Rodney Sampson, Wendy Ayres-Bennett (eds.), Interpreting the History of French, A Festschrift for Peter Rickard on the Occasion of His Eightieth Birthday
Rodney Sampson, Wendy Ayres-Bennett (eds.), Interpreting the History of French, A Festschrift for Peter Rickard on the Occasion of His Eightieth Birthday, New York, Rodopi, Amsterdam, 2002.
Testo integrale
1Ces mélanges, en l’honneur de l’œuvre de philologue de Peter Rickard, professeur aux Universités d’Oxford et de Cambridge, sont organisés en trois parties. La première, consacrée à l’interprétation textuelle, s’ouvre avec l’article de Sophie Marnette, The Evolution of Reported Discourse in Mediaeval French: An Overview (pp. 3-34), qui analyse les conséquences de l’emploi du discours indirect libre, du discours direct avec que et du discours indirect sans que sur la relation qui s’établit entre narrateur et public, le contrôle que le narrateur exerce sur ses personnages et la représentation de notions telles que celle de «vérité» ou d’ «histoire». L’auteur, qui a analysé un corpus de 34 textes, souligne dans sa conclusion la complexité des stratégies discursives qui travaillent les textes.
2Le deuxième texte, Rewriting the Old French Bible: the New Testament and Evolving Reader Expectations in the Thirteenth and Early Fourteenth Centuries (pp. 35-59), de Clive R. Sneddon, se propose d’explorer l’hypothèse selon laquelle l’un des facteurs à la base des variations dans la Bible en ancien français soit le fait que les copistes, ou leurs correcteurs, aient changé leurs sources afin d’améliorer la qualité du résultat final. Les choix des copistes pourraient alors constituer des schémas de variation susceptibles d’éclairer les attitudes des copistes eux-mêmes ainsi que de leurs lecteurs envers la «norme» de l’Ancien Français.
3En clôture de la première section, Jacques-Philippe de Saint-Gérand, dans son Mediaeval Revival, ou comment le français prit conscience de son histoire à l’époque romantique (pp. 61-91), se penche sur l’intérêt que portent les historiens et les historiens de la langue du XIXe siècle aux textes médiévaux: découverte de matériaux jusqu’alors discrédités ou ignorés, édification de «protocoles d’analyse rigoureux» (p. 86) qui démontrent le respect qu’il faut porter aujourd’hui encore à ces études.
4La deuxième section, qui s’intéresse à l’interprétation des formes et des structures, est ouverte par la contibution d’Yves Charles Morin qui, dans Philological Status of Nasal Vowels in Sixteenth Century French (pp. 95-129), se penche sur la dénasalisation progressive de certains sons au cours du XVIe siècle. Ce changement serait, d’après l’auteur, le résultat de la compétition entre deux normes: l’une «orale» qui voudrait imposer pour certains mots une dénasalisation complète, alors que l’autre souhaiterait préserver la voyelle nasale correspondant au o ouvert. Cette compétition s’est évidemment soldée par la victoire de la première norme, qui s’est imposée et survit encore de nos jours.
5De son côté, Rodney Sampson, dans A Transient Vowel in Early Modern French: i Nasal (pp. 131-149), s’intéresse au phénomène de l’apparition, au début de la période moderne, du «i nasal», phénomène qui va à l’encontre de la tendance dominante de réduction du nombre des voyelles nasales et de la neutralisation de certaines oppositions. Le «i nasal», malgré les avantages possibles de son introduction, fut toutefois condamné à disparaître dès la fin du XVIIIe siècle.
6La question de la norme, cette fois-ci sous son aspect grammatical, se fait jour également dans Aspects historiques de la normalisation du système verbal français: le point de vue extra-hexagonal (pp. 151-179) de Christian Schmitt, qui analyse un corpus de grammaires du français rédigés à l’étranger au XVIIe siècle et qui seraient moins normatives et donc plus proches de l’usage. Ces sources, jusqu’ici marginalisées, devraient contribuer à donner «une image plus variée de l’histoire du français».
7Toujours d’un point de vue grammatical, Marc Wilmet s’interroge, dans L’Accord du participe passé avant la grammaire scolaire (pp. 181-193), sur les modalités de présentation des règles de l’accord de la forme verbale indiquée dans le titre avant l’apparition des manuels scolaires: l’auteur analyse un corpus de grammaires des XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, pour arriver à conclure que jusqu’au XVIIIe siècle les grammairiens «ont occulté les régularités de l’accord […] et focalisé leur attention sur les écueils potentiels» (p. 190), alors qu’au XIXe siècle on «privilégie une démarche globalisante à dominante (1) formelle, (2) fonctionnelle» (p. 190).
