Enjeux moraux et politiques de l’exigence d’hospitalité
Résumés
Dans un contexte de restriction des protections sociales, de limitations au droit d’asile et de multiplication des obstacles à l’obtention du statut de réfugié, l’article s’interroge sur la portée et la signification de la montée de l’exigence d’hospitalité. Rappelant que les liens entre les évolutions des structures juridiques et celles des économies morales, attirant l’attention sur la montée en puissance d’un registre de critique morale qui se vérifie à la fois dans la tradition de la pensée critique et dans la critique politique la plus courante, l’article met en évidence les ambivalences du concept d’hospitalité, qui, d’une part, permet de dénoncer les conditions inacceptables faites aux populations les plus vulnérables, mais, d’autre part, transformée en exigence, risque de privilégier une lecture morale de ces conditions et, du coup, de légitimer des réponses de types humanitaires plutôt que juridiques.
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1Pourquoi parlons-nous tant d’hospitalité ? Et comment en parlons-nous ? Pour exiger, pour revendiquer, pour excuser, pour expliquer, pour justifier, pour critiquer… quoi ? Quel est l’univers sémantique des controverses où elle cherche à asseoir sa place ? Et à propos de quelles pratiques la mobilise-t-on ? Telles sont les questions que je souhaite aborder dans cette réflexion.
Mon questionnement part donc d’un constat : celui de l’irruption massive du concept d’hospitalité dans les discours des mouvements sociaux confrontés à la grande misère, celle des SDF, des demandeurs d’asile, des réfugiés, des victimes de catastrophes… Mais pas seulement puisqu’on le rencontre aussi, dans le même temps, au sein des théories politiques, sans parler – mais là sous des horizons politiques différents – des politiques urbanistiques ou encore de certains discours managériaux ou touristiques par exemple. Pourquoi donc cette montée en puissance ? Comment l’interpréter ?
Que les conditions d’accueil des demandeurs d’asile ou des candidats réfugiés soient scandaleuses, que le sort des SDF ne soit pas digne des pays qui se veulent démocratiques… ne fait pour moi aucun doute. Ma réflexion porte plutôt sur la compréhension et la signification du fait que cela soit aujourd’hui de plus en plus saisi sous l’horizon à la fois descriptif et normatif de l’hospitalité, et que donc le concept se fasse une place importante, notamment au sein des discours critiques.
Quelques éléments contextuels
2Avant d’entrer dans le cœur de mon argumentation, un certain nombre de précisions contextuelles sont toutefois indispensables. Progressivement, en particulier depuis les années quatre-vingt et la montée du néolibéralisme, nous assistons à des régressions constantes des protections sociales. Résultat des luttes ouvrières, l’instauration de ces dispositifs de protection s’appuyait sur un processus de collectivisation des responsabilités face aux aléas de l’existence, chômage, handicap, retraite… qui lui-même reposait sur des intuitions éthiques, en particulier sur la valeur de solidarité. Même si elle était au départ fondée sur l’idée de citoyenneté, cette solidarité s’est aussi étendue à des non-citoyens, en particulier ceux dont l’existence était menacée dans leurs pays à qui fut donc reconnu un droit à l’asile. Dans leur esprit initial, ces droits furent pensés comme des droits créances, des droits qu’avaient ceux qui se trouvaient face à ces aléas d’exiger de l’État que celui-ci leur donne accès aux prestations prévues, et cela de manière inconditionnelle.
- 1 Jean-Louis Genard, La grammaire de la responsabilité, Paris, Cerf, « Humanités », 1999.
- 2 Jean-Louis Genard et Fabrizio Cantelli, « Pour une sociologie politique des compétences », Les Poli (...)
C’est précisément cette accessibilité qui, depuis les années quatre-vingt, n’a cessé et ne cesse d’être remise en question. Ces régressions sont à la fois administratives, juridiques et, dans leur logique, elles conduisent très généralement à conditionnaliser ce qui auparavant ne l’était pas ou l’était moins. Mais comme l’instauration des protections sociales avait trouvé appui sur des intuitions éthiques, les régressions dont elles sont l’objet s’appuient quant à elles sur d’autres intuitions ou des intuitions concurrentes, en particulier les intuitions délégitimant la collectivisation de la responsabilité au profit de son individualisation1 portées par le néolibéralisme. C’est ainsi que l’accès aux différents droits sociaux est de plus en plus conditionné à des exigences dont le principe repose sur la responsabilisation individuelle (démonstration de la recherche d’emploi…). Avec pour résultat immédiat, la multiplication des processus d’exclusion, et l’augmentation de citoyens abandonnés par l’État2.
- 3 Christelle Palluel, « Le nouveau régime de la demande d’asile en rétention administrative : des gar (...)
