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Hommage

Hommage à Paula Vásquez Lezama (1969-2021)

Fatiha Talahite, Brenda Rousset Yépez et Imène Laourari
p. 265-281

Texte intégral

  • 1 . Aujourd’hui, la République bolivarienne du Venezuela connaît toujours l’une des plus grandes cris (...)
  • 2 . Vásquez Lezama, P. (2019). Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos. Buchet-Chastel, p (...)

1Paula Vásquez Lezama, anthropologue chargée de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), affiliée au GTM-Cresppa (Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris), nous a quittées le 22 mai 2021, foudroyée au milieu d’une belle carrière de chercheuse, déjà très riche mais surtout pleine de promesses, tant elle bouillonnait d’idées et de projets. Elle terminait la rédaction d’une HDR (habilitation à diriger des recherches) et était impatiente de renouer avec le terrain après la crise sanitaire. Fauchée en plein essor intellectuel, alors qu’il lui restait tant à réaliser, elle laisse un vide immense derrière elle pour celles et ceux avec qui elle travaillait et partageait des projets. L’originalité de sa vision, la finesse de son analyse de la complexité d’un pays aux multiples facettes, qu’elle refusait de réduire à un ou deux facteurs, faisait écho à notre quête pour aller au-delà des clichés dans nos recherches sur nos pays. À nous, économistes et démographe, elle a fait découvrir un autre regard sur les pays pétroliers, celui de l’anthropologue des mondes contemporains, sensible aux transformations de la société, de la culture, des pratiques, des territoires. Elle parlait de « villes-pétrole », d’« hommes et de femmes-pétrole », des catastrophes environnementales et sanitaires, de la faim, et finalement du désastre humanitaire que vivait son pays, qui recèle pourtant parmi les plus grandes réserves de pétrole au monde, mais où l’écrasante majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Elle dénonçait le silence des médias, l’aveuglement idéologique d’une certaine gauche à défendre le régime d’Hugo Chávez – et de Nicolás Maduro – pour son anti-américanisme, alors qu’il avait couvert le pillage du pays par une mafia cachée à Miami. Avec sa disparition, la France a perdu un visage du Venezuela, une voix courageuse qui clamait la vérité sur ce qui se passait dans son pays, au-delà du voile des idéologies. Son honnêteté, la puissance de son message, forçaient le respect. Elle était reconnue comme experte, surtout depuis 2013 où elle fut très sollicitée par les médias. « La tâche est difficile, écrit-elle, car mon avis est clairement critique envers le gouvernement actuel malgré ma volonté d’avoir une position distanciée. Mais je ne suis pas “représentante de l’opposition vénézuélienne”, je ne milite pas dans un parti politique, je ne suis pas financée par une organisation qui chercherait à contrecarrer la révolution bolivarienne1 »2. Elle continuait à aller au Venezuela tant que c’était possible, malgré le risque lié à ses prises de position publiques, mais confiante en sa bonne étoile. Juste avant la crise sanitaire et le confinement, elle y a fait un dernier voyage. Mais c’était devenu impossible d’y enquêter. Être ainsi coupée de son terrain la rendait malheureuse.

  • 3 . Ainsi est désigné le pétrole au Venezuela.

2Paula nous a laissé un livre magnifique en héritage, Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos (Buchet-Chastel, 2019), une enquête minutieuse, avec une démarche rigoureuse, des références, des données et des analyses précises. Accessible au « grand public », cet ouvrage n’en est pas moins un travail scientifique, contrairement à ce que, trop modeste, elle écrit dans l’introduction. Il est le résultat de recherches documentaires et d’investigations de terrain longues et approfondies d’une chercheuse de talent. En disant cela, elle se donnait probablement plus de liberté, s’autorisait à faire le lien entre divers aspects – économique, politique, social, juridique –, à allier témoignage, analyse, discours journalistique, ce qu’elle a fait avec brio. C’est peut-être finalement la seule forme d’écriture possible si on veut vraiment dire quelque chose sur l’Algérie et le Venezuela, des pays où les données sont rares et peu fiables, le fonctionnement institutionnel et la chose politique opaques. C’est cette forme d’écriture qui lui a permis de transmettre avec ce livre quelque chose de très fort, sa passion tant pour son métier que pour le Venezuela. Elle raconte l’effondrement d’un pays qui dérive au gré des marées du marché international du pétrole. Elle dénonce l’incapacité des gouvernements vénézuéliens à générer, avec l’« excrément du diable3 », une économie diversifiée, et fustige leur irresponsabilité dans la gestion des milliards de revenus pétroliers perçus au cours des vingt dernières années, « un crime contre la population et la nation » (Vásquez Lezama, 2019:113).

3Fatiha se souvient de leur première rencontre en février 2015 à l’EHESS (École des hautes études en sciences sociales) au séminaire « Anthropologie critique de l’État. Approche comparative Afrique-Amérique latine » que Paula dirigeait avec Rémy Bazenguissa-Ganga4. Elle y était invitée à faire une présentation sur l’Algérie. De là est née l’idée de travailler ensemble sur leurs deux pays qui présentent tellement de points de comparaison. Cette collaboration a débouché sur l’organisation de deux panels « Algérie-Venezuela » au 24e Congrès mondial de science politique en 2016, malgré la difficulté à faire venir des chercheur·es des deux pays, et d’une journée d’étude au GTM-Cresppa en mai 20185, à laquelle Imène a participé. Ce projet de dossier thématique, également fruit de cette collaboration, nous avons dû le réaliser sans elle, bien qu’elle soit présente à chaque étape, dans les noms d’auteur·es et de referees qu’elle nous avait indiqués, dans la rédaction de l’appel puis de l’introduction. Ainsi est née une nouvelle amitié avec Brenda, qui a pris brillamment la relève dans la coordination du dossier.