8De son côté, Lene Schøsler retrace l’évolution de l’expression du sujet grammatical de l’ancien français à la langue contemporaine, examine les hypothèses des linguistes qui justifieraient la variation qui l’a rendu obligatoire au fil des siècles, propose un aperçu statistique du phénomène et analyse enfin un cas d’espèce: le «Quadrilogue Invectif» (1422) d’Alain Chartier (La Variation linguistique: le cas de l’expression du sujet ; pp. 195-212).
9Dans L’Introduction et la diffusion de patrie en français au XVIe siècle (pp. 213-242), William Kemp présente les étapes de la naturalisation du mot patrie en français au XVIe siècle, c’est-à-dire son intégration progressive entre 1510 et 1580: d’abord apanage des humanistes, le sens du mot est ensuite étendu au royaume de France, pour entrer dans la langue commune lors de la première Guerre de Religion.
10Le domaine du lexique est abordé par David Singleton dans Crosslinguistic Operations in the Mental Lexicon and Lexical Change (pp. 243-258), où l’auteur cherche à expliquer les dynamiques du changement lexical dans une situation de contact linguistique particulière: celle du nord de la Gaule après l’invasion des Francs Saliens au Ve siècle. Singleton y affirme que le changement lexical s’est produit par l’influence de mots francs latinisés ou de nouveaux sens attribués par les Francs à des mots latins sur le latin des Romani, cela étant dû au nombre élevé de Francs et à leur position dominante dans la société de l’époque.
11La troisième section, «Interpreting the Sociolinguistic and the Metalinguistic», s’ouvre sur l’article de Anthony Lodge, The Medieval Sources of Standardisation in French (pp. 261-296), qui critique les théories expliquant la standardisation du français et propose sa propre hypothèse selon laquelle ce phénomène s’est déroulé en deux phases: au XIIe siècle on assiste à la «koinéisation» de la langue orale dans le melting-pot parisien, alors que la standardisation, basée sur la langue écrite, n’aurait lieu que beaucoup plus tard, au début de la période moderne.
12Dans Marques d’oralité et conventions littéraires dans les anciens textes en français populaire (pp. 297-311), Jakob Wüest reprend la question de la naissance du français standard et de ses rapports avec le patois parisien. De celui-ci serait né le français populaire, une langue essentiellement orale qui est transcrite, non sans difficultés, dans de nombreux textes des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles.
13Douglas A. Kibbee se penche, dans Growing Pains: Territorial Expansion and Language Policy in France from Villers-Cotterêt to the Revolution (pp. 313-328) sur l’expansion de la langue française, aux XVIe et XVIIe siècles, en Alsace et dans la partie flamandophone de l’extrême nord, régions où le pouvoir politique dut mettre en œuvre une politique linguistique explicite.
14De son côté, Philippe Caron (Vers la notion de chronolecte ? Quelques jalons à propos du français préclassique, pp. 329-352) propose d’introduire en linguistique la notion de «chronolecte», néologisme qui permettrait à la périodisation de la langue d’atteindre une plus grande rigueur scientifique. L’auteur analyse à titre d’exemple un corpus de textes écrits du XVIIe siècle appartenant au sociolecte du «bon vsage» et conclut qu’autour de 1610-1620 se manifeste «un réseau de courbes matérialisant chacune la disparition graduelle ou la croissance d’un trait linguistique pertinent».
15En conclusion de recueil, Wendy Ayres-Bennett aborde, dans An Evolving Genre: Seventeenth-Century Remarques and Observations on the French Language, la question du genre des Remarques: partant d’une analyse du format, du public, des intentions, du sujet, de l’idéologie et de l’emploi des citations des Remarques sur la langue françoise de Vaugelas, l’auteur se demande si ses successeurs se placent dans son sillage ou rejettent plutôt ces caractéristiques.
Per citare questo articolo
Notizia bibliografica
Anna Giaufret, «Rodney Sampson, Wendy Ayres-Bennett (eds.), Interpreting the History of French, A Festschrift for Peter Rickard on the Occasion of His Eightieth Birthday», Studi Francesi, 142 (XLVIII | I) | 2004, 233-234.
Notizia bibliografica digitale
Anna Giaufret, «Rodney Sampson, Wendy Ayres-Bennett (eds.), Interpreting the History of French, A Festschrift for Peter Rickard on the Occasion of His Eightieth Birthday», Studi Francesi [Online], 142 (XLVIII | I) | 2004, online dal 30 novembre 2015, consultato il 18 avril 2024. URL: http://journals.openedition.org/studifrancesi/41391; DOI: https://doi.org/10.4000/studifrancesi.41391
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