S’agissant cette fois plus spécifiquement du droit d’asile, à cette logique de conditionnalisation fondée sur la responsabilité individuelle, s’est ajoutée la montée des nationalismes, régionalismes… qui invitaient à restreindre aux seuls nationaux les protections sociales et à limiter autant que faire se pouvait et se peut, au travers d’une surenchère de conditions, l’accès au droit d’asile. Ces attaques portées contre le droit d’asile se sont avérées et s’avèrent d’autant plus « efficaces » que, contrairement aux protections sociales classiques qui peuvent s’appuyer sur des alliés traditionnels, le droit d’asile est au départ, par nature dirions-nous, un droit fragile. Son ancrage – non pas dans le droit national mais dans le droit international – a, par exemple, pour conséquence que ses concrétisations juridico-administratives et ses applications concrètes demeurent largement à la « discrétion » des États. Par ailleurs, dans sa conception initiale, le droit d’asile a été conçu par rapport aux risques de persécution politique, ce qui en limite fortement le champ d’application, et problématise par nature l’ensemble des situations où peuvent être soupçonnées, à tort ou à raison, des motivations économiques. Et, particulièrement dans ces cas, le droit d’asile peut aisément être mis en balance par rapport à des situations et législations nationales, comme par exemple celles concernant l’accès au marché du travail, et, au-delà, le permis de séjour, justifiant par exemple des formes de conditionnalisation liées par exemple aux « besoins » de main-d’œuvre ou de qualifications. Enfin, la logique de conditionnalisation trouve dans l’octroi du droit d’asile et du statut de réfugié un « terreau » de choix. Fondamentalement, la conditionnalisation s’appuie sur le soupçon que des demandes seraient abusives. Elle requiert alors une accumulation d’enquêtes et de preuves quant à la justification de la demande, balisée par une accumulation d’étapes dans un parcours administratif dont la logique même pose des questions éthiques non seulement au regard de la vulnérabilité des demandeurs, mais tout simplement par rapport à leur « commune humanité », comme l’illustrent par exemple les conditions dans les centres de rétention3.
Mes réflexions s’inscriront dans ce contexte. Elles se focaliseront sur ce que les quelques développements précédents ont présupposé, à savoir que si les dispositifs de protection sociale se manifestent dans les registres juridico-administratifs, il n’en demeure pas moins qu’ils reposent sur des fondements éthiques. Je m’intéresserai donc prioritairement à la place que prend et au sens que peut avoir la référence à ce beau concept d’hospitalité au cœur des ressources critiques mobilisées dans ce contexte de régression des protections sociales et du droit d’asile. Et, même si le champ d’application du concept est fort vaste, mon attention portera, sans doute non exclusivement, mais de manière privilégiée, sur les références qui y sont faites à l’égard des populations les plus vulnérables, celles dont l’accès aux protections sociales et au droit d’asile est fragilisé.
Un tournant éthique de la critique politique : critique sociale, critique artiste, critique morale
3Pour aborder cela, sans doute est-il tout d’abord indispensable de replacer le concept d’hospitalité parmi d’autres concepts plus ou moins proches qui participent du même mouvement. Je pense bien sûr au concept d’accueil qui le côtoie très souvent, au concept d’accompagnement qui s’est frayé un bel espace au sein des nouvelles politiques sociales, à celui de reconnaissance qui en appelle à une capacité de décentrement également centrale dans celui d’hospitalité, dans ceux aussi de sollicitude et de care.
- 4 Dans cet article, j’ai pris le parti de ne pas entrer explicitement dans les discussions distinguan (...)
- 5 Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, « Essais », 1999
Tous ces termes participent en réalité de la montée spectaculaire des arguments éthiques face à ce qui en vient désormais à être interprété sous l’angle de la grande vulnérabilité, du mépris, de la souffrance, du déni de reconnaissance4. Des situations qui, il y a peu de temps encore, auraient sans doute été plus directement interprétées en termes de domination, d’exploitation… dans le registre de ce que Luc Boltanski et Ève Chiapello ont appelé la critique sociale5, le sont aujourd’hui de manière de plus en plus marquée, sous des registres et au travers de sémantiques éthiques.
- 6 Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, (1992), Paris, Le Cerf, « Passages », 2000.
- 7 Avishai Margalit, La société décente, Paris, Flammarion, « Champs », 2007.
- 8 Jean-Louis Genard, « La place du care dans la réorientation des théories critiques » in Matthieu De (...)
Les illustrations de ce tournant au sein des théories critiques sont nombreuses. Les réflexions menées par Jürgen Habermas sur les fondements de la démocratie à partir d’une éthique de la discussion. Le renouveau récent de la théorie critique de Francfort par Axel Honneth autour des concepts de reconnaissance et de mépris6. L’ouvrage de Avishai Margalit intitulé significativement Une société décente7. Mais aussi, la montée au sein des théories critiques du concept de care, dont on connaît évidemment les liens, via les travaux de Carol Gilligan, avec la théorie du développement moral de Lawrence Kohlberg, et plus globalement l’ancrage dans un registre éthique avant d’être politique. Les illustrations pourraient être multipliées8.
4Cette évolution des registres critiques est à mon sens essentielle. Si Boltanski et Chiapello avaient repéré l’affaiblissement depuis les années soixante du siècle dernier de ce qu’ils avaient appelé la critique sociale, dénonçant l’exploitation, la domination…, au profit de la critique artiste dénonçant l’aliénation, l’inauthenticité, l’absence de réalisation de soi, d’autonomie et de responsabilité… il me semble qu’aujourd’hui ces deux critiques se trouvent confrontées à ce que j’appelle ici la critique morale.
- 9 Philippe Gonzalez et Laurence Kaufmann, « La caricature sans blasphème ? Sémantique et pragmatiques (...)
