1.  Introduction

1La Covid 19 a entraîné de profonds changements au sein du paysage universitaire (Villiot-Leclercq, 2020 ; Lefébure, 2020). En effet, pour limiter la propagation du virus, les universités ont été contraintes à suspendre les cours en présentiel organisés dans les différents établissements d’enseignement supérieur et à passer en distanciel. L'impossibilité de réunir des cohortes importantes d'étudiants dans de grands amphithéâtres a conduit les enseignants à innover afin de pouvoir enseigner efficacement à de grands groupes et d'assurer une forme de continuité pédagogique. L’utilisation de dispositifs de formation à distance comme le MOOC hybride semble intéressante pour enseigner dans cette période compliquée.

2Par ailleurs, plus globalement, la massification du besoin de formation exprimé par la population ainsi que l’absence de lieux d’enseignement « classiques  » dans certaines parties du monde ne permettent pas toujours à tous les individus de bénéficier de manière égale de l’accès à l’éducation et à la formation. Comme l’exposent Christian Depover et François Orivel (2012, p. 9), la formation à distance semble un moyen judicieux pour rendre l’éducation accessible aux individus qui n’ont pas la possibilité de s’inscrire dans un système d’enseignement « classique  », que ce soit « pour des raisons d’éloignement géographique, de manque de ressources financières, ou par manque de temps ». L’évolution des moyens technologiques et surtout la démocratisation de l’accès à Internet ont offert de nouvelles perspectives en termes d’apprentissage et ont permis le développement de la formation à distance, désormais accessible à une grande variété d’apprenants — disposant d’un accès au Web — dans le monde.

3Les MOOC (Massive Open Online Course), cours en ligne d’accès libre destinés à de nombreux apprenants, semblent être une réponse à ce besoin de formation. L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), dans le cadre du programme «  Éducation 2030  » destiné à sensibiliser les décideurs politiques (notamment dans les pays en développement), souligne l’intérêt des MOOC comme solution permettant de répondre à une demande croissante en termes d’éducation et de formation. Pour l’UNESCO, «  le MOOC a une distinction : c’est la seule technologie éducative évolutive développée par et pour les éducateurs  » (Patru & Balaji, 2016, p. 3). En Belgique francophone, l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES, 2017) perçoit également les MOOC comme une adaptation pédagogique susceptible de pallier l’augmentation démographique et la massification de l’enseignement supérieur.

4Sur le plan pédagogique, ces environnements numériques d’apprentissage ont un point commun : ils intègrent un certain nombre de ressources (capsules informatives, syllabus, espaces de communication, tests auto-correctifs, etc.) pour permettre aux apprenants d’atteindre les objectifs ciblés par la formation. Dans cette recherche, nous nous intéressons, d’une part, à l’évaluation de l’atteinte de ces objectifs en questionnant la performance des apprenants et, d’autre part, à l’usage de ces ressources pédagogiques intégrées. Cette double observation nous donnera l’occasion de mettre en évidence les éventuels facteurs explicatifs de la réussite et les différents types de profils d’apprenants dans la formation.

1.1.  Du MOOC à l’hybridation…

5Dans la littérature en technologie de l’éducation, on distingue généralement deux catégories de MOOC : les xMOOC transmissifs et les cMOOC connectivistes. Les premiers reposent sur les théories cognitivo-comportementales et instructivistes selon lesquelles l’enseignant détient le savoir (Hennequin, 2014), qu’il partage avec les apprenants par le biais de vidéos accompagnées généralement de questionnaires auto-correctifs. Les seconds, à l’inverse, sont connectivistes et fonctionnent selon la métaphore du réseau où des apprenants autonomes se connectent les uns aux autres et partagent des connaissances (Ebben & Murphy, 2014 ; Cisel, 2016 ; Hoppe, 2017). Pour plusieurs auteurs (David, 2015  ; Cisel, 2016 ; Conole, 2016), la distinction entre les deux types de MOOC est trop restrictive. Des MOOC «  hybrides  », qui en combinent les caractéristiques pour favoriser l’apprentissage d’un public plus large et diversifié en termes de besoins éducatifs et de formation, ont ainsi émergé. En effet, entre ces deux conceptions théoriques, diverses formes de MOOC bien plus variées (SPOC, COOC, SOOC, etc.) se sont développées, notamment pour prendre en considération la multiplicité des contextes d’apprentissage qui ont une incidence sur les usages et les effets de ces dispositifs.

6Abram Anders (2015) a élaboré un modèle conceptuel (tableau 1) du continuum d’apprentissage des MOOC intégrant différentes théories et applications des MOOC. Pour lui, les MOOC se situent «  le long d’un spectre allant de l’apprentissage prescriptif à l’apprentissage émergent  » (Anders, 2015, p. 47). Aux extrémités de ce continuum se trouvent les théories cognitivo-comportementales et l’instructivisme d’un côté, et le connectivisme de l’autre. C’est précisément entre ces deux pôles qu’Anders situe les MOOC hybrides. Son modèle intègre au contexte d’enseignement/formation à distance des éléments issus de la taxonomie de Terry Anderson et de Jon Dron (2011) relative aux théories de l’apprentissage. Cette taxonomie met en avant trois approches se rapportant chacune à un type de MOOC : les xMOOC, les MOOC hybrides et les cMOOC.

