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Les dynamiques sociales des carrières sportives contemporaines

Les propositions de résumés sont à envoyer pour le 15 juillet 2025

Coordonné par : Yannick LINOSSIER & Matthieu QUIDU

Argumentaire

L’examen de la littérature sociologique révèle une production croissante de travaux s’intéressant aux processus temporels des carrières d’acteurs. Ces multiples contributions ont notamment été conduites en sociologie de la déviance (Becker, 1985), de la santé (Darmon, 2003 ; Caradec et al., 2023), des professions (Marc & Pruvost, 2011 ; Dain, 2023), de la transformation des modes de vie (Thircuir, 2020 ; Rigal, 2020 ; Stroude, 2021), du bénévolat (Jouanneau, 2011 ; Simonet, 2010) ou encore du militantisme (Collovald, 2002 ; Agrikoliansky, 2017). L’intérêt des sociologues pour l’étude des trajectoires s’est également matérialisé dans la parution d’ouvrages de synthèse prenant pour objets l’analyse processuelle (Mendez, 2010), les bifurcations (Bessin et al., 2009), l’imprévisibilité (Grossetti, 2004) ou encore la dynamique des parcours sociaux (Caradec et al., 2012).

La sociologie du sport n’est pas restée insensible à ces réflexions, nombre de travaux ayant documenté l’épaisseur temporelle des carrières sportives. A ainsi été étudiée l’historicité de l’engagement des pratiquants dans une diversité de disciplines sportives comme les carrières équestres (Chevalier, 1998 ; Le Mancq, 2007), athlétiques (Schotté, 2008 ; Julla-Marcy, 2019 ; Forté, 2020), pugilistiques (Mennesson, 2005 ; Burlot, 2011), footballistiques (Peneff, 2000 ; Rasera, 2016), gymniques (Papin, 2000) ou encore de danseurs (Sorignet, 2001). De plus, la littérature est riche de publications ayant investigué les carrières de divers acteurs du monde sportif, dont les arbitres (Nuytens et al., 2020 ; Duvant, 2020), les supporters (Lestrelin, 2006 ; Ginhoux, 2012 ; Bodin et al., 2013), les dirigeants (Schotté, 2016), les journalistes (Dargelos & Marchetti, 2000) ou encore les entraineurs sportifs (Bréhon et al., 2016). En outre, ont été documentées les trajectoires de sportifs aux profils variés, en fonction du niveau et du type de pratique, qu’il soit question de pratiquants professionnels (Burlot, 2011 ; Fleuriel & Schotté, 2011), amateurs (Chevalier, 1998 ; Knobé, 2007), en situation de handicap (Delalandre et al., 2022) et/ou malades (Lion et al., 2022), ou encore de sportifs « addicts » (Moreau et al., 2023) ou « minimalistes » (Favier-Ambrosini et al., 2025) ; de l’âge, qu’il s’agisse de jeunes pratiquants (Guérandel, 2016 ; Forestier et al., 2023) ou de séniors (Hénaff-Pineau, 2012) ; enfin, du sexe, féminin (Mennesson, 2005) ou masculin (Saouter, 2000) ou de l’orientation sexuelle (Sablik & Mennesson, 2008).

Dans le cadre de sociétés marquées par un processus structurel d’« accélération sociale » (Rosa, 2010), les carrières des pratiquants sportifs manifestent une épaisseur temporelle renouvelée : celles-ci se raccourcissent, s’accélèrent, se multiplient, se diversifient voire s’entremêlent (Quidu, 2023). En outre, l’accélération du rythme des changements sociaux induit de plus en plus de bifurcations, de transitions, d’abandons et de recommencements (Bessin et al., 2009) dans les carrières sportives, qui renforcent l’enjeu et l’intérêt d’une analyse processuelle. Si les temporalités plurielles du sport ont déjà été investiguées (Devetter & Soldani, 2017), la problématique de l’analyse processuelle des trajectoires sportives reste à éclairer, tant celle-ci n’est pas exempte de difficultés théoriques et méthodologiques (Mendez, 2010).