4Nous reproduisons ici deux extraits des publications de Paula. Le premier est issu de l’ouvrage collectif Penser le politique en Amérique latine. La recréation des espaces et des formes du politique et porte sur l’un des événements marquants de l’histoire contemporaine du Venezuela : la coulée de boue qui a eu lieu à Caracas le 15 décembre 1999, causant environ un millier de morts et plus de 150 000 sinistrés. Ce texte provient d’une recherche très aboutie de Paula puisqu’il s’agit du sujet de sa thèse. À la suite de ce travail, elle s’est intéressée à une autre catastrophe terrible vécue par ce pays, l’explosion de la raffinerie d’Amuay en 2012, et a forgé le concept de « ville-pétrole ».

5Le second texte reproduit ici est extrait de son livre Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos qu’elle a traduit en espagnol et qui a été publié sous le titre País fuera de servicio. Venezuela de Chávez a Maduro (Siglo XXI Editores, 2021). Après avoir expliqué, au chapitre précédent, les conditions de l’émergence du chavisme et le lien entre la politique économique de Chavez et la corruption, elle dénonce ici la politique pétrolière de Chavez et ses effets catastrophiques sur le secteur, malgré des prix du brut exceptionnellement élevés durant la majeure partie de sa présidence (1998-2013).

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Penser le politique en Amérique latine. La recréation des espaces et de formes du politique, Éditions Karthala, 2009 6

Chapitre 5.Les politiques de la dignité. La morale de l’assistance aux victimes de la catastrophe

6La Tragedia (1999) au Venezuela

  • 7 . Fariñas, William, Plan Civico Militar Bolívar 2000, Caracas, Comisión interministerial, 1999. Le (...)
  • 8 . Au Venezuela, on se sert du terme barrio pour nommer les quartiers populaires urbains, constitués (...)

7Lors de la catastrophe, un décret présidentiel a transformé le Plan Bolívar 2000 7 en axe d’opération du « Plan national de dignification de la famille vénézuélienne » (1999). La prise en charge proposait à long terme le relogement dans des sites souvent éloignés des centres urbains. Dans l’attente de nouveaux logements, le gouvernement procéda à l’attribution d’emplois temporaires pour les membres des familles logées dans les forts militaires. Le responsable d’un refuge de sinistrés installé au Fort Tiuna à Caracas affirmait lors d’un entretien que les familles sinistrées – en l’occurrence des familles défavorisées qui n’avaient pas eu d’autre choix que de loger dans ces abris provisoires – se « réhabilitaient (se rehabilitan) socialement » lorsqu’elles effectuaient les tâches de ménage et de nettoyage qu’on leur proposait dans le cadre du « Plan d’emploi rapide » PER, Plan de empleo rápido) que le Plan Bolívar 2000 et le FUS mettaient en œuvre dans cette unité militaire. D’après lui, ces personnes ne surmontaient ainsi pas seulement la catastrophe, mais aussi la pauvreté spirituelle et morale qui les entourait dans leur barrio8 d’origine :

  • 9 . Lieutenant du bataillon Ortega Ramírez, Fort Tiuna, Caracas, mai 2000.

Nous avons la capacité de transformer des milliers de malandros, qui rentrent comme conscrits tous les ans, en citoyens républicains. Nous ne pouvons faire que du bien à ces gens-là9.

  • 10 . Delgado, Tania, « The institutional restructuring of the Venezuelan Armed Forces. National and Re (...)

8Ce jugement montre que la militarisation de l’assistance aux victimes implique des pratiques de rétablissement de l’ordre social qui ne relèvent plus de l’administration de l’urgence par les Forces armées. La vision exprimée par ce lieutenant-colonel est dominante dans la composante militaire du gouvernement vénézuélien concernant le rôle que leur institution joue dans le développement national, en particulier auprès des milieux défavorisés. Les Forces armées sont devenues le seul cadre institutionnel valable pour mener à bien les politiques publiques, car ce sont elles qui sont en mesure de combiner les ressources, la main-d’œuvre et l’ordre nécessaires à la réussite des opérations et permettent, en fin de compte, d’atteindre le progrès social. Dans cette perspective, l’institution militaire constitue l’unique moyen de « laver » la société de la corruption inhérente aux institutions civiles10. Pour le bolivarianisme, les Forces armées représentent l’entité véritablement capable de sauver le pays de la décomposition généralisée et de rétablir l’ordre moral de la République.

9Pour pallier le chômage, des Plans d’Emploi Rapide (PER) ont en effet été créés et mis en œuvre dans tous les forts militaires qui hébergeaient les familles sinistrées. Interrogé par mes soins sur ces PER, le directeur du FUS soulignait la nécessité impérative de « récupération morale » des classes populaires par l’emploi temporaire :

  • 11 . Entretien au FUS, Caracas, mai 2000.

Cela est le premier pas pour réduire le chômage. En effet, leur salut [des sinistrés] n’est pas seulement une question économique. Il s’agit de toute une thérapie sociale, car l’oisiveté est nocive pour la communauté11.