Tableau 1 - Adaptation et traduction du modèle conceptuel des théories de l’apprentissage et des applications aux MOOC d’Abram Anders (2015)

Théories de l’apprentissage
Apprentissage prescriptif		Apprentissage émergent
Prévisible/complexe Hiérarchique, centralisé, contrôlé par des enseignants, transmis aux apprenants.		Complexe/adaptatif Décentralisé et distribué, collaboration et autonomie organisées et créées par les apprenants.
Cognitivo-béhavioriste/instructivisme	(Auto-)socio-constructivisme		Connectivisme
Particuliers L’apprentissage est individuel, stimulé  ; les connaissances sont acquises individuellement par les apprenants par le biais d’un processus d’apprentissage ou d’un programme de formation conçu par des experts et étayé.	Groupes/communautés L’apprentissage est social, participatif, contextuel  ; les connaissances sont construites par un processus de socialisation avec des perspectives multiples.		Foule/réseaux Les connaissances sont distribuées, mises en réseaux, adaptatives ; on navigue et on les active en établissant des liens entre les réseaux de personnes, d’information et de ressources.
Caractéristiques
Apprentissage très structuré, dirigé et déterminé par l’instructeur. Faible niveau d’autonomie de l’apprenant.	Apprentissage autodirigé dans lequel l’apprenant oriente le contenu et le cheminement d’apprentissage avec la guidance et l’aide de l’enseignant. L’accent est mis sur le développement des compétences.		Apprentissage dans lequel l’apprenant détermine les objectifs et les processus d’apprentissage. L’accent est mis sur les capacités supérieures, la pensée critique et l’apprentissage du «  comment apprendre  ».
Applications MOOC
xMOOC	Hybrides		cMOOC
Basé sur le contenu Apprentissage piloté par des enseignants-experts.	Communautaire et basé sur les tâches Communauté d’apprenants ; activités d’apprentissage social guidées par les enseignants.		Basé sur le réseau Apprentissage par les pairs auto-organisé et en réseaux.

7Selon ce même auteur, l’hybridation des MOOC est susceptible d’aider les apprenants présentant différents profils à acquérir des capacités relatives aux styles d’apprentissage en réseau et émergents.

1.2.  Des ressources pédagogiques

8Dans cette partie nous décrivons, de manière non exhaustive, les principales ressources généralement mobilisées en formation en ligne et, plus spécifiquement, dans les MOOC. D’abord, nous nous centrons sur l’utilisation des ressources informatives que sont les capsules vidéo-pédagogiques. Nous décrivons par ailleurs l’utilisation de ressources formatives comme les questionnaires auto-correctifs dans les dispositifs de formation et d’enseignement en ligne. Enfin, nous nous attachons à décrire l’utilisation des ressources communicationnelles à des fins d’apprentissage.

1.2.1. Des ressources informatives

9Selon Edward Awad et ses collègues (2017) la capsule vidéo-pédagogique est outil hautement efficace. Plusieurs recherches en sciences de l’éducation mettent en avant l’intérêt de l’utilisation de ce médium en situation d’apprentissage (Bishop & Verleger, 2013 ; Meyer, 2010). Plusieurs paramètres sont à prendre en considération lors de la création d’une vidéo pédagogique : la possibilité de faire des pauses (Fiorella & Mayer, 2018), le style communicationnel (Cormier et al., 2017 ; Mayer, 2009). Les vidéos intégrées dans les MOOC sont accessibles tant pour des spécialistes (du domaine abordé par le MOOC) que pour les apprenants tout-venant (Stöhr et al., 2019). Si la capsule vidéo apporte une plus-value à l’apprentissage, plusieurs recherches montrent que certains apprenants ne visionnent pas les vidéos qui leur sont proposées (Kim et al., 2014  ; Cisel, 2017b).

1.2.2.  Des ressources formatives

10Nous relevons deux modalités d’évaluation dans les MOOC : l’intervention des pairs pour la correction de productions écrites et l’utilisation de questionnaires auto-correctifs en ligne. Bien que plus riche sur le plan pédagogique (Cisel, 2013), la première forme d’évaluation est difficilement gérable (Karsenti, 2013). Le questionnaire auto-correctif est l’outil pédagogique qui aurait le plus d’effet sur l’apprentissage (Hattie, 2009). Par ailleurs, la réalisation de tests, dans une logique de répétitions espacées dans le temps favoriserait, la rétention par les apprenants (Dunlosky et al., 2013). Toutefois, comme l’explique Matthieu Cisel (2013) les apprenants utilisant ces questionnaires auto-correctifs sont susceptibles de diffuser les réponses sur les forums et réseaux sociaux. Ils peuvent également créer plusieurs comptes pour profiter de plusieurs tentatives (Stöhr et al., 2019). Si cela peut poser problème dans le cadre d’une évaluation certificative, en contexte formatif, partager les questions par le biais d’outils communicationnels pourrait se révéler constructif, puisque cela favoriserait l’émergence de conflits socio-cognitifs. Ces ressources formatives peuvent aussi concerner des tâches ouvertes où les apprenants entre eux partagent des productions qu’ils ont réalisées en lien avec le contenu traité dans une perspective de transfert des apprentissages.

