Skip to navigation – Site map

HomeIssues XXX-1Écrire l’histoire des luttes en G...

Écrire l’histoire des luttes en Grande-Bretagne : people’s history et history from below

Writing the History of Protest Movements in Britain : People’s History and History from below
Delphine Frasch and Marion Leclair

Abstracts

This paper traces the origins of British “history from below” back to 19th-century people’s history and labour history, and charts its evolution onwards, as it was shaped in turn by the “Popular Front” communism of the 1930s, the heterodox marxism of the “New Left” in the late 1950s, the social and countercultural movements of the late 1960s up to “Women’s Lib” in the 1970s. Though the term itself, which gained ground in the 1980s as a byword for a cultural history of the people, whose template could be applied to a variety of times and places, seems to point to a shared theme, method and ideology, it encompasses potentially contradictory intellectual and political projects, as was emphasised by Raphael Samuel as early as 1979. 

Top of page

Full text

Introduction

  • 1 Hobsbawm Eric, « L’Histoire populaire » (1988), in Marx et l’Histoire, traduction de Christophe Mag (...)
  • 2 Bède le Vénérable, Histoire ecclésiastique du peuple anglais, traduction de Pierre Monat et Philipp (...)
  • 3 Berger Stefan et Conrad Christoph, The Past as History: National Identity and Historical Consciousn (...)
  • 4 Pittock Murray G.H., « Historiography », in Broadie Alexander (dir.), Cambridge Companion to the Sc (...)
  • 5 Macaulay Thomas B., Histoire d’Angleterre (1848-1861), traduction de Jules de Peyronnet et Amédée P (...)
  • 6 Macaulay Thomas B., « History » (1828), in Complete Works of Thomas Babington Macaulay, Hastings, D (...)
  • 7 Green John R., A Short History of the English People (1874), Londres, Folio Society, 1992.
  • 8 Brundage Anthony, The People’s Historian: John Richard Green and the Writing of History in Victoria (...)

1« L’histoire des gens ordinaires (common people) comme sujet d’étude commence […] avec les mouvements de masse du xviiie siècle1. » On pourrait juger bien injuste cette déclaration d’Eric Hobsbawm : le moine Bède (673-735) ne prétend-il pas déjà écrire une histoire de la gens Anglorum2 ? Si on n’attend donc pas le xviiie siècle pour écrire des histoires du peuple, néanmoins, ce « peuple » s’incarne longtemps dans les dynasties régnantes. Leur public, en outre, dépasse rarement les frontières d’une élite « faite de savants, diplomates, politiciens, membres de clergé et aristocrates3 ». C’est bien au xviiie siècle que les premières histoires de la société civile sont écrites, particulièrement depuis l’Écosse4. Ces histoires philosophiques trouvent un aboutissement plus empirique dans le troisième chapitre du premier tome de la populaire Histoire d’Angleterre de Thomas Babington Macaulay5. Celui-ci, raillant l’historien « respectable » qui après avoir « dîné avec le roi » croit avoir vu l’Angleterre, prétend quant à lui « se mêler aux foules de la bourse et du coffee-house » et même se glisser « à la table conviviale et dans le foyer domestique » des « personnes ordinaires »6. Durant la seconde moitié du xixe siècle, cette histoire du peuple prend un nouveau visage aux mains d’historiens liés à la nouvelle école historique d’Oxford comme William Stubbs, E.A. Freeman ou J.R. Green, dont la Short History of the English People7 atteint le demi-million de ventes avant la fin du siècle8.

  • 9 Burrow John W., A Liberal Descent: Victorian Historians and the English Past, Cambridge, Cambridge (...)

2Néanmoins, s’il s’agit là assurément de formes de people’s history – à la fois histoires du peuple et histoires populaires –, on n’a pas affaire à une history from below (histoire par le bas), au sens d’une histoire centrée sur la plèbe (les common people, classes populaires incluses) par distinction avec les élites, et sur l’agentivité (agency) individuellement ou collectivement déployée. Outre que Macaulay exclut assez franchement les classes populaires (rurales et urbaines) de son « peuple », ce dernier n’est que le véhicule des lois universelles de la civilisation. Ces lois, combinées à la vertu exceptionnelle de l’élite politique anglaise, conduisent au triomphe de la nation contemporaine assis sur la monarchie parlementaire. Stubbs, Freeman et Green proposent une version « populiste9 » du récit whig de Macaulay, avec un peuple plus plébéien et plus actif, mais servant toujours un récit de réconciliation nationale.

  • 10 Geerkens Eric, Hatzfeld Nicolas, Lespinet-Moret Isabelle, Vigna Xavier (dir.), Les enquêtes ouvrièr (...)
  • 11 Engels Friedrich, La situation de la classe laborieuse en Angleterre (1ère édition allemande 1845), (...)
  • 12 Mayhew rassemble une partie des articles, en les retravaillant, dans Mayhew Henry, London Labour an (...)
  • 13 Voir par exemple Thompson Edward Palmer, Yeo Eileen (dir.), The Unknown Mayhew. Selections from the (...)
  • 14 Webb Beatrice et Sidney, Histoire du trade-unionisme. Les origines – la période révolutionnaire (17 (...)
  • 15 Hammond Barbara et John, The Village Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1911 ; (...)

3C’est également durant la seconde moitié de xixe siècle qu’apparaissent, hors de l’université, les prémisses de l’histoire ouvrière (labour history). Cette dernière s’invente depuis une tradition fort éloignée des grands récits nationaux : celle des enquêtes sur la condition ouvrière, commandées par le Parlement mais également déployées depuis les organisations ouvrières et socialistes10. Friedrich Engels avait publié dès 1845 une description des conditions de travail et d’existence de la « classe laborieuse en Angleterre11 ». En 1849-1850, le journaliste Henry Mayhew produit une importante série d’articles pour le Morning Chronicle sur la condition des ouvrier·es et des pauvres de Londres ; rééditées à plusieurs reprises12, ces enquêtes fascinent tant les contemporain·es que les historien·nes sociaux/ales du siècle suivant par leur rigueur, leur épaisseur descriptive, et par les voix populaires qu’elles laissent résonner13. Depuis les rangs de la Société fabienne (fondée en 1884), Beatrice et Sidney Webb écrivent une histoire du trade-unionisme, qui constitue jusqu’aux années 1960 l’ouvrage de référence sur le sujet14. Dans les années 1910, Barbara et John L. Hammond publient trois études influentes des effets du capitalisme industriel sur les classes populaires15. Néanmoins, cette histoire ouvrière précoce dépeint rarement les membres des classes populaires comme des agents culturels et historiques. Elles sont plutôt envisagées, ou bien à travers leurs conditions de vie et de travail (souvent décrites comme intolérables), ou bien à travers les organisations supposées représenter leurs intérêts (et souvent célébrées).

Débuts communistes de l’histoire par le bas

  • 16 Dimitrov Georgi, The United Front. The Struggle Against Fascism and War, Londres, Lawrence and Wish (...)
  • 17 Bounds Philip, British Communism and the Politics of Literature, 1928-1939, Londres, Merlin Press, (...)
  • 18 Cole G.D.H. et Postgate Raymond, The British Common People, 1746-1938, Londres, Methuen, 1936.
  • 19 Morton A.L., A People’s History of England, Londres, Victor Gollancz Ltd, 1938, p. 410.

4Il faut attendre les années 1930 pour qu’émergent des formes d’histoire par le bas, à partir d’une fusion entre l’histoire ouvrière et l’histoire whig populiste érigeant le peuple national en héros de son histoire. Le contexte politique joue ici à plein : la stratégie dite du « Front populaire » formulée en 1935 lors du viie Congrès International du Komintern par Georgi Dimitrov promeut l’alliance entre les forces démocratiques de chaque nation contre le fascisme, guidée par les partis communistes européens. Dimitrov enjoint donc aux intellectuel·les associé·es à ces derniers de réécrire l’histoire nationale pour révéler, dans les luttes sociales et les contestations intellectuelles du passé, une culture démocratique s’accomplissant au présent dans le mouvement ouvrier guidé par le PC16. Si de telles directives invitent à l’instrumentalisation et la déformation, elles permettent également aux intellectuel·les de redéfinir (dans certaines limites) le projet communiste au-delà du seul modèle soviétique17, en accordant une attention inédite aux mouvements populaires et contestataires du passé. Un tel contexte innerve la production historienne au-delà du seul PC : en 1936, les socialistes G.D.H. Cole et Raymond Postgate publient The British Common People, une histoire par le bas de la Grande-Bretagne entre 1746 et 193818. Il s’agit d’un récit des effets de la révolution industrielle sur les conditions de vie populaires, et de luttes sociales et démocratiques continues débouchant sur le mouvement ouvrier et le socialisme. Deux ans plus tard, c’est au tour du communiste Arthur Leslie Morton de publier A People’s History of England : dans une reprise avouée du récit national de Green, Morton raconte l’histoire de l’Angleterre, des origines romaines à 1937, comme la lente auto-formation politique de la plèbe nationale, débouchant finalement sur « l’organisation de la classe ouvrière19 », le socialisme internationaliste, et l’horizon d’un front populaire antifasciste.

  • 20 Hobsbawm Eric, « The historians’ group of the Communist Party », in Cornforth Maurice (dir.), Rebel (...)
  • 21 Dobb Maurice et Hill Christopher et Saville John et Thomson George, « Foreword », in Saville John ( (...)
  • 22 Shohat Gil, « Political Activism, Academic Merit and Committee Meetings. The Communist Party Histoi (...)
  • 23 Hilton Rodney, Fagan Hyman, The English Rising of 1381, Londres, Lawrence and Wishart, 1950, p. 9.
  • 24 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain. History, the New Left, and the Origins of Cult (...)
  • 25 Hilton Rodney, « Peasant movements in England before 1381 », Economic history review, n° 2/2, 1949, (...)
  • 26 Hill Christopher, The English Revolution 1640, Londres, Lawrence and Wishart, 1940.
  • 27 Hobsbawm Eric, « The Machine Breakers », Past & Present, no1/1, 1952, p. 57-70.
  • 28 Voir les études rassemblées dans Rudé George, Paris and London in the Eighteenth Century. Studies i (...)

