Navigation – Plan du site

AccueilSociologieSDossiers2024Savoirs pluriels. Enjeux épistémo...Pluralité des savoirs et puissanc...

2024
Savoirs pluriels. Enjeux épistémologiques et politiques

Pluralité des savoirs et puissance des injustices épistémiques

L’enjeu du pilotage et de la validation des démarches participatives
Plurality of Knowledge and the Power of Epistemic Injustice. The challenge of steering and validating participatory approaches
Pluralidad de conocimientos y poder de las injusticias epistémicas. El reto de dirigir y validar los enfoques participativos
Marion Carrel

Résumés

À l’heure où sciences et recherches participatives se développent, les modalités plus ou moins inclusives du « produire avec » sont à interroger, afin d’en mesurer les effets sur la perpétuation ou le recul des inégalités en leur sein. Cette réflexion a tout intérêt à se construire dans un dialogue entre sciences et société, et pas seulement depuis le point de vue des chercheur·es académiques. Tissant des parallèles entre les dilemmes et faux-semblants de la participation dans divers mondes sociaux, cet article explore d’abord le phénomène de redoublement des inégalités auquel la participation peut paradoxalement conduire, drame qui se rejoue de manière comparable dans la démocratie participative et les recherches participatives. La deuxième partie, centrée sur les leviers permettant de lutter contre les inégalités sociales et les injustices épistémiques, apporte des clés d’analyse sur les enjeux de pilotage pluriel et de validation croisée des démarches participatives.

Haut de page

Texte intégral

Introduction

1Présente depuis les origines de la sociologie, la réflexion sur les relations entre sciences et société est en ébullition depuis le début du xxie siècle. Si depuis Le Savant et le politique de Weber, la quête d’une délimitation soigneuse entre ce qui relève du scientifique et du politique reste prégnante, les bouleversements sociaux, économiques et politiques contemporains ont des effets sur les représentations et les pratiques du métier de sociologue qui rendent cette délimitation plus hasardeuse. Les catastrophes, les controverses et les conflits sont le théâtre le plus visible de batailles entre différents savoirs, avec le surgissement des citoyens dans le débat scientifique. La fabrique des sciences sociales se transforme également, plus discrètement, à mesure que « les enquêteurs professionnels entrent en interactions continues avec d’autres enquêteurs dont les capacités de réflexion et d’action sont souvent très aiguisées, plus agiles et aisément transportables d’un champ d’expérience à un autre » (Chateauraynaud, 2021, p. 3). Sans verser dans le relativisme, la poussée des exigences, des critiques et des contributions citoyennes transforment la fabrique des sciences, que l’on regrette l’effritement de leur légitimité et les accusations faites, par exemple, à la sociologie d’excuser les conduites déviantes (Lahire, 2016) ou que l’on salue la reconnaissance d’une pluralité de savoirs dans la société (Kellert, Longino & Waters, 2006).

2Les théories et les enquêtes sociologiques ont progressivement pris en compte l’interrelation des savoirs théoriques et pratiques. L’ingénierie sociale du xxe siècle, qui postulait que les experts et chercheurs pouvaient, de manière scientifique, réguler les activités humaines à grande échelle, s’est effritée à mesure que les critiques du positivisme de Comte s’accumulaient via les travaux de Lipmann, Dewey, Hayek et Russel, en passant par Habermas et Popper (Godrie, 2015). La crise écologique, la critique du capitalisme et l’expérimentation de modes de vie alternatifs interrogent également la hiérarchie des savoirs, en plaçant les savoirs pratiques et les savoirs expérientiels au premier plan (Pruvost, 2021). Les épistémologies féministes et des Suds appellent pour leur part à produire et valider les connaissances ancrées dans les expériences de résistance des groupes sociaux qui ont souffert de l’injustice, de l’oppression causée par le capitalisme, le colonialisme et le patriarcat (Harding, 1991 ; Medina, 2012). De longue date, cependant, ces réflexions sont aussi exogènes à la sociologie. La critique d’une science coupée des réalités sociales est en effet souvent initiée et portée par des associations et mouvements sociaux, que ce soit dans le domaine de la santé avec les mouvements de malades contre le Sida (Barbot, 2002), des Disability Studies (Baudot, 2022), de la lutte contre la pauvreté (Brodiez-Dolino, 2023) ou encore de la préservation de l’environnement (Charvolin, 2019).