1.2.3.  Des ressources communicationnelles

11Au niveau des ressources communicationnelles, Christian Depover et ses collègues (2007) distinguent les outils asynchrones (forums) des outils synchrones (messageries instantanées). Il est possible d’intégrer ces différents types de ressources dans les MOOC pour favoriser l’apprentissage. Pour Nabeel Gillani et Rebecca Eynon (2014), le nombre important d’inscrits aux MOOC offre aux participants la possibilité de communiquer via les forums avec des apprenants ayant des profils parfois très différents du leur. Malgré cette massivité d’inscrits, les participants au sein des forums représentent un pourcentage relativement faible du nombre d’inscrits (Breslow et al., 2013 ; Karsenti, 2013  ; Manning & Sanders, 2013  ; Gillani & Eynon, 2014 ; Bar-Hen et al., 2015). Si certains apprenants préfèrent utiliser les forums hébergés sur la plateforme du MOOC pour accéder à une information centralisée (Alario-Hoyos et al., 2013), d’autres vont privilégier des outils de communication externes comme les réseaux sociaux (Cisel, 2017a).

2.  Méthodologie

12Notre recherche porte sur un MOOC hybride (le MOOC L’innovation pédagogique dont vous êtes le héros…), conçu à l’université de Mons (UMONS) et hébergé sur la plateforme France université numérique (FUN). Les thèmes abordés dans ce MOOC hybride se rapportent aux sciences de l’éducation. L’objectif est de faire découvrir aux apprenants différents principes pédagogiques qui peuvent faire la différence en termes d’apprentissage (Hattie, 2009) comme les types d’évaluations, l’apprentissage collaboratif, la conception didactique de supports de cours, etc. Il a accueilli plus de 8 000 apprenants. Ce public hétérogène se compose d’apprenants que nous qualifions de spontanés ou d’enrôlés : les premiers sont ceux qui se sont inscrits librement au MOOC tandis que les seconds ont participé au dispositif dans le cadre de leur cursus universitaire.

13Il s’agit d’étudiants inscrits au début de cycle du bachelier en sciences psychologiques et de l’éducation à l’UMONS à la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (FPSE). Pour ce type d’apprenants, la participation au MOOC se voyait créditée dans leur parcours universitaire.

2.1.  Design pédagogique

14À l’instar d’Anders (2015), le MOOC hybride étudié s’inscrit dans une approche (auto)socio-constructiviste où les apprenants ont la possibilité de réaliser des activités interactives, en autonomie ou avec l’aide des pairs ou de tuteurs. Bien que la théorie développée par cet auteur nous ait aidés à saisir la tendance à suivre lors de la création du scénario pédagogique d’un MOOC hybride, son modèle conceptuel ne nous permettait pas nécessairement de bénéficier de ressources applicables sur le plan pratique.

15Dès lors, afin de définir des lignes directrices de conception d’un dispositif hybride, nous nous sommes basés sur le modèle pragmatique de l’apprentissage proposé par Marcel Lebrun (2011) (figure 1).

16Nous caractérisons le MOOC étudié de dispositif hybride de formation à distance, car il est supporté par une plateforme technologique qui associe une multitude de constituants (ressources, stratégies, méthodes, etc.) (Lebrun, 2011). Ce MOOC, constitué de différentes dimensions (information, motivation, activité, interaction et production) (Lebrun, 2007, 2001), s’adresse à un public constitué d’apprenants disparates et combine les caractéristiques des xMOOC et cMOOC (Downes, 2012) en proposant, dans une approche instructiviste, des contenus théoriques par le biais d’un planning guidant les apprenants pour le visionnage des capsules vidéo-pédagogiques et la réalisation des questionnaires auto-correctifs leur permettant de vérifier leur compréhension (Titone, 2014 ; Xu & Yang, 2015). Dans une perspective socio-constructiviste, ce MOOC propose également des activités collaboratives favorisant la mise en relation entre les savoirs — par le biais des réseaux — ainsi que la création et le partage de celles-ci (Kop, Fournier & Mak, 2011). De manière à qualifier notre dispositif MOOC d’hybride, nous avons utilisé un outil (annexe) développé par Christian Depover et ses collègues (2017). Il s’agit d’une grille subdivisée en quatre colonnes qui permet d’identifier les types de MOOC. La première colonne présente les critères établis sur la base d’un examen de la littérature et qui permettent de caractériser le MOOC analysé. Les trois autres colonnes répertorient les caractéristiques des MOOC selon trois types (générales, transmissives et connectivistes). Ces trois colonnes contiennent des cases à cocher. Par comparaison des nombres de cases cochées dans les colonnes 2 (xMOOC) et 3 (cMOOC), l’utilisateur peut se représenter le type de MOOC analysé (Depover et al., 2017). Sur la base de notre analyse au moyen de cette grille de spécification des MOOC, nous pouvons mettre en évidence que notre dispositif hybride se caractérise par des éléments issus des xMOOC à 75 % (soit 9 critères satisfaits sur 12) et des cMOOC à 84.62 % (soit 11 critères satisfaits sur 13).