5Le projet de réviser l’histoire de Morton constitue l’un des ressorts de la constitution, en 1946, du désormais célèbre Communist Party Historians’ Group20 pour qui « l’histoire était la sueur, le sang, les larmes et les triomphes du peuple ordinaire, notre peuple21 ». Si le nombre de membres s’élève dans les premières années à plus de 100 personnes, seules 25 à 30 d’entre elles constituent des participant·es régulier·es22. Les recherches portent particulièrement sur les mouvements sociaux, en vue de nourrir une réinterprétation de l’histoire britannique – et surtout, là encore, anglaise – qui mette au jour la présence transversale de la lutte des classes, en un sens large et attentif à la subjectivité des acteur·rices, aux « motifs et [aux] buts, insuffisamment consignés, non plus des oppresseurs mais des opprimés23 » (même si les perspectives déterministes ne sont pas absentes24). Le groupe des médiévistes reconstruit la révolte paysanne de 1381 comme le point culminant d’une tradition de résistance pluriséculaire25. Les modernistes travaillent l’hypothèse formulée dès 1940 par Christopher Hill, qui analyse les années 1640-1660 comme une authentique « révolution » (plutôt qu’une simple guerre civile), creuset d’une classe bourgeoise capitaliste mais également d’idées démocratiques et même communistes (promptement réprimées)26. Le groupe contemporanéiste, auquel appartiennent John Saville et Dorothy Thompson (et, de manière périphérique, E.P. Thompson), est soumis à un contrôle plus étroit de la part des cadres du PC ; néanmoins, Hobsbawm livre déjà une relecture influente des actions des « briseurs de machine » comme forme précoce de lutte des classes (au sens restreint)27. Ces recherches foisonnantes se nourrissent de liens avec l’histoire marxiste française centrée sur la Révolution française (George Lefebvre, Albert Soboul), via la figure de George Rudé, l’un des rares à travailler sur le xviiie siècle et – outre Hobsbawm – à s’extraire du cadre national, dressant des comparaisons entre le « menu peuple » parisien et londonien28.

Les années 1960 : marxisme hétérodoxe et histoire sociale par le bas

  • 29 Hill Christopher, Hilton Rodney, Hobsbawm Eric, « Past and Present: Origins and Early Years », Past (...)
  • 30 La littérature secondaire sur la New Left britannique est considérable. On peut se référer avec pro (...)

6L’un des accomplissements durables du groupe est la création de la revue Past & Present, avec pour sous-titre initial A Journal of Scientific History. Son premier numéro paraît en février 1952, et son ethos soigneusement professionnel participe d’une volonté de convaincre au-delà des cercles communistes – dans le prolongement de la stratégie « Front populaire »29. Mais le groupe constitue également, après le « rapport secret » de Khrouchtchev de février 1956 puis la répression de la révolte hongroise par l’URSS en novembre, une chambre d’incubation pour les contestations internes au parti, puis pour l’émergence d’un socialisme indépendant. Saville et Thompson, contraints à la rupture avec le PC, lancent le New Reasoner – qui devient en 1959 New Left Review – et s’impliquent dans le mouvement anti-nucléaire. Cette New Left rassemble bientôt une galaxie remarquablement riche d’initiatives politiques et intellectuelles30.

  • 31 Hobsbawm Eric, The Age of Revolution, 1789-1848 (Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1962) ; The Age of (...)
  • 32 Thompson Edward Palmer, « The Free-Born Englishman », New Left Review, I/15, 1962.

7Communistes et ex-communistes restent toutefois suspects dans un contexte marqué par la guerre froide, et la chasse aux sorcières, certes moins virulente au Royaume-Uni qu’aux États-Unis, complique leur carrière. L’histoire qu’ils produisent s’écrit donc plutôt depuis les marges de l’université. Elle est aussi soucieuse de rester accessible à un public non-universitaire. La série des quatre Age of… pour laquelle Hobsbawm est sans doute le plus connu aujourd’hui31, qui brosse une histoire mondiale synthétique des xixe et xxe siècles, est publiée par un éditeur commercial, Weidenfeld & Nicolson, qui ne publie pas exclusivement de l’histoire. La Formation de la classe ouvrière anglaise de Thompson a d’abord une diffusion militante (certains chapitres paraissent sous forme d’articles dans la New Left Review32) et le livre est publié par Victor Gollancz, pionnier de la démocratisation intellectuelle et politique, qui avait lancé le Left Book Club et soutenu les enquêtes sociales de Mass-Observation dans les années 1930.

  • 33 Samuel Raphael, « People’s History », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theo (...)
  • 34 Hobsbawm Eric, Interesting Times, Londres, Abacus, 2003, p. 288-289.
  • 35 Rudé George, The Crowd in English History: A Study of Popular Disturbances in France And England, 1 (...)

8Ce souci d’« élargir la base de l’histoire33 » se retrouve aussi, thématiquement, dans l’intérêt pour les luttes populaires et l’histoire ouvrière hérité du Historians’ Group. Il recouvre aussi un effort pour élargir la discipline historique en y faisant entrer les sciences sociales, dans une perspective modernisatrice partagée avec l’école française des Annales34. Thompson, Hobsbawm et Rudé, importent ainsi les méthodes et les questionnements de la sociologie et de l’anthropologie dans leurs travaux, qui sont parfois mieux reçus par les sociologues que par les historiens. L’élargissement, enfin, concerne les documents historiques mobilisés. En 1964, Rudé exhorte ainsi à l’usage des archives du mouvement ouvrier, archives judiciaires et policières, registres de prisons, d’hôpitaux, de l’assistance publique qui permettent d’entrevoir la vie de « ceux qui n’ont que trop rarement laissé de trace directe sous la forme de mémoires, de lettres ou de tracts », et d’écrire une autre histoire que l’histoire officielle des dirigeants35 .

  • 36 Marx Karl, Contribution à la critique de l’économie politique (1ère édition allemande 1859), traduc (...)
  • 37 Rudé George, « The Changing Face of the Crowd », in Curtis L.P. (dir.), The Historian’s Workshop, N (...)
  • 38 Lee-Six Edward, « ‘Culture’ dans l’oeuvre de Raymond Williams », in Adjerad Gabrielle, Goudmand Ana (...)

9L’histoire qu’ils écrivent est tributaire d’un même modèle marxiste, posant la détermination de la « superstructure » idéologique par la « base » des rapports sociaux de production, et la lutte des classes en principe moteur de l’histoire36. Ce modèle est toutefois révisé dans un sens moins déterministe, par l’agentivité que tous trois reconnaissent aux acteurs (et dans une moindre mesure, aux actrices) de l’histoire et par la « force matérielle » qu’ils accordent aux idées « dès lors qu’elles sont absorbées dans la conscience active des hommes37 » – soulignant du même coup la dimension infra-discursive, affective et vécue, de l’idéologie politique. Ils ménagent ainsi une place considérable à la culture : entendue comme un mode de vie tout entier, dans le sens que lui donne l’anthropologie et qui s’impose à la même époque dans les cultural studies sous la plume de Raymond Williams, de Richard Hoggart et de Stuart Hall38, celle-ci tend à devenir une catégorie-reine qui englobe rapports sociaux, mentalités, pratiques, et, ce faisant, à dissoudre la distinction entre base et superstructure.

  • 39 Hobsbawm Eric et RudÉ George, Captain Swing (1969), Londres, Verso, 2014, p. 12.
  • 40 Sur l’importance des artisans cordonniers, du fait des conditions d’exercice de leur métier (compat (...)

10Cet intérêt pour la culture populaire est manifeste dans Captain Swing où Hobsbawm et Rudé définissent leur tâche d’« historiens sociaux » comme un effort pour « reconstruire l’univers mental d’une masse de gens anonyme dont on ne sait rien, de façon à en reconstruire les mouvements, qui ne sont que très imparfaitement documentés39 ». Ils commencent par dresser un tableau économique de l’Angleterre rurale au sortir des guerres napoléoniennes, capitalisée par les enclosures parlementaires du xviiie siècle, paupérisée par la chute des prix agricoles et l’effet pervers de l’assistance aux pauvres sur l’emploi, menacée par la multiplication des batteuses mécaniques. Ils mettent aussi en avant l’importance, dans le déclenchement des révoltes agraires, de facteurs moins directement matériels : celle du mouvement radical urbain du début des années 1830, qui essaime dans les campagnes via les bourgs (market towns) et les artisans ruraux comme les cordonniers40 ; et celle du sentiment d’injustice animant les travailleur·ses agricoles face à la disparition du sentiment d’obligation mutuelle entre employeur et employé et de certains droits coutumiers qui leur rendaient tolérable la société villageoise traditionnelle paternaliste et hiérarchisée.

  • 41 Rudé George, The Crowd in History, op. cit., p. 149-163.
  • 42 Thompson Edward Palmer, « The Moral Economy of the English Crowd », Past & Present, no 50/1, 1971, (...)

11The Crowd in History, de George Rudé, analyse dans les mêmes termes les Rebecca Riots, du nom dont se faisaient appeler les meneurs de ces émeutes, souvent déguisés en femme, qui surviennent au Pays de Galles en 1838 puis en 1842-1843. Plus que les mauvaises récoltes, plus même que l’essor du mouvement chartiste, c’est l’érection de nouvelles barrières de péage (toll gates) sur les petites routes (side roads) que les paysans avaient coutume d’emprunter, qui motivent les émeutes, au cours desquelles travailleur·ses agricoles et fermiers détruisent les nouvelles barrières considérées comme injustes, sans s’attaquer à celles qu’ils tiennent pour justes41 – en un exemple frappant de ce que Thompson a appelé, dans un article ultérieur consacré aux redistributions de blé lors d’émeutes de la faim, l’« économie morale des foules »42.

  • 43 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise (1963), traduction de Gilles Da (...)
  • 44 Ibid., p. 8-9.

12C’est sans doute Thompson qui va le plus loin dans la remise en question du modèle base/superstructure, en plaidant dans la préface devenue célèbre de La Formation pour une histoire plus inspirée par les textes historiques de Marx, qui fasse davantage droit à l’« agentivité » des travailleurs (et dans une moindre mesure, des travailleuses), « dont les efforts conscients ont contribué à faire l’histoire43 ». Si l’histoire telle que la conçoit Thompson est bien mue par la lutte des classes, il refuse une conception par trop « statique » et passive de la classe comme catégorie objective, décrivant au contraire la classe comme une « relation » dynamique44. La classe ouvrière, dont Thompson retrace la formation entre 1790 et 1830 en Angleterre n’est pas seulement une position dans l’appareil productif du pays, mais la conscience collective d’intérêts partagés, qui surgit à la fois d’une même expérience de l’exploitation industrielle et de traditions politiques plus anciennes.

  • 45 Thompson Edward Palmer, « Time, Work-Discipline, and Industrial Capitalism », Past & Present, no 38 (...)

13Thompson commence par reconstituer, chansons populaires et poèmes à l’appui, cette tradition politique radicale : remontant à la révolution anglaise de 1640, préservée par la continuité du non-conformisme religieux (dissent), elle engendre, dans une Angleterre galvanisée par la révolution française, de nouvelles formes d’organisation politique, plus populaires – les sociétés de correspondance (corresponding societies) à recrutement plébéien qui se déploient bientôt en réseau national. Ensuite seulement s’attache-t-il à décrire l’exploitation des travailleur·ses des villes et des champs, prolétarisé·es par la mécanisation de l’industrie textile et la restructuration agricole des enclosures, et conquis·es par un méthodisme agressivement prosélyte qui leur inculque discipline et morale de travail – alors que la transition du temps villageois des saisons et des clochers au temps industriel des machines et des horloges ne va pas de soi45. Exploitation qui conduit après les guerres napoléoniennes à la résurgence des luttes sociales et politiques auxquelles revient Thompson dans un troisième temps, sous forme clandestine (Pentrich, Cato Street Conspiracy) et insurrectionnelle (Luddite and Swing Riots), puis sous la forme d’un radicalisme plus réformiste : militant pour la liberté de la presse et des syndicats et pour le suffrage masculin, il est porté à la fois par une bourgeoisie encore exclue de la représentation parlementaire et par une classe ouvrière désormais dotée de ses institutions propres (Mechanics Institutes, Hampden Clubs, unstamped press).

