Laurent Mucchielli, La découverte du social. Naissance de la sociologie en France (1870‑1914)
Laurent Mucchielli, La découverte du social. Naissance de la sociologie en France (1870‑1914), La Découverte, coll. « Texte à l’appui », Paris, 1998, 576 p.
Texte intégral
1Voici un ouvrage consacré à l’histoire des débuts de la sociologie française qui a l’ambition d’être à la fois un ouvrage savant et un manuel pour étudiants et enseignants. C’est incontestablement un ouvrage savant par le volume de l’appareil critique mobilisé, par le souci de respecter les méthodes historiographiques et sociographiques les plus récentes pour l’étude des sciences. De ce point de vue l’ouvrage offre au lecteur un tableau érudit de l’histoire de l’institutionnalisation universitaire de la sociologie française entre les années 1880 (durant lesquelles Mucchielli estime pouvoir identifier des approches de l’homme et de sa société rompant avec le biologisme) et l’immédiat avant-guerre (où la discipline est un peu stabilisée au sens où elle possède une revue importante, L’Année sociologique, et un chef de file, Émile Durkheim, autour duquel se regroupent plusieurs jeunes philosophes).
2Mais en même temps, l’ouvrage se veut utile à l’enseignement en proposant un exposé pédagogique des fondements historiques (mais aussi épistémologiques) de la sociologie. Mucchielli offre au lecteur des réponses synthétiques à diverses questions très explicitement énoncées : par exemple, quels ont été les rapports entre la sociologie et les autres disciplines s’intéressant à l’homme (anthropologie raciale, histoire, psychologie, économie, géographie...) ?
3Bien entendu, poursuivre la double ambition (louable) de l’érudition et de la synthèse pédagogique n’est pas sans risque. Elle conduit parfois l’auteur à faire des choix, à avancer trop fermement des énoncés qui pourraient être nuancés ou complétés. Elle le conduit par exemple à concevoir la naissance de la sociologie à la fin du xixe siècle comme un processus visant presque exclusivement à s’opposer aux approches biologiques ou raciales prévalant alors dans les sciences de l’homme. Il n’évoque pas en détail, ne serait-ce que pour chercher à l’écarter, l’hypothèse selon laquelle la sociologie prend également appui sur des savoirs savants ou administratifs, sur des sciences dites « morales » (dès le début du xixe siècle), sur des institutions soucieuses de mieux « découvrir le social » (cf. le rôle des recherches de Le Play ; cf. les enquêtes insufflées par les pouvoirs publics ou l’ Académie des sciences morales et politiques sur le paupérisme, l’instruction primaire, les aliénés…).
4Reste que le livre, servi par une écriture limpide, éclaire la question de la naissance de la sociologie universitaire en France. Même si, comme tout autre ouvrage, il ne prétend pas l’épuiser.
Pour citer cet article
Référence papier
Olivier Martin, « Laurent Mucchielli, La découverte du social. Naissance de la sociologie en France (1870‑1914) », Sociologie du travail, Vol. 41 - n° 1 | 1999, 112-113.
Référence électronique
Olivier Martin, « Laurent Mucchielli, La découverte du social. Naissance de la sociologie en France (1870‑1914) », Sociologie du travail [En ligne], Vol. 41 - n° 1 | Janvier-Mars 1999, mis en ligne le 05 mars 2000, consulté le 07 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/sdt/37536 ; DOI : https://doi.org/10.4000/sdt.37536
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