10Le rôle du Plan Bolívar 2000 était de contribuer à la transformation du comportement de ces familles, afin de réduire leur tendance à l’oisiveté pernicieuse. Ce discours est représentatif de celui de tous les officiers chargés de refuge interviewés, pour qui la façon de vivre du pauvre est en soi porteuse des « mauvaises habitudes » qui « reproduisent la pauvreté ». Dans cette rhétorique, la finalité ultime des PER n’était pas de fournir un revenu aux familles mais de leur assurer le salut moral par le travail.

  • 12 . Lander, Edgardo, « Venezuela : la búsqueda de un modelo contra hegemónico », 2004, Transtational (...)
  • 13 . Ochoa Henríquez, Haydée et Isabel Rodríguez Colmenares, « Las fuerzas armadas en la política soci (...)
  • 14 . Ochoa Henríquez, Haydée et Isabel Rodríguez Colmenares, « Las fuerzas armadas en la política soci (...)

11Même si la participation active des militaires dans les politiques sociales est parfois présentée comme un élément provisoire de la gestion du président Chávez12, cette intervention bénéficia d’un consensus important et est souvent signalée comme « bénéfique » à la construction du « nouveau modèle de société »13. L’Armée de terre serait porteuse d’une « bonne volonté » sociale pour contribuer et participer avec bienveillance à la vie nationale, et dépasser ainsi les tâches que le vieux régime lui avait imposées, à savoir celles stipulées par la doctrine de « sécurité et défense »14. L’importance de ce rapprochement entre les Forces armées et la population – en particulier les secteurs populaires – relève d’une représentation de l’institution militaire comme porteuse de qualités et de valeurs (discipline, ordre, etc.) qui font défaut aux habitants des quartiers populaires, particulièrement à ceux situés en ville. Ainsi, dans un premier temps, le pouvoir militaire a vu dans l’événement catastrophique une occasion inespérée de légitimation, de mise à l’épreuve, de passer à l’acte dans l’accomplissement de ce nouveau rôle constitutionnel. Néanmoins, la gestion de la population sinistrée s’est avérée plus difficile que prévu, car le relogement en province fut un échec patent par rapport aux buts affichés.

12Le 16 décembre 2000 fut la date butoir annoncée par le président Chávez pour vider les refuges installés dans les casernes et transférer les familles vers les nouveaux sites de relogement. Au FUS, la pression institutionnelle pour accomplir le mandat fixé par le président était très forte, et cela pour plusieurs raisons : les sinistrés logés dans les refuges attendaient depuis un an une solution qui ne se matérialisait pas ; les médias critiquaient fortement sa gestion et ses directeurs ; le spectre de la corruption hantait ses bureaux et, sur le terrain, les fonctionnaires assurant la prise en charge des relogements étaient jugés inefficaces.

13Les écueils du programme de dignification révèlent ainsi les caractéristiques d’une nouvelle structure institutionnelle qui fonctionne en contournant l’appareil étatique bureaucratique traditionnel par le biais de la mise en œuvre d’actions spéciales et urgentes. D’ailleurs, ils montrent bien que la temporalité du provisoire est paradigmatique d’un mode de gestion où le temporaire finit par se stabiliser, puis les institutions entérinent, voire fixent, les procédures établies en principe comme passagères. Or, les principes organisateurs du Plan Bolívar 2000 réapparaissent dans les Misiones par le biais de l’urgence et du développement d’une structure parallèle à celle des ministères.

  • 15 . Alvarado, Neritza, « Pobreza y Exclusión en Venezuela a la luz de las misiones sociales (2003-200 (...)

14À partir de septembre 2003, le gouvernement met en effet en œuvre des politiques d’assistance de grande envergure, dénommées « missions », assurant une présence dans les quartiers populaires du pays. Elles s’adressent prioritairement aux secteurs populaires, même si certains établissements de soins de Barrio adentro à Caracas sont aussi présents dans des quartiers de classes moyennes. Les « missions » Robinson – ainsi nommée en honneur au pseudonyme de l’instituteur de Simón Bolívar – Rivas et Sucre ont été créées pour améliorer l’éducation supérieure et éradiquer l’analphabétisme. Les Mercal, acronyme de mercado de alimentos – et plus récemment PDVal et les PDValitos, des marchés alimentaires et des épiceries populaires gérés directement par Petróleos de Venezuela (PDVSA) pour contourner les problèmes administratifs et d’approvisionnement qui affectent les Mercal de manière chronique – visent, quant à eux, la distribution de nourriture à bas prix dans des marchés populaires. Vuelvan Caracas – dont le nom fait allusion au cri de guerre prononcé par le général Páez lors de la bataille Las Queseras del medio pendant la guerre d’Indépendance – devait assurer l’insertion par l’emploi des chômeurs15.

15On peut distinguer deux grandes caractéristiques de l’appareil étatique vénézuélien entre 1958 et 1998. La première est le pacte entre partis politiques, signé en 1961 après la fin de la dictature de Marcos Pérez Jiménez, dont un élément central était la mise à l’écart des Forces armées du pouvoir civil de l’État. Néanmoins, ce pacte n’affaiblit pas les Forces armées en tant qu’institution. Au contraire, l’éloignement du pouvoir exécutif leur a garanti la création d’une organisation forte, solide, autonome et professionnelle, dont les niveaux les plus élevés dans la hiérarchie ont été protégés des avatars des crises économiques. La seconde caractéristique de cette période est le pouvoir acquis par Petróleos de Venezuela (PDVSA), la Compagnie nationale de pétrole qui fédère les corporations nationales et coordonne les entreprises transnationales liées à l’extraction et au raffinage depuis la nationalisation de l’industrie en janvier 1976. Cette compagnie a agi avec une telle marge d’autonomie qu’elle a souvent été qualifiée d’» État à l’intérieur de l’État ».