  • 46 Engels Friedrich, La Situation de la classe laborieuse en Angleterre, op. cit., p.38.
  • 47 Ibid., p. 267-297.
  • 48 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise, op. cit., p. 19.

14Hétérodoxe par sa façon de définir et d’approcher la classe ouvrière, comme par l’importance qu’elle accorde à la religion (instrument de discipline, mais aussi ferment d’opposition, dans le protestantisme non-conformiste ou le catholicisme des immigrés irlandais), l’histoire de Thompson l’est aussi par son refus de la téléologie que certaines lectures marxistes de l’histoire anglaise partagent avec le progressisme bourgeois du xixe siècle et l’historiographie whig. De fait, dans la Situation de la classe laborieuse en Angleterre, Engels décrit la révolution industrielle comme une force civilisatrice qui a mis fin à l’existence « végétative46 » de la population rurale, et comme une étape nécessaire qui, en concentrant les ouvriers dans les grandes villes et les usines, a créé les conditions de leur coalition révolutionnaire. La Situation distingue aussi entre des formes plus ou moins « grossières » de contestation ouvrière, du crime, au bris de machine et à la société secrète jusqu’à l’organisation syndicale47. Thompson, à l’inverse, valorise bien davantage l’Angleterre pré-industrielle du fermier et de l’artisan, et le répertoire d’idées et de luttes qui en émanent. Il affirme ainsi dans la préface de La Formation, en une formule restée célèbre, vouloir « sauver de l’immense condescendance de la postérité » les perdants de la révolution industrielle, artisans évincés par la mécanisation et millénaristes trouvant dans l’attente du millenium un antidote à leurs espoirs politiques déçus48.

  • 49 Efstathiou Christos, E.P. Thompson: A Twentieth-Century Romantic, Londres, Merlin Press, 2015.
  • 50 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise, op. cit., p. 793.
  • 51 Rudé George, « The Changing Face of the Crowd », art. cit., p. 191.
  • 52 Hobsbawm Eric, Primitive Rebels (1963), Londres, Abacus, 2017, p. 16. En français : Les Primitifs d (...)
  • 53 Hobsbawm Eric, Interesting Times, op. cit., p. 250.
  • 54 Hobsbawm Eric, « British History and the Annales », in Hobsbawm Eric, On History, Londres, Abacus, (...)
  • 55 Thompson Edward Palmer, The Making of the English Working Class, op. cit., p. 210-211.

15Un tel attachement à l’Angleterre pré-industrielle est souvent vu comme la marque d’un romantisme propre à Thompson49, qui érige les ouvriers (et quelques ouvrières) en héro·ïnes du radicalisme populaire50. En vérité, Rudé et Hobsbawm adoptent des positions assez similaires. Le premier évoque son « affection » pour les artisans disparus et les foules révolutionnaires du dernier xviiie siècle et une « identification » avec certains d’entre eux51 ; le second, tout en affirmant que le lecteur des Primitifs de la révolte « n’est pas tenu de sympathiser » avec les « bandits sociaux » qu’étudie le livre52, et en s’alarmant de l’engouement qu’ils suscitent parmi les étudiants français insurgés de mai 196853, décrit son travail d’historien comme une tentative de « rendre aux hommes du passé, en particulier aux pauvres du passé, le don de la théorie », en reconstituant la logique interne de leurs mentalités apparemment contradictoires54.Tous trois partagent ainsi une posture d’empathie affichée envers l’objet d’étude, qui va de pair avec une certaine méfiance envers une histoire (notamment économique) quantitative positiviste, bien visible dans le débat persistent autour du niveau de vie des ouvriers pendant la révolution industrielle (standard of living debate). Thompson oppose ainsi la démarche quantitative du « statisticien », qui mesure des chiffres, à la démarche qualitative de l’« historien social », qui, en s’appuyant sur la littérature publiée par les contemporains, est à même de décrire l’expérience ouvrière55.

  • 56 Rudé George, The Crowd in History, op. cit., p. 1.
  • 57 Hobsbawm Eric, « L’histoire populaire », art. cit.
  • 58 Samuel Raphael, « People’s History », art. cit., p. xv-xxvii.

16C’est ce faisceau de positions politiques (un engagement à gauche), théoriques (un marxisme hétérodoxe), historiographiques (la mobilisation de sources peu exploitées par l’histoire traditionnelle au service d’une histoire empathique des luttes sociales et politiques), éditoriales (le souci d’une diffusion extra-universitaire) qui identifie les travaux de Thompson, Hobsbawm ou Rudé comme relevant d’une même histoire par le bas. Le terme ne s’impose toutefois pas d’emblée : il est absent de la préface de La Formation, qu’on a pourtant tendance à considérer comme un manifeste du genre, et c’est davantage, on l’a vu, sous la bannière de l’histoire sociale, que se positionnent dans les années 1960 aussi bien Thompson, que Hobsbawm et Rudé. Ils ne se revendiquent de l’histoire par le bas que dans des textes plus tardifs qui reconstruisent rétrospectivement une tradition : Rudé salue dans sa préface à la réédition de The Crowd in History en 1981 la nouvelle histoire ouvrière anglaise « par le bas » développée depuis les années 1960 qu’incarnent les travaux de Thompson et de Hobsbawm56 ; Hosbawm consacre en 1985 un essai à « l’histoire par le bas » dont il fait de Rudé l’un des pionniers57 ; et Raphael Samuel, dans l’essai qui introduit les actes du colloque de History Workshop consacré à l’« histoire populaire et à la théorie socialiste », revient sur l’éclosion du mouvement d’« histoire par le bas » porté par Hobsbawm, Thompson et Hill, au sein du Historians’ Group58.

Les années 1970 : History Workshop, féminisme et micro-histoire

  • 59 Voir par exemple Thompson Edward Palmer, « Highly Confidential », in Thompson Edward Palmer (dir.), (...)
  • 60 Samuel Raphael (dir.), History Workshop: A collectanea 1967-1991, Oxford, History Workshop, 1991, p (...)
  • 61 Ibid., p. 77.
  • 62 Gilding Bob, The Journeymen Coopers of East London. History Workshop Pamphlet n° 4, Ruskin, 1971.
  • 63 Kitteringham Jennie, Country Girls in 19th Century England. History Workshop Pamphlet n° 11, Ruskin (...)
  • 64 Samuel Raphael, « Local history and oral history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 191- (...)

17Si nombre d’étudiant·es au sein des cercles d’extrême gauche de la fin des années 1960 se prennent d’enthousiasme pour cette histoire par le bas, et particulièrement pour La Formation – que Penguin publie en livre de poche en 1968 –, les auteurs desdits travaux ne le leur rendent pas vraiment59. Mais l’un des membres les plus jeunes du Historians’ Group, et l’un des organisateurs-clefs de la New Left entre 1956 et 1963, Raphael Samuel, saura rencontrer le mouvement protestataire, et conjointement, donner à l’histoire par le bas une tournure et une ampleur inédites. À partir de 1964, Samuel est tuteur à Ruskin, un collège indépendant rattaché à Oxford, dont le public est principalement constitué d’ancien·nes ouvrier·es financé·es par leur syndicat (worker-students). L’histoire par le bas que Samuel élabore avec ses étudiant·es se reconfigure autour d’un projet inédit : transformer les relations de production des savoirs, contester les rapports de pouvoir et les hiérarchies de légitimité qu’elles impliquent. Pour Samuel, il s’agit de « démocratiser la pratique de l’histoire60 », faciliter l’appropriation de la pratique et du statut de chercheur·se et d’auteur·rice par des individus que tout conspirait à en écarter61 – et ce faisant, (re)créer des espaces où puisse s’opérer l’intégration organique entre expérience de l’oppression, production du savoir, et luttes. Ceci nourrit des innovations dans les sources mobilisées. Des archives orales sont constituées, notamment auprès de personnes âgées de classe ouvrière autour d’Oxford – contribuant à l’avènement de l’histoire orale comme domaine et méthode : Samuel et d’autres Workshopers comme Alun Howkins ou Anna Davin sont étroitement impliqué·es dans la fondation de la Oral History Society et du Oral history journal au début des années 1970 ; Paul Thompson, figure centrale de la Society, est d’emblée lié aux activités du History Workshop. Surtout, l’expérience même des étudiant·es – les vingt ans d’expérience en tonnellerie de Bob Gilding62, l’enfance rurale de Jennie Kitteringham63 – est érigée en document historique légitime. Si les difficultés que recèlent de telles sources ne sont jamais éludées, celles-ci sont déclarées irremplaçables, ouvrant sur des dimensions du passé inaccessibles à travers des archives institutionnelles64.

  • 65 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain, op. cit., p. 97.
  • 66 Samuel Raphael (dir.), History Workshop: A collectanea 1967-1991, op. cit., p. 79. Les treize broch (...)
  • 67 Les deux premiers de la série sont Samuel Raphael (dir.), Village, Life and Labour, Londres, Routle (...)

18Survient alors une heureuse rencontre entre ces pratiques d’enseignement et de recherche originales, et le mouvement de 68, impliquant une « offensive contre-culturelle et radicale dirigée contre la structure hiérarchique de l’enseignement supérieur et les rigidités de la vie académique65 » mais aussi des tentatives d’articulation avec des luttes ouvrières en pleine résurgence (grève des travailleurs de la mer de 1966, occupation des ouvriers de construction navale de 1971, grève des mineurs de 1972). Ce qui n’était qu’une initiative confidentielle impliquant Samuel et une poignée d’étudiant·es, prend alors une ampleur inattendue à travers l’engouement que suscitent les History Workshops. Lors de ces évènements hybrides, à mi-chemin entre expérience pédagogique, colloque universitaire et festival militant, interviennent à la fois des worker-students, des militant·es ouvrier·es (et bientôt, féministes), des enseignant·es, des historien·nes de renom (Hill, Hobsbawm, les Thompson) ou en voie de le devenir (Gareth Stedman Jones, Brian Harrison, Sheila Rowbotham) – face à un public qui se compte rapidement en centaines, parfois en milliers. De 1970 et 1974, Samuel et l’historienne féministe Anna Davin accompagnent l’écriture et la publication des treize Workshop pamphlets, le produit des recherches menées par certain·es worker-students de Ruskin, qui se vendent parfois jusqu’à 2000 exemplaires66. À ces brochures succède promptement la publication d’ouvrages collectifs chez Routledge67 et la création d’une revue, History Workshop Journal, en 1976.