3La reconnaissance d’une pluralité de savoirs dans la fabrique de la science, tout comme dans la fabrique de l’intérêt général, n’est cependant pas assurée. Ayant démarré il y a plus de vingt ans mes enquêtes dans le champ de la démocratie participative, ce qui me frappe, à mesure que j’explore le champ des recherches participatives, est la récurrence des questions communes et la reproduction des dilemmes et faux-semblants de la participation. Trois enjeux communs me semblent centraux. En premier lieu, le rôle des associations est souvent minimisé dans les processus de subjectivation et de construction des connaissances alternatives (en particulier pour les personnes touchées par des injustices épistémiques), que ce soit pour contribuer à un projet de rénovation urbaine, une enquête sur le développement social d’un quartier ou une recherche participative. Les institutions font appel à « des habitants » ou « des profanes » sans imaginer l’importance des associations de lutte dans leur construction d’un savoir expérientiel. Ce contournement des associations n’est pas qu’un problème politique, il est aussi un problème scientifique, dans la mesure où les savoirs issus de l’expérience sont construits, sédimentés, renouvelés en leur sein. En second lieu, le lien entre la participation et la décision est rarement pensé, explicité, débattu, ce qui alimente la défiance envers les experts scientifiques et/ou politiques. Les individus et les groupes répondent volontiers à l’appel à contribuer au bien commun en apportant des savoirs (qualifiés selon les contextes de savoirs « citoyens », « d’usage », « d’expérience », « militants ») ou en contribuant à la collecte de données (environnementales, de santé, etc.), mais se rendent rapidement compte de l’absence d’écoute et d’effets sur les institutions responsables des enjeux discutés. La promesse déçue de la participation, cette « injonction participative » consistant à faire porter la responsabilité de la participation sur les citoyens, sans transformer ni même questionner les processus décisionnels, renforce le fossé démocratique entre les citoyens et les politiques et/ou scientifiques (Carrel, 2013). Cette attention au lien entre participation et décision anime également le monde des Citizen Sciences, qui connaît depuis une dizaine d’années un « tournant démocratique », se souciant de « justice procédurale », dans le sillage des travaux d’Alan Irwin, qui explorent les outils de transformation des institutions scientifiques en faveur d’un pluralisme épistémique (Luneau et al., 2021). Le pluralisme épistémique part du principe que certains phénomènes ne peuvent être entièrement expliqués par une théorie unique ou entièrement étudiés selon une approche unique, et nécessitent donc que différents points de vue et méthodes soient intégrés ensemble en vue d’en obtenir une description complète (Kellert, Longino & Water, 2006). Enfin, le troisième enjeu concerne les inégalités sociales. Accusée d’aveuglement face aux différences, la théorie habermassienne de la délibération a été critiquée par les philosophes féministes, qui ont analysé les modalités de redoublement des inégalités dans l’activité d’échanger publiquement des arguments (Young, 2000). En l’absence de formats de communication inclusifs, les personnes qui détiennent le moins d’aisance à la communication, de légitimité et de capitaux symboliques s’expriment moins ou, quand elles s’expriment, sont peu écoutées, voire sont incomprises, ce qui renforce leur disqualification. Les sociologues ont également décrit la manière dont les démarches participatives pouvaient accroître non seulement les inégalités sociales, mais aussi les inégalités politiques, la participation renforçant l’autorité des décideurs et la division du travail en démocratie (Lee, 2014). Les travaux menés sur les injustices épistémiques apportent des clés majeures de compréhension de ces phénomènes. Elles affectent les individus et les groupes en tant que sujets de savoirs : en tant que détenteurs, transmetteurs ou producteurs de savoirs (Fricker, 2007). L’une des formes d’injustice épistémique les plus caractéristiques est celle qui tient au manque de crédibilité de certains individus en tant qu’ils appartiennent à des groupes marginalisés dans la société ou considérés comme non-experts de la science ou de la politique publique explorée.

4Cet article s’attache plus particulièrement à explorer cette question des inégalités. Que ce soit dans la démocratie participative ou dans les recherches participatives, il s’agit de questionner la puissance des inégalités sociales et des injustices épistémiques à l’œuvre, les ressorts de leur renforcement via la participation, mais aussi les moyens permettant leur réduction. À l’heure où sciences et recherches participatives se développent, il s’avère nécessaire d’interroger les modalités plus ou moins inclusives du « produire avec », afin d’en mesurer les effets sur la perpétuation ou le recul des inégalités en leur sein. À ce titre, explorer la boîte noire du pilotage et de l’évaluation des recherches participatives devient crucial. Qui pilote la démarche ? Les sociologues partagent-ils cette fonction de pilotage avec d’autres acteurs, moins dotés en légitimité et en crédibilité ? Les rapports de pouvoir, non seulement dans le processus de mise en concurrence, mais aussi dans celui d’hybridation des régimes de savoirs produits par une diversité d’acteurs, sont-ils reconfigurés par un pilotage pluriel ? À qui les connaissances produites sont-elles destinées et comment sont-elles intégrées, validées, reconnues dans les différents mondes sociaux impliqués ?

5Dès lors que l’enjeu de justice procédurale se pose dans le « tournant démocratique » opéré par les sciences et recherches participatives, il importe de problématiser celui du pilotage croisé et des critères de validité pluriels provenant de différents mondes sociaux. M’appuyant sur une expérimentation menée pendant quatre années, j’avance ici que cette problématisation du « produire avec » a tout intérêt à se construire de manière mixte, pas seulement depuis le point de vue des chercheurs académiques. Ces questions éthiques, méthodologiques et épistémologiques bousculent non seulement les sociologues, mais aussi les praticiennes, praticiens et personnes concernées, qui sortent du statut « d’objets d’étude » pour devenir sujets d’étude, contribuant aux choix stratégiques effectués à toutes les étapes de la procédure participative.

6Pour répondre à ces questions, la première partie de cet article explore le phénomène de redoublement des inégalités dans la participation, drame qui se rejoue de manière comparable dans la démocratie participative et les recherches participatives. La deuxième partie, centrée sur les leviers permettant de lutter contre ce phénomène, explore les enjeux de pilotage et de validation croisés des démarches participatives. Ce sera l’occasion de discuter des effets des « recherches participatives radicales », qui s’attachent à soigner la co-production réelle des résultats scientifiques tout au long du processus, dans une visée conjointe de production de connaissances, de justice sociale et d’approfondissement de la démocratie (Godrie, Juan & Carrel, 2022). Alors que nombre de nos collègues nous demandent pourquoi, en tant que sociologues, nous perdons autant de temps et d’énergie à produire des recherches vues comme étant « de moindre qualité » que les recherches académiques, demandons-nous ce qu’est l’apport de ces démarches et pourquoi elles sont amenées à se développer dans les décennies qui viennent.