  • 16 . Coronil, Fernando, The Magical State. Nature, Money, and Modernity in Venezuela, Chicago, The Uni (...)
  • 17 . Idem., p. 67.

16Ces deux éléments sont en tension permanente dans la dynamique historique de la nation car, d’une part, la structure économique basée sur le pétrole – rentière et non productive – demeure problématique pour le développement capitaliste et, d’autre part, le mode de constitution de l’État contemporain a limité les possibilités de consolidation de la démocratie. Le fait remarquable soulevé par Fernando Coronil16 est qu’une marchandise (le pétrole) sert à représenter l’identité (du Venezuela) en tant que nation. Selon cet auteur, c’est le pétrole qui rend possible « les tours de magie des dictateurs et des présidents de l’État magique17 » au travers de phénomènes de mémoire sélective, de déplacements des conflits et de construction mythique du passé national en tant que pays « riche ».

  • 18 . Manrique, Miguel, « El proceso de politización de las Fuerzas Armadas venezolanas en el periodo 1 (...)

17Sur la scène internationale, la révolution bolivarienne se présente comme un mouvement politique par le biais de l’adoption d’une attitude de confrontation rhétorique avec l’impérialisme et l’hégémonie des États-Unis, tout en préservant néanmoins les liens économiques étroits qui ont historiquement caractérisé la relation entre les deux pays. Ce régime contre-hégémonique sur la scène globale, dont l’un des piliers est l’Armée de terre, est néanmoins localement sans cesse confronté au retour permanent des pratiques relevant de l’ancien ordre politique. Les tensions locales permettent d’affiner l’analyse de la portée contre-hégémonique de la révolution bolivarienne. Ainsi, l’omniprésence de l’institution militaire ne sort pas indemne de la polarisation, d’autant plus que les officiers sont fortement exposés à la vie publique et aux médias18.

  • 19 . Le revenu pétrolier octroie à l’État vénézuélien un immense pouvoir d’ingérence dans tous les dom (...)
  • 20 . Domingo Irwin montre toutefois que cette subordination des militaires au monde civil n’a jamais é (...)

18Pays pétrolier depuis le début du XXe siècle, le Venezuela s’est d’abord « imaginé » comme une nation construite par des militaires pacificateurs, précurseurs de l’ordre et vainqueurs des guerres d’Indépendance et des guerres entre caudillos. L’histoire contemporaine du Venezuela a, en effet, souvent été décrite comme celle d’un État extrêmement puissant marqué par une tension fondatrice entre pétrole et militarisme qui s’est traduite historiquement dans des pratiques politiques caractérisées par l’autoritarisme et le clientélisme d’État19. Le Pacto de Punto Fijo fut une stratégie d’alternance au pouvoir de partis hégémoniques déjà constitués institutionnalisant une « complicité sempiternelle » entre Acción Democrática (AD) (démocratie sociale) et COPEI (démocratie chrétienne) ; il a toutefois octroyé, à partir des années 1970, des quotas de représentation au Movimiento Al Socialismo (MAS), et s’est appuyé sur un consensus favorable au maintien du pouvoir politique national dans des mains civiles, jamais militaires20. Autour de ce pacte s’est organisé un système politique démocratique formel soutenu en grande partie par la redistribution clientéliste du revenu pétrolier.

19La révolution bolivarienne prône de faire table rase de l’ancien ordre national. Dans ce contexte, le plan de dignification se veut un précurseur des nouvelles politiques sociales et s’inscrit dans la promesse d’un avenir socialement plus égalitaire, basé sur la redistribution plus juste du revenu pétrolier. Ce qui montre la prise en considération de ces situations nouvelles, engendrées par l’innovation politique et symbolique d’un gouvernement qui cherche à se différencier de l’ancien ordre politique, est que le rapport du gouvernement avec les gouvernés est plus que jamais identitaire, car il relève d’une construction de soi qui s’effectue dans l’expérience de l’assistance et qui, en même temps, dépasse largement le cadre de ces politiques sociales. Mais qui doit-on être et comment doit-on se comporter pour devenir visible puis mériter – ou continuer de mériter – la dignification, c’est-à-dire l’assistance des institutions ?

20Le discours révolutionnaire, inscrit dans le legs que constitue tout sacrifice héroïque, vise ainsi à justifier politiquement la participation active des anciens compagnons d’armes de l’actuel président, devenus dignes d’occuper des postes de direction, aux institutions civiles. En effet, depuis la victoire électorale de Chávez et encore aujourd’hui, les vaincus du 4 février 1992 et de novembre 1992 occupent des postes élevés dans l’administration publique. La rhétorique du projet politique bolivarien promulguait la fusion entre le peuple et le pouvoir à partir de la disparition radicale des barrières qui séparaient « le peuple » des « hautes sphères pourries » (cúpulas podridas), à savoir les privilégiés et les dirigeants de la société qui profitaient de la providence pétrolière. L’adhésion au projet bolivarien suppose en effet un antagonisme binaire, constitutif et par conséquent excluant, des identités – peuple et oligarchie, loyalistes et putschistes, traîtres et fidèles, etc. –, lié à une fusion originelle des Forces armées et du politique dans un contexte social profondément inégalitaire.