Ce numéro spécial entend s’inscrire dans le prolongement de cette riche littérature, et vise à « ouvrir la boite noire du processus » (Mendez, 2010) afin d’analyser de façon complexe, fine et nuancée les carrières sportives contemporaines, leur développement n’étant jamais totalement linéaire, homogène ni irréversible. Les trajectoires sportives apparaissent ainsi comme un observatoire singulier et heuristique pour ce dossier dont l’objectif est, en sus de rassembler des contributions empiriques inédites, de suggérer des perspectives théoriques et méthodologiques susceptibles d’intéresser, au-delà du champ sportif, les sociologues qui aspirent à documenter les carrières d’acteurs dans leur épaisseur temporelle. Quatre axes de contribution (sans être exclusifs) sont ainsi dégagés.

Axe 1. Analyses processuelles et temporelles des carrières sportives.

Tout d’abord ce dossier vise à analyser la manière dont se décompose et se développe, diachroniquement et synchroniquement, la dynamique des carrières sportives ainsi que la façon dont le temps sportif se déploie objectivement (structures temporelles) et se vit subjectivement (rapport au temps et durée).

  1. La structure diachronique des carrières sportives

Ce numéro spécial vise à interroger les outils conceptuels mobilisables par le sociologue pour étudier le développement diachronique des trajectoires d’acteurs du monde sportif. Dans la littérature, celui-ci a essentiellement été appréhendé en reconstruisant une chronologie à partir de « modèles séquentiels » (Becker, 1985), au sein desquels chaque séquence constitue un « segment temporel d’un processus », défini par une « unité » et une « dynamique » propres (Mendez, 2010). De nombreux concepts sont alors exploitables pour étudier les variations dans la carrière sportive, débouchant sur de nouvelles séquences. Mentionnons notamment les concepts de « turning point » (Abbott, 2009), de « crise », de « bifurcation » (Grossetti, 2006 ; Bidart, 2006) ou de « séquence bifurcative » (Hélardot, 2006), permettant de renseigner des variations radicales et régionales dans les trajectoires, ainsi que les concepts de « conversion » (Darmon, 2011) ou d’« alternation » (Berger & Luckmann, 2012[1966]) autorisant une lecture de bouleversements biographiques macroscopiques. Toutefois, comment les sociologues peuvent-ils dépasser les insuffisances empiriques générées par le mode séquentiel pour rendre compte de la dynamique complexe, souvent non linéaire et incertaine, des carrières sportives ? En effet, la « description de la dynamique intra et inter séquences pose (…) le problème d’établir les limites (début et fin) du processus, les bornes entre les séquences, le nombre d’intervalles et le découpage des contextes internes et externes du processus » (Mendez, 2010). De plus, la séquentialité semble discutable tant du point de vue analytique qu’émique : la séquence délimitée par le chercheur est-elle une catégorisation indigène, une réalité ontologique ou une construction exclusivement analytique ? En outre, si le mode séquentiel autorise une lecture heuristique des bifurcations, comment analyser des variations plus fines et diffuses dans les carrières sportives ?

  1. La dynamique des interactions entre la carrière sportive et une autre carrière

À l’heure de l’« accélération du rythme des changement sociaux » (Rosa, 2010), les carrières sportives s’accélèrent, se raccourcissement (Papin & Viaud, 2018 ; Wright, 2019), se diversifient voire s’entremêlent (Quidu, 2023a). En outre, de plus en plus fréquentes et sociologiquement prévisibles, les transitions/bifurcations, devenues la norme, tendent à évoluer de concert (Quidu et al., 2025b), le déploiement d’une carrière dans un domaine (le sport en l’occurrence) se faisant rarement indépendamment d’évolutions dans d’autres pans d’existence (Hélardot, 2006). Ainsi, les contributions pourront étudier les modalités d’interaction entre le développement d’une carrière sportive et d’autres carrières, par exemple professionnelles ou estudiantines, de santé ou encore conjugales.