Quand les démarches participatives redoublent les inégalités

7Comme toutes les formes d’injustice, les injustices épistémiques sont éminemment puissantes, en particulier envers les groupes marginalisés dont les savoirs ne sont pas reconnus, parfois aux yeux des personnes concernées elles-mêmes. Le fait de « co-produire » des connaissances, solutions, diagnostics ou politiques publiques est devenu à la mode. Toutefois, sous couvert de démarches participatives, les injustices n’auraient-elles pas tendance à être maintenues, voire renforcées ? On peut interroger ce phénomène sous trois angles, explorés à travers les enquêtes sur les démarches participatives dans les quartiers populaires.

8Premièrement, sans aménagements procéduraux, la participation redouble les inégalités. Le postulat d’égalité des intelligences a une dimension performative, bien mise en évidence par Rancière. Il ne suffit cependant pas, à lui seul, à inverser les puissantes inégalités qui structurent nos sociétés. Dans la plupart des réunions publiques, les publics sont « fantomatiques » (Berger, 2015). La parole des catégories populaires, cette parole « surnuméraire » (Rancière, 1995) ne cadre pas avec la parole attendue, elle est toujours incorrecte et ne peut, dans ces conditions, qu’être « in-ouïe » au double sens d’étrange et d’inaudible (Boullier, 2009). L’injustice liée au savoir prend, en effet, plusieurs formes – invisibilisation, discrédit, marginalisation, réduction au silence – particulièrement saillantes pour les personnes qui vivent la grande pauvreté (Befahy, Fanchon, Garrau et al., 2023). Dans ce contexte, les responsables qui mettent en place des dispositifs participatifs oscillent généralement entre « indifférence, condescendance et agacement » à leur égard (Neveu, 1999). Pour toutes ces raisons, force est de constater que sans « artefacts d’égalité », la participation a toutes les chances de redoubler les inégalités (Carrel, 2013). Les artefacts d’égalité peuvent concerner le statut des personnes et leur format de participation (par exemple, en rémunérant les « profanes » ou en les invitant en tant que membres de groupes de pairs), l’animation (par exemple, en évitant les sigles, en diversifiant les supports tels que la vidéo ou le récit, en alternant des temps en groupes et en plénières) ou encore le pilotage (par exemple, en veillant à expliciter le rapport à la décision et l’attention portée aux dimensions de pouvoir et d’égalité). Les trois processus décrits par Young, permettant de limiter la reproduction des inégalités dans la délibération – la salutation, la rhétorique et le récit – concernent la dimension d’animation de ces artefacts d’égalité (Young, 2000). Sans effort de ce type pour reconnaître la pluralité des expériences et des légitimités, les échanges publics d’arguments tournent systématiquement en faveur des individus et des groupes les mieux dotés en compétences discursives, légitimés à leurs propres yeux et aux yeux d’autrui du fait de leur sexe, âge, diplôme, profession ou encore origine ethno-raciale (Bourdieu, 1982 ; Palomarès & Rabaud, 2006). Les personnes marginalisées ont tout à fait conscience de l’absence de considération à leur égard en tant que détentrices de savoirs, voire en tant que personnes, tant la dé-subjectivation fait partie de leur quotidien. Lors d’un photolangage pour travailler les représentations du mot « collaborer », à propos de recherches participatives, le groupe des personnes en situation de pauvreté a choisi une photo d’une foule dans laquelle tous les visages portent le même masque blanc. Leur choix de photo était accompagné de ce texte :

Est‐ce qu’on sait qu’on collabore, nous les personnes en difficulté, est-ce qu’on nous prend au sérieux ? Est-ce qu’on existe en tant que personnes ? On est trop souvent des personnes invisibles, tout en étant présent.e.s. (Groupe des personnes ayant l’expérience de la pauvreté, Espace collaboratif « Croiser les savoirs avec tou.te.s », 11 juin 2019).

9En second lieu, parmi les freins à la justice épistémique figure la tendance à rabattre l’enjeu participatif sur sa seule dimension méthodologique, à réduire la participation à ses « kits participatifs » (Bonaccorsi & Nonjon, 2012). L’horizon d’une démocratisation de la démocratie et/ou de la science se réduit alors au profit d’un horizon de gestion, de concurrence et d’uniformisation autour de pratiques issues du conseil en management, dans ce qui est devenu un « marché de la démocratie participative » (Mazeaud & Nonjon, 2018). Les plus critiques en dénoncent les dérives : une professionnalisation centrée sur la communication, des accointances entre chercheurs, consultants et pouvoirs publics (Gourgues, 2012). Dans le cadre de ce marché en expansion, on assiste également à une certaine professionnalisation des « habitants-experts » et des « pairs-aidants », qui, s’ils ne sont pas insérés dans des collectifs et associations militant pour la reconnaissance de leurs savoirs et le respect de leurs droits, perdent de leur potentiel critique au fur et à mesure de leur installation dans des dispositifs pérennes de participation. Les biais de cette professionnalisation ont été étudiés dans le secteur de la santé mentale et de l’errance au Québec, au point que certains pairs-aidants impliqués dans des démarches participatives n’apportent plus de point de vue critique sur l’institution ou « craquent » devant la charge professionnelle ou émotionnelle de leur travail (Godrie, 2015). En France, les avancées législatives telles que l’obligation, depuis 2009, de la présence de représentants de bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) dans les équipes pluridisciplinaires (instances garantes de l’application des droits et devoirs des bénéficiaires) et de leur association à l’élaboration, au suivi et à l’évaluation de la politique départementale d’insertion n’ont pas échappé à ces écueils. Individualisée, le bénéficiaire venant seul représenter ses semblables, les réunions portant uniquement sur des dossiers individuels de réductions et de suspensions du RSA, déconnectée des enjeux collectifs sur les politiques d’insertion, cette participation reste limitée tant par le nombre de bénéficiaires impliqués que par sa portée égalitaire et démocratique (CNLE, 2011).

