2La rencontre a eu lieu à Lyon les 7 et 8 juin 2016. Deux aspects principaux avaient été retenus pour ces deux journées, et justifient la présentation du dossier en deux parties. Un premier volet est consacré à la présentation ou au réexamen de dossiers documentaires : Grégoire Poccardi propose d’abord une synthèse des connaissances sur la topographie du site, puis, en collaboration avec Jacques Leblanc, une hypothèse nouvelle fondée sur l’étude d’une photographie aérienne ancienne concernant le palais de Daphné, connu par les sources littéraires, mais jamais repéré sur le terrain. Les témoignages des voyageurs font l’objet d’une présentation d’ensemble par Guy Meyer qui propose une revue détaillée et critique de ces descriptions ou évocations assorties de dessins, gravures ou photographies. La perspective se resserre ensuite sur l’édifice dégagé au lieu-dit Yakto et publié sous le nom de « villa de plaisance » : Éric Morvillez propose un réexamen des vestiges fondé sur l’exploitation des archives numérisées de la Mission de Princeton et tente de reconstituer une partie de l’histoire des aménagements de cette demeure. Janine Balty revient sur l’analyse et la datation de la « mosaïque de Megalopsychia » qui ornait le bâtiment, grâce à la comparaison avec d’autres mosaïques de chasse. Catherine Saliou se concentre sur la bordure topographique de cette mosaïque. Pour mieux établir la lecture qui peut en être faite, et en préciser l’apport à la connaissance de la topographie de Daphné, il faut en effet replacer l’ensemble de la mosaïque dans son contexte ou plutôt ses contextes.

3La célébrité de Daphné tenait à son sanctuaire d’Apollon et à l’oracle dont il était le siège. Le deuxième volet du dossier est donc consacré à l’histoire religieuse du site. L’une des grandes manifestations qui permit au sanctuaire de rayonner à travers le monde antique fut le concours olympique d’Antioche. Cet événement qui participait du renom d’Antioche, et qui nous vaut le célèbre Éloge d’Antioche de Libanios, prononcé à l’occasion du concours de 356, se déroulait pour partie à Daphné. Sofie Remijsen retrace l’histoire des Olympia sur le temps long. La célébrité de Daphné tient aussi à son oracle d’Apollon, dont la fondation est attribuée à Séleucos Nicator. Bernadette Cabouret propose une synthèse sur le site du sanctuaire, dont sont particulièrement décrits et célébrés le bois sacré et les sources. Le temple d’Apollon, qui était le siège du culte et sans doute de l’oracle, reste l’une des grandes inconnues du site, car les données tirées des textes n’ont jamais pu être vérifiées sur le terrain et aucun vestige n’en a pour l’heure été identifié. L’un des épisodes les plus connus de son histoire est celui du conflit entre païens et chrétiens autour du martyrium de Babylas installé auprès du temple d’Apollon dans l’enceinte même du sanctuaire. Cet épisode a été largement exploité, détaillé, amplifié par les auteurs chrétiens. Charles Davoine montre que les ruines du temple sont investies par ces auteurs du rôle de vecteur mémoriel, affichant pour la postérité la défaite du culte païen. La réévaluation des textes et de leur validité permet en retour une approche plus critique des réalités architecturales décrites, comme le fait Andrea Pellizzari pour le monument et la statue dépeints par Libanios dans la Monodie sur le temple de Daphné. Daphné s’inscrit aussi dans une histoire qui est à la fois chrétienne et urbaine, et l’analyse des récits dont ses martyriums sont l’objet ou le théâtre, telle que la mène Frédéric Alpi, contribue à l’étude de sa topographie.

4Les échanges qui ont animé ces journées ont montré que les différentes approches étaient complémentaires et que les centres d’intérêt des uns suggéraient des questionnements ou des éclairages nouveaux aux autres, dans la confrontation des sources et des méthodes. La mise en forme et l’édition de ces actes ont rendu encore plus sensible à nos yeux la richesse de ce dialogue. Les renvois de chacun des articles à ceux des autres prouvent en effet à quel point il fut fructueux : les textes ne peuvent se comprendre qu’à la lumière de la connaissance fine de la topographie ; les connaissances actuelles, appuyées sur les vestiges subsistants, s’éclairent grâce aux témoignages portés par d’anciens voyageurs sur des restes disparus ou occultés par une urbanisation galopante ; les images et représentations peuvent aider à se figurer les lieux observés par ces « témoins », mais aussi esquisser un imaginaire du lieu, tant les fantasmes ont entouré le site dès l’Antiquité. Le croisement des sources et des approches a ainsi permis, nous l’espérons, de restituer à Daphné un peu de son importance historique. Jean-Charles Balty, qui avait assuré la conclusion des deux journées lyonnaises, a aussi accepté de rédiger les conclusions du dossier.

5Nous tenons à remercier les institutions qui nous ont apporté leur soutien dans ce projet scientifique et qui nous ont accueillis pour ces deux journées dans leurs locaux : l’université Jean Moulin Lyon 3, le laboratoire HiSoMA (Histoire et sources des mondes antiques – UMR 5189) et sa directrice d'alors, Véronique Chankowski. Enfin notre gratitude va tout particulièrement à Annelise Poulet, bibliothécaire et responsable du centre HiSoMA-Ceror de l’université Jean Moulin Lyon 3, dont la compétence, l’efficacité et la disponibilité ont été, pendant toute la préparation du colloque et pendant les deux jours de sa tenue, d’une aide précieuse.