  • 68 Samuel Raphael, « General editor’s introduction : people’s history », in Samuel Raphael (dir.), Vil (...)
  • 69 Gorman John, Banner bright: An Illustrated History of Trade Union Banners (1973), Londres, Scorpion (...)
  • 70 McKenna Frank, A Glossary of Railwaymen’s Talk. History Workshop Pamphlet n° 1, Ruskin, 1970.
  • 71 Dans l’index thématique des numéros 1 à 32 du History Workshop Journal constitué pour l’ouvrage col (...)
  • 72 Alexander Sally, St. Giles Fair, 1830-1914. History Workshop Pamphlet n° 2, Ruskin, 1970.
  • 73 C’est le thème du History Workshop des 5-7 mai 1972 : « Childhood in history : Children’s liberatio (...)
  • 74 Samuel Raphael, « Comers and goers », in Samuel Raphael, Workshop of the world. Essays in People’s (...)
  • 75 Judith Walkowitz intervient lors du History Workshop des 4-6 mai 1973 sur le thème « Work Girls and (...)
  • 76 Harding Arthur et Samuel Raphael, East End Underworld. Chapters in the life of Arthur Harding, Lond (...)
  • 77 Weeks Jeffrey, « ‘Sins and diseases’: Some notes on homosexuality in the nineteenth century », Hist (...)
  • 78 Scott James C., La domination et les arts de la résistance, Paris, Éditions Amsterdam, 2009.
  • 79 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain, op. cit., p. 191.

19Ces initiatives dégagent de nouvelles perspectives historiographiques, avec une focale particulière sur l’histoire britannique du xixe siècle. Comme chez les historien·nes issu·es du Historians’ Group, l’intérêt se porte prioritairement sur les conditions d’existence et de travail des membres des classes populaires, et sur les formes autonomes de culture, de savoir et de lutte qu’elles déploient. Néanmoins, tandis que Hobsbawm, Hill, Rudé ou les Thompson repartaient des révoltes populaires dans une tentative de réécrire « par le bas » l’histoire nationale, les recherches produites autour du History Workshop participent d’autres tropismes historiographiques, caractéristiques des années 1970-1980 : 1) l’intérêt pour le « micro », le procès de travail et plus largement « la vie intime du lieu de travail68 » ; 2) l’intérêt pour la culture populaire (culture matérielle69, sociolectes70, pratiques religieuses71, spectacles et fêtes72) ; 3) l’intérêt pour des figures populaires auparavant négligées – enfants73, migrant·es et autres « itinérant·es (comers and goers)74 », prostitué·es75, criminel·les76, gays et lesbiennes77, etc. La dimension engagée de cette historiographie se traduit par la tentative de mettre au jour un « infrapolitique » au sens de James C. Scott : des formes subalternes de critique des dominant·es qui, comme des rayons infrarouges, tendent à échapper à l’attention tant des dominant·es que des savant·es78. Ceci a en même temps pu faire l’objet de critiques, y compris de la part d’ancien·nes membres du Historians’ Group, reprochant aux Workshopers leur tendance à postuler chez les membres des classes populaires une « propension ‘naturelle’ à résister, se révolter et transformer l’ordre social79 », nuisant à l’analyse des processus macrohistoriques qui informent les pratiques « micro ».

  • 80 Douglass David, Pit Life in Country Durham. History Workshop Pamphlet n° 6, Ruskin, 1972, p. i.
  • 81 Ibid., p. 26
  • 82 Shipley Stan, Club Life and Socialism in Mid-Victorian London. History Workshop Pamphlet n° 5, Rusk (...)

20David Douglass, mineur et militant, propose par exemple une reconstitution minutieuse de la « vie au travail du mineur80 » dans la région de Durham. Il détecte des pratiques informelles de résistance à la discipline de l’usine, qui constituent « un embryon de contrôle ouvrier […] au milieu du système capitaliste81 ». La lutte des classes serait ainsi davantage l’affaire des travailleur·ses ordinaires que des responsables syndicaux. De tels travaux s’articulent sans peine à ceux visant à saisir la culture populaire hors des lieux de travail. Stan Shipley voit par exemple dans les working-men’s clubs londoniens la pépinière d’un radicalisme populaire, où émergent le socialisme et l’anarchisme avant même les années 1880 et la création de la Social Democratic Federation82.

  • 83 Davin Anna, « The London Feminist History Group », History Workshop Journal, n° 1/9, 1980, p. 192-1 (...)
  • 84 Pour plus de détails sur les rapports entre History Workshop et histoire socialiste-féministe brita (...)
  • 85 Rowbotham Sheila, Hidden from history: 300 years of women’s oppression and the fight against it, Lo (...)
  • 86 Davin Anna, « Women & history », in Wandor Michelene (dir.), The body politic, Londres, Stage One, (...)
  • 87 Alexander Sally, « Women’s work in nineteenth-century London », in Mitchell Juliet et Oakley Ann (d (...)
  • 88 Alexander Sally et Davin Anna, « Feminist history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 4-6
  • 89 Alexander Sally, « Women’s work in nineteenth-century London », art. cit., p. 76.
  • 90 Davin Anna, « Women & history », art. cit., p. 217.

21L’histoire féministe britannique des années 1970, tout en se donnant des espaces propres comme le London Feminist History Group83, se trouve prise dans une relation exceptionnellement organique avec cette histoire par le bas socialiste84. L’intérêt pour le travail et les figures populaires négligées peut être redéployé en direction du travail rémunéré et non-rémunéré (travail domestique, soin des plus jeunes et des malades, etc.) des femmes. Rowbotham85, Davin86 et Sally Alexander87 développent ainsi une histoire du travail ouvrier féminin dans l’Angleterre capitaliste, qui peut être dite féministe à trois titres. D’abord, elle déconstruit « l’identification de la femme avec le monde privé du foyer88 », et révèle que le phénomène de la double journée de travail n’a rien de neuf. Elle analyse en outre, au lieu de la tenir pour acquise, la place spécifique à laquelle sont assignées les femmes au sein du marché du travail capitaliste, et l’identifie comme impliquant une surexploitation s’articulant à une précarité extrême89. Elle contribue, enfin, à la mise en lumière des formes d’autonomie et de résistance déployées par ces femmes : Davin évoque par exemple les rires et chants retentissants des ouvrières d’usine, invitant à « étendre la définition conventionnelle de l’activité politique90 ».

  • 91 Liddington Jill et Norris Jill, Histoire des suffragistes radicales, traduction de Laurent Bury, Pa (...)

22L’intérêt pour les oublié·es de la mémoire des luttes offre à ces historiennes la possibilité de mettre en lumière la place des femmes et du féminisme dans le mouvement ouvrier et socialiste. Elles exhument des pratiques et des rêves au sein desquels revendications sociales, socialistes et féministes sont nouées. Ainsi, Jill Liddington et Jill Norris remettent en question le caractère bourgeois du combat pour le suffrage féminin, en reconstituant des luttes suffragistes qui se déploient, loin du mouvement londonien des suffragettes, depuis le cœur du mouvement ouvrier dans la région du Lancashire. Ces « suffragistes radicales91 » revendiquent, à travers un riche répertoire d’action (pétitions adressées au parlement, meetings en plein air), un suffrage universel opposé au suffrage féminin censitaire défendu par certaines suffragettes, et conçu comme une étape pour l’obtention d’autres droits pour les femmes et la classe ouvrière.

  • 92 Taylor Barbara, Eve and the New Jerusalem, Londres, Virago Press, 1983.
  • 93 Rowbotham Sheila, « The trouble with ‘patriarchy’ », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and (...)
  • 94 Alexander Sally et Taylor Barbara, « In defense of patriarchy », in Samuel Raphael (dir.), People’s (...)
  • 95 Ibid., p. 371.

23Néanmoins, les historiennes socialistes-féministes emportent parfois l’histoire par le bas dans des directions plus inattendues. S’appuyant sur les propos furieux de femmes au sein de la « Woman’s Page » (1833-1834) de la revue owéniste The Pioneer, Barbara Taylor n’euphémise pas l’hostilité des ouvriers et artisans à la participation des femmes dans les luttes syndicales et socialistes. Elle l’analyse plutôt comme leur tentative de contrer la menace qu’une telle participation représente pour leur domination sur les femmes, dans un contexte où ils subissent souvent eux-mêmes une perte de pouvoir économique et symbolique92. Et c’est pour développer une attention spécifique à la domination masculine que Taylor, et avec elle Alexander, défendent – contre Rowbotham93 – l’emploi du terme de patriarcat94 ; sans cette attention spécifique, l’histoire par le bas socialiste-féministe risque de « se contenter de faire […] ce que le mariage fait en général aux femmes : les dissoudre dans la partie la plus forte du partenariat95 ».

Vers une nouvelle histoire par le bas ?

  • 96 Voir Scott Joan W., « On Language, Gender, and Working-Class History », International Labor and Wor (...)
  • 97 Gregg Robert et Kale Madhavi, « The Empire and Mr. Thompson », Economic and Political Weekly, no 32 (...)
  • 98 Stedman Jones Gareth, Languages of Class, Cambridge, Cambridge University Press, 1983, p. 8, et « D (...)

24Sous la forme, sociale et marxiste, sous laquelle elle s’est développée dans les années 1960, l’histoire par le bas est vivement contestée à partir des années 1980. On lui reproche à la fois le biais de genre, puis de race, qui, chez Thompson notamment, réduit souvent la classe ouvrière à la classe ouvrière masculine anglaise96, au détriment des travailleur·ses du reste des Îles britanniques et de l’Empire97. Plus fondamentalement, on lui reproche, au moment où tournant linguistique et déconstruction s’imposent dans les universités anglo-américaines, de concevoir la classe comme « réalité sociale antérieure », plutôt que comme construction discursive. Stedman Jones conteste ainsi la relation d’antériorité que présuppose « l’approche anglo-marxiste de l’histoire ouvrière et sociale », entre la réalité sociale et les discours que celle-ci produit : pour lui, la « réalité substantielle » n’est pas accessible autrement que par les « idiomes » dans lesquels elle s’exprime98. Contre cette histoire sociale supposée obsolète, se développe une histoire intellectuelle des luttes sociales et politiques du xixe siècle, devenue enquête génétique sur les sources, l’élaboration et la diffusion (nationale et internationale) des idées radicales et socialistes, à partir d’autres discours (politiques, religieux, esthétiques, médicaux, etc.). C’est aussi une histoire davantage par le haut dans le sens où elle est plus établie dans l’université et moins soucieuse de son dehors, tant comme public-cible que comme réserve de forces pour l’élaboration d’une fabrique démocratique de l’histoire.

  • 99 Epstein James, Radical Expression: Political Language, Ritual, and Symbol in England, 1790-1850, Ne (...)
  • 100 Wood Marcus, Radical Satire and Print Culture, 1790-1822, Oxford, Clarendon Press, 1994.
  • 101 McCalman Iain, Radical Underworld: Prophets, Revolutionaries and Pornographers in Londres, 1795-184 (...)
  • 102 Le sous-titre de l’ouvrage d’Anna Clark reprend explicitement celui de l’ouvrage de 1963, tout en i (...)