10Le troisième angle sous lequel interroger le redoublement des inégalités via la participation est celui de son institutionnalisation. En cours depuis une vingtaine d’années, l’institutionnalisation de la démocratie participative se donne à voir dans le fait que les collectivités locales, ainsi que les différents niveaux de l’État, intègrent la participation dans leur manière de travailler. Ce processus en est à ses débuts en ce qui concerne les sciences et recherches participatives en France. En témoignent certains indices tels que les appels à projets « Science avec et pour la société » de l’Agence nationale de la recherche (ANR) depuis 2021, la création d’un Prix de la recherche participative par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en 2022 ou encore la mise en avant du « dialogue sciences-sociétés » dans toutes les institutions de recherche et d’enseignement. Quelle est la volonté politique associée à l’objectif de « participation » quand il n’est plus porté par des mouvements sociaux, mais par l’institution qui développe une offre participative ? Le risque de la récupération à des fins de gouvernementalité, voire d’une alliance entre gouvernance autoritaire et discours participatif, a été récemment pointé dans la manière dont le gouvernement français avait géré la crise des « Gilets jaunes » (Jeanpierre, 2019). Il s’agirait surtout, en mettant en place des « débats » et « conventions citoyennes », de faire en sorte que les mouvements sociaux soient contenus et les responsables politiques confortés dans leur légitimité (Gourgues & Mazeaud, 2023). Dans l’encouragement institutionnel à développer les sciences et recherches participatives, ne trouverait-on pas le même processus à l’œuvre : un vernis participatif dont l’objectif est avant tout de re-légitimer les sciences, non de les démocratiser ? Dans ce contexte, le renouveau de pratiques participatives autonomes et méfiantes vis-à-vis des institutions est un scénario probable. Les personnes préfèrent s’auto-organiser, initier des expérimentations citoyennes autonomes, inventer de nouvelles manières de produire des connaissances, sur les questions écologiques notamment, et s’éloigner des scientifiques et experts.

11Dans un contexte de crise démocratique, de fragilisation des budgets publics pour la recherche et d’effritement de la légitimité de la science, critiquée par les citoyens comme par les gouvernants, les doutes et les craintes multiples sur l’avenir de la participation (Blondiaux, 2022) peuvent se poser dans des termes similaires pour les recherches participatives. La « co-production de savoirs » appelée de ses vœux par Callon, combinant l’exigence d’une réduction des asymétries entre profanes et scientifiques, leur collaboration à tous les stades de la recherche, la reconnaissance de savoirs associatifs liés à l’expérience et l’interconnexion entre acteurs associatifs et scientifiques, resterait rare et fragile (Fiorini, 2023).

Quand les démarches participatives veillent à produire de l’égalité : pilotage et validation croisés

12La donne change-t-elle quand les démarches participatives veillent à produire de l’égalité de bout en bout ? Que se passe-t-il quand les savoirs expérientiels sont non seulement présents, mais aussi impliqués dans le pilotage et la validation de ces démarches ? Le néologisme « savoirs expérientiels » s’est progressivement imposé, d’abord sous l’impulsion de différents mouvements sociaux dans les années 1970 (Godrie, 2022). Le passage de l’expérience aux savoirs expérientiels n’étant pas automatique, il nécessite le temps long et les espaces collectifs favorisant l’échange de récits, la réflexivité, la subjectivation et la construction de données partagées. En ce sens, on peut rapprocher les savoirs expérientiels des « savoirs militants », définis comme l’ensemble des savoirs que possède un groupe opprimé et qui lui permet d’agir pour essayer de transformer collectivement sa situation sociale (Pereira, 2023). Co-produire de la connaissance entre savoirs scientifiques et savoirs expérientiels pose ainsi, nécessairement, la question de la place des collectifs, associations et mouvements sociaux dans le pilotage et la validation des démarches participatives mises en place.

13Devant la puissance des injustices épistémiques et le risque de redoublement des inégalités dans la participation, l’enjeu du pilotage pluriel des recherches participatives s’avère crucial. Il s’agit de soigner l’activité de régulation démocratique et scientifique d’une recherche impliquant des mondes sociaux différents. Un pilotage pluriel, attentif à ce que les différentes sources de savoirs contribuent effectivement à la production de connaissances, apparaît comme l’une des clés permettant de réduire les torts épistémiques faits aux savoirs expérientiels. En effet, le pilotage est une activité hautement stratégique. Il donne le pouvoir d’orienter les questions de recherche, ajuster les méthodes d’enquête, sélectionner les personnes, données et matériaux impliqués et convoqués, réguler les frictions épistémiques qui ne manquent pas de surgir tout au long du processus, choisir les analyses à creuser, organiser la mise en récit des résultats de la recherche. La lutte contre les injustices épistémiques dans les sciences et recherches participatives passe donc nécessairement par la co-production de ce pilotage.

