l’époque du Collège Canisius de Berlin, le père jésuite Klaus Mertes. Peu de temps auparavant, d’anciens élèves étaient venus le trouver pour lui faire part d’abus qu’ils avaient subis dans ce collège jésuite réputé au cours des années 1970 et 1980. Le recteur accorda foi à ces témoignages et rompit le silence qui prévalait alors au sein de l’Église. Dans une circulaire adressée à tous les anciens élèves des années concernées et également diffusée dans la presse, il pria d’autres victimes éventuelles de se manifester8. En l’espace de quelques mois, l’ordre reçut plus de 200 déclarations d’abus commis dans des établissements dirigés par les jésuites9. D’autres informations incriminaient les paroisses : une enquête menée début février 2010 par le magazine Der Spiegel auprès des 27 diocèses allemands révélait que plus de 90 clercs et laïcs y avaient été soupçonnés d’abus depuis 199510. Cette fois, l’opinion publique prit la mesure de la situation et réagit en conséquence. Le gouvernement fédéral organisa une table ronde réunissant des représentants du monde politique, des Églises et des associations, ainsi que des experts et des juristes, afin de développer les possibilités d’enquête et de prévention des abus sexuels, non seulement au sein de l’Église, mais aussi dans les institutions publiques et les familles en général. En réponse, les victimes, s’y jugeant sous-représentées, initièrent de leur côté une « table carrée », comme elles l’appelèrent, afin de pouvoir mieux défendre leurs intérêts. Ce groupe allait trouver un porte-parole engagé, ne craignant ni les médias ni les représentants de l’Église et de l’État, en la personne de Matthias Katsch, l’une des victimes qui avaient pris contact avec Klaus Mertes. Grâce à l’action de Katsch et d’autres victimes, le travail de mémoire se développa considérablement et se poursuit aujourd’hui11.
- 12 N. Leygraf et al., Sexuelle Übergriffe durch katholische Geistliche in Deutschland. Eine Analyse f (...)
- 13 K. Jansen, « Leygraf: “Pädophilie bei Priestern die Ausnahme” », dw.com, 08.12.2012 : learngerman. (...)
6Après s’être contentée de déclarations lénifiantes et de mesures a minima, l’Église se décida à commander une première étude scientifique, sous la direction, notamment, du psychiatre Norbert Leygraf, qui avait déjà effectué des expertises pour le compte de l’Église12. Après deux ans d’enquête et l’analyse de 78 rapports d’expertises judiciaires concernant des prêtres coupables d’abus, Leygraf arriva à la conclusion suivante : les cas étudiés relevaient dans l’ensemble de « délits relativement mineurs », sans motifs systémiques, et les prêtres avaient commis en moyenne moins d’actes que l’ensemble de la population masculine13. Telle était donc la conclusion des recherches en 2012, du moins celle de l’un des plus célèbres experts psychiatres d’Allemagne. Il est clair aujourd’hui, dix ans plus tard, que cette conclusion ne tient plus.
- 14 G. di Lorenzo, « Christian Pfeiffer: “Ich sagte dem Bischof: Wir lassen uns nicht kaufen” », Die Z (...)
7Une autre étude victimologique, commandée parallèlement à l’étude Leygraf et placée sous la supervision du directeur du Centre de recherche criminologique de Basse-Saxe, Christian Pfeiffer, fut annulée par la Conférence des évêques quelques semaines après la présentation du rapport Leygraf, au motif que la relation de confiance entre le représentant chargé des abus au sein de la Conférence des évêques, l’évêque de Trèves Stephan Ackermann, et le chef du projet avait été rompue. Pfeiffer affirmera plus tard que l’Église avait exprimé son intention de contrôler et de censurer les résultats, ce qu’il ne pouvait accepter pour des raisons scientifiques. À ce jour, les motifs ayant mené à l’annulation de l’étude n’ont pas encore été totalement clarifiés14.
- 15 V. l’étude MHG, op. cit. note 3.
8Après ce fiasco, la Conférence des évêques lança un nouveau grand projet de recherche interdiocésain, pour lequel un consortium formé d’un institut de recherche de Mannheim et d’instituts universitaires de Gießen et de Heidelberg fut créé. L’étude MHG (d’après les initiales des trois sites de recherche) présenta finalement ses résultats en 2018. Avec une conclusion bien différente de celle de 2012 : les chercheurs avaient identifié pas moins de 3 677 victimes d’abus sexuels sur mineurs et 1 670 clercs (prêtres, religieux et diacres) incriminés, soit environ 4,4 % de l’ensemble des dossiers personnels analysés15.
- 16 V. notamment l’avis de la Commission indépendante chargée d’enquêter sur les abus sexuels sur mine (...)
9Les résultats de l’étude MHG jetèrent un énorme pavé dans la mare en révélant d’un coup toute l’ampleur du scandale des abus. Plus personne ne pouvait désormais parler de cas isolés. Pourtant, cette étude n’était que partiellement satisfaisante : d’une part, les chercheurs n’avaient pas eux-mêmes accès aux dossiers personnels, mais dépendaient de la collaboration des archivistes de l’Église et de l’administration ecclésiastique. D’autre part, l’étude MHG s’était concentrée sur les victimes, les accusés et les actes ; la question de la dissimulation et de l’attitude de l’Église envers les coupables ne fut traitée que sur quelques pages et de manière purement quantitative. Le comportement des évêques et des responsables restait à peine effleuré16.