25En revanche, l’histoire par le bas telle qu’elle s’est infléchie dans les années 1970 en histoire culturelle des pratiques populaires a un impact et une postérité considérables. Elle inspire de nombreux travaux sur les rituels contestataires, souvent approchés comme autant de symboles. À ce titre, l’histoire des pratiques dans leur dimension symbolique rejoint celle des idées et participe le plus souvent de l’étude des discours. L’analyse des dîners, toasts et bonnets phrygiens dont font usage les radicaux au cours du premier xixe siècle99, des chansons, caricatures, artefacts et graffitis qui constituent la culture visuelle du mouvement100, des lieux, publics et clandestins, qui constituent leurs espaces de sociabilité101, devient ainsi partie intégrante de l’histoire du radicalisme. Conjointement, dans le sillage de l’histoire socialiste-féministe des années 1970, certains travaux cherchent à penser l’intrication des dynamiques de classe et de genre : dans un prolongement critique du projet thompsonien102, Anna Clark analyse les différents rapports de genre impliqués dans la formation de la classe ouvrière britannique – entre réaffirmations d’une domination misogyne (par les artisans), formes inédites de coopération (chez les travailleur·ses textiles), et appropriations de la culture bourgeoise de la domesticité.

  • 103 Chitra Joshi, « A Thompson Moment in the late 1970s » et Lara Silvia, «  E. P. Thompson, the Egg, a (...)
  • 104 Thompson, Edward Palmer, Customs in Common, Londres, Merlin Press, 1991.
  • 105 Cerutti Simona, « Who is below? E. P. Thompson, historien des sociétés modernes : une relecture », (...)
  • 106 Zinn Howard, A People’s History of the United States, Londres et New York, Longman, 1980, p. 10.
  • 107 Sur les différentes « formes d’écriture du social » que recouvre le terme d’« histoire populaire » (...)

26Hors de Grande-Bretagne, et malgré la négligence des questions coloniales et impériales dont on lui a souvent fait reproche, l’histoire par le bas a pu fournir un modèle pour penser le caractère hétérogène et « élastique » des formations sociales en Inde, ou les pratiques de résistance des esclaves au Brésil103. En Italie, où les travaux de Thompson, notamment ses essais plus anthropologiques postérieurs à la Formation, consacrés au braconnage, à la vente des épouses ou au charivari (rough music)104, sont popularisés par Carlo Ginzburg, l’histoire par le bas devient micro-histoire des cultures populaires plutôt que macro-histoire de classes en lutte105. Aux États-Unis, elle devient, sous la plume d’Howard Zinn, contre-histoire de la nation américaine écrite du point de vue des « victimes » plutôt que des « bourreaux »106. En France, plus récemment, si l’histoire populaire de Michelle Zancarini-Fournel s’inscrit clairement dans une filiation thompsonienne cherchant à mettre en évidence les « luttes et les rêves » des ouvrier·es, mais aussi des femmes, des immigré·es et des colonisé·es, Gérard Noiriel, quant à lui, s’intéresse plutôt aux interactions entre l’État, les pouvoirs et les classes populaires107.

  • 108 Hailwood Mark, « Who is below? », in Hailwood Mark and Waddell Brodie (dir.), The Future of History (...)
  • 109 Hitchcock Tim, « A New History from Below », History Workshop Journal, no 57/1, 2004, p. 294-298, e (...)
  • 110 Rediker Marcus et Linebaugh Peter, The Many-Headed Hydra, Boston, Beacon Press, 2000.

27Sous couvert d’apparente unité politique (une même sympathie pour les opprimé·es) et formelle (une histoire narrative assumant une certaine subjectivité située), cette histoire par le bas mondialisée en vient à recouvrir des projets (exhumer les vies ordinaires, défendre les marginaux/ales, reconstruire des cultures de résistance) potentiellement contradictoires, comme le note Mark Hailwood dans le cadre d’un atelier réuni pour réfléchir au futur de l’histoire par le bas, cinquante après la publication de la Formation108. Dix ans auparavant, Tim Hitchcock plaidait déjà pour une « nouvelle histoire par le bas », appuyée sur la numérisation et l’exploration d’archives peu mobilisées (comme les archives judiciaires du Old Bailey) et recentrée sur l’étude des pauvres et des masses écartés par l’intérêt du tournant linguistique pour les textes109. L’atelier appelle aussi de ses vœux une histoire par le bas moins nationale, qui intégrerait questions coloniales et sociales en une histoire globale du travail mondialisé par l’essor du capitalisme au xviie siècle, et des résistances qu’il suscite – dans la lignée des travaux de Marcus Rediker et Peter Linebaugh aux États-Unis sur les mille visages (pirates, esclaves, émigré·es religieux·ses, soldats, marins) de l’hydre révolutionnaire dans l’espace Atlantique110. La nouvelle histoire par le bas se veut donc aussi histoire de résistances et de révolutions, renouant avec l’antagonisme fondateur de la discipline.

  • 111 Poole Robert, Peterloo: the English Uprising, Oxford, Oxford University Press, 2019.
  • 112 Gatrell Vic, Conspiracy on Cato Street: A Tale of Liberty and Revolution in Regency London, Cambrid (...)
  • 113 Chase Malcolm, Chartism: A New History, Manchester, Manchester University Press, 2007.
  • 114 Raw Louise, Striking a Light: the Bryant and May Matchwomen and their Place in History, Londres, Co (...)
  • 115 Poole Robert, Schlunke Eva et Polyp, Peterloo: Witnesses to a Massacre, Oxford, The New Internation (...)

28Cette conflictualité retrouvée est visible aussi dans les travaux d’histoire britannique publiés au cours des quinze dernières années : dans une conjoncture idéologique moins hostile aux présupposés marxistes qui sous-tendent l’histoire par le bas, ils se ressaisissent de ses objets (le travail et les luttes) et sources (archives populaires) traditionnels – qu’ils conduisent dans d’autres directions. L’épluchage minutieux des témoignages contemporains du « massacre » de Peterloo en 1819 par Robert Poole l’amène à souligner la participation des femmes à la manifestation et le caractère constitutionnel et pacifique du radicalisme britannique des années 1810111. La reconstitution méticuleuse par Vic Gattrell de « l’habitat » londonien dans lequel les conspirateurs de Cato Street vivaient, travaillaient et se réunissaient, met en lumière le rôle crucial joué par le quartier dans la conspiration, comme lieu de convergence de détresses parallèles (artisans cordonniers paupérisés et ex-esclaves stigmatisés) et comme facteur de radicalisation par l’expérience partagée d’une même misère urbaine112. La découverte par Malcolm Chase de broderies chartistes étaye la reconstruction de « vies chartistes » qui éclairent la dimension familiale du mouvement et la porosité entre « force physique » et « force morale »113. La reconstitution par Louise Raw d’une histoire orale de la grève des ouvrières de Bryant & May en 1888, en discutant avec leurs descendantes, réévalue les rôles respectifs d’Annie Besant et des ouvrières dans le déclenchement de la grève, et fait du conflit l’inspiration de la grève des dockers qui éclate l’été suivant non loin de là, et le véritable début du nouvel unionisme (new unionism)114. L’exhumation des vies ordinaires est ainsi mise au service d’une histoire des tensions entre « haut » et « bas », qui affiche volontiers son caractère engagé (Raw décrit sa recherche comme inspirée par sa propre expérience des luttes sociales) et son souci d’une diffusion élargie de l’histoire par des moyens renouvelés – vidéo immersive (visionnable en ligne) en trois dimension du « massacre » de Peterloo heure par heure, chez Poole, et roman graphique racontant l’événement tout en suggérant des liens entre Peterloo et la bataille entre les mineurs et la police à Orgreave en 1984, inscrivant la manifestation de 1819 pour le suffrage dans une histoire plus longue des luttes sociales et de leur répression115.

Conclusion

  • 116 Griffin Emma, Liberty’s Dawn: A People’s History of the Industrial Revolution, New Haven et Londres (...)
  • 117 Vincent David, Burnett John et Mayall David (dir.), The Autobiography of the working class: an anno (...)
  • 118 Humphries Jane, Childhood and Child Labour in the British Industrial Revolution, Cambridge, Cambrid (...)
  • 119 Samuel Raphael, « People’s History », art. cit., p. xx.

29Le réinvestissement récent par les historien-nes britanniques de l’histoire par le bas peut aussi se faire dans d’autres directions. Dans l’« histoire populaire de la révolution industrielle » d’Emma Griffin116, qui se revendique explicitement de l’histoire par le bas, la mobilisation de sources ouvrières (le vaste corpus d’autobiographies mis au jour depuis les années 1980117), explorées avec une admiration affichée pour ces récits d’épreuves surmontées, aboutit à une réévaluation positive de la période : l’alphabétisation ou semi-alphabétisation dont attestent ces écrits, la mobilité géographique et sociale qui s’y lit, font de la révolution industrielle « l’aube de la liberté ». L’agentivité collective est devenue résilience individuelle et l’histoire par le bas se retrouve au service d’une vision optimiste de la révolution industrielle – tandis qu’en un chassé-croisé paradoxal, l’histoire économique quantitative (celle du travail des enfants réalisée par Jane Humphries118, par exemple) confirme l’interprétation pessimiste soutenue jadis par Hobsbawm et Thompson contre l’histoire quantitative… Mais le paradoxe n’est qu’apparent : l’histoire par le bas ramenée à une histoire empathique d’agentivité appuyée sur des archives populaires est, comme le soulignait Samuel en 1979, un projet politiquement ambivalent, qui peut se décliner en version socialiste, libérale ou conservatrice : « si sa tendance principale a été radicale, la gauche n’en a pas la propriété exclusive119. »

Top of page

Bibliography

Alexander Sally, St. Giles Fair, 1830-1914. History Workshop Pamphlet n° 2, Ruskin, 1970.

Alexander Sally, « Women’s work in nineteenth-century London », in Mitchell Juliet et Oakley Ann (dir.), The rights and wrongs of women, Harmondsworth, Penguin Books, 1976, p. 58-111.

Alexander Sally et Davin Anna, « Feminist history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 4-6.

Alexander Sally et Taylor Barbara, « In defense of patriarchy », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), op. cit., p. 370-374.

Bède le Vénérable, Histoire ecclésiastique du peuple anglais, traduction de Pierre Monat et Philippe Robin, Paris, Cerf, 2005.

Berger Stefan et Conrad Christoph, The Past as History: National Identity and Historical Consciousness in Modern Europe, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2015.

Bounds Philip, British Communism and the Politics of Literature, 1928-1939, Londres, Merlin Press, 2011.

Brundage Anthony, The People’s Historian: John Richard Green and the Writing of History in Victorian England, Westport, Greenwood, 1994.

Burrow John W., A Liberal Descent: Victorian Historians and the English Past, Cambridge, Cambridge University Press, 1981.

Cerutti Simona, « Who is below? E. P. Thompson, historien des sociétés modernes : une relecture », Annales HSS, no 4, 2015, p. 931-955.

Chase Malcolm, Chartism: A New History, Manchester, Manchester University Press, 2007.

Chitra Joshi, « A Thompson Moment in the late 1970s », in Fontes Paulo (dir.), Thompson at 100, 2024 [en ligne].

Clark Anna, The Struggle for the Breeches. Gender and the Making of the British Working Class, Londres, University of California Press, 1995.

Cole G.D.H. et Postgate Raymond, The British Common People, 1746-1938, Londres, Methuen, 1936.

Davin Anna, « Women & history », in Wandor Michelene (dir.), The body politic, Londres, Stage One, 1972, p. 215-224.

