1Les auteurs nous livrent ici la publication d’un trésor identifié en 1968, que les inventeurs (A. Spear † et S. Hurter †) n’ont pu publier de leur vivant. H. Gitler et O. Tal présentent dans cet ouvrage l’ensemble des travaux déjà conduits sur ce trésor, auxquels s’ajoutent de nouvelles conclusions grâce aux méthodes d’analyse et de recherche récentes qui complètent l’ensemble des données existantes. L’ouvrage s’organise en sept chapitres auxquels s’ajoutent les planches en fin d’ouvrage.

2L’introduction (p. 2-46) expose les conditions de la découverte du trésor, l’historique des pièces qui le composent (archivage et dispersion dans différentes institutions) et le travail de collecte qui a été préalablement nécessaire à l’élaboration de l’ouvrage ; des remerciements sont adressés aux familles des inventeurs. Le trésor de Naplouse, nommé NH, composé de 965 monnaies et de bijoux, et celui de Samarie, nommé SH, composé de 337 monnaies et de bijoux, sont ensuite rapidement décrits selon l’origine des différentes monnaies qui les composent. L’histoire des deux trésors, tous deux apparus au même moment sur le marché des antiquités de Jérusalem, et la discussion sur leur origine géographique sont résumées, et suivies d’un point sur la date d’enfouissement probable à partir des données monétaires. Un rapide rappel des conditions géographiques et politiques de la région à l’époque perse et un tour d’horizon des sites archéologiques contemporains remettent dans son contexte historique le trésor étudié, afin d’appréhender son importance dans la trame générale de la culture matérielle connue de la région pour la même époque. La partie suivante s’intéresse plus précisément aux différentes monnaies qui composent ces deux trésors selon des catégories typologiques : 1. phéniciennes, 2. graffitis, 3. samaritaines, 4. athenian-styled, 5. philistines et judéennes, 6. athéniennes, 7. varia. Sont détaillées dans chacune de ces catégories les spécificités des sous-ensembles monétaires quant à leur nombre, leurs types, leurs datations et leurs apports à l’étude du trésor. En particulier les monnaies samaritaines font l’objet d’une étude approfondie (types, épigraphie, sources littéraires), dans le but de poser les fondations d’une typologie propre, en relation avec l’étude du SH (Meshorer et Qedar, 1991). Est ajouté un tableau de concordance bibliographique entre la publication présente et les ouvrages ayant déjà publié certaines monnaies du trésor NH (Elayi 1993, 2004 et 2014).

3Le catalogue monétaire (p. 47 à 106) a été construit sur la base des fiches des deux inventeurs, reprises et complétées par les références des collections et la bibliographie. Il est organisé de façon commode par région d’origine, par atelier, puis par autorité (chronologique) et enfin par modules. Les descriptions sont simples et efficaces pour chaque groupe de type semblable, de même que les spécificités de chaque monnaie (poids, axe, coin, références). La numérotation continue des monnaies finalise ce catalogue en un outil pratique et efficace.

4Le catalogue des 92 bijoux (p. 107-117), très détaillé, comprend la description, le poids, les références bibliographiques et les numéros de collections des pièces, là aussi numérotées en continu.

5D. Ashkenazi et A. Stern se joignent aux précédents auteurs pour les deux chapitres suivants, traitant de l’analyse métallurgique des monnaies, puis des bijoux. Concernant les monnaies, sont rapidement expliquées les origines de la frappe monétaire, puis sont précisés les choix faits par l’équipe quant au type d’analyses pratiquées et les outils utilisés en vue de cette analyse ; y sont décrites les limites et les marges d’erreurs, soit par rapport aux outils et aux choix d’analyses, soit par rapport aux monnaies elles-mêmes (environnement, techniques de conservation). Les résultats des analyses font apparaître deux groupes homogènes, distincts par leur proportion de cuivre, et permettent également d’identifier le processus de fabrication de certains des flans analysés (en moule multiple). Ces résultats sont suivis d’une discussion quant à la composition chimique des monnaies et à sa variation, ainsi qu’au constat que la composition métallique des monnaies des deux trésors est très homogène malgré une différence de datation, c'est-à-dire avec un très haut titre d’argent, et un pourcentage faible mais homogène de cuivre ; des photos et un tableau récapitulatif appuient ces conclusions.