- 10 Gilles Gauthier, « Le débat public à la suite de l’attentat contre Charlie Hebdo – Y a-t-il une éth (...)
- 11 Carole Talon-Hugon, Morales de l’art, Paris, Presses Universitaires de France, « Lignes d’art », 20 (...)
- 12 Luc Boltanski, De la critique. Précis de sociologie de l’émancipation, Paris, Gallimard, « Essais » (...)
Comme la critique sociale s’était trouvée fragilisée dans les années soixante par la critique artiste, aujourd’hui, cette même critique artiste se trouve fragilisée, à la fois par un retour relatif de la critique sociale, mais surtout – ce qui nous intéressera ici – par la critique morale. Elle l’est d’ailleurs sur son propre terrain. Là où la critique artiste avait créé les conditions pour une sorte d’immunisation de l’art, de la créativité artistique par rapport à la morale, aujourd’hui cette immunisation est sans cesse contredite. Les artistes (Woody Allen, Roman Polanski, Gabriel Matzneff…) sont contestés eux-mêmes en raison de comportements qui leur sont reprochés au nom d’arguments moraux. On a vu aussi, dans de nombreux cas, à quel point l’argument de la liberté de création, du droit à la provocation se trouvait fragilisé face aux critiques morales, aux accusations de pornographie, d’irrespect, de blasphème. Que l’on pense simplement, suite à l’attentat de Charlie Hebdo, à la place qu’a pris l’argument du nécessaire respect de l’autre, des indispensables limites à la provocation, des tensions entre liberté de création et exigences de reconnaissance. Ces controverses autour des limites à la liberté d’expression et de sa mise en perspective par rapport à des arguments moraux ont d’ailleurs fait l’objet de nombreuses analyses mettant par exemple en évidence les tensions entre grammaires « pluraliste et critique, d’une part, et… fondamentaliste » de l’autre9, ou évoquant l’horizon de « régulations éthiques » auxquelles devrait être soumise la liberté d’expression, et cela y compris auprès de personnes que l’on ne peut en rien soupçonner de sympathie à l’égard des terroristes10. Et, dans le même temps, de plus en plus d’artistes en viennent à situer, expliquer, justifier leurs œuvres par rapport à des engagements sociaux, notamment par rapport aux combats émergents11. C’est somme toute ce que remarquait aussi Luc Boltanski lorsqu’il expliquait que de plus en plus souvent les stylisations esthétiques, par le monde artiste, des « épreuves existentielles » précédaient leurs thématisations politiques au travers des « épreuves de réalité »12. Et, bien sûr, cette montée de la critique morale gagne très largement la sphère politique, comme on l’a vu, parmi de multiples autres exemplifications possibles, avec le cas de François Fillon lors des dernières campagnes présidentielles françaises, ou comme on le voit avec l’importance prise par la dénonciation, pour des raisons souvent d’abord morales, des hauts salaires, des parachutes dorés… dans le monde de l’entreprise et de la finance. Ou encore l’ampleur du discrédit porté sur de hauts décideurs politiques ou économiques par des dénonciations morales, en particulier sur le plan sexuel, là où les critiques politiques relevant de la critique sociale les fragilisaient à vrai dire bien moins.
Les sous-bassement anthropologiques de ce tournant éthique : de la domination et de l’exploitation à la vulnérabilité et à la fragilité
5Les enjeux liés à cette montée de la critique morale sont nombreux, et il ne saurait être question d’en analyser l’ampleur et les multiples figures. Nul doute qu’il y aurait par exemple beaucoup à dire sur les acteurs par lesquels elle est quelquefois – souvent – portée, en particulier par les fondamentalismes religieux ou les conservatismes politiques, et donc sur les effets possibles que certaines des accentuations de la critique morale peuvent avoir par rapport aux atteintes aux conditions de la critique au sein d’un espace public libéral. Ce n’est toutefois pas cet aspect – bien sûr politiquement essentiel – qui m’intéressera d’abord ici. J’y reviendrai en conclusion de cet article. Mes réflexions s’intéresseront d’abord aux occurrences de la sémantique de l’hospitalité au sein de discours que l’on qualifierait sans doute spontanément de progressistes, des discours qui prennent fait et cause pour des situations faites à des populations dominées, fragilisées…
Entendons-nous bien aussi. Ce tournant éthique n’a évidemment rien de problématique en soi. Ce que les catégories éthiques permettent de dénoncer peut tout à fait mériter de l’être, et souvent, par rapport aux dénonciations qui occupent le centre de mes réflexions, le mérite. Et, par ailleurs, la montée de la critique morale n’efface pas les autres registres critiques mais cohabite avec eux, tout en prenant une place qu’elle n’avait pas auparavant et qu’elle avait d’ailleurs largement perdue avec les mouvements contre-culturels des années soixante et la montée de la critique artiste.