- 17 Les différentes étapes de la « crise de confiance » que traverse actuellement l’archevêché de Colo (...)
- 18 U. Wastl, M. Pusch, N. Gladstein, Sexueller Missbrauch Minderjähriger und erwachsener Schutzbefohl (...)
- 19 B. Gercke et al., Pflichtverletzungen von Diözesanverantwortlichen des Erzbistums Köln im Umgang m (...)
10Après la publication de l’étude MHG, l’opinion publique fit pression pour poursuivre l’enquête en ce sens. Certains diocèses confièrent alors à des cabinets d’avocats la rédaction d’expertises dans lesquelles le comportement des responsables par rapport aux victimes et aux faits devait être examiné et évalué. Mais comme le montrent les événements de ces dernières années dans l’archevêché de Cologne, qui fut l’un des premiers diocèses d’Allemagne à s’engager dans cette voie, l’archevêque alors en fonction, Rainer Maria Woelki, n’était pas prêt à affronter publiquement les résultats de cette expertise. En mars 2020, il en refusa même la publication, au motif de prétendues réserves concernant la liberté d’expression, et fit appel à une agence professionnelle de relations publiques pour tâcher d’en convaincre les victimes de son diocèse17. D’autres diocèses, comme ceux de Berlin, Aix-la-Chapelle et Munich, qui avaient également mandaté des cabinets d’avocats (dont celui de Cologne dont l’expertise n’a pas été publiée), ont écarté ce type de réserves ; les rapports se trouvent désormais librement accessibles18. Le diocèse de Cologne a finalement mené à bien sa démarche et rendu public un rapport, rédigé toutefois par un autre cabinet que celui mandaté à l’origine19.
- 20 C’est actuellement le cas pour les diocèses de Münster, Paderborn, Osnabrück, Trèves, Würzburg et (...)
11Pourtant, les expertises juridiques ne satisfaisaient toujours pas aux souhaits de transparence et de traçabilité des victimes et des membres de l’Église, d’autant qu’elles étaient souvent rédigées dans un jargon technique qui privilégiait les subtilités de l’analyse juridique à l’évaluation morale. La plupart du temps, elles manquaient de finesse, sans parler d’une contextualisation historique insuffisante. Plusieurs diocèses décidèrent alors de confier l’analyse scientifique des abus sexuels commis au sein de l’Église à des équipes d’historiens, seuls ou en collaboration avec des spécialistes d’autres disciplines20.
2. Que peut apporter l’approche historique ?
- 21 V. à ce sujet et sur les développements suivants : K. Große Kracht, « Die Last der Geschichte. Was (...)
12Les recherches des psychologues, pédagogues et sexologues sont importantes pour mieux comprendre le phénomène et les conséquences des abus sexuels sur mineurs et pour pouvoir prendre les mesures de prévention qui s’imposent. Le travail des juristes est également essentiel pour arrêter les auteurs des faits et ceux qui les dissimulent et pour pouvoir en attribuer concrètement la responsabilité. Pour leur part, les spécialistes en sociologie, en anthropologie sociale et en histoire peuvent aider à examiner les systèmes sociaux et les interactions au sein desquels les abus ont été commis et parfois cachés, afin d’identifier les structures qui les ont facilités et favorisés, surtout lorsque les abus remontent à plusieurs décennies21.
- 22 M. Pohlig, « Vom Besonderen zum Allgemeinen? Die Fallstudie als geschichtstheoretisches Problem », (...)
- 23 C. Geertz, « Dichte Beschreibung. Bemerkungen zu einer deutenden Theorie von Kultur », in C. Geert (...)
13La plupart du temps, une analyse historique commence avec un cas particulier. En effet, contrairement aux sciences sociales, qui travaillent surtout de manière systématique et globalisante, l’histoire procède de manière idiographique et descriptive, c’est-à-dire qu’elle reconstruit l’enchaînement de faits individuels22. Il est donc logique de commencer la recherche historique concernant les abus sexuels commis sur mineurs par des membres du clergé catholique par l’analyse de cas concrets. L’objectif de ce premier niveau d’étude historique est de « décrire le plus précisément possible » le déroulement des événements, de la préparation de l’acte jusqu’à sa dissimulation23.
- 24 V. à ce sujet et dans d’autres contextes : J. Brunner, D. Stahl, Recht auf Wahrheit. Zur Genese ei (...)
14Pour les victimes, ces reconstitutions concrètes de l’histoire de leurs cas respectifs sont d’une importance non négligeable. Alors qu’elles disposent souvent de connaissances rudimentaires sur leur agresseur et sur la réaction de l’Église à son égard, la reconstitution des cas à partir des dossiers favorise l’autonomisation et la libération de la parole. C’est en sachant qu’il y a d’autres victimes, que certains ont détourné le regard, qu’ils ne sont pas intervenus sciemment et que les responsables ecclésiastiques ont protégé les agresseurs et en ayant connaissance de toutes ces informations et de bien d’autres encore, que les victimes peuvent exprimer plus concrètement leurs revendications et leurs intérêts. En outre, l’asymétrie habituelle, du point de vue de l’information, entre les victimes et ceux qui ont accès aux dossiers tend à se combler, de sorte que les victimes peuvent affronter l’institution responsable sur un pied d’égalité24.
