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Cliché P. Donceel-Voûte

1La revue Syria tient à saluer la mémoire de Robert Donceel, professeur en archéologie classique, décédé à Mont-Godinne (Belgique) le 16 août 2019, à l’âge de 80 ans. Nombreux sont les collègues libanais, syriens, italiens et français qui se souviendront de l’immense affabilité de l’homme, de son érudition et de l’extrême méticulosité de ses travaux. Né à Ixelles le 8 septembre 1938, Robert Donceel reçut une solide formation en humanités gréco-latines au collège Saint-Boniface (Ixelles), avant d’obtenir sa licence en philologie classique (1961) à l’Université catholique de Louvain. Son intérêt pour la Campanie et la région de Nole se manifesta dès ses années d’apprentissage, et c’est comme membre de l’Institut historique belge de Rome (1961-1963) qu’il développa ses recherches sur l’Ager Nolanus ; c’est ainsi qu’il compléta, toujours à l’Université catholique de Louvain, une candidature en histoire ancienne et une licence en histoire de l’art et archéologie (1963). Dès ces premières années, une vocation était née : Robert Donceel allia durant toute sa carrière un plaisir communicatif de la prospection archéologique et du terrain inlassablement arpenté, à celui de la recherche documentaire, menée avec une rare acribie, ne négligeant aucune source, fût-elle fragmentaire, indirecte ou obscure (tessons abandonnés, monnaies disséminées entre d’innombrables collections, papiers inédits, photographies écartées, relevés égarés, notes marginales ou repentirs...). Ces deux versants de sa méthode sont présents, à près de soixante ans d’intervalle, dans ses toutes premières chroniques « Nouvelles recherches archéologiques menées en Campanie » parues dans L’Antiquité classique en 1963 et 1964 comme dans son Nola et son territoire en Campanie dans l’Antiquité : les découvertes archéologiques en contexte, du xvi^e au xxi^e siècle, publié à Louvain-la-Neuve en 2019, quelques mois après sa disparition.

2C’est muni de son agrégation belge en Philologie classique qu’il obtient un emploi de professeur au collège maronite de la Sagesse à Beyrouth, où il enseigne de 1963 à 1966. Ces années beyrouthines lui ouvrent les portes du Proche-Orient, lequel constituera la seconde pierre angulaire de sa carrière scientifique. Fort de son expérience campanienne, il met ces années orientales à profit pour prospecter la région, ce dont témoignent par exemple ses toujours utiles « Recherches et travaux archéologiques récents au Liban (1962-65) », parus dans l’AC en 1966 et 1967. Les réseaux scientifiques développés alors lui permettent aussi de participer aux fouilles de Byblos, aux fouilles belges d’Apamée de Syrie (1964-1968) ou, plus tard, aux travaux de la Mission archéologique française en Syrie du Sud (Qanawat, 1976). De retour du Liban, Robert Donceel décroche en Belgique un mandat d’aspirant au Fonds national de la recherche scientifique (1966-1970), qui lui permet de soutenir sa thèse campanienne à l’Université catholique de Louvain. Suite à la scission linguistique de cette université et à la construction d’un nouveau site à Louvain-la-Neuve, Robert Donceel obtient un poste de chargé de cours – charge qui équivaut à celle de maître de conférences en France (1970) – puis de professeur (1975) à la faculté de Philosophie et Lettres (collège Érasme), où il enseigne jusqu’à son éméritat (2003).

3Dans les années qui suivent cette entrée en charge, et à la faveur de la direction par son épouse, Pauline Donceel-Voûte, de l’Institut historique et archéologique néerlandais d’Istanbul, l’antenne stambouliote de l’Instituut voor het Nabije Oosten / l’Institut du Proche-Orient de Leiden (1974-1978), Robert Donceel mène des prospections régulières en Asie Mineure, en Paphlagonie (vallée du Gökirmak, côte méridionale de la mer Noire), Phrygie (Blaundos), Isaurie (Dağ Pazarı) et Pamphylie (Antalya). C’est ensuite vers la publication d’une partie du mobilier archéologique de Khirbet Qumrân et de ʿAin Feshkha que la Bonne Fortune des archéologues mène Robert Donceel et son épouse, à la suite de la demande (1990) de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem d’intégrer l’équipe chargée de la publication du matériel exhumé dans les années 1950 par le père R. de Vaux. Ces travaux, menés dans des conditions difficiles, sont à l’origine d’une réévaluation radicale de la doxa qumrânienne, relecture dont l’argumentaire archéologique est développé dans le désormais fondamental Matériel archéologique de Khirbet Qoumrân et ʿAin Feshkha sur la mer Morte. Pierre – lampes – verre – matériaux divers, ouvrage co-édité avec P. Donceel-Voûte et paru à Louvain-la-Neuve en 2018. Ces travaux furent aussi l’occasion de réunir, à la suite de J. Ryckmans, la documentation archéologique produite par la Mission archéologique belge en Terre sainte (Khirbet Mird, 1953).

4Robert Donceel eut à cœur de s’investir dans la vie académique de son université, qu’il s’agisse de publier dans les revues scientifiques de son alma mater (Le Muséon, la Revue des archéologues et des historiens d’art de Louvain), d’honorer ainsi plusieurs de ses collègues disparus (Paul Naster, Tony Hackens), de publier des recensions aussi discrètes qu’informées dans diverses revues (Revue archéologique, Revue belge de Philologie et d’Histoire), d’enseigner ou d’encadrer ses mémorants et doctorants. Son expérience et sa connaissance approfondie du terrain lui ont permis d’élargir son champ d’investigation à l’Orient ancien, et le désignèrent naturellement aux enseignements d’archéologie du Proche-Orient ancien, d’archéologie romaine, ou encore de topographie et géographie historique de l’Antiquité. Notre dernière rencontre date de la cérémonie de remise d’un volume in honorem dédié à Pauline Voûte et Robert Donceel par la Société royale belge d’études orientales, quelques mois avant sa disparition. Fidèle à lui-même, Robert Donceel s’y était montré d’une immense discrétion ; ses collègues et ses étudiants garderont l’image d’un homme d’une grande modestie, d’une parfaite probité, au sens aigu de l’exactitude la plus rigoureuse.