Navigation – Plan du site

AccueilNuméros16Notes de lectureAnne Fornerod (dir.), La liberté ...

Notes de lecture

Anne Fornerod (dir.), La liberté de religion en question(s)

Bruxelles, Bruylant, 2022
Marie Féméli
p. 159-161
Référence(s) :

Anne Fornerod (dir.), La liberté de religion en question(s), Bruxelles, Bruylant, 2022 (Droit et religion), 212 p.

Texte intégral

1Cet ouvrage collectif, sous la direction d’Anne Fornerod, s’illustre par l’étendue et la complémentarité des travaux de ses auteurs qui permettent de revisiter un sujet classique. La liberté de religion y est abordée dans son acception juridique sous l’angle de l’impact des mutations sociales contemporaines autour de trois « aires culturelles » : l’universelle, l’européenne et la française. Deux questions originelles y sont posées. La première est relative à la délimitation des contours de la liberté de religieuse et la seconde à son degré de protection. Or, traiter de la liberté des religions revient à se pencher sur la « rencontre » entre « la religion et l’État » (P. Dane, chap. 2) qui est le « berceau du droit à la liberté religieuse » (A. Ferrari, chap. 1). L’étude des paradigmes des relations État-religion suppose une analyse historique et géographique « d’un droit à la liberté religieuse qui a développé dans le temps une nature amphibie de plus en plus contradictoire » (A. Ferrari, p. 19).

2L’« implantation » de la liberté des religions au niveau constitutionnel est, pour illustration, encore « incomplète ou inachevée » au sein des États asiatiques (A. Fornerod, p. 11). Il existe par conséquent « un décalage entre ce qui est garanti par les instruments » juridiques et « la réalité » de la pratique (A. Jamal, chap. 3). Les évolutions sociétales dans leur universalisme mettent en exergue des divergences d’approches parfois concurrentes et sources d’adaptations qui modèlent ce droit fondamental. Cette mutation de la liberté de religion semble tendre outre-Atlantique vers une alarmante fragilisation de ce droit. En Europe, son évolution vers « une liberté plurielle dans un contexte pluraliste » interroge également sur son effectivité (A. Fornerod, p. 12).

3La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qui s’illustre tant par son aspect quantitatif que par son aspect qualitatif et sa protection des minorités religieuses apparaît comme l’application d’un cadre normatif bien déterminé. Elle aboutit néanmoins parfois à des résultats inattendus par « l’affirmation […] d’une protection forte de la liberté de religion » liée à sa « sanctuarisation » contrebalancée par le « principe de subsidiarité » (G. Gonzalez, p. 80), « un garde-fou des débordements interprétatifs » (G. Gonzalez, p. 84) qui démontre le pouvoir des juges européens dans l’édification de la liberté de religion. Ce positionnement s’inscrit a contrario de la dynamique impulsée par la Cour de justice de l’Union européenne. Elle « ne se prononce directement ni sur la notion ni sur le régime de la religion » et saisit la « question religieuse » essentiellement « au prisme de la discrimination religieuse » (F. Laronze, p. 93). La Cour de justice se démarque ainsi par « l’imbrication du droit fondamental à la liberté de religion et du principe de non-discrimination […] laquelle trouve un champ d’application privilégié dans les situations de travail » (M. Schmitt, p. 129).

4Le système français se singularise quant à lui par « une spécificité tenant à la laïcité comme principe d’organisation des rapports entre les pouvoirs publics et les religions, mais également comme une valeur sociale forte » (A. Fornerod, p. 13). Le « paradigme laïque-séparatiste français révèle le nouvel horizon où s’inscrivent aussi les paradigmes des relations État-Églises » (A. Ferrari, p. 32). Il en demeure que la conception « française laïque » de la liberté de religion entre en « tension » au niveau international avec l’approche « libérale classique » (P.-H. Prélot, p. 155). Cette divergence de conception de la laïcité se décèle également dans le déploiement de la liberté de religion au niveau interne entre les différents ordres de juridiction.

5Les évolutions se traduisent par « l’affirmation d’une conception extensive de la neutralité religieuse » sous « l’influence d’une approche politique de la laïcité » (A. Fornerod, p. 13). La liberté de religion peut également être restreinte par des circonstances exceptionnelles. L’instauration de l’état d’urgence en 2015 dans le contexte des attentats terroristes a relancé le débat autour du blasphème et avec lui les liens, voire la concurrence, entre liberté de religion et liberté d’expression. L’introduction d’une nouvelle légalité de crise par la création de l’état d’urgence sanitaire en 2020 diversifie les libertés mises en balance. Ces restrictions mettent en exergue le rôle protecteur que doivent exercer l’ensemble des juridictions tant judiciaires (C. Delmas, p. 167) qu’administratives (F. Dieu, p. 181).

Haut de page

Pour citer cet article

Référence papier

Marie Féméli, « Anne Fornerod (dir.), La liberté de religion en question(s) »Revue du droit des religions, 16 | 2023, 159-161.

Référence électronique

Marie Féméli, « Anne Fornerod (dir.), La liberté de religion en question(s) »Revue du droit des religions [En ligne], 16 | 2023, mis en ligne le 21 novembre 2023, consulté le 13 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/rdr/2233 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rdr.2233

Haut de page

Auteur

Marie Féméli

Chargée de TD en droit public, Université de Perpignan Via Domitia, Centre du droit économique et du développement (CDED)

Articles du même auteur

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont susceptibles d’être soumis à des autorisations d’usage spécifiques.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search