Hommage par Louis Hincker
Les circonstances auront fait que Jacques Rougerie fut mon parrain en histoire. J’aurai passé trente-six années à son école, sans discontinuité et sans aucune ombre. École qui avait pour principe qu’il était rigoureusement interdit de devenir un disciple. Élève consciencieux, j’ai respecté la consigne. Il m’a fait historien, en me mettant au travail sur la révolution de 1848, le nez dans les archives, et tout ce qui devait s’en suivre. À partir de là, l’appartement du 4e étage du 28 de la rue Marx Dormoy a été durablement mon université alternative et émancipée. J’y ai poursuivi durant plus de trois décennies, des heures durant, la même discussion avec lui, dans de multiples variations. Nous reprenions à peu de chose près, la même conversation, là où nous l’avions laissée la fois précédente. La discussion consistait, de sa part, à laisser parler l’invité et à le relancer par des réparties contradictoires. Au fil du temps, on apprenait à penser librement. Jac...