14Aux origines des recherches en croisement des savoirs, impulsées par le mouvement ATD Quart Monde, une équipe pédagogique avait déjà été mise en place afin :

d’assurer un équilibre entre la compréhension intersubjective et la construction d’une pensée structurée dans la recherche. [...] la nécessité de construire collectivement une production intellectuelle cohérente dépendait d’abord de la possibilité de compréhension réciproque des acteurs. (Groupe de recherche Quart-Monde Université, 1999, p. 31)

15Dans les recherches en croisement des savoirs qui ont été menées ensuite, un « comité pédagogique » a été mis en place, instance de coordination tripartite impliquant des représentants des trois sources de savoirs mobilisées : les savoirs issus de l’expérience de la pauvreté, les savoirs professionnels de l’action et du développement social et les savoirs universitaires sur la pauvreté et le fonctionnement de la société. Dans certaines publications, sont évoquées les tensions qui traversent le comité pédagogique, parfois tellement fortes entre chercheurs universitaires et volontaires d’ATD Quart Monde qu’une intervenante extérieure a été appelée à la rescousse pour aider à démêler le conflit (Carrel et al., 2017). Une analyse précise du fonctionnement de ces comités de pilotage tripartites et des questions qui s’y jouent reste cependant à faire, et appelle au développement de tout un programme de recherche, participative évidemment, dans les années à venir.

16Nous tentons de contribuer à l’émergence de ce programme de recherche via l’écriture d’un article sur le fonctionnement du comité de pilotage de l’Espace collaboratif « Croiser les savoirs avec tout.e.s », qui a exploré, entre 2018 et 2022, différentes dimensions éthiques, méthodologiques et épistémologiques des recherches participatives en croisement des savoirs avec les personnes ayant l’expérience de la pauvreté (Bucolo et al., à paraître). Nous montrons le rôle complexe du comité tripartite, petite main invisible du travail de recherche, favorisant l’intercompréhension et le dialogue entre les différents savoirs, mais aussi espaces de pouvoir : le pouvoir d’analyser et d’orienter la production des données, de travailler les asymétries et rapports de force au sein des groupes et entre les groupes, mais aussi de choisir des thèmes et d’orienter le travail de recherche. C’est aussi l’un des endroits où les inégalités de statut et de légitimité se donnent à voir : par exemple, les chercheures académiques prennent le plus long temps de parole dans les réunions du comité pédagogique, tandis que les militants associatifs ont l’ascendant sur les choix méthodologiques et stratégiques. De fait, les praticiennes du social ont moins de poids et d’influence dans ce comité, regrettant par exemple que certaines questions soulevées par leur groupe de pairs (sur le genre, les émotions) n’aient pas été retenues dans les thèmes travaillés en profondeur dans la recherche.

17C’est également dans le cadre des relations entre le comité pédagogique et les personnes impliquées dans la recherche – membres de trois groupes de pairs – que des « frictions épistémiques » se sont déployées. Par exemple, plusieurs chercheurs ont exprimé une résistance à travailler en groupes de pairs, certains quittant même le processus après la première journée de plénière. Cette résistance peut s’analyser de deux manières. D’une part, comme une forme de « résistance épistémique », d’ignorance active des privilèges que les chercheurs de métier peuvent avoir à converser librement avec les personnes vivant la pauvreté sans prendre conscience des efforts à produire pour garantir des rapports plus égalitaires (Medina, 2012). D’autre part, elle peut se comprendre comme une réaction au primat et à la rigidité de la démarche de « croisement des savoirs » associée à ATD Quart Monde, alors que plusieurs chercheurs portaient des démarches ancrées dans d’autres courants de recherche-action (Bucolo et al., à paraître). Des ajustements ont été négociés en comité pédagogique, tout en « tenant bon » sur la rigueur méthodologique. La nécessité de procédures contraignantes pour réduire les inégalités épistémiques entre, de fait, en tension avec l’exigence d’écoute et de co-production de démarches participatives. Cette tension était bien perceptible dans les discussions au sein du comité pédagogique, dont les longues et régulières réunions ont tissé les fils d’un artisanat méthodologique. Enfin, le pilotage pluriel intervient également dans la régulation des inégalités épistémiques entre les institutions embarquées dans la recherche participative. Dans le cas de l’Espace collaboratif, le comité pédagogique a été au cœur du processus de légitimation à la fois des institutions et de la recherche en cours, oscillant entre la neutralisation de son potentiel critique et sa reconnaissance, passant par la signature d’une convention et l’obtention de financements de la part du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), du Conservatoire national des Arts et Métiers (Cnam) et d’ATD Quart Monde.

  • 1 Pour une discussion de ces critères et du débat sur l’utilité d’ajuster ou d’abandonner les critèr (...)

18En ce qui concerne la validation des recherches participatives, un vaste chantier de réflexion et d’analyse mériterait également de s’ouvrir en sociologie. Le débat sur les critères de scientificité a été initié par les philosophes féministes, nous invitant à repenser l’objectivité scientifique. Harding appelle ainsi à prendre en compte les conditions matérielles d’existence des chercheuses et chercheurs, incluant leurs convictions et engagements, afin de redéfinir les critères de scientificité contre le fantasme selon lequel la science pourrait être délestée de prénotions (Harding, 1992). Depuis ces travaux pionniers, dans une discussion nourrie par la pratique de la recherche-action participative, certains travaux appellent à repenser les critères de scientificité, voire à aller au-delà de ces critères pour en penser d’autres. Le critère de l’équilibre, visant à s’assurer que les différents points de vue sont exprimés de façon équitable, ainsi que différents critères d’authenticité, visant à mesurer les apprentissages et l’augmentation de la capacité d’action issue du processus de recherche, ont ainsi été proposés (Manning, 1997). D’autres critères sont avancés, tels que la cohérence systémique (poussant à documenter les rôles et responsabilités des co-chercheurs), la faisabilité, le respect des valeurs et principes démocratiques (critère à l’aune duquel le fonctionnement du pilotage pluriel pourrait être évalué) ou encore l’appropriation1 (Savoie-Zask, 2019).