2.2.  Learning analytics et dispositif expérimental

17Dans le cadre de cette recherche, nous proposons donc une approche comparative des deux catégories d’apprenants (spontanés vs enrôlés) concernant leurs usages effectifs des ressources pédagogiques qui leur ont été proposées (capsules vidéo-pédagogiques, outils communicationnels et questionnaires auto-correctifs). Pour étudier les usages qu’ont les apprenants des ressources (vidéos, quiz, outils communicationnels, etc.) et leurs effets sur l’apprentissage, nous avons exploité les traces de leur activité (learning analytics) dans l’environnement informatique, que nous avons par ailleurs associées à leurs déclarations transmises lors d’une enquête en ligne. Sur le plan conceptuel, la trace correspond à «  un enregistrement automatique d’éléments en interaction entre un utilisateur et son environnement dans le cadre d’une activité donnée  » (Laflaquière & Prié, 2007, p. 1). Chaque action réalisée par l’apprenant au sein de l’environnement informatique est alors enregistrée avec une référence temporelle dans une base de données. Ce type d’analyse a notamment permis d’identifier des facteurs susceptibles d’avoir influencé leur progression et contribuant ainsi à l’aide à la réussite des étudiants.

2.3.  Questions de recherche

19Dans le cadre de cette recherche, nous nous posons trois questions de recherche.

20Question 1 - Quelles sont les performances et la progression des apprenants inscrits au MOOC hybride ? Pour répondre à cette première question, nous évaluons, d’une part, le niveau de maîtrise des apprenants (spontanés et enrôlés) au post-test et, d’autre part, nous cherchons à mettre en avant une potentielle progression.

21Question 2 - Quelles variables du processus d’apprentissage peuvent expliquer la progression des utilisateurs du MOOC ? Pour répondre à cette deuxième question, nous cherchons à identifier les variables se rapportant au processus d’apprentissage mobilisées par les sujets susceptibles d’influencer leur progression. Pour ce faire, nous analysons les gains relatifs moyens des apprenants. Selon François-Marie Gérard (2003), le gain relatif moyen est le rapport entre ce qui a été gagné et ce qui pouvait être gagné. Cette approche nous semble un moyen pertinent d’évaluer la progression entre deux performances (ici, le pré-test et les post-tests).

22Question 3 - Quels profils d’apprenants se distinguent dans l’environnement d’apprentissage MOOC de type hybride ? Finalement, pour répondre à notre dernière question, nous proposons une typologie des apprenants évoluant dans notre MOOC selon leur mobilisation des différentes ressources pédagogiques et leur niveau de maîtrise au post-test. Nous réalisons cette typologie à l’aide de la technique statistique des clusters, que nous détaillons plus loin.

3.  Analyse des résultats

3.1.  Question 1 - Quelles sont les performances et la progression des apprenants inscrits au MOOC hybride   ?

23Le tableau ci-dessous montre que le score moyen des apprenants ayant participé au post-test (N = 637) est de 11.55/18, soit 64.17 %. Dans le tableau, nous comparons les scores des apprenants spontanés (N = 305) à ceux des enrôlés (N = 332). Sur le plan descriptif, l’analyse des résultats indique que le score moyen global des apprenants enrôlés (11.86/18, soit 65.89 %) n’est que légèrement plus élevé que celui des apprenants spontanés (11.22/18, soit 62.33 %).

Tableau 2 - Scores de tous les apprenants au post-test

Post-test (score sur 18)	N	M	σ	Min.	Max.
Tous	637	11.55	3.22	0	18
Enrôlés	332	11.86	2.96	2	18
Spontanés	305	11.22	3.46	0	18

24Les comparaisons de ces résultats au moyen du test U de Mann-Whitney révèlent que les scores moyens globaux au post-test des apprenants des deux groupes ne diffèrent pas significativement (cf. tableau 3).

Tableau 3 - Comparaison des scores des apprenants enrôlés et spontanés au post-test

	U de Mann-Whitney	P-value
Post-test	55 153.500	0.051

25Globalement, les apprenants ont donc atteint un niveau de performance équivalent au post-test réalisé, quel que soit leur groupe d’appartenance.

26Sur le plan descriptif, nous observons dans le tableau 4 que les apprenants progressent globalement entre le pré-test et le post-test : en effet, ils obtiennent un score moyen de 7.66/18 au pré-test (soit 42.55 %) et de 11.46/18 au post-test (soit 63.68 %).

Tableau 4 - Scores des apprenants enrôlés et spontanés au pré-test et au post-test

	N	Score global au… (score sur 18)	M	σ	Min.	Max.
Tous	598	pré-test	7.66	2.42	1	14
		post-test	11.46	3.26	0	18
Enrôlés	317	pré-test	7.35	2.43	1	14
		post-test	11.57	3.10	1	18
Spontanés	281	pré-test	8.00	2.36	1	14
		post-test	11.33	3.42	0	18

27Le graphique ci-dessous (figure 2) permet d’apprécier les évolutions des participants : une très large majorité des apprenants ont progressé (N = 481, soit 80.43 %) entre le pré-test et le post-test, 39 sont restés stables (soit 6.52 %) et 78 ont régressé (soit 13.04 %).