15Les historiens peuvent apporter une contribution importante à cet égard. Ils sont experts dans la gestion de volumineux dossiers, dans le traitement d’informations fragmentaires et dans la reconstitution d’une image cohérente du passé, même si cette image comporte des lacunes. Les historiens savent comment extraire des connaissances fiables des dossiers tout en étant conscients que leur contenu ne reflète pas la réalité de manière fiable et exhaustive. Ils ont développé et mis en pratique des méthodes d’interprétation et de critique des sources qui permettent de lire entre les lignes des documents et d’en extraire les informations que le rédacteur n’avait peut-être pas l’intention d’écrire. Ils savent surtout que ces dossiers ne sont pas des documents exclusivement individuels ; ils sont souvent le produit de structures de communication dont on a hérité. En effet, ce qu’un vicaire général ou un chef du personnel écrit à partir des déclarations d’une victime ne correspond pas forcément à ce que celle-ci a effectivement rapporté. La critique des sources n’est donc pas seulement une méthode, c’est aussi et surtout une attitude critique : la naïveté à l’égard des sources est, au mieux, un manquement professionnel.
- 25 V. à ce sujet les travaux du groupe de recherche financé par la Deutsche Forschungsgemeinschaft : (...)
- 26 M. Wijlens, « Entwicklungen im kanonischen Recht zwischen 1983 und 2020 » et J. M. Fegert, « Verän (...)
16À partir des descriptions de cas individuels, il est possible de produire des analyses et des synthèses plus globales. Elles permettent de comprendre de manière empirique les relations qui régissent une organisation, un groupe d’individus ou une institution d’envergure. Ces grandes unités sociales doivent toujours être considérées comme variables d’un point de vue historique, et le contexte spécifique des actions doit être pris en compte. Ainsi, si l’on se réfère à notre cas, « être catholique » est un concept qui diffère considérablement entre les années 1950 et 1980 en Allemagne25. À la campagne, le curé avait un autre statut qu’à la ville ; il en va de même entre les régions traditionnellement catholiques et les bastions syndicaux. Les règles de conduite collective et les « limites du dicible » évoluent dans l’espace mais aussi au fil du temps. Le débat sur les abus sexuels sur mineurs au sein de l’Église catholique ne doit donc plus être mené de manière anhistorique. Ainsi, le droit national tout comme le droit ecclésiastique ont considérablement évolué au cours de la seconde moitié du xxe siècle, de même que les connaissances médicales concernant les dommages à long terme des abus sexuels sur mineurs26.
- 27 R. Bucher, Kirchenbildung in der Moderne. Eine Untersuchung der Konstitutionsprinzipien der deutsc (...)
17Souvent, cette affirmation (« tout était différent à l’époque ») est utilisée à des fins peu glorieuses, pour relativiser la gravité d’un acte et en innocenter ses auteurs et ses dissimulateurs. Ici aussi, l’intervention des historiens est importante pour mettre en évidence non seulement les évolutions, mais aussi les continuités et la « longue durée » (Fernand Braudel) des logiques d’action et des rapports de force institutionnels. Ceci vaut en particulier pour l’histoire récente de l’Église catholique, car elle prétend s’inscrire dans la « longue durée » sans suivre chaque soubresaut de « l’esprit du temps ». L’Église se considère plutôt comme une sorte d’institution supra-historique, un corpus mysticum et l’interprète perpétuelle du depositum fidei, c’est-à-dire la gardienne de la vérité éternelle. Or, c’est précisément ce « dispositif de durée27 » auto-attribué qui exclut d’avance toute critique et changement profond, de sorte que la voie qu’elle emprunte n’est jamais remise en question, même en cas de doutes tenaces. Célibat des prêtres, exclusion des femmes du sacerdoce, absence de démocratie dans l’Église : tout cela est justifié par l’autorité de la tradition comme source de vérité. En revanche, on ne voit pas assez que l’autorité de la tradition peut conduire à la dissimulation des abus de pouvoir.
- 28 Concernant le terme de « milieu catholique », V. A. Henkelmann, « Vom Milieu zur geteilten Geschic (...)