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Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos, Paula  Vásquez Lezama, Buchet-Chastel, 2019 21

L’énigme pétrolière de Chavez

  • 22 . Terry Lynn Karl, The Paradox of Plenty: Oil Booms and Petro-States, University of California Pres (...)

21Matière première convoitée, le pétrole est accusé de bien des maux du monde moderne : pollution, exacerbation de la corruption, inflation, déstructuration des activités agricoles et industrielles, renforcement des dictatures, financement des appareils de répression. Les économistes, notamment, ont beaucoup étudié le syndrome de la « maladie hollandaise » (dutch disease), ainsi nommée en référence à la crise inflationniste qui a suivi la mise en exploitation de gisements gaziers aux Pays-Bas dans les années 1960. Terry Lynn Karl soutient que la dépendance au pétrole a conduit les pays pétroliers à une dépendance financière disproportionnée aux pétrodollars et à la dépense publique, au détriment de la bonne gouvernance22.

  • 23 . Thad Dunning, Crude Democracy: Natural Resource Wealth and Political Regimes, Cambridge Universit (...)

22Les booms pétroliers, qui créent l’illusion de la prospérité et du développement, déstabilisent les régimes en renforçant les intérêts liés au secteur des hydrocarbures et en affaiblissant les autres fonctions de l’État. Le Venezuela a pu échapper, entre 1961 et la fin des années 1980, aux effets de ce paradoxe de l’abondance pétrolière en créant des structures de redistribution dans un cadre démocratique, certes imparfait, mais réformable. Il me semble en effet qu’il faut prendre ses distances avec la « théorie de la malédiction des ressources », automatiquement considérée comme acquise dès que l’on aborde le problème vénézuélien. C’est une manière, à mon avis, d’évacuer la dimension politique de la chose et d’exonérer les responsabilités dans la distribution du revenu dans la société. Autrement dit, pour reprendre très brièvement le raisonnement de Thad Dunning23, la richesse pétrolière n’est pas une fatalité.

23Enquêter sur le pétrole, c’est avancer en terrain miné. Mon constat est que la façon dont la source de la richesse nationale a été mise hors service est un crime envers la population et la nation.

24L’analyse de la relation que le chavisme a entretenue avec le pétrole laisse penser que Hugo Chavez n’avait pas une vision stratégique sur la question. Depuis la nationalisation du pétrole en 1975 et jusqu’à la grève nationale du pétrole en avril 2002, PDVSA avait un statut d’entreprise publique autonome, organisée autour d’une « méritocratie technocratique ». À partir de 2002, elle est complètement subordonnée à l’exécutif et devient le bras financier des politiques du gouvernement.

25Les médias français reprennent souvent l’affirmation fausse selon laquelle « Hugo Chavez a nationalisé l’industrie pétrolière ». PDVSA a toujours été une entreprise publique et l’« ouverture pétrolière » (ouverture à la libéralisation dans l’exploitation des huiles lourdes du bassin de l’Orénoque) qui commença en 1994 sous la seconde présidence de Rafael Caldera n’était pas une privatisation.

  • 24 . Asdrubal Baptista et Bernardo Mommer, El petróleo en el pensamiento económico venezolano, Caracas (...)

26Avant 1998, PDVSA avait un cadre légal qui lui permettait d’agir de manière autonome pour établir des lignes directrices en matière d’exploration et de production ainsi que dans le domaine du downstream, c’est-à-dire du raffinage, du marketing et de la commercialisation. C’était, à l’époque, une structure puissante et relativement indépendante du gouvernement, qualifiée parfois d’État dans l’État24.

27Mais, depuis 2002, la production vénézuélienne de pétrole est en déclin. Si, au début du premier gouvernement de Hugo Chavez, PDVSA produisait 3,5 millions de barils par jour, en 2013 elle n’en produit plus que 2,6 millions. En 1998, l’entreprise employait 42 000 personnes ; ce chiffre est presque multiplié par trois en 2013 avec 111 000 employés. Si l’on mesure la productivité de l’entreprise en calculant le ratio entre le nombre de barils par jour et le nombre d’employés, elle est passée de 83 barils en 1998 à 23 en 2013. Mais l’augmentation du nombre d’employés ne s’est pas du tout traduite par une amélioration des conditions de travail des ouvriers, du respect de l’environnement, et encore moins de la productivité.

  • 25 . Depuis 2000, le Venezuela livre à Cuba entre 50 000 et 100 000 barils de pétrole par jour.
  • 26 . Depuis 2007, le gouvernement chinois a prêté 36 milliards de dollars au Venezuela, dont une parti (...)

28La politique conçue et appliquée par le président Chavez se trouve remise en cause par la situation de PDVSA, en particulier dans les rapports avec Cuba25 et la Chine26. En 2016, le contexte géopolitique dans la région, relevant de la diplomatie pétrolière chaviste, amenait à s’interroger sur l’avenir des accords d’envoi de pétrole à des pays comme Haïti, Nicaragua et Cuba. En 2017, ces accords sont devenus intenables en l’état actuel de l’industrie et de l’économie nationales.

29Entre 1976 et 1998, les changements de gouvernement n’affectaient pas les politiques internes de l’entreprise. Certains choix sont bien évidemment contestables. Mais l’entreprise rendait des comptes à l’État et fonctionnait avec des critères étudiés, des règles de sécurité qui garantissaient un nombre peu élevé d’accidents de travail dans les processus de production et de distribution des combustibles et de ses dérivés.