28La figure 3 indique qu’il n’y a que légèrement plus d’apprenants enrôlés qui progressent (258/317, soit 81.39 %) que de spontanés (223/281, soit 79.36 %) ou qui se stabilisent (22/317, soit 6.94 % vs 17/281, soit 6.05 %). À l’inverse, on peut observer une légère supériorité, parmi les apprenants qui régressent, des spontanés (41/281, soit 14.59 %) sur les enrôlés (37/317, soit 11.67 %).

29La comparaison des répartitions des sujets dans les catégories «  progression  », «  stabilisation  » et «  régression  » au moyen du test du χ2 nous permet d’ailleurs de confirmer l’absence de différences significatives entre les deux groupes de participants en termes d’évolution entre le pré-test et le post-test du MOOC (cf. tableau 5 : χ2 = 1.23  ; ddl = 2  ; p = 0.541).

Tableau 5 - Comparaison des répartitions des sujets enrôlés et spontanés selon leur évolution

	Évolution entre le pré-test et le post-test
	Effectifs	Progression	Stabilisation	Régression	Totaux
Enrôlés	observés	258 (81.39 %)	22 (11.17 %)	37 (6.94 %)	317
	attendus	254.98	20.67	41.35
Spontanés	observés	223 (79.36 %)	17 (6.05 %)	41 (14.59 %)	281
	attendus	226.02	18.33	36.65
Totaux		481 (80.43 %)	39 (6.52 %)	78 (13.04 %)	598
		χ2 = 1.23 ; p =0.541

30Nous pouvons donc conclure de ces analyses que les apprenants enrôlés et spontanés présentent des évolutions équivalentes quand on observe les effectifs de progressions, de stabilisations ou de régressions.

3.2.  Question 2 - Quelles variables du processus d’apprentissage peuvent expliquer la progression des utilisateurs du MOOC  ?

31Pour répondre à cette question, nous avons recouru à la technique d’analyse de régression multiple pour identifier les variables pouvant influencer l’apprentissage, c’est-à-dire les gains relatifs des apprenants. Nous nous focalisons ici sur les traces laissées par les apprenants lors de l’usage des différentes ressources intégrées dans le MOOC (informatives, formatives et interactives). Précisons que, d’un point de vue méthodologique, ces variables sont indépendantes les unes des autres. Avec cette méthode, « toutes les variables sont incluses dans le modèle, puis les variables les moins significatives sont retirées une à une jusqu’à ce que toutes les variables restantes soient significatives » (Gillaizeau & Grabar, 2011, p. 360). Le tableau 6 ci-après présente le gain relatif moyen des apprenants (N = 530) et reprend les variables se rapportant aux traces laissées lors de l’usage des ressources pédagogiques ainsi que le score moyen au pré-test.

Tableau 6 - Statistiques descriptives des variables potentiellement prédictives de la progression (gain relatif)

Variables	M
Gain relatif	35.61
Nombre de tentatives aux questionnaires auto-correctifs	17.62
Nombre de vues des diapositives constituant les vidéos	155.56
Nombre de messages postés sur Facebook	3.67
Nombre de messages postés sur le Forum	1.53
Score au pré-test	7.65

32L’analyse de régression révèle que le premier des six modèles générés par le logiciel SPSS, intégrant l’ensemble des variables relatives à l’utilisation des ressources ainsi que le score au pré-test, prédit significativement la progression (score aux gains relatifs) des apprenants inscrits au MOOC (tableau 7 : p = 0.000). Les autres modèles générés ne sont quant à eux pas significatifs.

Tableau 7 - Analyse de régression : effet de l’utilisation des ressources pédagogiques sur la progression des apprenants (gain relatif)

Modèle	Variables	P-value
1	Gain relatif Prédicteur : Nombre de tentatives aux questionnaires auto-correctifs Nombre de vues des diapositives constituant les vidéos Nombre de messages postés sur Facebook Nombre de messages postés sur le Forum Score au pré-test	0.000

33La puissance estimée à partir du R2 est de 0.154. Cela signifie que le modèle proposé permet d’expliquer 15.40 % de la progression des apprenants inscrits au MOOC hybride. Comme nous l’observons dans le tableau 8, sur l’ensemble des variables sélectionnées relatives aux traces laissées par les apprenants (les prédicteurs), aucune ne nous permet de prédire significativement les gains relatifs des apprenants inscrits au MOOC. Néanmoins, le modèle de régression nous indique que ce sont les apprenants ayant un niveau faible au départ qui ont progressé le plus (β = -0.385).

Tableau 8 - Modèle prédictif de la progression basé sur l’observation de l’utilisation des ressources pédagogiques par les apprenants (gains relatifs)

R (taux de significativité)	0.392 (0.000)
R2	0.154
Prédicteur 1 : nombre de vues des diapositives constituant les vidéos
β (taux de significativité)	0.059 (0.408)
Prédicteur 2 : nombre de messages publiés sur le forum
β (taux de significativité)	0.082 (0.056)
Prédicteur 3 : nombre de messages publiés sur le groupe Facebook
β (taux de significativité)	-0.058 (0.176)
Prédicteur 4 : nombre de tentatives aux questionnaires auto-correctifs
β (taux de significativité)	-0.067 (0.345)
Prédicteur 5 : score au pré-test
β (taux de significativité)	-0.385 (0.000)

3.3.  Question 3 - Quels profils d’apprenants se distinguent dans l’environnement d’apprentissage MOOC de type hybride ?

34Pour répondre à cette dernière question de recherche, le sous-échantillon (N = 530) faisant l’objet de nos analyses était constitué des sujets satisfaisant aux critères suivants : avoir participé au pré-test ainsi qu’au post-test, avoir visionné au moins une vidéo d’au moins un module d’apprentissage et participé aux exercices intégrés dans celle-ci, avoir publié au moins un message sur l’un des outils communicationnels.