Se pose alors la question de la micro-temporalité de la diffusion synchronique d’un processus d’une sphère à l’autre de l’existence. À cet égard, ont notamment été utilisées les images d’« engrenage », d’« extension » (Stroude, 2021), de « contamination » (Elster, 1998) ou encore d’« avalanche » (Geels & Schot, 2007). Dès lors, quels sont les modèles utiles pour décrire la (dé)synchronisation entre le développement d’une carrière sportive et des changements dans d’autres registres existentiels ? Quels sont les concepts permettant d’expliquer, à l’échelle synchronique, des conflits de temporalités, des « engagements contradictoires » (Becker, 2006), ou la délimitation d’un processus à un pan de l’existence sans diffusion à d’autres sphères ?

  1. Les régimes de temporalités des carrières sportives

Enfin, il convient d’analyser le « temps [sportif] lui-même », alors même que « l’étude des carrières (…) est souvent fort discrète sur la durée des phases et l’effet du temps (et non pas des processus qui s’y déroulent) sur les individus » (Darmon, 2013, p. 136). Ainsi, alors qu’un macro-processus structurel d’« accélération sociale » (Rosa, 2010) bouleverse les coordonnées temporelles des carrières sportives (Quidu, 2023), les contributions pourront examiner aussi bien la pluralité des rythmes inter- et intra-carrières sportives, que la relativité sociale des rapports singuliers au(x) temps (Darmon et al., 2019) sportif(s), qu’il soit question d’un rapport intensif au temps, ajusté à un espace de production de performance (Julla-Marcy et al., 2017 ; Viaud & Papin, 2012), ou au contraire d’une quête de ralentissement et de décélération, à l’image des carrières minimalistes (Favier-Ambrosini et al., 2025) ou dans le « slow sport » (Lebreton et al., 2020 ; Lebreton & Allen-Collinson, 2024). Ainsi, en suivant Darmon et al. (2019), nous souhaitons insister sur l’intérêt heuristique d’une sociologie empirique du temps sportif afin d’investiguer l’épaisseur des socialisations temporelles et la variabilité sociale des rapports au et usages du temps dans les carrières sportives. Ces derniers semblent en effet « constituer une composante relativement première et profonde des rapports au monde, et devenir la base d’autres processus d’intériorisation ».

Axe 2. Les conditions sociales de possibilité des carrières sportives

Dans la lignée de la contribution de Darmon (2003) sur les carrières anorexiques, plusieurs travaux en sociologie du sport ont mis en évidence les conditions sociales de possibilité des carrières sportives. Ainsi, l’incorporation de disposition sexuées inversées apparaît par exemple comme une condition sociale de l’engagement de sportives dans des disciplines « viriles » (Mennesson, 2005) ou en carrière homosexuelle (Sablik & Mennesson, 2008). Dans le prolongement de ces résultats empiriques, les contributions pourront s’attacher à resituer les carrières sportives dans l’espace social, en révélant la diversité de leurs conditions sociales de possibilité (ou d’impossibilité), et plus particulièrement les effets liés à l’âge, au sexe, à l’origine sociale et/ou géographique ainsi qu’à la situation familiale et/ou parentale.

En arrière-plan, c’est la problématique de l’explication sociologique des carrières qui se pose. Celle-ci réactive une opposition théorique entre modèles interactionnistes et structuralistes : suffit-il de décrire la carrière pour l’expliquer ? À quelles conditions celle-ci est-elle à la fois explicative (explicans) et expliquée (explicandum) ? Selon la théorie interactionniste (Becker, 1985), la carrière est explicative et s’auto-explique par sa dynamique interne, suivant la « thèse de la dépendance au sentier » (Bresson et al., 2016) ; exit alors la prise en compte de caractéristiques sociales qui précéderaient le temps de l’interaction pour expliquer la dynamique de la carrière (Becker, 1985 ; Schotté, 2005 ; Darmon, 2008). Par contraste, en suivant les modèles structuralistes (Bourdieu, 1986 ; de Coninck et Godart, 1990), la trajectoire, qui vit et prend position dans un espace social hiérarchisé, est préstructurée en amont par des variables sociales (s)électives. Positionner la carrière dans l’espace social (Darmon, 2003) renouvelle ainsi l’armature explicative de celle-ci en induisant le glissement d’un « schème d’intelligibilité » à l’autre, ici du « procès » à la « structure » (Berthelot, 1990). Combiner ces schèmes d’intelligibilité est-il la condition pour que la carrière soit explicative et expliquée ? Ce numéro spécial est ainsi motivé par une ambition analytique invitant les contributeurs à expliciter leurs choix épistémologiques en matière d’approches théoriques pour documenter et expliquer le développement des carrières sportives.

