• 1  Nous ne pouvons revenir ici sur l’histoire de la colonisation, ni sur celle de la guerre à la suit (...)

1Entre ces deux pays, les relations sont anciennes et témoignent d’une histoire complexe1. A la suite de la décolonisation, l’Algérie a opté pour une économie planifiée et centralisée, sur le modèle des républiques socialistes dans lesquelles régnait un régime de parti unique combiné à la domination de la propriété d’Etat. Toutefois, l’activité économique n’a pu être totalement régulée, les « petits entrepreneurs » ont toujours existé, et les entrepreneurs issus de l’immigration se placent dans ces secteurs, délaissés par l’Etat, qui connaissent une forte expansion, dans un marché où se développent de nouveaux besoins de consommation.

• 2  Les deux étant d’ailleurs fortement liés, comme l’écrit B. Chavance in A. Dahmani (1999, p. I) « L (...)

2Malgré des atouts indéniables, la situation économique algérienne s’est détériorée au point de contraindre le gouvernement, à la fin des années 1980, à dresser le constat de la faillite du « modèle algérien de développement ». Parallèlement à cette crise économique majeure, la société s’est trouvée confrontée à un profond malaise. Elle contestait de plus en plus le pouvoir politique instauré à la suite de l’indépendance2. Pour tenter de sortir de ce marasme, de nombreuses réformes économiques, sociales, institutionnelles et politiques ont été mises en place, entre la fin des années 1980 et le début des années 1990. Mais force a été de constater leur échec, ce qui a contraint l’Etat à accepter de signer, en avril 1994, le premier accord pour le rééchelonnement de la dette extérieure, avec pour corollaire l’application d’un programme d’ajustement structurel négocié avec le fmi.

• 3  Au point que l’Algérie a remboursé par anticipation plus de 12 milliards de dollars de sa dette ex (...)

3Dès lors, l’Algérie a été engagée dans un vaste champ de mesures visant la privatisation et la libéralisation de son économie. Cette phase de transition vers l’économie de marché intervient dans un contexte de hausse du prix du pétrole et du gaz, ce qui permet à l’Algérie d’afficher, au niveau des données macro-économiques, de bons résultats3. Toutefois, si le pays a recouvré une relative paix, les problèmes socio-politiques demeurent (manque de logement, corruption, présence de réseaux mafieux et terroristes, absence de pluralisme politique), et la réalité micro-économique est bien sombre du fait de la pénurie d’emplois, des licenciements massifs (officiellement, un taux de chômage avoisinant les 12% en mai 2007, alors qu’il était de 30% au début des années 2000), du déclin du secteur public, du manque d’infrastructures, etc.

• 4  A titre d’exemple, le site d’Altanetwork, l’association ceinaf (cercle des entrepreneurs et indust (...)

4Plusieurs événements récents témoignent de l’acuité des relations économiques entre l’Algérie et la France (création de l’Union pour la Méditerranée, multiplication des initiatives politico-économiques dont l’émergence d’associations et sites consacrés à ces échanges économiques franco-algériens4), car l’Algérie fait partie des pays prioritaires en termes d’investissements pour dynamiser l’économie française et s’assurer de nouveaux débouchés commerciaux. Depuis de nombreuses années, la France demeure le premier fournisseur commercial de l’Algérie et les investissements français connaissent une croissance soutenue et régulière depuis 2003, passant de 51 à 295 millions de dollars en 2006, renforçant ainsi sa position de premier investisseur (hors hydrocarbures).

• 5  La Chine a multiplié par trois ses parts de marché entre 2002 et 2006, tandis que les investisseme (...)
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• 7  La richesse de l’Algérie repose très massivement sur les matières énergétiques (pétrole et gaz).
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• 9  Malgré des transformations profondes du système de production et institutionnel, il demeure des co (...)

5Toutefois, l’idée d’un partenariat économique privilégié entre les deux pays ne va plus autant de soi. Alors que la France est demeurée depuis des décennies la plaque tournante des échanges économiques entre ces deux pays, aujourd’hui, la mondialisation des échanges économiques bouscule les règles du jeu établies ; contribuant à remettre en cause cette attitude qui consiste à penser que le marché algérien est une chasse gardée. En effet, l’intensification des échanges entre l’Algérie et les autres pays provoque l’effritement des parts de marché détenues par la France : en valeur absolue, la France reste largement en tête, mais en valeur relative, elle perd du terrain en faveur de la Chine, des pays du Golfe et des pays du Sud de l’Europe. L’émergence de nouveaux investisseurs se fait donc ressentir dans un contexte de reconfiguration économique et géostratégique5. Néanmoins, pour des raisons historiques et culturelles, nombreux sont les chefs d’entreprise algériens qui expriment (encore) une préférence pour le partenariat économique avec la France. Mais de nombreux signes indiquent que l’économie française perd de son leadership6. Ainsi, s’il est incontestable que l’Algérie a impérieusement besoin de passer d’une économie de rente7 à une économie de production (condition essentielle pour assurer sa stabilité politique), il est de moins en moins certain que l’Algérie ait besoin de la France pour y parvenir8. Elle peut s’appuyer sur d’autres partenaires, démontrant qu’elle est entrée dans un nouveau cycle, même si de nombreuses réformes se font encore attendre9.