35Pour dégager des profils d’apprenants éventuels, nous nous intéressons, d’une part, aux différentes variables liées au processus d’apprentissage (visionnage des vidéos, participation aux exercices, messages sur les outils communicationnels) et, d’autre part, aux scores au pré-test ainsi qu’au post-test. Nous souhaitons catégoriser les apprenants selon leur utilisation des ressources pédagogiques (informatives, formatives et interactives) proposées dans le MOOC hybride et leurs performances. Dans notre recherche, l’approche TwoStep Cluster est appropriée dans la mesure où elle permet « de sélectionner automatiquement le meilleur nombre de clusters, en plus des mesures de sélection parmi des modèles de cluster. Elle offre également la possibilité de créer simultanément des modèles de cluster sur la base de variables catégorielles et continues  » (Temperman & De Lièvre, 2016, p. 14). Cette approche « consiste à créer rapidement un pré-regroupement des observations en un nombre élevé de classes à l’aide d’une méthode de partitionnement rapide, puis à réaliser une agrégation hiérarchique à partir de ces pré-clusters pour bénéficier de la lisibilité des résultats associée au dendrogramme. » (Rakotomalala 2016, p. 1).

36L’avantage de cette méthode est qu’elle permet de découvrir le nombre optimal de classes et offre également une visualisation de la proximité entre les classes ou les objets (ce qui n’est pas possible pour la méthode «  nuées dynamiques  », que nous avons mobilisée antérieurement). Comme l’expliquent Yves Moulin et Sébastien Point (2012, p. 11), ce type d’analyse exploratoire réalisée via le logiciel SPSS permet de « révéler des groupements naturels (ou classes) au sein d’un ensemble de données  » tout en dégageant les variables qui contribuent fortement (ou faiblement) à structurer cette catégorisation.

37Cette méthode nous permet de regrouper les sujets en classant les 530 apprenants (soit, 288 apprenants enrôlés et 242 apprenants spontanés) et en mettant en lumière la hiérarchisation des variables sélectionnées pour l’opération de classification. Les variables prises en compte concernent les ressources informatives, formatives et interactives mobilisées par les apprenants : nombre de diapositives constituant les capsules vidéo-pédagogiques des différents modules du MOOC qu’ils ont visionnées, nombre de tentatives réalisées dans les questionnaires auto-correctifs et, enfin, nombre de messages publiés sur le forum ou sur le groupe Facebook. Nous avons également pris en compte les scores obtenus au pré-test et au post-test de manière à mettre en évidence une potentielle évolution liée au processus d’apprentissage. Nous avons préalablement standardisé ces variables, initialement quantifiées sur des échelles différentes, afin de pouvoir procéder à l’analyse (conversion de nos données en notes Z).

38Dans un premier temps, nous allons nous focaliser sur les apprenants enrôlés. Le tableau 9 ci-après présente les scores Z moyens pour chaque variable prise en compte et pour les trois clusters que l’analyse Two-step Cluster a générés pour les sujets enrôlés.

39Le premier cluster rassemble 54.50 % des sujets de ce groupe (N = 157), le deuxième 38.50 % (N = 111). Le troisième cluster ne réunit comparativement qu’un nombre relativement faible d’apprenants (N = 20, soit 6.90 %). La figure 4 traduit sous forme graphique le tableau 9. Elle permet d’apprécier les caractéristiques des apprenants enrôlés appartenant aux trois clusters identifiés.

Tableau 9 - Scores Z moyens par variable et par cluster pour les enrôlés

	Cluster 1	Cluster 2	Cluster 3
Score au pré-test	-0.12	-0.15	0.10
Nombre de diapositives visionnées	-0.71	0.91	0.14
Nombre de tentatives aux questionnaires auto-correctifs	-0.79	0.96	0.36
Nombre de messages publiés sur le forum	-0.21	-0.12	1.67
Nombre de messages publiés sur le groupe Facebook	-0.27	-0.26	0.08
Score au post-test	0.05	0.09	-0.26
Effectif du cluster	157	111	20
% de sujets par cluster	54.50	38.50	6.90

40Le cluster 1 regroupe 157 apprenants que nous qualifions de «  non-engagés enrôlés  »  ; nous constatons en effet qu’ils utilisent généralement systématiquement moins les différentes ressources pédagogiques qui leur sont proposées dans le MOOC que les autres sujets.

41Bien que leur score moyen au pré-test soit, comme celui des sujets du cluster 2, inférieur à celui des sujets du cluster 3 (qui ont comme caractéristique d’investir plus intensément les outils communicationnels proposés dans le MOOC), nous notons que leur score au post-test surpasse celui de ces derniers, traduisant donc une meilleure progression.