Davin Anna, « The London Feminist History Group », History Workshop Journal, n° 1/9, 1980, p. 192-194.

Dimitrov Georgi, The United Front. The Struggle Against Fascism and War, Londres, Lawrence and Wishart, 1938.

Dobb Maurice et Hill Christopher et Saville John et Thomson George, « Foreword », in Saville John (dir.), Democracy and the Labour Movement. Essays in Honor of Dona Torr, Londres, Lawrence and Wishart, 1954, p. 7-9.

Douglass David, Pit Life in Country Durham. History Workshop Pamphlet n° 6, Ruskin, 1972.

Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain. History, the New Left, and the Origins of Cultural Studies, Londres, Duke University Press, 1997.

Efstathiou Christos, E.P. Thompson: A Twentieth-Century Romantic, Londres, Merlin Press, 2015.

Engels Friedrich, La situation de la classe laborieuse en Angleterre (1ère édition allemande 1845), édition de Fabrice Bensimon, Paris, Les éditions sociales, 2021.

Epstein James, Radical Expression: Political Language, Ritual, and Symbol in England, 1790-1850, New York, Oxford University Press, 1994.

Frasch Delphine, « L’expérience collective des archives. Histoires féministes par en bas en Angleterre dans les années 1970 », GLAD! [En ligne], 11 | 2021, mis en ligne le 20 décembre 2021, consulté le 29 janvier 2022. URL : http://journals.openedition.org/glad/3579 ; DOI : https://doi.org/10.4000/glad.3579

Gatrell Vic, Conspiracy on Cato Street: A Tale of Liberty and Revolution in Regency London, Cambridge, Cambridge University Press, 2022.

Geerkens Eric, Hatzfeld Nicolas, Lespinet-Moret Isabelle, Vigna Xavier (dir.), Les enquêtes ouvrières dans l’Europe contemporaine. Entre pratiques scientifiques et passions politiques, Paris, La Découverte, 2019.

Gilding Bob, The Journeymen Coopers of East London. History Workshop Pamphlet n° 4, Ruskin, 1971.

Gorman John, Banner bright : An Illustrated History of Trade Union Banners (1973), Londres, Scorpion Publications, 1986.

Green John R., A Short History of the English People (1874), Londres, Folio Society, 1992.

Gregg Robert et Kale Madhavi, « The Empire and Mr. Thompson », Economic and Political Weekly, no 32/36, 1997, p. 2273-2288.

Griffin Emma, Liberty’s Dawn: A People’s History of the Industrial Revolution, New Haven et Londres, Yale University Press, 2013.

Hailwood Mark, « Who is below? », in Hailwood Mark and Waddell Brodie (dir.), The Future of History from Below: An Online Symposium (2013) [https://manyheadedmonster.wordpress.com/history-from-below/].

Hammond Barbara et John, The Village Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1911. 

Hammond Barbara et John, The Town Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1917. 

Hammond Barbara et John, The Skilled Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1919.

Harding Arthur et Samuel Raphael, East End Underworld. Chapters in the life of Arthur Harding, Londres, Routledge, 1981.

Hill Christopher, The English Revolution 1640, Londres, Lawrence and Wishart, 1940.

Hill Christopher, Hilton Rodney, Hobsbawm Eric, « Past and Present: Origins and Early Years », Past & Present, n° 100/1, 1983, p. 3-14.

Hilton Rodney, « Peasant movements in England before 1381 », Economic history review, n° 2/2, 1949, p. 117-136.

Hilton Rodney, Fagan Hyman, The English Rising of 1381, Londres, Lawrence and Wishart, 1950.

Hitchcock Tim, « A New History from Below », History Workshop Journal, no 57/1, 2004, p. 294-298.

Hitchcock Tim, Shoemaker Robert et al., The Old Bailey Proceedings Online, 1674-1913 [www.oldbaileyonline.org, version 9.0, Autumn 2023].

Hobsbawm Eric, « The Machine Breakers », Past & Present, no1/1, 1952, p. 57-70.

Hobsbawm Eric, The Age of Revolution, 1789-1848, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1962.

Hobsbawm Eric, Primitive Rebels (1963), Londres, Abacus, 2017.

Hobsbawm Eric, The Age of Capital, 1848-1875, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1975.

Hobsbawm Eric, « The historians’ group of the Communist Party », in Cornforth Maurice (dir.), Rebels and their causes. Essays in honour of A.L. Morton, Londres, Lawrence and Wishart, 1978, p. 21-47.

Hobsbawm Eric, The Age of Empire, 1875-1914, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1987. 

Hobsbawm Eric, « L’Histoire populaire » (1988), in Marx et l’Histoire, traduction de Christophe Magny, Paris, Demopolis, 2008, p. 137-160.

Hobsbawm Eric, The Age of Extremes, 1914-1991, Londres, Michael Joseph, 1994.

Hobsbawm Eric, On History, Londres, Abacus, 1997.

Hobsbawm Eric, Interesting Times, Londres, Abacus, 2003.

Hobsbawm Eric et Rudé George, Captain Swing (1969), Londres, Verso, 2014.

Hobsbawm Eric et Scott Joan W., « Political Shoemakers », Past & Present, no 89/1, 1980, p. 86-114.

Humphries Jane, Childhood and Child Labour in the British Industrial Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 2011.

Kitteringham Jennie, Country Girls in 19th Century England. History Workshop Pamphlet n° 11, Ruskin, 1973.

Lara Silvia, «  E. P. Thompson, the Egg, and Slavery in Brazil », in Fontes Paulo (dir.), Thompson at 100, 2024 [en ligne].

Lee-Six Edward, « ‘Culture’ dans l’oeuvre de Raymond Williams », in Adjerad Gabrielle, Goudmand Anaïs, Hillion Marianne et Leclair Marion (dir.), Les études littéraires face aux Cultural Studies : du projet matérialiste à la pratique critique, COnTEXTES [en ligne]

Liddington Jill et Norris Jill, Histoire des suffragistes radicales, traduction de Laurent Bury, Paris, Libertalia, 2018.

Macaulay Thomas B., Histoire d’Angleterre, traduction de Jules de Peyronnet et Amédée Pichot, Paris, Robert Laffont, 1989.

Macaulay Thomas B., « History » (1828), in Complete Works of Thomas Babington Macaulay, Hastings, Delphi Classics, 2016. 

Marx Karl, Contribution à la critique de l’économie politique (1ère édition allemande 1859), traduction de Guillaume Fondu et Jean Quétier, Paris, Les éditions sociales, 2014.

Mayhew Henry, London Labour and the London Poor (1861-2), Oxford, Oxford University Press, 2010.

McCalman Iain, Radical Underworld: Prophets, Revolutionaries and Pornographers in Londres, 1795-1840, Cambridge, Cambridge University Press, 1988.

McKenna Frank, A Glossary of Railwaymen’s Talk. History Workshop Pamphlet n° 1, Ruskin, 1970.

Morton A.L., A People’s History of England, Londres, Victor Gollancz Ltd, 1938, p. 410.

Oxford University Socialist Discussion Group, Out of Apathy: Voices of the New Left Thirty Years On, Londres, Verso Books, 1989.

Parolin Christina, Radical Spaces: Venues of Popular Politics in Londres 1790-1845, Canberra, ANU Press, 2010.

Pittock Murray G.H., « Historiography », in Broadie Alexander (dir.), Cambridge Companion to the Scottish Enlightenment, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, p. 258-279.

Poole Robert, Peterloo: the English Uprising, Oxford, Oxford University Press, 2019.

Poole Robert, Schlunke Eva et Polyp, Peterloo: Witnesses to a Massacre, Oxford, The New Internationalist, 2019.

Raw Louise, Striking a Light: the Bryant and May Matchwomen and their Place in History, Londres, Continuum, 2009.

Rediker Marcus et Linebaugh Peter, The Many-Headed Hydra, Boston, Beacon Press, 2000.

Roberts Matthew, « Rural Luddism and the makeshift economy of the Nottinghamshire Framework Knitters », Social History, no 42/3, 2017, p. 365-398.

Rowbotham Sheila, Hidden from history : 300 years of women’s oppression and the fight against it, Londres, Pluto Press, 1973.

Rowbotham Sheila, « The trouble with ‘patriarchy’ », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), op. cit., p. 364-370.

Rudé George, The Crowd in English History: A Study of Popular Disturbances in France And England, 1730-1848 (1964), Londres, Serif, 2005.

Rudé George, « The Changing Face of the Crowd », in Curtis L.P. (dir.), The Historian’s Workshop, New York, Alfred A. Knopf., 1970.

Rudé George, Paris and London in the Eighteenth Century. Studies in Popular Protest, Londres, Collins, 1970.

Ruiz Émilien, « L’histoire populaire : label éditorial ou nouvelle forme d’écriture du social ? », Le Mouvement Social, n°269-270/4, 2020, p. 185-230.

Samuel Raphael (dir.), Village, Life and Labour, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1975.

Samuel Raphael, « General editor’s introduction : people’s history », in Samuel Raphael (dir.), Village, Life and Labour, op. cit., p. 13-18.

Samuel Raphael, « Local history and oral history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 191-208.

Samuel Raphael (dir.), Miners, Quarrymen and Altworkers, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1977.

Samuel Raphael, « People’s History », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), Londres, Routledge, p. xv-xxxix.

Samuel Raphael (dir.), History Workshop : A collectanea 1967-1991, Oxford, History Workshop, 1991.

Samuel Raphael, « Comers and goers », in Samuel Raphael, Workshop of the world. Essays in People’s History, Londres, Verso, 2024, p. 44-67.

Scott James C., La domination et les arts de la résistance, Paris, Éditions Amsterdam, 2009.

Scott Joan W., « On Language, Gender, and Working-Class History », International Labor and Working-Class History, no 31, 1987, p. 1-13.

Shipley Stan, Club Life and Socialism in Mid-Victorian London. History Workshop Pamphlet n° 5, Ruskin, 1971.

Shohat Gil, « Political Activism, Academic Merit and Committee Meetings. The Communist Party Historians’ Group, 1946-1956 », MA dissertation, Université d’Exeter, Département d’histoire, 2016.

Stedman Jones Gareth, Languages of Class, Cambridge, Cambridge University Press, 1983.

Stedman Jones Gareth « De l’histoire sociale au tournant linguistique et au-delà. Où va l’historiographie britannique ? », Revue d’histoire du XIXe siècle, no 33, 2006, p. 143-166 [en ligne].

Taylor Barbara, Eve and the New Jerusalem, Londres, Virago Press, 1983.

Taylor Barbara, « E.P. Thompson and the Woman Problem », History Workshop, mai 2024 [en ligne].

Thompson Edward Palmer, « The Free-Born Englishman », New Left Review, I/15, 1962.

Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise (1963), traduction de Gilles Dauvé, Mireille Golaszewski et Marie-Noëlle Thibault (1988), Paris, Seuil, 2012.

Thompson Edward Palmer, « Time, Work-Discipline, and Industrial Capitalism », Past & Present, no 38/1, 1967, p. 56-97.