18L’approche historique dans l’étude sur les abus dépasse donc l’expertise purement juridique sur un point décisif : là où cette dernière cherche à attribuer de manière concrète des décisions et des actes à des individus afin de leur demander des comptes (ce qui, dans le cadre d’une enquête sur les abus sexuels au sein de l’Église catholique, peut s’avérer extrêmement difficile, voire impossible), les chercheurs en sciences sociales et en histoire s’intéressent quant à eux aux aspects structurels à long terme qui relient les différents actes entre eux, aux mentalités communes qui lient les groupes d’acteurs et aux rapports de force sociaux qui entourent une situation d’action concrète. En effet, au sein de l’Église catholique, les trois groupes d’acteurs, à savoir les auteurs des abus, leurs victimes et ceux qui les dissimulent, se trouvent souvent dans un espace social commun de valeurs et de croyances partagées, par exemple en ce qui concerne les différents rôles des laïcs et des prêtres, des hommes et des femmes, des adultes et des enfants, et partagent les mêmes tabous, notamment en matière de sexualité. Ils vivent dans un même milieu catholique, dont il n’était guère possible de s’échapper au cours des dernières décennies28. Outre la restitution précise des informations contenues dans les dossiers, la mise en évidence de ces effets de structures liés au milieu, c’est-à-dire les rapports de force respectifs et les mentalités communes qui les soutiennent, est la principale contribution que la science historique peut apporter à l’analyse scientifique des abus sexuels commis au sein de l’Église catholique, mais peut-être aussi au-delà.
3. Pouvoir et abus au sein du diocèse de Münster : les résultats de l’enquête
- 29 Concernant l’histoire moderne de l’évêché, V. W. Damberg, Moderne und Milieu, 1802-1998. Geschicht (...)
19En septembre 2019, le diocèse de Münster, l’un des plus grands d’Allemagne29, a chargé l’Université de Münster de mener une enquête historique sur les abus sexuels sur mineurs commis par des membres du clergé du diocèse. La période analysée devait s’étendre de la fin de la seconde guerre mondiale à nos jours. L’évêque en fonction, Felix Genn, s’était déclaré prêt à mettre à la disposition des chercheurs, sans la moindre restriction, toutes les archives du diocèse, les archives secrètes de l’évêché et les dossiers d’administration courante (notamment ceux du service du personnel, du bureau de l’évêque et du service d’intervention). En outre, l’évêché s’engageait à ne pas intervenir dans les recherches et à laisser une entière liberté de publication aux chercheurs. À ce jour, ces promesses ont été tenues.
- 30 B. Frings et al., op. cit. note 4 ; Th. Großbölting, op. cit. note 1.
20Au cours des deux ans et demi qui ont suivi, le groupe de recherche de l’Université de Münster, composé de quatre historiens et d’une spécialiste d’anthropologie sociale, a étudié, selon ses propres critères et priorités, la quantité et la nature des abus sexuels sur mineurs commis par des prêtres du diocèse et leur dissimulation par les responsables ecclésiastiques. Plus d’un millier de dossiers ont été examinés et de nombreux entretiens ont été menés avec des victimes, des témoins de l’époque et des responsables ecclésiastiques, dont des évêques, des évêques auxiliaires et des membres de différentes commissions ecclésiastiques. À l’été 2021, le groupe de recherche a présenté ses conclusions dans deux ouvrages, d’abord dans un cadre privé aux victimes, puis au grand public le lendemain30.
- 31 « Macht und Missbrauch in der katholischen Kirche. Betroffene, Beschuldigte und Vertuscher im Bist (...)
21Dans la première partie de l’étude, intitulée « Pouvoir et abus au sein de l’Église catholique. Victimes, accusés et dissimulateurs dans le diocèse de Münster depuis 194531 », nous présentons douze cas particuliers de prêtres accusés d’abus sexuels sur mineurs. Ces cas, décrits de la manière la plus détaillée possible, reviennent sur l’origine et le parcours des accusés, leurs actes et les réactions de leurs supérieurs hiérarchiques, mais aussi de leurs complices dans les paroisses locales. S’ils couvrent chronologiquement l’ensemble de la période analysée et géographiquement toutes les régions du diocèse, ils ne peuvent toutefois être qualifiés de « représentatifs » au sens strict du terme. Néanmoins, la présentation chronologique des cas permet de constater à quel point l’histoire du diocèse est gangrénée par ces abus dans la deuxième moitié du xxe siècle. Ainsi, chaque évêque du diocèse de Münster a été confronté à plusieurs cas au cours de ses fonctions. L’action du diocèse a toujours été dictée par l’évitement des scandales et la protection des institutions ecclésiastiques. La plupart du temps, les coupables ont simplement été déplacés vers un autre diocèse.