42Nous constatons que les 111 apprenants du cluster 2, que nous nommons «  engagés modérés enrôlés  », sont ceux qui investissent le plus les ressources informatives (vidéos) et formatives (exercices) proposées dans le MOOC. Leur mobilisation des outils communicationnels est très proche de celle des sujets du cluster 1, toutes deux moins intenses que celle des apprenants du troisième groupe. En termes de résultats au pré-test et au post-test, ils présentent les mêmes caractéristiques que les sujets du cluster précédemment présenté. Comme ces derniers, bien qu’ils aient obtenu des résultats plus faibles au pré-test que les sujets du cluster 3, ils les surpassent au post-test. Enfin, le troisième cluster réunit 20 sujets que nous caractérisons de «  peu engagés moyennement communicants enrôlés  ». Ces sujets ont la particularité d’avoir obtenu les résultats les plus élevés au pré-test. Ils ont, durant leur parcours, moins utilisé les ressources informatives et formatives que les sujets du cluster 2, mais davantage que les premiers. Ils se démarquent par leur utilisation plus intense des ressources communicationnelles (et tout particulièrement en ce qui concerne le forum FUN). En fin de parcours, ils présentaient cependant le niveau de performance le plus faible au post-test.

43Trois clusters ont également été dégagés pour caractériser les apprenants spontanés. Le tableau 10 ci-après présente les scores Z moyens pour chaque variable prise en compte et pour les trois clusters obtenus pour ces sujets.

Tableau 10 - Scores Z moyens par variable et par cluster pour les spontanés

	Cluster 1	Cluster 2	Cluster 3
Score au pré-test	0.26	0.00	0.11
Nombre de diapositives visionnées	-0.72	0.82	1.00
Nombre de tentatives aux questionnaires auto-correctifs	-0.81	0.98	0.69
Nombre de messages publiés sur le forum	-0.07	-0.22	3.54
Nombre de messages publiés sur le groupe Facebook	0.18	0.08	2.89
Score au post-test	0.02	-0.16	0.07
Effectif du cluster	125	104	13
% de sujets par cluster	54.50	38.50	6.90

44Le premier cluster comporte 51.70 % des sujets de ce groupe (N = 125), le deuxième 43.00 % (N = 104) et, comparativement, le troisième ne réunit, encore une fois, qu’un nombre relativement faible d’apprenants (N = 13, soit 5.40 %). La figure 5 ci-après traduit sous forme graphique le tableau 10 et nous permet d’apprécier les caractéristiques des apprenants spontanés relevant des trois clusters identifiés.

45Le cluster 1 regroupe 125 apprenants que nous qualifions de «  non-engagés spontanés  », car nous constatons qu’ils ont généralement moins tendance que les autres à utiliser les différentes ressources pédagogiques proposées dans le MOOC. Leur score moyen au pré-test était toutefois un peu plus élevé que celui des apprenants des deux autres clusters, ce qui reste le cas pour leur score au post-test par rapport à celui des sujets du cluster 2, mais pas par rapport à celui des sujets du cluster 3, qui les dépassent.

46Les 104 apprenants du cluster 2, les «  engagés modérés spontanés  », ont un score moyen au pré-test plus faible que celui des sujets des deux autres clusters. Si leur utilisation des ressources informatives (visionnage des vidéos) et surtout formatives (exercices auto-correctifs) est nettement plus importante que celles des apprenants du cluster 1, nous remarquons qu’il s’agit de la catégorie d’apprenants qui mobilise le moins les ressources interactives (groupe Facebook et forum FUN). Nous constatons enfin que ces «  engagés modérés spontanés  » sont les apprenants qui réalisent la plus faible performance finale. Enfin, les 13 sujets du cluster 3, que nous caractérisons d’« engagés modérés communicants spontanés », sont caractérisés par l’utilisation autonome des ressources informatives (vidéos) la plus élevée des trois groupes. Ils semblent cependant utiliser un peu moins les questionnaires auto-correctifs qui y sont intégrés que les sujets du cluster 2. En revanche, leur utilisation autonome des ressources communicationnelles est, très clairement, plus intense que celle des sujets des deux autres clusters. Alors que leur performance au pré-test atteignait un niveau intermédiaire à ceux caractérisant les autres groupes, leurs résultats au post-test sont les plus élevés de tous. Nous avons donc pu identifier, dans les différents niveaux d’analyse envisagés, des clusters dont les caractéristiques peuvent être mises en rapport de manière similaire.

4.  Discussion

47Nos analyses indiquent que le niveau de performance moyen des apprenants des deux groupes s’élève globalement à 64.17 %. Nous ne relevons pas de différences significatives entre les apprenants enrôlés et spontanés à ce niveau. Nous avons généré un modèle de régression pour tenter d’expliquer la progression des apprenants inscrits au MOOC. Si ce modèle ne nous permet pas de mettre en évidence les variables issues du processus d’apprentissage qui peuvent expliquer la progression, il nous renseigne sur le fait que ce sont les apprenants ayant un niveau initial faible qui progressent le plus. En outre, nos résultats montrent que 80.43 % des apprenants inscrits au MOOC progressent entre le pré-test et le post-test. Cette progression peut être objectivée par un gain relatif moyen de 36.77 %. Nous n’avons pas relevé de différence significative entre les sujets spontanés et enrôlés.