Thompson Edward Palmer, « Highly Confidential », in Thompson Edward Palmer (dir.), Warwick University Ltd : Industry, Management and the Universities, 1970, Middlesex, Penguin Books, p. 146-165.

Thompson Edward Palmer, Yeo Eileen (dir.), The Unknown Mayhew. Selections from the Morning Chronicle, 1849-1850, Londres, Merlin Press, 1971.

Thompson Edward Palmer, « The Moral Economy of the English Crowd », Past & Present, no 50/1, 1971, p. 76-136.

Thompson, Edward Palmer, Customs in Common, Londres, Merlin Press, 1991.

Vincent David, Burnett John et Mayall David (dir.), The Autobiography of the working class: an annotated critical bibliography, Brighton, Harvester, 1984.

Webb Beatrice et Sidney, Histoire du trade-unionisme. Les origines – la période révolutionnaire (1799-1842) (1894), traduction d’Albert Métin, Paris, Les Nuits Rouges, 2011.

Weeks Jeffrey, « ‘Sins and diseases’ : Some notes on homosexuality in the nineteenth century », History Workshop Journal, no. 1/1, 1976, p. 211-219.

Wood Marcus, Radical Satire and Print Culture, 1790-1822, Oxford, Clarendon Press, 1994.

Zinn Howard, A People’s History of the United States, Londres et New York, Longman, 1980.

Top of page

Notes

1 Hobsbawm Eric, « L’Histoire populaire » (1988), in Marx et l’Histoire, traduction de Christophe Magny, Paris, Demopolis, 2008, p. 140.

2 Bède le Vénérable, Histoire ecclésiastique du peuple anglais, traduction de Pierre Monat et Philippe Robin, Paris, Cerf, 2005.

3 Berger Stefan et Conrad Christoph, The Past as History: National Identity and Historical Consciousness in Modern Europe, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2015, p. 33.

4 Pittock Murray G.H., « Historiography », in Broadie Alexander (dir.), Cambridge Companion to the Scottish Enlightenment, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, p. 258-279.

5 Macaulay Thomas B., Histoire d’Angleterre (1848-1861), traduction de Jules de Peyronnet et Amédée Pichot, Paris, Robert Laffont, 1989.

6 Macaulay Thomas B., « History » (1828), in Complete Works of Thomas Babington Macaulay, Hastings, Delphi Classics, 2016, p. 3210 : « More than one illustrious stranger has landed on our island […], has dined with the king […] and has then departed, thinking that he has seen England. […] But of the vast and complex system of society, of the fine shades of national character, of the practical operation of government and laws, he knows nothing. He who would understand these things rightly […] must see ordinary men as they appear in their ordinary business and in their ordinary pleasures. He must mingle in the crowds of the exchange and the coffee-house. He must obtain admittance to the convivial table and the domestic hearth. »

7 Green John R., A Short History of the English People (1874), Londres, Folio Society, 1992.

8 Brundage Anthony, The People’s Historian: John Richard Green and the Writing of History in Victorian England, Westport, Greenwood, 1994, p. 1.

9 Burrow John W., A Liberal Descent: Victorian Historians and the English Past, Cambridge, Cambridge University Press, 1981, p. 103.

10 Geerkens Eric, Hatzfeld Nicolas, Lespinet-Moret Isabelle, Vigna Xavier (dir.), Les enquêtes ouvrières dans l’Europe contemporaine. Entre pratiques scientifiques et passions politiques, Paris, La Découverte, 2019.

11 Engels Friedrich, La situation de la classe laborieuse en Angleterre (1ère édition allemande 1845), édition de Fabrice Bensimon, Paris, Les éditions sociales, 2021.

12 Mayhew rassemble une partie des articles, en les retravaillant, dans Mayhew Henry, London Labour and the London Poor (1861-2), Oxford, Oxford University Press, 2010.

13 Voir par exemple Thompson Edward Palmer, Yeo Eileen (dir.), The Unknown Mayhew. Selections from the Morning Chronicle, 1849-1850, Londres, Merlin Press, 1971, p. 44.

14 Webb Beatrice et Sidney, Histoire du trade-unionisme. Les origines – la période révolutionnaire (1799-1842) (1894), traduction d’Albert Métin, Paris, Les Nuits Rouges, 2011.

15 Hammond Barbara et John, The Village Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1911 ; The Town Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1917 ; The Skilled Labourer 1760-1832, Londres, Longmans, Green, and co., 1919.

16 Dimitrov Georgi, The United Front. The Struggle Against Fascism and War, Londres, Lawrence and Wishart, 1938.

17 Bounds Philip, British Communism and the Politics of Literature, 1928-1939, Londres, Merlin Press, 2011.

18 Cole G.D.H. et Postgate Raymond, The British Common People, 1746-1938, Londres, Methuen, 1936.

19 Morton A.L., A People’s History of England, Londres, Victor Gollancz Ltd, 1938, p. 410.

20 Hobsbawm Eric, « The historians’ group of the Communist Party », in Cornforth Maurice (dir.), Rebels and their causes. Essays in honour of A.L. Morton, Londres, Lawrence and Wishart, 1978, p. 21-47.

21 Dobb Maurice et Hill Christopher et Saville John et Thomson George, « Foreword », in Saville John (dir.), Democracy and the Labour Movement. Essays in Honor of Dona Torr, Londres, Lawrence and Wishart, 1954, p. 8.

22 Shohat Gil, « Political Activism, Academic Merit and Committee Meetings. The Communist Party Histoirans’ Group, 1946-1956 », MA dissertation, Université d’Exeter, Département d’histoire, 2016.

23 Hilton Rodney, Fagan Hyman, The English Rising of 1381, Londres, Lawrence and Wishart, 1950, p. 9.

24 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain. History, the New Left, and the Origins of Cultural Studies, Londres, Duke University Press, 1997, p. 44.

25 Hilton Rodney, « Peasant movements in England before 1381 », Economic history review, n° 2/2, 1949, p. 117-136. Pour une reprise contemporaine de cette lecture, voir Vallance Edward, A Radical History of Britain, Londres, Little, Brown and Company, 2009.

26 Hill Christopher, The English Revolution 1640, Londres, Lawrence and Wishart, 1940.

27 Hobsbawm Eric, « The Machine Breakers », Past & Present, no1/1, 1952, p. 57-70.

28 Voir les études rassemblées dans Rudé George, Paris and London in the Eighteenth Century. Studies in Popular Protest, Londres, Collins, 1970.

29 Hill Christopher, Hilton Rodney, Hobsbawm Eric, « Past and Present: Origins and Early Years », Past & Present, n° 100/1, 1983, p. 3-14.

30 La littérature secondaire sur la New Left britannique est considérable. On peut se référer avec profit aux analyses rétrospectives livrées par certain·es acteur·rices dans Oxford University Socialist Discussion Group, Out of Apathy: Voices of the New Left Thirty Years On, Londres, Verso Books, 1989.

31 Hobsbawm Eric, The Age of Revolution, 1789-1848 (Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1962) ; The Age of Capital, 1848-1875 (Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1975) ; The Age of Empire, 1875-1914 (Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1987) ; The Age of Extremes, 1914-1991 (Londres, Michael Joseph, 1994).

32 Thompson Edward Palmer, « The Free-Born Englishman », New Left Review, I/15, 1962.

33 Samuel Raphael, « People’s History », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), Londres, Routledge, p. xvi.

34 Hobsbawm Eric, Interesting Times, Londres, Abacus, 2003, p. 288-289.

35 Rudé George, The Crowd in English History: A Study of Popular Disturbances in France And England, 1730-1848 (1964), Londres, Serif, 2005, p. 12.

36 Marx Karl, Contribution à la critique de l’économie politique (1ère édition allemande 1859), traduction de Guillaume Fondu et Jean Quétier, Paris, Les éditions sociales, 2014, p. 63.

37 Rudé George, « The Changing Face of the Crowd », in Curtis L.P. (dir.), The Historian’s Workshop, New York, Alfred A. Knopf., 1970, p. 189.

38 Lee-Six Edward, « ‘Culture’ dans l’oeuvre de Raymond Williams », in Adjerad Gabrielle, Goudmand Anaïs, Hillion Marianne et Leclair Marion (dir.), Les études littéraires face aux Cultural Studies : du projet matérialiste à la pratique critique, COnTEXTES [en ligne]

39 Hobsbawm Eric et RudÉ George, Captain Swing (1969), Londres, Verso, 2014, p. 12.

40 Sur l’importance des artisans cordonniers, du fait des conditions d’exercice de leur métier (compatible avec la lecture à voix haute en atelier et les plaçant au contact d’une gamme variée d’interlocuteurs) comme vecteur privilégié de dissémination des nouvelles et des idées politiques, voir Hobsbawm Eric et Scott Joan W., « Political Shoemakers », Past & Present, no 89/1, 1980, p. 86-114.

41 Rudé George, The Crowd in History, op. cit., p. 149-163.

42 Thompson Edward Palmer, « The Moral Economy of the English Crowd », Past & Present, no 50/1, 1971, p. 76-136.

43 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise (1963), traduction de Gilles Dauvé, Mireille Golaszewski et Marie-Noëlle Thibault (1988), Paris, Seuil, 2012, p. 19.

44 Ibid., p. 8-9.

45 Thompson Edward Palmer, « Time, Work-Discipline, and Industrial Capitalism », Past & Present, no 38/1, 1967, p. 56-97.

46 Engels Friedrich, La Situation de la classe laborieuse en Angleterre, op. cit., p.38.

47 Ibid., p. 267-297.

48 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise, op. cit., p. 19.

49 Efstathiou Christos, E.P. Thompson: A Twentieth-Century Romantic, Londres, Merlin Press, 2015.

50 Thompson Edward Palmer, La Formation de la classe ouvrière anglaise, op. cit., p. 793.

51 Rudé George, « The Changing Face of the Crowd », art. cit., p. 191.

52 Hobsbawm Eric, Primitive Rebels (1963), Londres, Abacus, 2017, p. 16. En français : Les Primitifs de la révolte, traduction de Reginald Laars, Paris, Fayard, 1963.

53 Hobsbawm Eric, Interesting Times, op. cit., p. 250.

54 Hobsbawm Eric, « British History and the Annales », in Hobsbawm Eric, On History, Londres, Abacus, 1997, p. 245.

55 Thompson Edward Palmer, The Making of the English Working Class, op. cit., p. 210-211.

56 Rudé George, The Crowd in History, op. cit., p. 1.

57 Hobsbawm Eric, « L’histoire populaire », art. cit.

58 Samuel Raphael, « People’s History », art. cit., p. xv-xxvii.

59 Voir par exemple Thompson Edward Palmer, « Highly Confidential », in Thompson Edward Palmer (dir.), Warwick University Ltd: Industry, Management and the Universities, 1970, Middlesex, Penguin Books, p. 155 : « Youth, if left to its own devices, tends […] to be more concerned with the style than with the consequence of actions, and to commit various sins of self-righteous political purism and intellectual arrogance ».