Simplement, ce que les rapides évocations précédentes entendent mettre en évidence, ce sont les significations et effets sociaux et politiques de cette montée des grammaires morales, en particulier lorsqu’elles entrent en tension avec d’autres grammaires, pouvant par exemple conduire à en relativiser le monopole, et parfois, la pertinence. Ce que ces remarques invitent à voir dans le « succès » du concept d’hospitalité, ce n’est donc pas sa pertinence intrinsèque, mais bien, répétons-le, la place qu’il occupe dans l’espace sémantique de qualification des questions sociales, les effets de ces tensions avec des qualifications concurrentes tant au niveau de la force des arguments que des dispositifs sociaux que ces différentes qualifications justifient. Pour aller plus avant dans l’argumentation et en revenir plus frontalement à la question de l’hospitalité, il peut donc être utile de réfléchir aux manières dont les différentes critiques jettent leur regard sur ceux et celles qu’elles entendent défendre. Si ceux qu’entend défendre la critique sociale sont ceux qui sont exploités, qui sont injustement dominés ; si ceux qu’entend défendre la critique artiste sont plutôt ceux qui sont privés de leurs capacités d’autonomie, de leur liberté de créer, d’être eux-mêmes ; ceux qu’entend défendre la critique morale en l’occurrence sous l’horizon de l’hospitalité qui nous intéresse ici, en évoquant la nécessaire sollicitude, le précieux accueil, l’indispensable bienveillance, ce sont d’abord ceux qui sont fragiles, affaiblis, précarisés, vulnérables. Et, encore une fois entendons-nous bien : ceux qui mettent en avant la grammaire de la vulnérabilité ne dénient pas forcément celle de l’exploitation et de la domination. Simplement, leur regard diffère et cette différence porte à agir selon des registres eux-mêmes différents. Le regard porté sur l’autre se charge moins de la dénonciation des processus qui l’ont conduit à la situation qui est la sienne, que de celle à la fois de l’indignité du sort qui lui est réservé et de l’urgence de l’appel que constituent son désarroi et sa souffrance. Moins l’injustice dont il ou elle est victime que l’indécence de la situation où il ou elle se trouve. Moins donc un sujet de droit qu’un être vulnérable et souffrant, et qu’une assignation à sortir de l’indifférence. Moins un sujet dont on doit d’abord se demander comment il en est arrivé là, s’il est par exemple responsable ou non de sa situation, qu’un sujet dont la situation ne peut nous laisser indifférents, un sujet qui appelle à agir avant de juger.
La signification politique d’un déplacement vers des lectures morales
- 13 Jean-Louis Genard, « La question de la responsabilité sous l’horizon du référentiel humanitaire », (...)
- 14 Didier Fassin, La raison humanitaire. Une histoire morale du temps présent, Paris, Éd. de l’EHESS/S (...)
6Encore une fois, qu’il y ait vulnérabilité, que face à ces souffrances l’indifférence serait coupable constituent des évidences. Le problème réside en fait dans ce que j’ai commencé à dessiner, à savoir la concurrence éventuelle entre les registres interprétatifs, et, dans la foulée, dans les dispositifs et les types de politiques qu’ils appellent. Dans un précédent article, j’ai montré comment la montée du référentiel anthropologique de la fragilité et de la vulnérabilité s’était accompagnée d’un changement ou du moins d’un infléchissement profonds des politiques sociales, en particulier en contribuant à développer, à côté, en complément, des politiques sociales classiques dont l’accès devenait de plus en plus exigeant et de plus en plus conditionnalisé, un ensemble de dispositifs « humanitaires », gérés le plus souvent par les secteurs associatifs quelquefois subsidiés mais s’appuyant largement sur le bénévolat, bénéficiant parfois aussi de financements résultant d’appels à la générosité plus ou moins médiatisés, générosité d’ailleurs couramment encadrée d’incitants fiscaux13. De manière plus radicalement critique, dans La raison humanitaire, Didier Fassin parle à ce propos d’un tournant compassionnel de la politique14.
- 15 Jean-Louis Genard, « Pourquoi l’hospitalité ? », SociologieS [en ligne], 2018.
Je n’évoquerai pas ici une des difficultés inhérentes à l’exigence d’hospitalité dès lors qu’elle est pensée essentiellement sur le registre d’un don sans réciprocité. J’y ai consacré un texte15 dans un dossier consacré à l’hospitalité paru dans la revue SociologieS. Ce à quoi je m’intéresse et qui me paraît personnellement essentiel par rapport à la compréhension de la montée de l’exigence d’hospitalité, c’est la tension qui, dans ce contexte de concurrence entre les lectures du malheur, se crée entre différentes manières d’y répondre et plus précisément ici, dans la précarisation et la conditionnalisation de l’accès à des droits, à des obligations de prise en charge qui puissent sécuriser la situation de ceux qui en sont l’objet.
- 16 Élodie Boublil et Laure Wolmark, « Vulnérabilité, soin et accueil des demandeurs d’asile », La Revu (...)
On comprend en effet aisément que mettre en place les conditions d’un accueil hospitalier pour ceux qui se trouvent en situation de vulnérabilité est essentiel, mais on comprendra tout aussi aisément qu’exiger un accueil hospitalier n’est pas la même chose qu’exiger par exemple l’effectivité du droit d’asile pour ceux qui se réfugient dans des pays où ils pensent pouvoir échapper aux risques qu’ils courraient en demeurant dans leur pays. Que demander que les institutions qui assurent l’hébergement des SDF soient hospitalières est bien sûr fondamental, mais est bien différent par exemple de l’instauration pour chacun d’un droit au logement. Bref, que les politiques de réponse à la vulnérabilité ne soient pas forcément à la hauteur de l’exigence de protection des personnes et de reconnaissance de leurs situations16.