48Le groupe d’appartenance n’influence donc pas la progression ou la régression des sujets. De plus, nous ne relevons pas de différence significative entre les participants des deux groupes en termes de progression entre le pré-test et le post-test du MOOC. De ce fait, nous pouvons confirmer que le MOOC hybride analysé a favorisé la progression de tous les apprenants, spontanés comme enrôlés.

49Trois profils d’apprenants se sont dégagés de nos analyses visant une catégorisation des apprenants selon leur utilisation autonome des ressources pédagogiques (informatives, formatives et interactives) proposées dans le MOOC hybride et leurs performances. Deux profils sont présents dans les deux groupes d’apprenants spontanés ou enrôlés : les «  non-engagés  » et les «  engagés modérés  ». Les «  non-engagés spontanés  » et les «  non-engagés enrôlés  » sont les plus nombreux et se distinguent des autres catégories d’apprenants par leur usage limité des ressources pédagogiques. Ce type d’utilisateurs peut s’apparenter aux « observers » de Phil Hill (2013), qui se connectent dans le MOOC pour utiliser de manière superficielle les ressources intégrées. Ces comportements ne sont toutefois pas spécifiques aux apprenants des MOOC : en effet, plusieurs auteurs affirment que les apprenants ont souvent tendance, même en situation d’apprentissage en présentiel, à faire preuve de passivité (Eison, 2010 ; Bernstein, 2014). Qu’ils soient enrôlés ou spontanés, les «  engagés modérés  » s’investissent davantage dans le MOOC en visionnant quelques capsules pédagogiques et en participant de manière modérée aux exercices. Nous remarquons en effet qu’ils font un plus grand usage des ressources informatives (visionnage des vidéos) et surtout formatives (exercices). Néanmoins, cela ne leur permet pas d’atteindre de hauts niveaux de performance. Nous mettons également en évidence qu’ils n’utilisent que peu les outils communicationnels. Ces sujets ont également le niveau le plus faible au départ ; ils ont donc besoin de s’entraîner. Cela expliquerait leur investissement plus intensif dans les exercices. Nous présupposons que ces apprenants n’utilisent pas les outils communicationnels, car ils n’en perçoivent pas l’utilité pour apprendre (Davis, 1989). À l’instar des lurkers de Colin Milligan et ses collègues (2013), ces «  engagés modérés  » (enrôlés ou spontanés) suivent le cours en ligne en réalisant les différentes tâches demandées sans nécessairement s’investir dans les forums de discussion. Ce constat a également été opéré par Daniel Onah et ses collègues (2014), qui précisent que l’usage des outils communicationnels dans les MOOC est souvent réduit et ne concerne qu’une minorité d’apprenants. Selon Rita Kop (2011), le manque d’interactions des apprenants au moyen des outils de communication serait lié à leur grand nombre. Les apprenants n’osent pas forcément poser leurs questions sur les forums par peur d’être jugés par leurs pairs (Chagnoux & Lavielle-Gutnik, 2017). Finalement, nous observons tant chez les spontanés que les enrôlés une minorité d’apprenants qui mobilisent davantage les outils communicationnels que les autres clusters de leurs groupes respectifs. Le comportement de ces apprenants n’est pas sans rappeler celui des utilisateurs que Franza Grunewald et ses collègues (2013) qualifient de reacting pour leur tendance à participer aux échanges en commentant et en réagissant aux différentes publications de leurs pairs. Nous retenons qu’au sein des deux groupes spécifiques se dégage un petit groupe de sujets «  ultra-communicants  » dont les trajectoires diffèrent selon leur statut : chez les spontanés, cette «  sur-communication  » relative ne les a pas empêchés de présenter les meilleurs résultats finaux, ce qui n’est pas le cas pour les sujets enrôlés ayant adopté des comportements communicationnels équivalents.

50Pour conclure, nous constatons que, quelles que soient les ressources utilisées par les apprenants de ces différents clusters, tous les participants obtiennent sensiblement les mêmes résultats au post-test. Si nous sommes conscients que l’absence d’un groupe contrôle peut être une limite, car il ne nous est pas pleinement possible d’effectuer une comparaison objective afin d’imputer avec assurance les performances et la progression des sujets à leur seul investissement dans le MOOC hybride, nous pensons toutefois que cette recherche réalisée dans une situation réelle de formation peut nous aider à mieux comprendre les mécanismes d’apprentissage à partir de l’exploitation des traces et des profils initiaux des apprenants. Nos analyses montrent également que les enseignants sont amenés à gérer une grande hétérogénéité de comportements des participants et des profils d’apprenants très différents. Dans cette perspective, il nous semble important de privilégier dans ce type de dispositif davantage de parcours différenciés selon les besoins des apprenants, et adaptés à leurs motifs d’engagement, à leur niveau de maîtrise à l’entrée ainsi qu’aux modalités d’apprentissage qu’ils privilégient. Ce type d’approche ambitionne de permettre à tous les apprenants d’atteindre les mêmes objectifs d’enseignement et/ou de formation en empruntant des voies différentes qui reposeraient sur leur singularité. Bien évidemment, il ne s’agit pas d’isoler les apprenants dans leur parcours, mais plutôt de maximiser leurs chances de réussite en répondant directement à leurs besoins, en leur proposant, par exemple, de collaborer au sein de groupes générés de manière à valoriser les atouts de chacun de façon optimale.