  • 2 Pour une présentation de ces neuf critères, voir Carrel, Bucolo & De Laat, 2023.

19Or, si l’on prend au sérieux l’horizon de la justice épistémique dans les recherches participatives radicales, c’est-à-dire réellement participatives de bout en bout, et associant des objectifs scientifiques et démocratiques, cette réflexion touchant aux critères de validité des recherches participatives doit pouvoir associer les différents types de savoirs mobilisés. Je m’appuie ici sur les résultats de notre recherche participative sur les enjeux épistémologiques des recherches participatives (Espace collaboratif « Croiser les savoirs avec tout.e.s », 2023). L’Espace collaboratif a réfléchi à des critères de validation qui seraient spécifiques aux recherches participatives avec des personnes ayant l’expérience de la pauvreté, au croisement entre critères de scientificité et critères de pertinence sociale. Dans ce sens, neuf critères ont été identifiés, en lien avec QUI a participé à la recherche, COMMENT la recherche a été faite et avec quels RÉSULTATS et EFFETS2. Ces critères ne sont pas exhaustifs, mais peuvent servir de base de réflexion pour la formalisation d’un cadre évaluatif partagé entre les mondes académique, associatif et professionnel. Ce cadre évaluatif partagé s’avère utile pour toute personne qui se demande quelles sont les conditions pour s’engager dans une démarche participative. Les conditions organisationnelles, stratégiques, méthodologiques, politiques sont-elles réunies, peut-on s’assurer que la démarche lutte concrètement contre les injustices épistémiques en visant à produire des connaissances utiles pour la science et pour la transformation sociale, la lutte contre les inégalités ou la préservation de la planète ?

20Parmi les critères mis en avant dans l’Espace collaboratif, certains complètent la littérature existante, en ce qu’ils attirent l’attention sur les moyens de s’assurer de la présence et la reconnaissance des savoirs d’expérience de l’exclusion et de la grande pauvreté. Le critère « Se retrouver tous et toutes dans le résultat (qui peut être un désaccord) » insiste sur la pluralité des formats et langages de restitution de la recherche, permettant à chaque personne et chaque milieu de s’approprier les résultats. Ce critère est relatif à la diffusion et à l’activation des résultats dans les différents mondes impliqués dans la co-production de savoirs : les laboratoires et universités, les centres sociaux, les services sociaux, les associations, les milieux de vie des personnes concernées. Il fait écho à l’injustice d’appropriation des données et savoirs produits, une des formes de l’injustice épistémique (Fricker, 1997), et bien sûr, il rejoint le critère d’appropriation évoqué plus haut (Savoie-Zask, 2019).

21Par ailleurs, la co-construction de critères de validité des démarches participatives permet de mettre l’accent non seulement sur les apprentissages et conscientisations vécus par les publics minorisés, victimes d’injustices épistémiques, mais aussi ceux des chercheur·es et des professionnel.les qui apprennent à dialoguer, travailler, communiquer autrement. Autrement dit, la pluralisation de l’évaluation contribue à travailler les effets des démarches participatives sur la science, l’action publique et la démocratie. L’un des critères établis par l’Espace collaboratif, relatif aux résultats et effets, nommé « Transformation de tous les participants avec un développement du pouvoir d’agir », est important en relation à la capacité que les personnes vont avoir de transformer un contexte ou une réalité. Une personne a pointé, lors des Rencontres des 15-16 novembre 2022, l’importance de ce critère :

Je voulais vous remercier d’avoir dit que cela concerne chaque participant, donc pas seulement les personnes en situation de pauvreté. […] Ce sera réussi s’il y a une transformation des chercheur·es et des professionnel.les.

  • 3 Institut national de la statistique et des études économiques.

22Le critère « Transformation de la société » renvoie quant à lui aux changements structurels initiés par les recherches participatives radicales, tels que la modification des questionnaires de l’Insee3 à la suite d’une recherche sur les dimensions de la pauvreté (Lasida et al., 2022) ou la préservation et le développement de semences paysannes (Demeulenaere & Goldringer, 2017). L’adage, attribué à Wittgenstein, selon lequel les savoirs sont toujours produits en lien avec les modes de vie, ou pour le dire autrement, « la forme de vie est le milieu vital de nos conceptualisations […]. Nos concepts baignent dans ce milieu comme dans un liquide nourricier » (Chauviré, 2020, p. 277), appelle au développement d’espaces de réflexion épistémologiques croisant différents milieux de vie.

Conclusion

23Les enjeux du pilotage partagé et de la co-validation des recherches participatives appellent à être davantage explorés à l’avenir, sans oublier leurs angles morts. L’enjeu est complexe et suscite des réactions, notamment dans le champ scientifique. Le risque d’angélisme, voire de relativisme, se pose quant au fonctionnement propre de la science et à l’impossibilité d’imposer la collégialité dès lors que s’introduit, dans les dispositifs, une forme de connaissance assertée et de recours à des savoirs spécialisés (Charvolin & Heaton, 2022). Dans les discussions soulevées par la présentation des résultats de l’Espace collaboratif, le risque de manipulation des participantes et participants est également parfois pointé par nos collègues sociologues : les critères de validité de recherches participatives intéressent-ils vraiment les non-scientifiques ? Est-ce réaliste d’associer des personnes non-diplômées, éloignées des enjeux théoriques, à des réflexions épistémologiques, et qu’en retirent-elles concrètement ?