- 17 Ruwen Ogien, « Les “valeurs morales” contre les droits », Raison publique 6 (2007), Sorbonne Univer (...)
7Dans un texte datant de 2010, intitulé significativement « Les “valeurs morales” contre les droits », Ruwen Ogien, réfléchissant notamment à la place prise par les argumentations morales dans les élections présidentielles, et plus généralement dans les controverses politiques américaines et françaises, s’inquiétait déjà de cette irruption du discours moral, plus précisément du fait que, disait-il, le discours des valeurs remplace celui du droit. Dans ce texte, l’auteur ne contestait pas que le droit pouvait tout à fait s’appuyer sur des valeurs, que des critiques au nom de valeurs avaient pu être et pouvaient encore bien sûr être fondatrices de nouveaux droits, mais, dans le contexte des années 2000, c’était plutôt la tendance inverse qu’il observait. S’appuyant sur de multiples illustrations, il pouvait affirmer que « dans tous ces cas, l’appel à ces “valeurs morales” ne vise pas à élargir, renforcer, protéger la liberté de chacun de faire ce qu’il veut de sa vie du moment qu’il ne nuit pas aux autres, ou celle des personnes consentantes d’avoir les relations qu’elles souhaitent en matière sexuelle par exemple, mais à les affaiblir, à les remettre en cause »17.
- 18 Jean-François Neven, La référence à la vulnérabilité dans le droit de la protection sociale : des s (...)
- 19 Fabrizio Cantelli et Jean-Louis Genard (s.l.d.), Action publique et subjectivité, Paris, LGDJ, « Dr (...)
Pour illustrer l’ambiguïté non plus du discours des valeurs morales, mais plutôt, cette fois, celle des dispositifs d’action publique participant de cette évolution, je ferai référence à un très beau travail doctoral réalisé par un magistrat spécialiste du droit social, Jean-François Neven, qui s’interrogeait, du point de vue donc d’un acteur de la justice, sur la montée dans le droit du référentiel de la vulnérabilité18. En magistrat obligé de prendre des décisions de justice, il s’interrogeait sur ce que pouvait faire à ses décisions ce nouveau paysage sémantique. Une partie particulièrement riche de son travail, et des discussions soulevées en jury, portait sur un type de dispositif qui apparaissait comme induit par la référence à la vulnérabilité, à savoir les dispositifs dits « d’accompagnement ». De nombreux travaux ont mis en évidence les transformations des politiques sociales sous l’horizon de la responsabilisation19 en montrant comment la référence à la responsabilité, et plus précisément à la déresponsabilisation générée par le caractère inconditionnel des droits sociaux, avait pu contribuer à leur délégitimation d’abord et à la mise en place de nouveaux dispositifs, parmi lesquels des dispositifs de suivi et de contrôle des bénéficiaires. Les dispositifs d’accompagnement en font partie, avec donc leur lot d’ambiguïtés. Présentés comme des dispositifs d’aide, témoignant d’une sollicitude, d’une bienveillance à l’égard de personnes fragilisées, ils apparaissent dans le même temps comme des dispositifs de contrôle, permettant éventuellement de justifier des suppressions de droits. Ce qui était toutefois particulièrement intéressant dans les réflexions doctorales menées par Jean-François Neven, ce sont les doutes sur les manières de « juridiciser », et surtout de rendre opposable ce que sous-tendaient la vulnérabilité et l’accompagnement.
« Plutôt que » ou « par ailleurs » : l’hospitalité « à la place » ou « en plus » des droits
8Les développements précédents ont mis en évidence les ambiguïtés portées par la référence à l’hospitalité, non pas en soi, mais dans les relations que cette référence entretient avec d’autres références mobilisées dans les controverses et les politiques publiques. La question n’est donc en rien de condamner la montée de l’exigence d’hospitalité mais de la problématiser au sein des contextes où s’opère cette montée en cherchant à saisir ce qu’elle induit, ce qu’elle fait faire et ne pas faire. On l’a compris, l’enjeu est donc contextuel. Et, en particulier, au regard des illustrations précédentes un des enjeux pourrait bien être celui de la détermination des espaces où s’impose la référence à l’hospitalité et où cette transition permet en fait de déjuridiciser ou de dépolitiser certains enjeux sous-jacents.
- 20 Camille Chamard et Lee Schlenker, « La place du marketing territorial dans le processus de transfor (...)
Ainsi, lorsque les politiques de la ville attendent que les aménagements envisagés permettent de rendre la ville plus hospitalière pour les touristes de passage, les enjeux politiques tels qu’ils sont évoqués ici sont relativement mineurs, encore que leurs implications socio-politiques ne soient pas forcément absentes. S’inscrivant par exemple dans le cadre de la montée du référentiel de l’attractivité, ces références à une hospitalité visant le développement du tourisme peuvent tout à fait se conjuguer avec des aménagements urbains favorisant des processus de gentrification ou encore, par exemple, avec des configurations du mobilier urbain, parfaitement inhospitalières pour les SDF. C’est ainsi que, dans un article récent, on peut trouver cette phrase où est mobilisé le concept d’hospitalité : « L’utilisation des termes “marketing territorial” s’accompagne bien souvent de notions d’attractivité, d’hospitalité, de compétitivité, dans l’optique de préciser davantage le sens à privilégier à une telle démarche »20. On aura compris que le potentiel éthique du mot hospitalité se trouve ici mobilisé dans une optique strictement utilitariste et managériale, comme s’il s’agissait de lui conférer une plus-value éthique.