60 Samuel Raphael (dir.), History Workshop: A collectanea 1967-1991, Oxford, History Workshop, 1991, p. 118.

61 Ibid., p. 77.

62 Gilding Bob, The Journeymen Coopers of East London. History Workshop Pamphlet n° 4, Ruskin, 1971.

63 Kitteringham Jennie, Country Girls in 19th Century England. History Workshop Pamphlet n° 11, Ruskin, 1973.

64 Samuel Raphael, « Local history and oral history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 191-208.

65 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain, op. cit., p. 97.

66 Samuel Raphael (dir.), History Workshop: A collectanea 1967-1991, op. cit., p. 79. Les treize brochures sont consultables en ligne sur le site du History Workshop, à l’adresse https://www.historyworkshop.org.uk/museums-archives-heritage/history-workshop-pamphlets/

67 Les deux premiers de la série sont Samuel Raphael (dir.), Village, Life and Labour, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1975 ; Samuel Raphael (dir.), Miners, Quarrymen and Altworkers, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1977.

68 Samuel Raphael, « General editor’s introduction : people’s history », in Samuel Raphael (dir.), Village, Life and Labour, op. cit., 1975, p. 13.

69 Gorman John, Banner bright: An Illustrated History of Trade Union Banners (1973), Londres, Scorpion Publications, 1986.

70 McKenna Frank, A Glossary of Railwaymen’s Talk. History Workshop Pamphlet n° 1, Ruskin, 1970.

71 Dans l’index thématique des numéros 1 à 32 du History Workshop Journal constitué pour l’ouvrage collectif de 1991, on trouve 24 entrées sous la rubrique « religion » : Samuel Raphael (dir.), History Workshop : A collectanea 1967-1991, op. cit., p. 201.

72 Alexander Sally, St. Giles Fair, 1830-1914. History Workshop Pamphlet n° 2, Ruskin, 1970.

73 C’est le thème du History Workshop des 5-7 mai 1972 : « Childhood in history : Children’s liberation ».

74 Samuel Raphael, « Comers and goers », in Samuel Raphael, Workshop of the world. Essays in People’s History, Londres, Verso, 2024, p. 44-67.

75 Judith Walkowitz intervient lors du History Workshop des 4-6 mai 1973 sur le thème « Work Girls and Prostitutes in 19th Century Plymouth ».

76 Harding Arthur et Samuel Raphael, East End Underworld. Chapters in the life of Arthur Harding, Londres, Routledge, 1981.

77 Weeks Jeffrey, « ‘Sins and diseases’: Some notes on homosexuality in the nineteenth century », History Workshop Journal, no. 1/1, 1976, p. 211-219.

78 Scott James C., La domination et les arts de la résistance, Paris, Éditions Amsterdam, 2009.

79 Dworkin Dennis, Cultural Marxism in Postwar Britain, op. cit., p. 191.

80 Douglass David, Pit Life in Country Durham. History Workshop Pamphlet n° 6, Ruskin, 1972, p. i.

81 Ibid., p. 26

82 Shipley Stan, Club Life and Socialism in Mid-Victorian London. History Workshop Pamphlet n° 5, Ruskin, 1971, p. 71.

83 Davin Anna, « The London Feminist History Group », History Workshop Journal, n° 1/9, 1980, p. 192-194.

84 Pour plus de détails sur les rapports entre History Workshop et histoire socialiste-féministe britannique, voir Frasch Delphine, « L’expérience collective des archives. Histoires féministes par en bas en Angleterre dans les années 1970 », GLAD! [En ligne], 11 | 2021, mis en ligne le 20 décembre 2021, consulté le 29 janvier 2022. URL : http://journals.openedition.org/glad/3579 ; DOI : https://doi.org/10.4000/glad.3579

85 Rowbotham Sheila, Hidden from history: 300 years of women’s oppression and the fight against it, Londres, Pluto Press, 1973 p. 73.

86 Davin Anna, « Women & history », in Wandor Michelene (dir.), The body politic, Londres, Stage One, 1972, p. 215-224.

87 Alexander Sally, « Women’s work in nineteenth-century London », in Mitchell Juliet et Oakley Ann (dir.), The rights and wrongs of women, Harmondsworth, Penguin Books, 1976, p. 58-111.

88 Alexander Sally et Davin Anna, « Feminist history », History Workshop Journal, n° 1/1, 1976, p. 4-6.

89 Alexander Sally, « Women’s work in nineteenth-century London », art. cit., p. 76.

90 Davin Anna, « Women & history », art. cit., p. 217.

91 Liddington Jill et Norris Jill, Histoire des suffragistes radicales, traduction de Laurent Bury, Paris, Libertalia, 2018.

92 Taylor Barbara, Eve and the New Jerusalem, Londres, Virago Press, 1983.

93 Rowbotham Sheila, « The trouble with ‘patriarchy’ », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), op. cit., p. 364-370.

94 Alexander Sally et Taylor Barbara, « In defense of patriarchy », in Samuel Raphael (dir.), People’s History and Socialist Theory (1981), op. cit., p. 370-374.

95 Ibid., p. 371.

96 Voir Scott Joan W., « On Language, Gender, and Working-Class History », International Labor and Working-Class History, no 31, 1987, p. 1-13, et Taylor Barbara, « E.P. Thompson and the Woman Problem », History Workshop, mai 2024 [en ligne].

97 Gregg Robert et Kale Madhavi, « The Empire and Mr. Thompson », Economic and Political Weekly, no 32/36, 1997, p. 2273-2288.

98 Stedman Jones Gareth, Languages of Class, Cambridge, Cambridge University Press, 1983, p. 8, et « De l’histoire sociale au tournant linguistique et au-delà. Où va l’historiographie britannique ? », Revue d’histoire du XIXe siècle, no 33, 2006, p. 143-166 [en ligne].

99 Epstein James, Radical Expression: Political Language, Ritual, and Symbol in England, 1790-1850, New York, Oxford University Press, 1994.

100 Wood Marcus, Radical Satire and Print Culture, 1790-1822, Oxford, Clarendon Press, 1994.

101 McCalman Iain, Radical Underworld: Prophets, Revolutionaries and Pornographers in Londres, 1795-1840, Cambridge, Cambridge University Press, 1988 ; Parolin Christina, Radical Spaces: Venues of Popular Politics in Londres 1790-1845, Canberra, ANU Press, 2010.

102 Le sous-titre de l’ouvrage d’Anna Clark reprend explicitement celui de l’ouvrage de 1963, tout en introduisant une perspective de genre et élargissant l’analyse à l’Écosse : voir Clark Anna, The Struggle for the Breeches. Gender and the Making of the British Working Class, Londres, University of California Press, 1995.

103 Chitra Joshi, « A Thompson Moment in the late 1970s » et Lara Silvia, «  E. P. Thompson, the Egg, and Slavery in Brazil », in Fontes Paulo (dir.), Thompson at 100, 2024 [en ligne].

104 Thompson, Edward Palmer, Customs in Common, Londres, Merlin Press, 1991.

105 Cerutti Simona, « Who is below? E. P. Thompson, historien des sociétés modernes : une relecture », Annales HSS, no 4, 2015, p. 931-955.

106 Zinn Howard, A People’s History of the United States, Londres et New York, Longman, 1980, p. 10.

107 Sur les différentes « formes d’écriture du social » que recouvre le terme d’« histoire populaire » en France, voir Ruiz Émilien, « L’histoire populaire : label éditorial ou nouvelle forme d’écriture du social ? », Le Mouvement Social, n°269-270/4, 2020, p. 185-230.

108 Hailwood Mark, « Who is below? », in Hailwood Mark and Waddell Brodie (dir.), The Future of History from Below: An Online Symposium (2013) [https://manyheadedmonster.wordpress.com/history-from-below/].

109 Hitchcock Tim, « A New History from Below », History Workshop Journal, no 57/1, 2004, p. 294-298, et Hitchcock Tim, Shoemaker Robert et al., The Old Bailey Proceedings Online, 1674-1913 [www.oldbaileyonline.org, version 9.0, Autumn 2023]. Dans le même esprit, Matthew Roberts montre qu’une attention exclusive aux textes produits par le luddisme rural du Nottinghamshire, plutôt qu’aux archives judiciaires répertoriant les nombreux incidents locaux, induit une lecture constitutionnaliste faussée du mouvement. Voir Roberts Matthew, « Rural Luddism and the makeshift economy of the Nottinghamshire Framework Knitters », Social History, no 42/3, 2017, p. 365-398.

110 Rediker Marcus et Linebaugh Peter, The Many-Headed Hydra, Boston, Beacon Press, 2000.

111 Poole Robert, Peterloo: the English Uprising, Oxford, Oxford University Press, 2019.

112 Gatrell Vic, Conspiracy on Cato Street: A Tale of Liberty and Revolution in Regency London, Cambridge, Cambridge University Press, 2022.

113 Chase Malcolm, Chartism: A New History, Manchester, Manchester University Press, 2007.

114 Raw Louise, Striking a Light: the Bryant and May Matchwomen and their Place in History, Londres, Continuum, 2009.

115 Poole Robert, Schlunke Eva et Polyp, Peterloo: Witnesses to a Massacre, Oxford, The New Internationalist, 2019.

116 Griffin Emma, Liberty’s Dawn: A People’s History of the Industrial Revolution, New Haven et Londres, Yale University Press, 2013.

117 Vincent David, Burnett John et Mayall David (dir.), The Autobiography of the working class: an annotated critical bibliography, Brighton, Harvester, 1984.

118 Humphries Jane, Childhood and Child Labour in the British Industrial Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 2011.

119 Samuel Raphael, « People’s History », art. cit., p. xx.

Top of page

References

Electronic reference

Delphine Frasch and Marion Leclair, “Écrire l’histoire des luttes en Grande-Bretagne : people’s history et history from belowRevue Française de Civilisation Britannique [Online], XXX-1 | 2025, Online since 13 January 2025, connection on 19 April 2025. URL: http://journals.openedition.org/rfcb/12943; DOI: https://doi.org/10.4000/133db

Top of page

About the authors

Delphine Frasch

Delphine Frasch est agrégée et doctorante en philosophie à l’ENS de Lyon, rattachée au laboratoire Triangle (UMR 5206). Ses recherches, articulant épistémologie et histoire des sciences humaines, portent sur les histoires du peuple (et spécialement, du peuple anglais) comme genre discursif, et sur la catégorie de populisme intellectuel. Elle a consacré plusieurs articles à l’histoire par le bas, ainsi qu’aux épistémologies féministes.

Marion Leclair

Marion Leclair est Maîtresse de conférences à l’Université Paris Nanterre. Spécialiste du radicalisme en Angleterre des XVIIIe et XIXe siècles, elle travaille sur les rapports entre littérature et politique, en particulier dans l’œuvre de William Godwin, Mary Wollstonecraft et John Thelwall, auxquels elle a consacré sa thèse et plusieurs articles. Avec Edward Lee-Six, elle a édité et traduit un recueil d’essais posthume d’E.P. Thompson, Les Romantiques : l’Angleterre à l’âge des révolutions (2023). 

Top of page

Copyright

CC-BY-NC-ND-4.0

The text only may be used under licence CC BY-NC-ND 4.0. All other elements (illustrations, imported files) are “All rights reserved”, unless otherwise stated.

Top of page
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search