22Prenons simplement quelques exemples : l’aumônier Kurt-Josef Wielewski (1929-1985) a abusé d’au moins 13 garçons dans le cadre de l’animation de groupes de jeunes paroissiens à la fin des années 1950, ce dont les responsables successifs de l’évêché ont eu connaissance. Après la plainte contre l’aumônier du père de l’un des garçons, les responsables de l’évêché permirent à ce dernier, avec le soutien de toute l’Église, de fuir pendant plusieurs années à travers l’Europe jusqu’en Amérique latine. Ce n’est qu’en 1969 qu’il fut arrêté et condamné, tout en étant à nouveau affecté à une paroisse après sa sortie de prison. Selon les archives, au moins 19 garçons ont subi des abus de la part du prêtre Franz N. (1928-2017) entre la fin des années 1950 et le milieu des années 1980. Depuis 1971 au moins, le diocèse avait connaissance de ces faits, auxquels il a réagi en se contentant de déplacer son auteur, sans prendre de mesure de contrôle spécifique, de sorte que N. a continué à abuser d’enfants à plusieurs reprises au cours des années suivantes. Le cas du prêtre Heinz Pottbäcker (1937-2007), rendu public en 1967 à la suite d’une enquête du parquet, illustre également l’incapacité de l’évêché à arrêter un pédophile multirécidiviste pendant des décennies. Pottbäcker a été déplacé à plusieurs reprises, avec pour seule conséquence ses rencontres avec de nouvelles victimes. Ce n’est qu’après l’échec de plusieurs thérapies qu’il s’est vu privé de ses fonctions ecclésiastiques. Dans le cas de Helmut Behrens (1932-2016), les responsables du diocèse ont également réagi trop tard. Depuis 1980 au moins, ce prêtre a commis des abus sexuels et de nombreuses agressions sur des femmes et des mineurs de sexe masculin, toujours au su des responsables ecclésiastiques. Ce n’est qu’après plusieurs déplacements et cures que l’évêque de Münster de l’époque, Reinhard Lettmann, décida de démettre Behrens de ses fonctions ecclésiastiques. Lettmann se montra par la suite prêt à accorder une « seconde chance » à Münster à des prêtres d’autres diocèses, comme dans le cas d’un ecclésiastique toujours en vie, que nous appellerons le prêtre M.*, qui récidiva ensuite dans les années 1990. Cette série d’exemples s’allonge bien sûr au-delà des douze cas que nous avons décrits en détail.
23La deuxième partie de l’étude présente les résultats de notre évaluation quantitative. Nous avons évalué à 196 le nombre de clercs mis en cause pour la période analysée : 183 prêtres, 12 religieux (sous la responsabilité personnelle de l’évêque) ainsi qu’un diacre permanent, soit 4,17 % du nombre total de prêtres du diocèse de Münster pendant cette période. En suivant la chronologie, nous avons constaté que les abus ont été relativement nombreux entre les années 1960 et le milieu des années 1980, puis ont diminué et se sont stabilisés à un niveau bas jusqu’à la fin de la période analysée, sans disparaître complètement.
- 32 L’étude ne procède à aucune estimation des cas non recensés par extrapolation à partir des données (...)
24Selon nos estimations, au moins 610 victimes au total sont à dénombrer, pour environ 5 700 abus présumés. Le nombre de cas non recensés est certainement bien plus élevé, mais difficile à évaluer32. Les trois quarts des victimes sont des hommes. Dans plus de 85 % des cas, le premier abus présumé a été commis avant les 16 ans de la victime, soit en dessous de l’âge de la majorité sexuelle reconnue par l’Église jusqu’en 2001. Dans plus de la moitié des cas, les victimes entretenaient des liens étroits, voire très étroits, avec l’Église (par le biais des chorales, par exemple) ; dans environ trois quarts des cas, les abus ont été commis au sein de la paroisse, dans le cadre des activités ecclésiastiques proposées pour les jeunes ou dans des lieux de vie de l’Église (foyers, internats).
25Nous avons également tenté d’évaluer de manière quantitative les connaissances et les réactions des responsables et des décideurs ecclésiastiques. Parmi les cas d’abus portés à la connaissance du diocèse jusqu’en 2020 et dûment documentés, près d’un tiers des signalements a été reçu avant l’année 2000 et deux tiers par la suite. Dans la moitié des cas environ, l’intervalle entre le cas d’abus et sa dénonciation était de plus de 30 ans, mais dans près d’un tiers des cas, cet intervalle n’était que d’un an. Dans plus d’un tiers des cas portés à la connaissance du diocèse et concernant un accusé encore en vie à l’époque, il semble n’y avoir eu aucune réaction immédiate de la part des responsables ecclésiastiques. Dans les autres cas, c’est le déplacement (souvent accompagné d’un suivi thérapeutique à partir des années 1970) qui a été privilégié par ces responsables ecclésiastiques pour remédier à la situation.
- 33 W. Damberg, op. cit., p. 377-382.