24Ce débat sur les dimensions éthiques et méthodologiques des démarches participatives n’est pas prêt de se refermer. La sociologie a un rôle à jouer dans le questionnement des usages sociaux et politiques des innovations démocratiques telles que les sciences et recherches participatives. C’est une chance, que les sciences sociales devraient saisir pleinement, que d’alimenter ce débat, face aux incertitudes générées par les crises sociales, écologiques, démocratiques et économiques en cours, et en réponse aux exigences des individus et des groupes qui refusent les expertises surplombantes et déconnectées de leurs réalités, et s’organisent pour produire eux-mêmes des connaissances et organiser des actions émancipatrices (Laplanche-Servigne, 2014). L’enjeu est crucial dans la mesure où le pilotage et l’évaluation croisés des démarches participatives s’attellent concrètement à lutter contre les injustices de témoignage, d’interprétation, d’appropriation et de contribution, toutes ces formes d’injustices épistémiques, corrélées aux inégalités sociales, qui se déploient dans nos sociétés (Bessone, Garrau & Lavergne, à paraître). Continuer ce débat pourrait par exemple contribuer à faire évoluer les formulaires, processus et modes d’évaluation pratiqués dans les appels à projets et à recherches qui font le quotidien des professionnels du social et de la science. L’enquête reste à poursuivre, selon une démarche de radicalité pragmatique, attentive aux leviers et freins de l’égalité dans les démarches participatives, qui ne se résument pas à des protocoles ou des dispositifs mais sont toujours des constructions sociales (Longino, 1990).

Haut de page

Bibliographie

Barbot J. (2002), Les malades en mouvements. La médecine et la science à l’épreuve du sida, Paris, Éditions Balland.

Baudot P.-Y. (2022), « Handicap », in Petit G. et al. (dir.), Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la Participation, DicoPart, 2e éd., GIS Démocratie et Participation. URL : https://www.dicopart.fr/handicap-2022

Befahy R., Fanchon A., Garrau M. et al. (2023), « Reconnaître les savoirs issus de la pauvreté : l’enjeu de la justice épistémique », in Jomini F., Jousset D., Poché F. & B. Tardieu (dir.), Pour une nouvelle philosophie sociale. Transformer la société à partir des plus pauvres, Lormont, Le bord de l’eau, p. 135-206.

Berger M. (2015), « Des publics fantomatiques. Participation faible et démophobie », SociologieS. URL : https://journals.openedition.org/sociologies/4935

Bessone M., Garrau M. & C. Lavergne (à paraître), Trajectoires de l’injustice épistémique, Paris, Éditions de la Sorbonne, coll. « Philosophies pratiques ».

Blondiaux L. (2022), « Le participatif en actes : quel avenir pour l’injonction à la participation ? », Questions de communication, no 41, p. 73-86.

Bonaccorsi J. & M. Nonjon (2012), « La participation en kit : l’horizon funèbre de l’idéal participatif », Quaderni, no 79, p. 29-44.

Boullier D. (2009), « Choses du public et choses du politique : pour une anthropologie des inouïs », in Carrel M., Ion J. & C. Neveu (dir.), Les intermittences de la démocratie, Formes d’action et visibilités citoyennes dans la ville, Paris, Éditions L’Harmattan, p. 21-38.

Bourdieu P. (1982), Ce que parler veut dire. L’économie des échanges linguistiques, Paris, Éditions Fayard.

Brodiez-Dolino A. (2023), « Comprendre la pauvreté en société d’abondance : les enquêtes d’ATD Quart Monde (années 1960-1970) », Le Mouvement Social, vol. 2, no 283, p. 159-180.

Bucolo E., Carrel M. & M. Juan (2024), « Les coulisses d’une recherche participative radicale. Le comité pédagogique, un pilotage partagé du croisement des savoirs », Journal des Anthropologues, en cours d’évaluation.

Carrel M. (2013), Faire participer les habitants ? Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires, Lyon, ENS Éditions.

Carrel M., Bucolo E. & M. De Laat (2023), « Pauvreté. Pour un croisement des savoirs radical », Revue Projet, no 394, p. 4-9.

Carrel M., Loignon C., Boyer S. & M. De Laat (2017), « Les enjeux méthodologiques et épistémologiques du croisement des savoirs avec les personnes en situation de pauvreté. Retours sur la recherche ÉQUIsanTÉ au Québec », Sociologie et Sociétés, vol. XLIX, no 1, p. 117-140.

Charvolin F. & L. Heaton (2022), « Au-delà des intentions de collégialité de la vigilance environnementale. Médiation et régulation des pratiques », Revue d’anthropologie des connaissances, no 16-4.

Chauviré C. (2020), « Y a-t-il un relativisme des formes de vie chez Wittgenstein ? », Revue de métaphysique et de morale, vol. 106, no 2, p. 271-288.

Chateauraynaud F. (2021), « Des expérimentations démocratiques en tension. L’œuvre des citoyens dans le travail politique des bifurcations », Cahiers du GRM, no 18. URL : http://journals.openedition.org/grm/3238

Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) (2011), Recommandations pour améliorer la participation des personnes en situation de pauvreté et d’exclusion à l’élaboration, à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques publiques, rapport à la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale.

Demeulenaere É. & I. Goldringer (2017), « Semences et transition agroécologique : initiatives paysannes et sélection participative comme innovations de rupture », Natures Sciences Sociétés, Supplément no 4, p. 55-59.

Espace collaboratif « Croiser les savoirs avec tout.e.s » (2023), Actes des rencontres de l’Espace collaboratif des 15 et 16 novembre 2022. URL : https://www.participation-et-democratie.fr/croiser-les-savoirs-avec-toutes

Fiorini C. (2023), La coproduction des savoirs en pratique au tournant du xxie siècle. Études de cas sur la mise en œuvre et la conduite de collaborations entre chercheurs et acteurs associatifs dans les domaines de la santé, de l’environnement et de la lutte contre la pauvreté, thèse en épistémologie, histoire des sciences et des techniques, Cnam-Hesam Université.

