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Comptes rendus

François Brizay (dir.), Identité religieuse et minorités. De l’Antiquité au xviiie siècle

Rennes, Presses universitaires de Rennes (« Histoire »), 2018
Matteo Antoniazzi
p. 557-559
Référence(s) :

François Brizay (dir.), Identité religieuse et minorités. De l’Antiquité au xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes (« Histoire »), 2018, 302 p., 22 €, 24 cm, ISBN 978‑2-7535‑6629‑3.

Texte intégral

1Ce livre réunit quinze contributions issues d’un colloque organisé en juin 2014 par le Centre de recherches historiques de l’Ouest (CERHIO, université d’Angers). L’ouvrage est divisé en trois parties qui portent respectivement sur la construction et l’affirmation des identités religieuses, la perception des minorités et enfin les stratégies adoptées pour vivre sa différence. Ce recueil s’insère dans un axe de recherche qui s’est développé ces dernières années, comme en témoignent plusieurs travaux tels que celui de Peter Van Nuffelen sur la tolérance durant l’Antiquité tardive (Penser la tolérance durant l’Antiquité tardive, Paris, Cerf, 2018) ou ceux de Gérard Noiriel à propos de l’identité nationale en France (Population, immigration et identité nationale en France, xixe-xxe siècle, Paris, Hachette, 1992 ; Le massacre des Italiens, Aigues-Mortes, 17 août 1893, Paris, Fayard, 2010).

2Les contributions de la première partie concernent les mondes anciens et médiévaux. Pour commencer, Marie-Françoise Baslez analyse la construction d’une identité samaritaine à l’époque hellénistique d’un point de vue ethnico-religieux. Il s’agit d’un sujet d’actualité persistante puisque les Samaritains constituent encore aujourd’hui la plus petite communauté religieuse de l’État d’Israël. Les deux contributions suivantes s’intéressent aux minorités au sein de l’Empire romain d’Orient : la minorité chalcédonienne à Alexandrie durant la seconde moitié du ve siècle (Philippe Blaudeau), puis la minorité miaphysite en Orient aux ve-vie siècles (Claire Fauchon-Claudon). Au contraire du cas des Samaritains, il s’agit ici de groupes qui construisent leur identité sur des éléments exclusivement religieux et non pas ethniques, ce qui constitue souvent une spécificité de l’Antiquité tardive (p. 79). Les études d’Isabelle Augé et de Farid Bouchiba analysent le rôle de la conversion dans l’intégration au sein de l’Empire byzantin et d’Al-Andalus. Cette partie se termine par un essai sur le durcissement du sort de la minorité juive en péninsule Ibérique à la fin du Moyen Âge (Claire Soussen-Max).

3La deuxième partie analyse la perception des minorités religieuses d’après les voyageurs musulmans à l’époque médiévale (Mickaël Cousin), les minorités européennes à Alger au xviie siècle (Abd El Hadi Ben Mansour), les grecs-catholiques à Malte à l’époque moderne (Anne Brogini) et les chrétiens du Levant dans la correspondance diplomatique française au xviiie siècle (François Brizay). Enfin, la troisième partie, qui évoque les stratégies adoptées pour vivre sa différence, porte sur le choix de la visibilité ou de l’invisibilité de la part des membres des minorités religieuses à la fois à l’époque ancienne (Bernard Pouderon, Annick Peters-Custot) et moderne (Luc Daireaux, Chrystel Bernat, Didier Boisson).

4Tout en traitant plusieurs cas spécifiques, cet ouvrage vise à donner une vision d’ensemble de la thématique qui intéresse l’histoire des religions. Il défend une thèse précise : bien des minorités religieuses se distinguent de la majorité de la population par leur religion, mais d’autres critères les individualisent (p. 297). Parmi ces marqueurs identitaires, une place d’honneur est réservée à la langue et aux usages vestimentaires. Dans ce contexte, le rôle prépondérant de la religion dans la définition de l’identité des minorités constitue une spécificité de l’Antiquité tardive, qui se détache ainsi des autres périodes ici analysées (p. 79). Ce recueil met en évidence l’ambiguïté des relations entre la majorité et des minorités qui peuvent faire l’objet de différentes formes d’exclusion. En outre, les identités religieuses n’étaient pas figées : sous des modalités différentes, il était donc possible de changer de religion, comme le montre par exemple la contribution de F. Bouchiba.

5Comme nous l’avons souligné, la publication d’un tel ouvrage n’est pas isolée, et ce dernier aborde un sujet qui devient toujours plus d’actualité chez les chercheurs en histoire. On assiste en effet à un véritable « retour du religieux », qui invite la communauté scientifique à s’interroger sur les liens entre identité culturelle et religion. D’autre part, la notion même de « minorité » est assez floue et tire son origine des discours juridico-politiques conçus aux xviiie et xixe siècles (p. 9). Le plus grand mérite de l’ouvrage est d’offrir aux lecteurs une grande variété de points de vue différents, qui analysent une chronologie longue. Dans l’ensemble, chaque contribution apporte un regard original sur le sujet et fournit une riche bibliographie complémentaire. En outre, l’introduction et la conclusion de F. Brizay sont éclairantes et contribuent de manière efficace à développer une vision d’ensemble sur la thématique en objet.

6Relevons malgré tout une limite, plus qu’un défaut, puisqu’elle ne relève pas d’un manque de rigueur dans le travail analytique, mais plutôt d’une perspective parfois trop restreinte, inhérente aux ouvrages tirés des actes d’un colloque. Certaines contributions peuvent être d’une lecture difficile pour les non-spécialistes car elles donnent peu d’éléments pour se repérer dans un contexte plus général, même si cela n’empêche pas la cohérence des réflexions finales. La lecture de ce livre sera utile pour tous ceux qui s’intéressent au processus d’élaboration des identités religieuses de l’histoire ancienne jusqu’à l’époque moderne.

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Pour citer cet article

Référence papier

Matteo Antoniazzi, « François Brizay (dir.), Identité religieuse et minorités. De l’Antiquité au xviiie siècle »Revue de l’histoire des religions, 3 | 2021, 557-559.

Référence électronique

Matteo Antoniazzi, « François Brizay (dir.), Identité religieuse et minorités. De l’Antiquité au xviiie siècle »Revue de l’histoire des religions [En ligne], 3 | 2021, mis en ligne le 01 septembre 2021, consulté le 19 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/rhr/11328 ; DOI : https://doi.org/10.4000/rhr.11328

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Auteur

Matteo Antoniazzi

Université d’Angers / THEMOS UMR 9016.

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Droits d’auteur

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés), sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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