26La troisième partie de l’étude est consacrée à l’analyse systématique des différents groupes d’acteurs concernés, sous quelque forme que ce soit, par les abus sexuels sur mineurs commis par des clercs. Nous nous sommes tout d’abord penchés sur le groupe des victimes. Nous avons pu constater que les abus sexuels, souvent vécus comme une fracture profonde, concernaient surtout des personnes proches de l’Église et socialement vulnérables. Nous avons en outre tenté de décrire les obstacles liés aux mentalités, au langage, aux institutions, auxquels les victimes ont dû faire face pour se faire entendre dans leur environnement social immédiat. En ce qui concerne les prêtres coupables de ces abus, nous avons pu constater qu’ils ont profité à l’extrême de l’autorité de leur ministère. En effet, selon la conception de l’Église, le prêtre agit, pendant la célébration des sacrements, en vertu d’une autorité divine, in persona Christi, ce qui établit un rapport de pouvoir particulièrement inégal entre le prêtre et le fidèle, qui va bien au-delà du sacrement en lui-même. Cette asymétrie entre prêtres et laïcs a favorisé de manière décisive le passage à l’acte, ainsi que la dissimulation ultérieure par les responsables ecclésiastiques. Les paroissiens qui étaient au courant des faits, mais se sont abstenus de réagir, étaient pour la plupart tellement aveuglés par le charisme entourant la fonction de prêtre qu’ils n’ont rien fait. Ce « cléricalisme d’en bas » a largement contribué à la dissimulation des actes. Mais les responsables ecclésiastiques et leurs complices au sein des paroisses ne sont pas seuls à avoir dissimulé et minimisé les abus sexuels sur mineurs dans l’Église. Les thérapeutes des accusés – qui pour la plupart étaient eux-mêmes membres de l’Église ou mandatés par elle – et même des membres de l’appareil judiciaire et du parquet ont également souvent contribué à altérer la perception du danger que pouvait représenter un prêtre accusé. Ainsi, dans le cas susmentionné du prêtre Helmut Behrens, une entente entre l’évêque auxiliaire compétent et le procureur local a probablement empêché les autorités judiciaires d’intervenir. Le dispositif catholique d’abus a impliqué plus d’acteurs qu’un simple coup d’œil aux victimes, aux auteurs et aux dissimulateurs au sein de l’administration ecclésiastique le laisse supposer. L’abus sexuel, qui est toujours un abus de pouvoir, a concerné et concerne toujours le milieu catholique dans son ensemble. La diminution significative du nombre de cas dans le diocèse de Münster, à compter du milieu des années 1980, est probablement liée au mouvement général de sécularisation subi par le catholicisme allemand dans le dernier tiers du xxe siècle. On observe en effet, dès les années 1960, une baisse rapide de la fréquentation régulière des offices religieux, puis, à partir des années 1970, une augmentation des départs de fidèles tandis que le nombre de candidats à la prêtrise diminue rapidement33. Toutefois, même s’il est d’une ampleur moindre, le problème des abus sexuels commis par des prêtres sur des mineurs persiste au xxie siècle, dans le diocèse de Münster comme dans le monde entier.
- 34 Les violences sexuelles dans l’Église catholique : France 1950-2020, rapport de la Commission indé (...)
27L’analyse historique des abus sexuels dans le diocèse de Münster est la première d’une série d’autres études historiques se penchant sur les abus passés et présents commis dans certains diocèses allemands. Si de grandes enquêtes nationales comme l’étude MHG ou le rapport de la CIASE34 sont nécessaires, notamment pour jouir d’une vision transnationale et globale du scandale des abus dans l’Église catholique, il est également essentiel de mener des recherches empiriques et concrètes sous forme d’études locales, comme celles que nous avons présentées pour le diocèse de Münster. Car en fin de compte, ce scandale concerne des abus commis sur des êtres humains, qui ne doivent pas disparaître derrière des chiffres et des arguments juridiques. Si les gouvernements, les tribunaux et les autorités judiciaires ne peuvent plus rendre justice aujourd’hui en raison des délais de prescription, la reconnaissance d’un « droit à la vérité » des victimes est d’autant plus urgente. C’est précisément sur ce point que la recherche historique peut apporter une contribution importante.
Notes
1 Th. Großbölting, Die schuldigen Hirten. Geschichte des sexuellen Missbrauchs in der katholischen Kirche, Freiburg im Breisgau, Herder, 2022.
2 A. Liedhegener, Ch. Kösters, « Katholisch sein, katholisch bleiben? Wie Glauben und Kirche in Deutschland gelebt werden », HerderKorrespondenz, 9/2022, p. 22-24 ; « Kirchenhistoriker: Missbrauchsskandal größere Krise als Reformation », katholisch.de, 17.12.2019 : www.katholisch.de/artikel/20708-kirchenhistoriker-missbrauchsskandal-groessere-krise-als-reformation [consulté le 12 déc. 2022].
3 H. Dreßing et al., Sexueller Missbrauch an Minderjährigen durch katholische Priester, Diakone und männliche Ordensangehörige im Bereich der Deutschen Bischofskonferenz, 2018 : présenté par un groupe de recherche du Zentralinstitut für Seelische Gesundheit de Mannheim et des universités de Heidelberg et de Gießen : www.dbk.de/fileadmin/redaktion/diverse_downloads/dossiers_2018/MHG-Studie-gesamt.pdf [consulté le 12 déc. 2022]. L’abréviation MHG désigne les trois sites de recherche de Mannheim, Heidelberg et Gießen.
4 B. Frings et al., Macht und sexueller Missbrauch in der katholischen Kirche. Betroffene, Beschuldigte und Vertuscher im Bistum Münster seit 1945, Freiburg im Brisgau, Herder, 2022 : www.uni-muenster.de/imperia/md/content/wwu/journalisten/macht_und_sexueller_missbrauch_im_bistum_muenster.pdf [consulté le 12 déc. 2022].
5 Th. Großbölting, op. cit., p. 57-67 ; V. aussi D. Reisinger, Ch. Röhl, Nur die Wahrheit rettet. Der Missbrauch in der katholischen Kirche und das System Ratzinger, München, 2021.