6Le second chapitre d’analyse se concentre sur les bijoux, en établissant tout d’abord les processus d’extraction métallique (coupellation) et de fabrication utilisés à l’époque perse, détaillant ensuite précisément les alliages et leurs compositions, illustrés par deux diagrammes. Les techniques de joaillier n’étant connues que par des sources plus récentes (d’époque romaine), l’analyse ici menée permet de déterminer les détails de la fabrication (assemblage) de chacun des bijoux en plus de leur composition chimique pour l’époque perse ; à nouveau, limites et marges d’erreurs sont exposées pour les méthodes d’analyse pratiquées. Les résultats sont présentés en cinq tableaux regroupant les compositions chimiques et les descriptions de chacun des objets analysés, ainsi que des photos des éléments permettant l’identification des techniques de joaillerie utilisées. L’analyse permet de conclure que le métal des bijoux est de composition semblable d’un trésor à l’autre (NH et SH) et avec un titre d’argent élevé ; une technique particulière d’assemblage a été identifiée par la présence d’un titre plus élevé de cuivre au niveau des jointures des bijoux. En conclusion, cette analyse permet d’identifier les deux ensembles de bijoux comme un ensemble homogène du point de vue du métal comme des méthodes de fabrication, et donne un aperçu de la compétence des joailliers de l’époque, dont les techniques de fabrication pourraient être envisagés, par la suite, comme des marqueurs spécifiques de la région.

7Deux appendices sont ajoutés (p. 183-195) ; le premier expose la méthode de détermination des liaisons de coin par surimposition d’images, illustrée par des planches ; le second est un glossaire des termes techniques utilisés dans l’ouvrage. La bibliographie (p. 195-209), commodément organisée, comprend les publications majeures concernant les trésors de monnaies et la circulation monétaire pour le Levant. L’ouvrage se termine sur 41 planches (monnaies et bijoux) ; l’échelle est donnée dans l’ouvrage lui-même (2 : 1).

8La publication très attendue de ce trésor, « frère » de celui de Samarie publié en 1991, tient ses promesses ; cet ouvrage vient appuyer davantage encore sur l’importance, la variété et la spécificité des monnayages propres au Levant et particulièrement à Samarie. Les analyses de sa composition, aussi bien typologique que chimique, complètent et renforcent notre connaissance de la circulation des monnaies d’argent au Levant. En effet, les précédentes publications des mêmes auteurs donnaient déjà une trame cohérente des frappes et de la circulation monétaire d’argent (et en particulier des fractions : voir en particulier H. Gitler et O. Tal, The Coinage of Philistia, 2006). Cette étude, portant sur un trésor très conséquent de ces mêmes monnaies, est un élément majeur désormais accessible aux chercheurs. La rigueur et la clarté du propos, tant en termes monétaires (catalogue, description des apports en introduction) qu’en termes techniques (choix des outils d’analyse, portée technique et historique des résultats) permettent une appréhension fine et efficace des données du trésor, sans pécher par excès d’interprétation. La définition des limites et des marges d’erreurs dans chaque analyse est très appréciable, de même que la variété des biais d’analyse (analyse numismatique, métallurgique, identification des technologies d’époque, appréhension des contextes archéologiques). Un seul et unique petit défaut : on regrettera simplement l’absence pratique d’échelle directement dans les planches. Finalement un ouvrage qui, allié à l’étude du trésor de Samarie (Meshorer et Qedar 1991), porte des perspectives passionnantes pour l’avenir des recherches sur les fractions d’argent et leur circulation au Levant à l’époque perse.