Axe 3. La place du corps dans la construction des carrières sportives.

Espace poreux où s’entremêlent et interagissent l’institutionnel et l’individuel, le social et le biologique, le corps apparaît comme un moteur potentiel mais également un limitateur possible de l’engagement sportif. En cela, il constitue un révélateur des carrières sportives. Un axe de recherche consiste alors à examiner la condition corporelle des pratiquants sportifs, et plus particulièrement la place du corps matériel, du corps vécu ou encore des processus d’incorporation dans la construction des carrières sportives.

  1. La matérialité du corps dans la temporalité des carrières sportives.

En premier lieu, les contributions pourront étudier la fabrication sociale des corporéités sportives (Fleuriel, 2011) dans la temporalité des carrières. Plus précisément, elles pourront s’attacher à examiner la formation de corps « forts » et performants (Viaud, 2008 ; Viaud & Papin, 2012) et/ou leur « mise en forme » suivant des injonctions normatives (Mennesson, 2005 ; Louveau, 2007), mais aussi l’« érosion des corps » sportifs (Viaud & Papin, 2012), qui se blessent, souffrent (Fleuriel, 2014 ; Young & Héas, 2007 ; Forté, 2018) ou vieillissent (Hénaff-Pineau, 2012). Enfin, pourront également être investigués les « savoir-être corporels » (Viaud, 2008) déployés par les pratiquants pour instrumentaliser leur corps tout en préservant leur capital corporel (Wacquant, 2000 ; Papin, 2008 ; Forté, 2018), afin de pérenniser leur engagement sportif.

  1. Les processus d’incorporation des dispositions au cours des carrières sportives.

Complémentairement, gagnent à être examinés les processus d’incorporation (Bourdieu, 1997 ; Faure, 2000 ; Fleuriel et al., 2021) des dispositions dans le cadre des carrières sportives. Dès lors, si la socialisation sportive se manifeste par des apprentissages « du corps » et « par corps » (Bourdieu, 1997), elle façonne simultanément « un rapport au monde social » (Darmon, 2016), c’est-à-dire « une cosmologie, une éthique, une métaphysique, une politique » (Bourdieu, 1980, p. 117). En suivant Lahire (2004), les contributions pourront examiner la façon dont des dispositions historiquement incorporées s’actualisent et se solidifient dans le cadre de la carrière sportive, mais aussi la manière dont des dispositions spécifiques – corporelles, mentales, morales voire éthiques – se constituent dans et par l’engagement sportif, voire se recyclent dans d’autres registres existentiels.

  1. La dynamique de l’expérience corporelle au fil de la carrière sportive.

Enfin, les contributions pourront s’attacher à documenter la dynamique de l’expérience corporelle vécue (dans ses versants inextricablement sensoriels, émotionnels et cognitifs) d’une diversité de pratiquants au fil de leur carrière. Quelles méthodologies (en termes de dispositifs de recueil et d’analyse des données) le sociologue peut-il mobiliser pour suivre ou reconstruire la dynamique de l’expérience sportive vécue ? L’apprentissage de la pratique sportive induit la stabilisation de routines et habitudes sensori-motrices, où se déploient des processus infra-conscients d’« incorporation » (Julien & Rosselin, 2005 ; Level & Lesage, 2012). Dès lors, comment documenter finement l’épaisseur sensori-motrice du vécu incorporé dans la temporalité de la carrière sportive ? Des protocoles auto-ethnographiques, à l’instar des travaux ayant étudié en temps réel la dynamique du vécu corporel du pugiliste (Wacquant, 2000) ou du coureur minimaliste (Favier-Ambrosini et al., 2025), ou bien « sociologisé à postériori » une carrière sportive passée (Loirand, 2021 ; Peneff, 2000), peuvent-ils constituer des matériaux empiriques légitimes et heuristiques afin d’examiner la dynamique de l’expérience corporelle sportive ? Plus encore, le recours à des « méthodes mixtes » (Creswell & Plano Clark, 2018) peut-il enrichir la compréhension de la dynamique du vécu corporel de pratiquants sportifs ?