6 Pour un aperçu de l’histoire de l’enquête internationale, V. D. Cahill, P. Wilkinson, Child Sexual Abuse in the Catholic Church: An Interpretive Review of the Literature and Public Inquiry Reports, Melbourne 2017 ; pour le cas de l’Irlande en particulier, V. M. Keenan, Child Sexual Abuse and the Catholic Church. Gender, Power, and Organizational Culture, New York, Oxford Univeristy Press, 2012 ; D. Scally, The Best Catholics in the World: The Irish, the Church and the End of a Special Relationship, Dublin, Penguin/Sandycove, 2021.
7 Entretien avec le cardinal Lehmann : « Der Papst hat das Heft in der Hand », Der Spiegel, 23.06.2002 : www.spiegel.de/politik/der-papst-hat-das-heft-in-der-hand-a-122581ed-0002-0001-0000-000022955262 [consulté le 12 déc. 2022].
8 « So entschuldigt sich der Rektor für den Missbrauch », Die Welt, 28.01.2010 : www.welt.de/vermischtes/article6014879/So-entschuldigt-sich-der-Rektor-fuer-den-Missbrauch.html [consulté le 12 déc. 2022].
9 U. Raue, Bericht über Fälle des sexuellen Missbrauchs an Schulen und anderen Einrichtungen des Jesuitenordens, 27.05.2010, p. 2 : www.jesuiten.org/fileadmin/user_upload/Downloads/Bericht_27_05_2010_aktuell.pdf [consulté le 12 déc. 2022].
10 « Bistümer melden Dutzende Verdachtsfälle auf Kindesmissbrauch », Der Spiegel, 06.02.2010 : www.spiegel.de/panorama/justiz/katholische-kirche-in-deutschland-bistuemer-melden-dutzende-verdachtsfaelle-auf-kindesmissbrauch-a-676278.html [consulté le 12 déc. 2022].
11 M. Katsch, Damit es aufhört. Vom befreienden Kampf der Opfer sexueller Gewalt in der Kirche, Berlin, Nicolai Publishing & Intelligence, 2020.
12 N. Leygraf et al., Sexuelle Übergriffe durch katholische Geistliche in Deutschland. Eine Analyse forensischer Gutachten 2000-2010. Abschlussbericht 2012 : www.dbk.de/fileadmin/redaktion/diverse_downloads/Dossiers_2012/2012_Sex-Uebergriffe-durch-katholische-Geistliche_Leygraf-Studie.pdf [consulté le 12 déc. 2022].
13 K. Jansen, « Leygraf: “Pädophilie bei Priestern die Ausnahme” », dw.com, 08.12.2012 : learngerman.dw.com/de/leygraf-p%C3%A4dophilie-bei-priestern-die-ausnahme/a-16438922 [consulté le 12 déc. 2022].
14 G. di Lorenzo, « Christian Pfeiffer: “Ich sagte dem Bischof: Wir lassen uns nicht kaufen” », Die Zeit, 16.04.2019 : www.zeit.de/2019/17/christian-pfeiffer-aufklaerung-missbrauch-katholische-kirche/komplettansicht [consulté le 12 déc. 2022].
15 V. l’étude MHG, op. cit. note 3.
16 V. notamment l’avis de la Commission indépendante chargée d’enquêter sur les abus sexuels sur mineurs repris dans l’étude MHG, 25.09.2018 : www.aufarbeitungskommission.de/service-presse/service/meldungen/stellungnahme-der-unabhaengigen-kommission-zur-aufarbeitung-sexuellen-kindesmissbrauchs-zur-studie-sexueller-missbrauch-an-minderjaehrigen-durch-katholische-priester-diakone-und-maennliche-o/ [consulté le 12 déc. 2022].
17 Les différentes étapes de la « crise de confiance » que traverse actuellement l’archevêché de Cologne peuvent être suivies via le portail d’informations (en allemand) katolisch.de : www.katholisch.de/thema/563-missbrauch et www.katholisch.de/thema/705-koelner-missbrauchsstudie [consulté le 12 déc. 2022].
18 U. Wastl, M. Pusch, N. Gladstein, Sexueller Missbrauch Minderjähriger und erwachsener Schutzbefohlener durch Kleriker im Bereich des Bistums Aachen im Zeitraum 1965 bis 2019. Verantwortlichkeiten, systemische Ursachen, Konsequenzen und Empfehlungen, München, 2020 : westpfahl-spilker.de/wp-content/uploads/2020/11/Gutachten_Bistum_Aachen.pdf ; P.-A. Brand, S. Wildfeuer, Sexueller Missbrauch an Minderjährigen durch katholische Priester, Diakone und männliche Ordensangehörige im Bereich des Erzbistums Berlin seit 1946, Berlin, 2021 : www.erzbistumberlin.de/fileadmin/user_mount/PDF-Dateien/Erzbistum/ErzbischofKoch/20210823GutachtenSexuellerMissbrauch.pdf ; M. Westpfahl et al., Sexueller Missbrauch Minderjähriger und erwachsener Schutzbefohlener durch Kleriker sowie hauptamtliche Bedienstete im Bereich der Erzdiözese München und Freising von 1945 bis 2019. Verantwortlichkeiten, systemische Ursachen, Konsequenzen und Empfehlungen, 2022 : westpfahl-spilker.de/wp-content/uploads/2022/01/WSW-Gutachten-Erzdioezese-Muenchen-und-Freising-vom-20.-Januar-2022.pdf [consultés le 12 déc. 2022]. En revanche, une première expertise réalisée en 2010 par ce cabinet d’avocats pour l’archevêché de Munich et Freising demeure aujourd’hui classée.