Fricker M. (2007), Epistemic Injustice, Oxford, Oxford University Press.

Godrie B. (2015), Savoirs d’expérience et savoirs professionnels : un projet expérimental dans le champ de la santé mentale, thèse de doctorat en sociologie, Université de Montréal.

Godrie B., Juan M. & M. Carrel (2022), « Recherches participatives et épistémologies radicales : un état des lieux », Participations, no 32, p. 11-50.

Godrie B. (2022), « Savoir expérientiel », in Petit G. et al. (dir.), Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la Participation, DicoPart, 2e éd., GIS Démocratie et Participation. URL : https://www.dicopart.fr/savoir-experientiel-2022

Gourgues G. (dir.) (2012), « Produire la démocratie. Ingénieries et ingénieurs de l’offre publique de participation », dossier de la revue Quaderni, no 79.

Gourgues G. & A. Mazeaud (2022), « Une “participation d’État” sous contrôle. La neutralisation décisionnelle des dispositifs participatifs en France », Revue française de science politique, vol. 72, p. 781-804.

Groupe de recherche Quart-Monde Université (1999), Le croisement des savoirs. Quand le Quart Monde et l’Université pensent ensemble, Paris, Éditions de l’Atelier/Éditions ouvrières & Éditions Quart Monde.

Harding S. (1992), « Rethinking Standpoint Epistemology. What is “Strong Objectivity”? », The Centennial Review, vol. 36, no 3, p. 437-470.

Jeanpierre L. (2019), In girum : les leçons politiques des ronds-points, Paris, La Découverte.

Kellert S. H., Longino H. E. & C. K. Waters (dir.) (2006), Scientific Pluralism, Minneapolis, The University of Minnesota Press.

Lahire B. (2016), Pour la sociologie. Et pour en finir avec une prétendue « culture de l’excuse », Paris, La Découverte.

Laplanche-Servigne S. (2014), « Quand les victimes de racisme se mobilisent. Usage d’identifications ethno-raciales dans l’espace de la cause antiraciste en France et en Allemagne », Politix, no 108, p. 143-156.

Lasida E., Renault M, De Laat M. & B. Tardieu (2022), « Le savoir de l’expérience de la pauvreté. Étude à partir d’une recherche participative sur “les dimensions de la pauvreté avec les premiers concernés” », Participations, no 32, p. 93-125.

Lee C. W. (2014), Do-It-Yourself Democracy: The Rise of the Public Engagement Industry, Oxford, Oxford University Press.

Longino H. E. (1990), Science as Social Knowledge. Values and Objectivity in Scientific Inquiry, Princeton, Princeton University Press.

Luneau A., Demeulenaere É., Duvail S., Chlous F. & R. Julliard (2021), « Le tournant démocratique de la citizen science : sociologie des transformations d’un programme de sciences participatives », Participations, no 31, p. 199-240.

Manning K. (1997), « Authenticity in Constructivist Inquiry: Methodological considerations without prescriptions », Qualitative Inquiry, vol. 3, no 1, p. 93-115.

Mazeaud A. & M. Nonjon (2018), Le marché de la démocratie participative, Vulaines sur Seine, Éditions du Croquant.

Medina J. (2012), The Epistemology of Resistance. Gender and Racial Oppression, Epistemic Injustice, and the Social Imagination, Oxford, Oxford University Press.

Neveu C. (1999), « “Nous” illégitimes et “je” indicibles : tensions du collectif et de l’individuel dans des pratiques et des représentations de la citoyenneté à Roubaix », in Neveu C. (dir.), Espace public et engagement politique, Paris, Éditions L’Harmattan, p. 225-255.

Palomares É. & A. Rabaud (2006), « Minoritaires et citoyens ? Faites vos preuves ! », L’Homme et la société, vol. 160-161, no 2, p. 135-160.

Pereira I. (2023), « Pédagogie critique informelle : savoirs subalternes et savoirs critiques », Les Cahiers de Pédagogies radicales. URL : https://pedaradicale.hypotheses.org/4431

Pruvost G. (2021), Quotidien politique. Féminisme, écologie, subsistance, Paris, La Découverte.

Rancière J. (1995), La Mésentente. Politique et philosophie, Paris, Éditions Galilée.

Savoie-Zajc L. (2019), « Les pratiques des chercheurs liées au soutien de la rigueur dans leur recherche : une analyse d’articles de Recherches qualitatives parus entre 2010 et 2017 », Recherches qualitatives, vol. 38, no 1, p. 32-52.

Young I. M. (2000), Inclusion and Democracy, Chicago, Chicago University Press.

Haut de page

Notes

1 Pour une discussion de ces critères et du débat sur l’utilité d’ajuster ou d’abandonner les critères de scientificité dans les recherches participatives radicales, voir Godrie, Juan & Carrel, 2022.

2 Pour une présentation de ces neuf critères, voir Carrel, Bucolo & De Laat, 2023.

3 Institut national de la statistique et des études économiques.

Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Marion Carrel, « Pluralité des savoirs et puissance des injustices épistémiques »SociologieS [En ligne], Dossiers, mis en ligne le 13 juin 2024, consulté le 21 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/sociologies/23405 ; DOI : https://doi.org/10.4000/11ulg

Haut de page

Auteur

Marion Carrel

Professeure d’Université en sociologie, CeRIES, Université de Lille, France. Email : marion.carrel@univ-lille.fr

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search