1Dans cette étude qui s’inscrit dans la lignée de certains de ses travaux précédents, J.-H. Grinsward aborde, en médiéviste et comparatiste, la question de la naissance et de la genèse du monde arthurien, qu’il approche par le biais d’un regard posé sur deux univers épiques éloignés, dont il montre cependant la parenté: d’un côté la saga médiévale et de l’autre les Légendes sur les Nartes (ou Légendes nartes) des Ossètes, unique population de la région du Caucase parlant une langue indo-européenne. L’A. s’arrête notamment sur les membres de deux trios héroïques – Arthur, Gauvain, Keu, pour le monde arthurien; Batradz, Soslan/Sozryko, Syrdon, pour le contexte narte – dont il met en lumière les parallélismes particuliers, ainsi qu’un lien plus profond concernant «l’identité des rapports qui structurent les deux trios héroïques considérés» (p. 146). Le raisonnement se développe à travers quatre chapitres, dont les trois premiers (Keu premier ou le feu dans l’eau, Gauvain ou le chevalier soleil, Arthur ou le roi-épée) sont consacrés aux trois membres arthuriens et à leurs correspondants Nartes, alors que le quatrième (Le trio magnifique ou le rivage des Scythes) aborde «l’observation d’ensemble» et «les relations qui unissent entre eux les divers éléments constitutifs de cet ensemble envisagé […] en tant qu’ensemble» (p. 146).

2L’approche comparatiste permet à l’A. de déceler le «résidu», ou l’«essence» mythologique dont les personnages arthuriens sont les héritiers, ce qui implique un réexamen de certaines hypothèses critiques sur la naissance d’Arthur et de sa légende. Surtout, si le roi et ses chevaliers de la Table Ronde – comme les correspondances particulières et les réseaux des relations autorisent à le croire – «ont surgi de très anciens récits» (p. 169), c’est l’historicité d’Arthur et le rôle de l’Histoire dans la genèse du monde arthurien qui doivent être récusés, en faveur d’une fonction fondatrice du conte et de la légende.

3Une bibliographie distinguant le corpus sondé par l’A. et les études et articles consultés, suivi de trois index séparés (des noms propres, des œuvres citées et des thèmes et motifs), clôturent ce volume dense et d’un très grand intérêt.