30Dès ses débuts en tant qu’homme public, Hugo Chavez a tenu un discours discréditant l’industrie pétrolière. Des formules comme « nécessaire nettoyage de cette industrie », « boîte noire de l’État vénézuélien », « salaires fabuleux des cadres pétroliers », proliféraient en utilisant souvent de fausses grilles de salaires. Soulignons que les salaires de PDVSA étaient indexés sur ceux des entreprises privées. D’autre part, l’accusation lancée par Chavez d’évasion fiscale de la part de PDVSA – alors que la comptabilité de la Banque centrale vénézuélienne a toujours montré que PDVSA réglait bien ses impôts – a complètement miné la confiance dans l’entreprise des Vénézuéliens, qui ont suivi son démantèlement systématique avec un certain dédain.

31En septembre 2000, au sommet de l’OPEP à Caracas, fut signé l’« accord énergétique et de coopération » avec le gouvernement cubain. Les conditions du contrat étaient extraordinaires, car tous les mécanismes de contrôle administratif furent gommés. Au même moment, la fédération syndicale Fedepetrol lança une grève très suivie pour protester contre la modification de la convention collective et maintenir ce qu’on appelait la « clause de la méritocratie » de PDVSA. Cette grève d’octobre 2000 dura quatre jours. Officieusement, Carlos Ortega, le président de Fedepetrol, en sortit gagnant. Mais les tensions ne faisaient que s’accroître.

32Le contexte de l’année précédant le coup d’État d’avril 2002 contre Chavez est extrêmement conflictuel. En décembre 2001, l’approbation d’un « paquet » de 49 décrets-lois, dictés et approuvés par l’exécutif grâce aux pouvoirs extraordinaires que l’Assemblée nationale lui octroie, change la donne en faveur de l’exécutif. C’est également une année de ruptures dans le bloc présidentiel. Luis Miquilena, homme politique de gauche et d’expérience, promoteur de Chavez dans la vie politique civile, démissionne de son poste de ministre de l’Intérieur.

  • 27 . Le terme « méritocratie » est employé tant par l’opposition que par le gouvernement à l’époque. P (...)

33Le 11 avril 2002 eut lieu le coup d’État raté contre le président Chavez. Cet événement fera pivoter le pays tout entier. S’ensuit un bras de fer entre l’opposition qui contrôlait le secteur commercial et les entreprises privées, PDVSA et le gouvernement. Une grève générale illimitée (paro general petrolero indefinido) dure du 2 décembre 2001 au 2 février 2002, mais ne fait pas plier l’exécutif qui, finalement, reprend le contrôle en faisant occuper les usines par l’armée et en renouvelant l’intégralité des cadres de PDVSA. L’échec de la grève est le point culminant de l’hégémonie du projet politique bolivarien sur le secteur pétrolier. Selon la version officielle, les cadres de PDVSA étaient des « putschistes » qui avaient un agenda de déstabilisation du régime. Les choses sont bien plus compliquées, étant donné la taille et la complexité de l’industrie pétrolière. En effet, l’hostilité des cadres de PDVSA envers le gouvernement était avant tout un rejet des changements concernant le fonctionnement de l’entreprise elle-même. La transformation voulue de PDSVA consistait en changements drastiques dans l’organisation même du travail et les conceptions de management. Les cadres n’avaient pas de marge de négociation possible pour faire valoir leurs points de vue. En même temps, la politisation au sein même de l’entreprise était frappante et déconcertante. Des cadres moins qualifiés affichaient ouvertement leur sympathie pour le président Chavez, parfois en collant des affiches électorales au mur de leurs bureaux. Du jamais vu dans l’entreprise. Les cadres qui manifestaient leur adhésion au gouvernement étaient promus sans le mériter. Le bras de fer fut impitoyable. Très souvent, ceux qui n’acceptaient pas ces conditions ont dû partager leurs bureaux pendant des semaines avec un militaire qui les surveillait de près. Soit les cadres de l’industrie pétrolière acceptaient ces conditions, soit ils partaient. Cela a donné lieu au mouvement « pour la méritocratie27 ».

34Le paroxysme de ce rapport de forces entre PDVSA et le gouvernement fut la destitution du conseil d’administration et le licenciement massif des techniciens, ouvriers et employés administratifs : dans l’émission radiotélévisée Aló Presidente, 90 cadres de la corporation pétrolière furent nominalement licenciés le 26 décembre 2002, ainsi que 18 756 ingénieurs, cadres et ouvriers qualifiés. Cette vidéo est très souvent rediffusée à la télévision en France, à chaque fois qu’une crise éclate au Venezuela, pour illustrer l’autoritarisme de Chavez.

  • 28 . Brian Nelson, The Silence and the Scorpion: The Coup against Chavez and the Making of Modern Vene (...)
  • 29 . Maurice Lemoine, Chavez presidente!, Paris, Flammarion, 2005.

35La chronique la plus détaillée du putsch manqué contre Chavez est celle de Brian Nelson dans The Silence and the Scorpion28. Très loin des fantaisies caricaturales du roman du journaliste du Monde diplomatique Maurice Lemoine29, le récit par Nelson de ces jours funestes donne l’ampleur de la décapitation publique de PDVSA par Chavez. Le 7 avril 2002, pendant son émission Aló Presidente, Chavez vire les sept cadres les plus emblématiques de l’entreprise, notamment Eddie Ramirez, président de Palmaven, mais aussi Horacio Medina et Carmen Elisa Hernandez. Il prend un sifflet d’arbitre de football et, chaque fois qu’il prononce le nom d’un ces cadres, il siffle et crie « Dehors ! » ; la foule présente sur le plateau de télé applaudit et hurle à son tour « Dehors ! », « Dehors ! ». Une scène digne des minutes de haine imaginées par George Orwell dans 1984.