9Ce qui m’intéresse davantage dans le cadre de cette courte contribution, ce serait plutôt les cas où la référence à l’hospitalité fonctionne comme un opérateur de déplacement de la lecture de questions sociales, comme cela transparaît dans cette autre citation :
- 21 Mireille Rosello, Postcolonial Hospitality. The Immigrant as Guest, Stanford, Stanford University P (...)
- 22 Magali Bessonne, « Le vocabulaire de l’hospitalité est-il républicain ? », Éthique publique [en lig (...)
Or, si le phénomène de l’immigration est distinctement sociopolitique, le concept d’hospitalité relève plutôt d’une théorie éthique et son statut dans les discours est celui d’une métaphore21. Mon hypothèse est que son usage est un symptôme de la conversion, systématiquement accomplie par le républicanisme, des principes politiques de justice en obligations éthiques lorsqu’il est question de migrations22.
10C’est à une conclusion très semblable qu’arrive Guillaume Leblanc suite à des enquêtes ethnographiques menées auprès des réfugiés, notamment à Calais :
- 23 Guillaume Leblanc, « Nous sommes passés du problème de l’immigré à celui du migrant », interview da (...)
Nous avons été ainsi alertés par le fait qu’il existe deux recréations de lieux, soit le modèle domestique de l’hospitalité privée reposant sur l’ouverture de son chez-soi, soit le modèle politique de l’hospitalité publique reposant sur la création de dispositifs institutionnels : la maison d’un côté, l’hôpital de l’autre. Le basculement de l’un vers l’autre implique la politisation de l’hospitalité. Le refus d’ouvrir de tels dispositifs marque, au contraire, le reflux vers le traitement seulement éthique (moral ou religieux) de l’accueil des demandeurs de refuge. C’est à ce reflux que l’on assiste aujourd’hui23.
11Comme on l’aura compris, l’hypothèse développée ici est double, révélant l’ambiguïté moins du concept d’hospitalité que de ses usages.
D’un côté, indéniablement, l’exigence d’hospitalité permet de pointer non seulement à quel point l’organisation de certaines politiques publiques a sous-estimé la dimension morale des pratiques qu’elles mettaient en œuvre, mais aussi à en crier les insuffisances. En particulier, le concept d’hospitalité permet de pointer l’inhumanité des processus de bureaucratisation administrative. Elle attire du coup l’attention sur le fait que les politiques publiques portent, devraient, doivent porter des exigences éthiques, en particulier des exigences de reconnaissance de ceux qui y sont confrontés. Elle permet de penser les déficits moraux, le mépris quelquefois, sur lesquels elles se bâtissent. Elle remet au sein du débat public la question de la fragilité, de la vulnérabilité des populations, qui pour être des usagers, des bénéficiaires, des clients peut-être… n’en demeurent pas moins des sujets moraux à l’égard desquels s’imposent des obligations de respect.
Mais, d’un autre côté, la référence à l’hospitalité peut tout à fait jouer comme un opérateur de déplacement, et déplacer vers des abords moraux des enjeux en réalité politico-juridiques. Ce qui plaide par rapport à ce risque c’est évidemment la convergence entre la montée de la sémantique de l’hospitalité et celle des restrictions de droits des populations précisément à l’égard desquelles est sollicitée cette hospitalité. Des populations par rapport auxquelles la reconnaissance de droits pose question. Et c’est alors précisément parce qu’aucun cadre juridique solide, aucune politique publique de prise en charge n’est de mise que, minimalement, s’imposent des attentes éthiques. Cette longue citation qui suit résume parfaitement bien cette ambivalence :
- 24 Claudia Girola, « SDF à Nanterre : des hommes ni d’ici ni d’ailleurs Chronique d’une construction d (...)
Comme l’énonce le chef de projet du Petit Nanterre : « Il n’est même pas question d’hospitalité, plutôt d’humanité, les SDF ont plutôt besoin d’une prise en charge, ce n’est pas le cas lorsqu’on accueille quelqu’un par hospitalité. Accueillir quelqu’un c’est un signe d’acceptation, de respect, d’amitié, de reconnaissance mais pas forcément de prise en charge… Comment dès lors héberger cette humanité sans territoire et sans appartenance ? La réponse réside dans la prise en charge humanitaire. Ce qui se dit sans détour : « On ne peut pas les balancer dans la rue comme un paquet, il faut gérer la frontière entre le dedans et le dehors de l’institution, même étant dehors il faut penser comment les accompagner… Et je dis qu’il faut gérer le dehors, parce que ce sont des personnes qui seront toujours regardées comme étrangères à la ville, c’est difficile de changer ça » (adjoint délégué à l’habitat et aux personnes âgées)24.