Axe 4. Les carrières sportives au prisme d’enjeux sociologiques contemporains.

Ce dossier vise également à réunir des contributions étudiant les carrières sportives au prisme d’enjeux sociologiques contemporains. Deux axes de recherche pourraient prioritairement orienter les contributions.

  1. La quantification et la digitalisation de l’activité sportive.

  • 1 Institut National de la Jeunesse et de l’Education Populaire (INJEP) (2023). Les chiffres clés du s (...)

En premier lieu, pourront être examinées les carrières dans la quantification et/ou la digitalisation de l’activité sportive, alors qu’est actuellement constatée une démocratisation massive du recours aux outils numériques dans les sphères des loisirs sportifs (Lupton, 2016 ; Dagiral et al., 2019 ; Soulé et al., 2021 ; INJEP, 20231), du sport professionnel (Dalgalarrondo, 2018 ; Toner, 2024 ; Sedeaud, 2024) ou encore de l’activité physique adaptée (Nguyen-Vaillant, 2010 ; Mathieu-Fritz et Guillot, 2017). Ces dispositifs digitalisés, qu’il s’agisse d’objets d’auto-quantification (self-tracking), d’applications communautaires (plateforme type Strava) (Soulé et al., 2021) ou de technologies de data-tracking (Dalgalarrondo, 2018 ; Sedeaud, 2024), permettent de collecter, stocker, visualiser, traiter et éventuellement partager des données quantifiées d’activité sportive comme le temps réalisé, la distance parcourue, la vitesse moyenne ou instantanée, la fréquence cardiaque ou encore le nombre de calories dépensées (Soulé, 2021). Bien que la littérature centrée sur la numérisation en contexte sportif soit particulièrement prolixe (Soulé et al., 2021 ; Quidu, 2020), très rares sont les contributions ayant étudié les pratiques et expériences sportives de la digitalisation dans leur historicité et leur épaisseur temporelle. Ainsi, par quelles étapes passent les sportifs depuis la découverte d’un instrument numérique jusqu’à son appropriation, son incorporation, son détachement éventuel voire son abandon définitif ? Des travaux empiriques investiguant les trajectoires d’attachement et de détachement vis-à-vis des dispositifs digitalisés en contexte sportif amateur ou professionnel, à travers des protocoles longitudinaux ou rétrospectifs, seront appréciés.

  1. La simplification et l’écologisation de l’activité sportive.

Par contraste, les contributions pourront s’attacher à documenter la dynamique des carrières de sportifs engagés dans des modalités de pratique « minimalistes ». À contre-courant du modèle normatif dominant fondé sur l’abondance, la croissance, l’accumulation et la démesure (Stroude, 2021), celles-ci consistent à convoiter le « moins », voire le « sans », afin de générer du « mieux » (davantage de santé, de sensations, de soutenabilité, etc.) (Quidu, 2023b). Les pratiquants minimalistes, sensibles aux valeurs de simplicité et de sobriété, poursuivent des aspirations non matérielles, qu’elles soient spirituelles, écologiques et/ou anticonsuméristes. Dans la lignée des travaux ayant documenté les trajectoires de pratiquants amateurs se distanciant des interfaces numériques (montre connectée, plateforme de type Strava) (Quidu et al., 2025a), refusant l’accumulation d’équipements matériels (Boutroy, 2020, 2022), adoptant des modalités de chaussage s’éloignant du soulier conventionnel (Favier-Ambrosini et al., 2025) ou cessant de suivre une programmation stricte d’entraînement (Quidu et al., 2025b), pourront ainsi être étudiées les structures temporelles des carrières de sportifs minimalistes de haut-niveau, ou bien évoluant en loisir dans des activités inédites (StreetWorkout, musculation au poids de corps, randonnées itinérantes à vélo…) ainsi que des formes d’éviction (Goulet & Vinck, 2022) originales (retrait de la musique, du soutien-gorge…).