36Après le 11 avril 2002 et à la suite de la visite et de l’installation d’une mission de négociation du Centre Carter de Washington, présidé par Jennifer McCoy et le président dominicain Leonel Fernandez, la Coordinadora Democratica voit le jour comme contrepartie politique pour dialoguer avec le gouvernement. Les manifestations des opposants continuent pendant toute l’année 2002. Celle du 11 juillet est immense. L’ex-président des États- Unis Jimmy Carter ainsi que Lech Wałęsa visitent le pays pour soutenir une « transition ». Mais la tentative d’installer à Caracas un « bureau pour la transition » promu par Washington braque aussitôt le gouvernement de Chavez. 2002 n’était pas encore 2018, et le mot « transition » revêtait de fortes implications politiques. Chavez était investi d’une grande légitimité populaire et la révolution ne faisait que commencer.

37On peut tirer des leçons des années 2001, 2002 et 2003 : le coût politique de la grève nationale fut bien moindre pour le gouvernement que ce que les opposants envisageaient. Et même si le coup d’État manqué reflétait bien le malaise au sein des forces armées, la maladresse politique consistant à avoir investi un président – Pedro Carmona Estanga – issu de la confédération des patrons et sans aucune légitimité politique a coûté très cher. Plus tard, en 2003, c’est pour faire face à la menace réelle d’un référendum révocatoire que Hugo Chavez saisit la nécessité – à moins que le régime cubain ne le lui ait fait comprendre – de créer les missions pour s’ancrer dans les zones populaires. L’idéologie des circulos bolivarianos n’était pas suffisante. C’est le moment également où commencent à fonctionner de tout autre manière les institutions étatiques chargées de l’état civil.

38L’opposition, celle issue des élites qui, paradoxalement, favorisa l’arrivée au pouvoir de Chavez, le sous-estima et le crut manipulable. Les non-lieux dans les procès des protagonistes de l’insurrection militaire d’avril 2002 montraient sa volonté et sa capacité de démonter et de désamorcer les intrigues séditieuses tout en affirmant son pouvoir chez les militaires.

39Hugo Chavez avait dessiné son modèle économique dans un document intitulé Plan de la Patrie (20042013). Dans ce texte officiel, jargonneux, mal rédigé et mal diffusé, il propose un « modèle de développement » fondé sur les avantages comparatifs des ressources pétrolières et minières, et ouvre grand la porte aux investissements étrangers, notamment chinois et russes, mais aussi à certaines grandes compagnies minières canadiennes. La vision du plan économique de Chavez pour sa dernière décennie au pouvoir reposait également sur l’idée d’une « transition territoriale », qui consistait à promouvoir le déplacement de la population, principalement établie sur l’axe côtier, vers le Sud amazonien, pour exploiter les ressources minières.

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Notes

1 . Aujourd’hui, la République bolivarienne du Venezuela connaît toujours l’une des plus grandes crises de réfugiés et de migration au monde. Voir le Rapport mondial sur la migration de 2022.

2 . Vásquez Lezama, P. (2019). Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos. Buchet-Chastel, p. 12.

3 . Ainsi est désigné le pétrole au Venezuela.

4 . https://imaf.cnrs.fr/spip.php?article372

5 . https://www.canal-u.tv/chaines/cnrspouchet/rente-petrolierecrise-de-l-etat-et-inegalites-en-algerie-et-au-venezuela/rente

6 . La Revue internationale des études du développement remercie les Éditions Karthala pour leur aimable autorisation de reproduire cet extrait du chapitre 5, Les politiques de la dignité. La morale de l’assistance aux victimes de la catastrophe. La Tragedia (1999) au Venezuela, de Paula Vasquez Lezama, publié dans l'ouvrage Penser le politique en Amérique latine. La recréation des espaces et de formes du politique dirigé par Natacha Borgeaud-Garciandia, Bruno Lautier, Ricardo Peñafiel et Ania Tizziani.

7 . Fariñas, William, Plan Civico Militar Bolívar 2000, Caracas, Comisión interministerial, 1999. Le Plan Bolívar 2000, accompagné dans sa mise en œuvre par le FUS, est l’exemple paradigmatique du projet de récupération sociale visée par l’extension des actions de l’armée dans la vie civile. En 2001, le FUS et le Plan Bolivar 2000 ont été fusionnés au sein du ministère du Secrétariat de la présidence, ce qui était le signe d’une centralisation des politiques sociales et d’une concentration démesurée de tâches, du pouvoir et des ressources. Cf. Maingon, Thais, « Política social en Venezuela : 1999-2003 », Cuadernos del CENDES 21 (55), 2004, p. 59.