12Que les politiques publiques, les politiques sociales, les politiques de la ville, que les administrations publiques doivent faire preuve d’hospitalité, personne ne le conteste (encore que, comme on le verra, cette exigence d’hospitalité peut elle-même être contestée). Comme personne ne contestera sans doute que souvent ces politiques manquent effectivement d’hospitalité. Qu’une adjonction d’hospitalité soit donc la bienvenue ne fait aucun doute. Et on peut donc comprendre que cette demande d’hospitalité se fasse jour et se développe dans le même temps que ce que j’ai appelé la critique morale, mais aussi par exemple que se multiplient les dispositifs de régulation éthique des institutions, que s’écrivent des chartes éthiques exigeant des administrations qu’elles respectent davantage leurs usagers, que les configurations spatiales de ces mêmes administrations s’efforcent de rendre leurs espaces plus accueillants…
- 25 Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, op. cit.
Rien à redire sans doute à cela. La question ne se pose que lorsque ces exigences de reconnaissance éthique se substituent aux exigences de reconnaissance juridique et politique. Que la montée de l’hospitalité réponde en fait, pour faire référence aux milieux de la reconnaissance distingués par Axel Honneth25, à un déplacement vers le milieu des affects de ce qui était, avait été, devrait être, redevable des milieux du droit et de la solidarité. Qu’alors les réponses politiques à la vulnérabilité s’appuient sur la mobilisation de la sensibilité, des affects, de la compassion… et, plutôt que de renvoyer vers la robustesse des institutions de l’État de droit et des politiques sociales, elles le fassent aux initiatives associatives et citoyennes. Qu’elles s’appuient sur le bénévolat plutôt qu’elles ne mettent en place des services sociaux professionnalisés.
Lorsque la régression des exigences juridico-politiques ne fait plus place aux exigences morales, mais ouvre au déni – cynique – de vulnérabilité
- 26 Joan Stavo-Debauge, « L’oubli de ce dont c’est le cas », SociologieS [en ligne], 2018.
13A moins bien sûr, que le rapport aux grandes vulnérabilités ne donne lieu au désintérêt complet, voire au mépris de l’action publique. Comme c’est le cas lorsque les États en viennent à refuser toute légitimité à l’exigence d’hospitalité, déniant à ceux qui l’appellent toute justification à le faire, choisissant alors radicalement de récuser tout regard moral, toute attitude compassionnelle en faisant par exemple droit à des appréciations qui les exonèrent de toute responsabilité, soit qu’ils rejettent cette responsabilité sur ceux qui leur lancent cet appel (ils l’ont cherché, ce sont eux qui se sont mis dans cette situation) en mobilisant alors le référentiel de la responsabilité individuelle qui, déjà, avait permis de délégitimer les politiques de l’État social, soit qu’ils se dédouanent de toute responsabilité estimant, par exemple, que la responsabilité de l’État ne s’étend qu’à ceux qui peuvent faire valoir leur appartenance nationale, opérant alors une séparation dure entre les vulnérables nationaux et étrangers, et accusant les demandeurs d’asile d’abuser de l’hospitalité, comme par exemple Mateo Salvini en Italie, ou comme lorsque le groupe libéral-radical du parlement suisse dépose une initiative parlementaire intitulée explicitement « non aux abus de l’hospitalité » faisant valoir l’importance des délits commis en Suisse par les bénéficiaires de l’hospitalité du pays. À quoi s’ajoute évidemment, le fait que, comme c’est de plus en plus le cas dans de nombreux pays occidentaux, l’hospitalité devient potentiellement elle-même un délit, que ce soit de la part des personnes qui ont aidé des illégaux en détresse ou des associations qui leur viennent en aide. L’hospitalité devient alors coupable, l’obligation morale se mue en délit26.
Un pas de plus est alors franchi. Ce n’est plus que l’attitude morale se substitue à la lecture juridico-politique, c’est que le regard moral lui-même, l’exigence d’hospitalité semble ne plus avoir de justification acceptable. À la vulnérabilité, se substitue la responsabilité inexcusable de s’y être laissé aller, voire la responsabilité de chercher à en profiter. L’hospitalité se trouve prise par le doute quant à ceux qui pourraient en bénéficier. La beauté du don se trouve gangrenée par le soupçon de naïveté et/ou d’irresponsabilité de celui qui se laisse prendre. La vulnérabilité dont l’urgence de réponse exonère a priori de tout jugement moral sur celui qui la vit fait place à la suspicion à la fois sur celui qui en prend soin, et sur celui qui en bénéficie. Potentiellement le procès s’ouvre de celui qui offre l’hospitalité. Procès moral de celui qui est exagérément crédule, mais aussi, pourquoi pas, procès juridique de celui qui a accordé l’hospitalité à ceux qui ne pouvaient y prétendre.
Observant ce glissement critique, on ne peut qu’être tentés d’y déceler un parallélisme entre cette délégitimation du discours de l’hospitalité en fonction de la responsabilisation de ceux qui l’attendent, qui l’espèrent… de ceux dont on prétend qu’elle leur est due (en fait, ils en abusent, ils ne la méritent pas, ils viennent d’ailleurs profiter de nos politiques sociales…), et la délégitimation dont ont été l’objet les politiques de l’État social dans les années quatre-vingt, avec la montée du néolibéralisme, au nom de la déresponsabilisation des bénéficiaires qu’elles entraînaient, et des abus qu’elles induisaient.
Ce mouvement que l’on n’aurait sans doute pas imaginé possible il y a quelque temps est devenu notre lot.