En somme, les articles attendus dans le cadre de cet appel alimenteront un ou plusieurs des axes proposés (de façon non exhaustive) en analysant la manière dont les temporalités des carrières de sportifs aux profils diversifiés (amateurs et/ou professionnels, jeunes et/ou âgés, hommes et/ou femmes, malades…), dans des disciplines variées, s’agencent, se conjuguent, s’enchevêtrent ou se confrontent. Les contributeurs s’attacheront à expliciter leurs choix d’approches théoriques et de concepts ainsi que les méthodologies et les échelles temporelles adoptées pour examiner la dynamique des carrières sportives.

Mots clés : Trajectoires – Analyses processuelles et temporelles – Approches longitudinales – Sport – Corps.

Les deux co-porteurs de ce numéro-spécial

Yannick LINOSSIER est PRAG à l’Université Jean Monnet Saint-Etienne et Doctorant à l’Université Lyon 1 au sein du Laboratoire sur les Vulnérabilités et l’Innovation dans le Sport (L-ViS, UR 7428). Il étudie les carrières dans la digitalisation et l’auto-quantification de l’activité physique chez des jeunes pratiquants amateurs, des sportifs professionnels et des élèves en EPS. Sa thèse vise à documenter la complexité des processus temporels conduisant à l’appropriation, à l’incorporation et à la distanciation vis-à-vis des outils digitalisés en contexte sportif.

Matthieu QUIDU est sociologue et philosophe du sport au sein du Laboratoire sur les Vulnérabilités et l’Innovation dans le Sport (L-ViS, UR 7428). Maître de conférences en STAPS à l’Université Lyon 1, il s’intéresse à plusieurs innovations sportives contemporaines, dont l’émergence de modalités « minimalistes » de pratiques sportives, lesquelles consistent à se détacher de la montre connectée ou encore des chaussures de sport conventionnelles. Il s’agit en particulier de documenter les carrières vers et au sein du minimalisme, non seulement dans le champ de l’activité physique de loisir, mais aussi dans différents domaines de l’existence, comme l’alimentation, la consommation, le transport ou l’habitat.

Modalités de soumission

Le processus de soumission se déroulera en deux temps.

En premier lieu, les contributeur.rice.s enverront un résumé d’article en français (maximum 4 000 signes, bibliographie comprise) avant le 15/07/2025 aux deux coordinateurs du dossier :

yannick.linossier@univ-st-etienne.fr

matthieu.quidu@univ-lyon1.fr

Les propositions présenteront la problématique, le cadre théorique mobilisé, la méthodologie employée et les résultats empiriques obtenus. Elles seront rédigées suivant les normes d’écriture de la revue SociologieS, disponibles sur la page suivante : https://journals.openedition.org/sociologies/289

Chaque auteur.e veillera à indiquer :

  • son nom et prénom,

  • son pays de résidence, son statut et son institution de rattachement,

  • une adresse électronique.

Les propositions de résumés seront évaluées en fonction de leur pertinence par rapport à la thématique du numéro spécial et à leur complémentarité.

Au cours d’une deuxième phase, les contributeur.rice.s dont le résumé aura été sélectionné devront soumettre un article complet, d’une longueur comprise entre 25 000 et 35 000 signes, aux deux coordonnateurs du dossier, Yannick Linossier (yannick.linossier@univ-st-etienne.fr) et Matthieu Quidu (matthieu.quidu@univ-lyon1.fr), avant le 15/01/2026.

Les articles proposés au Comité de rédaction devront être originaux, ne pas avoir été soumis ailleurs et ne pas avoir été publiés dans une autre langue. Les textes feront l’objet d’un processus d’évaluation en double aveugle par deux examinateurs externes.

Calendrier prévisionnel

  • Date limite d’envoi des propositions de résumés : 15/07/2025

  • Sélection des propositions et réponses aux auteur.es : 01/09/2025

  • Date limite d’envoi des articles : 15/01/2026

  • Retour des expertises : 15/04/2026

  • Envoi de la seconde version enrichie : 15/06/2026

  • Réponse définitive suite à une double expertise anonyme : 15/07/2026

  • Remise de la version définitive des articles : 15/09/2026

  • Parution du numéro : décembre 2026

Bibliographie

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