8 . Au Venezuela, on se sert du terme barrio pour nommer les quartiers populaires urbains, constitués de logements précaires autoproduits (Bolivar, Teolinda, « Construction et reconnaissance des barrios urbains du Venezuela », Les Annales de la recherche urbaine 66, 1995, pp. 80-87), situés le plus souvent sur les pentes en aval des montagnes de la cordillère de la côte où se trouvent les villes de l’axe « centre-nord-côtier » du Venezuela. Caracas est une ville d’environ cinq millions d’habitants. Le littoral de Caracas est situé dans un autre département mais il fait partie de la métropole, La Guaira étant le complexe industrialo-portuaire de Caracas. De plus, dans les années 1980 et 1990, la précarité due à la chute de la rente pétrolière et aux programmes d’ajustement successifs a particulièrement affecté les secteurs urbains. Plus de 4 000 ha. de la zone métropolitaine de Caracas sont occupés par des barrios qui logent 41 % de sa population. Cf. Bolívar, Teolinda, Guerrero, M. et al., Densificación y vivienda en los barrios caraqueños. Contribución a la determinación de problemas y soluciones, MINDUR et CONAVI, 1993, (non publié).

9 . Lieutenant du bataillon Ortega Ramírez, Fort Tiuna, Caracas, mai 2000.

10 . Delgado, Tania, « The institutional restructuring of the Venezuelan Armed Forces. National and Regional Implications » in Pashentev, E. et C. Miniar-Belouratchev (dir.), Armies and Politics, Moscou, Library Authority and Society, 2002, pp. 67-88.

11 . Entretien au FUS, Caracas, mai 2000.

12 . Lander, Edgardo, « Venezuela : la búsqueda de un modelo contra hegemónico », 2004, Transtational Institute, http://www.tni.org/detail_page.phtml?act_id=17437&username=guest@tni.org&password=9999&publish=Y (consulté le 5 mai 2009).

13 . Ochoa Henríquez, Haydée et Isabel Rodríguez Colmenares, « Las fuerzas armadas en la política social de Venezuela », Política y Cultura (20), 2003, pp. 117-135.

14 . Ochoa Henríquez, Haydée et Isabel Rodríguez Colmenares, « Las fuerzas armadas en la política social de Venezuela », op. cit., pp. 118-124.

15 . Alvarado, Neritza, « Pobreza y Exclusión en Venezuela a la luz de las misiones sociales (2003-2004) », Fermentum, 14(39), 2004, pp. 181-232.

16 . Coronil, Fernando, The Magical State. Nature, Money, and Modernity in Venezuela, Chicago, The University of Chicago Press, 1997, p. 10.

17 . Idem., p. 67.

18 . Manrique, Miguel, « El proceso de politización de las Fuerzas Armadas venezolanas en el periodo 1998-2002 », in Democracias frágiles. Las relaciones civiles-militares en el mundo iberoamericano, J. A. Olmeda (coord.), Valencia, Tirant lo Blanch, 2005, pp. 767.

19 . Le revenu pétrolier octroie à l’État vénézuélien un immense pouvoir d’ingérence dans tous les domaines de la vie de la nation. Le point de départ de tout projet politique national est, a été et sera la destination des investissements de ce revenu : création de nouveaux marchés, augmentation des salaires des fonctionnaires publics, financement du secteur privé, etc. (Baptista, Asdrubal, « El desarrollo de Venezuela visto desde la economía política », in Apreciación del proceso histórico venezolano, R. J. Velásquez (éd.), Caracas, Fundación Universidad Metropolitana, 1988, p. 88).

20 . Domingo Irwin montre toutefois que cette subordination des militaires au monde civil n’a jamais été absolue (Irwin, Domingo, Relaciones civiles-militares en el siglo XX, Caracas, El Centauro, 2000).

21 . La Revue internationale des études du développement remercie les Éditions Buchet-Chastel pour leur aimable autorisation de reproduire cet extrait du chapitre III Le pétrole, de l’ouvrage Pays hors service. Venezuela : de l’utopie au chaos de Paula Vasquez Lezama.

22 . Terry Lynn Karl, The Paradox of Plenty: Oil Booms and Petro-States, University of California Press, 1997.

23 . Thad Dunning, Crude Democracy: Natural Resource Wealth and Political Regimes, Cambridge University Press, 2008.

24 . Asdrubal Baptista et Bernardo Mommer, El petróleo en el pensamiento económico venezolano, Caracas, Ediciones IESA, 1992.

25 . Depuis 2000, le Venezuela livre à Cuba entre 50 000 et 100 000 barils de pétrole par jour.

26 . Depuis 2007, le gouvernement chinois a prêté 36 milliards de dollars au Venezuela, dont une partie est remboursable en pétrole à travers la livraison de 270 000 barils par jour.

27 . Le terme « méritocratie » est employé tant par l’opposition que par le gouvernement à l’époque. Pour le gouvernement, la méritocratie était synonyme de privatisation. Pour les employés de PDVSA, c’était une garantie de fonctionnement avec des standards de qualité.

28 . Brian Nelson, The Silence and the Scorpion: The Coup against Chavez and the Making of Modern Venezuela, Nation Books, 2012.

29 . Maurice Lemoine, Chavez presidente!, Paris, Flammarion, 2005.

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Pour citer cet article

Référence papier

Fatiha Talahite, Brenda Rousset Yépez et Imène Laourari, « Hommage à Paula Vásquez Lezama (1969-2021) »Revue internationale des études du développement, 251 | 2023, 265-281.

Référence électronique

Fatiha Talahite, Brenda Rousset Yépez et Imène Laourari, « Hommage à Paula Vásquez Lezama (1969-2021) »Revue internationale des études du développement [En ligne], 251 | 2023, mis en ligne le , consulté le 28 novembre 2023. URL : http://journals.openedition.org/ried/8199 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ried.8199

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