Et c’est bien pour cela que, en dépit des effets pervers possibles que nous avons décrits des politiques qui deviendraient compassionnelles, l’exigence d’hospitalité, au-delà d’une dimension morale dont nous avons montré les risques, s’impose clairement comme une revendication politique, à condition bien sûr de la saisir, non pas seulement sur un registre moral qui ne s’ouvrirait pas à des concrétisations politiques, mais comme fondatrice de droits inconditionnels.
Notes
1 Jean-Louis Genard, La grammaire de la responsabilité, Paris, Cerf, « Humanités », 1999.
2 Jean-Louis Genard et Fabrizio Cantelli, « Pour une sociologie politique des compétences », Les Politiques sociales, 1& 2, 2010, p. 103-120 et Jean-Louis Genard, « La question de la responsabilité sous l’horizon du référentiel humanitaire », in Axelle Brodiez-Dolino, Isabelle Von Bueltzingsloewen, Benoît Eyraud, Christian Laval et Bertrand Ravon (s.l.d.), Vulnérabilités sanitaires et sociales. De l’histoire à la sociologie, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2014, p. 41-57.
3 Christelle Palluel, « Le nouveau régime de la demande d’asile en rétention administrative : des garanties en trompe-l’œil », La Revue des droits de l’homme [en ligne], 10 | 2016 (consulté le 7 janvier 2020).
4 Dans cet article, j’ai pris le parti de ne pas entrer explicitement dans les discussions distinguant, opposant morale et éthique. Les deux termes seront donc utilisés conjointement, le contexte d’énonciation me conduisant à privilégier l’un ou l’autre.
5 Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, « Essais », 1999.
6 Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, (1992), Paris, Le Cerf, « Passages », 2000.
7 Avishai Margalit, La société décente, Paris, Flammarion, « Champs », 2007.
8 Jean-Louis Genard, « La place du care dans la réorientation des théories critiques » in Matthieu De Nanteuil et Laura Merla (s.l.d.), Travail et care comme expériences politiques, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, 2017, p. 21-35.
9 Philippe Gonzalez et Laurence Kaufmann, « La caricature sans blasphème ? Sémantique et pragmatiques du Prophète en Une de Charlie Hebdo », Communication & langages, 2016, vol. 187, p. 47-68.
10 Gilles Gauthier, « Le débat public à la suite de l’attentat contre Charlie Hebdo – Y a-t-il une éthique de la liberté d’expression ? », Éthique publique [en ligne], 2017, 19(2)
11 Carole Talon-Hugon, Morales de l’art, Paris, Presses Universitaires de France, « Lignes d’art », 2009.
12 Luc Boltanski, De la critique. Précis de sociologie de l’émancipation, Paris, Gallimard, « Essais », 2009.
13 Jean-Louis Genard, « La question de la responsabilité sous l’horizon du référentiel humanitaire », op. cit.
14 Didier Fassin, La raison humanitaire. Une histoire morale du temps présent, Paris, Éd. de l’EHESS/Seuil/Gallimard, 2010.
15 Jean-Louis Genard, « Pourquoi l’hospitalité ? », SociologieS [en ligne], 2018.
16 Élodie Boublil et Laure Wolmark, « Vulnérabilité, soin et accueil des demandeurs d’asile », La Revue des droits de l’homme [en ligne], 2018, (consulté le 7 janvier 2020).
17 Ruwen Ogien, « Les “valeurs morales” contre les droits », Raison publique 6 (2007), Sorbonne Université Presses.
18 Jean-François Neven, La référence à la vulnérabilité dans le droit de la protection sociale : des sciences humaines et sociales au droit positif, thèse de doctorat en sciences juridiques (PDF en ligne), 2018.
19 Fabrizio Cantelli et Jean-Louis Genard (s.l.d.), Action publique et subjectivité, Paris, LGDJ, « Droit et Société », 2007.
20 Camille Chamard et Lee Schlenker, « La place du marketing territorial dans le processus de transforma- tion territoriale », Gestion et management public, 2017/3 vol. 6 (1), p. 41-57.
21 Mireille Rosello, Postcolonial Hospitality. The Immigrant as Guest, Stanford, Stanford University Press, 2001.
22 Magali Bessonne, « Le vocabulaire de l’hospitalité est-il républicain ? », Éthique publique [en ligne], 17(1), 2015.
23 Guillaume Leblanc, « Nous sommes passés du problème de l’immigré à celui du migrant », interview dans L’Écho, 27 février 2018.
24 Claudia Girola, « SDF à Nanterre : des hommes ni d’ici ni d’ailleurs Chronique d’une construction discur- sive de l’extraterritorialité », in Anne GOTMAN (s.l.d.), Villes et hospitalité. Les municipalités et leurs « étrangers », Paris, Éditions de la MSH, 2004, p. 235-258.
25 Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, op. cit.
26 Joan Stavo-Debauge, « L’oubli de ce dont c’est le cas », SociologieS [en ligne], 2018.
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Référence papier
Jean-Louis Genard, « Enjeux moraux et politiques de l’exigence d’hospitalité », Revue de l’Institut de Sociologie, 91 | 2022, 171-183.
Référence électronique
Jean-Louis Genard, « Enjeux moraux et politiques de l’exigence d’hospitalité », Revue de l’Institut de Sociologie [En ligne], 91 | 2022, mis en ligne le 01 décembre 2024, consulté le 22 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/ris/994
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