19 B. Gercke et al., Pflichtverletzungen von Diözesanverantwortlichen des Erzbistums Köln im Umgang mit Fällen sexuellen Missbrauchs von Minderjährigen und Schutzbefohlenen durch Kleriker oder sonstige pastorale Mitarbeitende des Erzbistums Köln im Zeitraum von 1975 bis 2018. Verantwortlichkeiten, Ursachen und Handlungsempfehlungen, 2021 : mam.erzbistum-koeln.de/m/2fce82a0f87ee070/original/Gutachten-Pflichtverletzungen-von-Diozesanverantwortlichen-im-Erzbistum-Koln-im-Umgang-mit-Fallen-sexuellen-Missbrauchs-zwischen-1975-und-2018.pdf [consulté le 12 déc. 2022].
20 C’est actuellement le cas pour les diocèses de Münster, Paderborn, Osnabrück, Trèves, Würzburg et Passau.
21 V. à ce sujet et sur les développements suivants : K. Große Kracht, « Die Last der Geschichte. Was können geschichtswissenschaftliche Forschungen zur Aufarbeitung des sexuellen Missbrauchs an Minderjährigen in der katholischen Kirche beitragen? », in B. Aschmann (Hsrg.), Katholische Dunkelräume. Die Kirche und der sexuelle Missbrauch, Paderborn, Brill/Schöningh, 2021, p. 250-265.
22 M. Pohlig, « Vom Besonderen zum Allgemeinen? Die Fallstudie als geschichtstheoretisches Problem », Historische Zeitschrift 2013, p. 297-319.
23 C. Geertz, « Dichte Beschreibung. Bemerkungen zu einer deutenden Theorie von Kultur », in C. Geertz, Dichte Beschreibung. Beiträge zum Verstehen kultureller Systeme, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1987, p. 7-43.
24 V. à ce sujet et dans d’autres contextes : J. Brunner, D. Stahl, Recht auf Wahrheit. Zur Genese eines neuen Menschenrechts, Göttingen, Wallstein, 2016.
25 V. à ce sujet les travaux du groupe de recherche financé par la Deutsche Forschungsgemeinschaft : Katholischsein in der Bundesrepublik Deutschland. Semantiken, Praktiken, Emotionen in der westdeutschen Gesellschaft 1965-1989/90 : www.katholischsein-for2973.de/ [consulté le 12 déc. 2022].
26 M. Wijlens, « Entwicklungen im kanonischen Recht zwischen 1983 und 2020 » et J. M. Fegert, « Veränderungen der medizinischen Wahrnehmung und des Umgangs mit sexualisierter Gewalt gegen Kinder », in B. Aschmann (Hrsg.), op. cit. note 21, p. 77-95 et p. 130-169.
27 R. Bucher, Kirchenbildung in der Moderne. Eine Untersuchung der Konstitutionsprinzipien der deutschen katholischen Kirche im 20. Jahrhundert, Stuttgart, W. Kohlhammer, 1998, p. 43-50.
28 Concernant le terme de « milieu catholique », V. A. Henkelmann, « Vom Milieu zur geteilten Geschichte? Thesen zur aktuellen Geschichtsschreibung des religiösen Feldes im Deutschland des 19. und 20. Jahrhunderts », Historisches Jahrbuch 2018, p. 420-448.
29 Concernant l’histoire moderne de l’évêché, V. W. Damberg, Moderne und Milieu, 1802-1998. Geschichte des Bistums Münster, t. V, Münster, Dialog, 1998.
30 B. Frings et al., op. cit. note 4 ; Th. Großbölting, op. cit. note 1.
31 « Macht und Missbrauch in der katholischen Kirche. Betroffene, Beschuldigte und Vertuscher im Bistum Münster seit 1945 » : B. Frings et al., op. cit. note 4.
32 L’étude ne procède à aucune estimation des cas non recensés par extrapolation à partir des données recueillies. Les statistiques reposent donc uniquement sur les 196 cas identifiés.
33 W. Damberg, op. cit., p. 377-382.
34 Les violences sexuelles dans l’Église catholique : France 1950-2020, rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église, 2021 : www.ciase.fr/rapport-final [consulté le 12 déc. 2022].
Haut de pagePour citer cet article
Référence papier
Klaus Große Kracht, « Les abus sexuels dans l’Église catholique allemande : perspectives historiques et résultats », Revue du droit des religions, 15 | 2023, 109-123.
Référence électronique
Klaus Große Kracht, « Les abus sexuels dans l’Église catholique allemande : perspectives historiques et résultats », Revue du droit des religions [En ligne], 15 | 2023, mis en ligne le 24 mai 2023, consulté le 30 mai 2023. URL : http://journals.openedition.org/rdr/2111 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdr.2111
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