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La SIPO-SD de Bruxelles au 347 de l’avenue Louise

De Louizalaan 347 en de Sipo–SD van Brussel
Lieven Saerens
p. 132-145
Traduction(s) :
De Louizalaan 347 en de Sipo–SD van Brussel [nl]

Résumés

Dans cet article, sera d’abord analysée la naissance, dans l’Allemagne nazie, du Reichssicherheitshauptamt (RSHA, l’Office central de la sécurité du Reich) dont dépend sous l’Occupation la Sipo-SD (Sicherheitspolizei und Sicherheitsdienst), la police SS de Bruxelles. Ensuite, seront évoquées la Belgique occupée et l’installation de la Sipo-SD. Dans la foulée, nous traiterons spécifiquement de la Sipo-SD. Dans une quatrième partie, nous nous concentrerons sur la Sipo-SD au 347 de l’avenue Louise. Une dernière dressera le tableau de l’enquête réalisée après-guerre à l’encontre de la Sipo-SD de Bruxelles ainsi que des demandes en dommages et intérêts des propriétaires d’origine de l’immeuble à appartements du 347 de l’avenue Louise. Une attention particulière sera portée aux rapports d’expertise des caves.

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Texte intégral

Je remercie Fabrice Maerten pour la traduction et la relecture scientifique.

  • 1 Les dossiers contiennent beaucoup d’informations de l’époque sur l’Endlösung voir Lieven Saerens, R (...)

1Nous avons examiné de nombreux dossiers de l’auditorat général, la juridiction militaire responsable après-guerre de la poursuite des collaborateurs et des criminels de guerre. Le dossier le plus important fut celui de la Sipo-SD de Bruxelles, composé de 28 cartons (soit environ 4 mètres linéaires d’archives). Ces cartons contiennent entre autres des informations sur la persécution des Juifs (739 témoignages, dont environ 330 se rapportent à la période du 347 de l’avenue Louise)1, l’arrestation de résistants (552 témoignages d’arrestations individuelles ; des témoignages de résistants arrêtés en groupe, comme ceux d’une cinquantaine de Partisans Armés capturés en 1944), l’enquête sur les membres allemands de la Sipo-SD arrêtés (Franz Straub et compagnie) et la structure de la Sipo-SD. Sur ce plan, notre enquête est tout à fait innovante. Les renseignements retrouvés dans les Archives Générales du Royaume concernant les Dommages de guerre fournissent, eux aussi, des informations totalement inédites.

le Reichssicherheitshauptamt dans l’Allemagne nazie

  • 2 Shlomo Aronson, Reinhard Heinrich und die Frühgeschichte von Gestapo und SD, Stuttgart, Deutsche Ve (...)

2Le 27 septembre 1939, après l’attaque de la Pologne, le Reichsführer-SS et chef de la police Heinrich Himmler fonde dans l’Allemagne nazie le Reichssicherheitshauptamt (RSHA), une structure SS (Schutzstaffeln, sections de protection du parti nazi). Le RSHA est un exemple type de l’écheveau des diverses instances de l’Allemagne nazie. Le nouvel organisme constitue le service central de renseignement et de sécurité du Reich. Il est placé sous la direction de Reinhard Heydrich, jusqu’alors chef du Sicherheitsdienst (SD, service de sécurité) et de la Geheime Staatspolizei (Gestapo, police secrète de l’État). En 1943, le SS-Obergruppenführer Ernst Kaltenbrunner succède à Heydrich. Trois services de police sont rassemblés au sein du Reichssicherheitshauptamt2 :

  • Le Sicherheitsdienst (SD, un service de renseignement idéologique et politique œuvrant pour les SS et le parti national-socialiste, qui a pour but de protéger le parti national-socialiste contre ses ennemis, soit à ses yeux les marxistes, les socialistes, les libéraux, les Juifs et les francs-maçons), créé en 1931.

  • La Geheime Staatspolizei (Gestapo), créée en 1933.

  • La Kriminalpolizei (Kripo, police judiciaire, un organe d’investigation pour les crimes non politiques) qui existe depuis longtemps.

  • Auparavant, en 1936, la SD et la Gestapo avaient déjà fusionné sous le nom de Sicherheitspolizei (Sipo), la police politique proprement dite de l’Allemagne nazie.

La Belgique sous l’occupation allemande

  • 3 Alexander von Falkenhausen, Mémoires d’outre guerre. Comment j’ai gouverné la Belgique, Bruxelles, (...)
  • 4 Wolfram Weber, Die innere Sicherheit im besetzten Belgien und Nordfrankreich. 1940-1944, Düsseldorf (...)

3Après sa capitulation, la Belgique est placée sous administration militaire allemande (Militärverwaltung), avec le général Alexander von Falkenhausen comme commandant (Miltärbefehelshaber) et la rue de la Loi comme siège3. von Falkenhausen dirige une Verwaltungsstab (cellule de gestion) qui traite des affaires civiles et administratives ainsi qu’un Kommandostab (état-major) qui s’occupe des affaires militaires. La Verwaltungsstab est présidée par le Militärverwaltungschef Eggert Reeder, le Kommandostab par l’Oberstleutnant Bodo von Harbou4.

4L’administration militaire dispose de services de police militaires : la Feldgendarmerie (FG), chargée de l’ordre public, et la Geheime Feldpolizei. (GFP, police secrète militaire). La FG et la GFP font partie de la Kommandostab de Bodo von Harbou. La GFP a un double but : d’un côté, enquêter sur les méfaits commis par et contre les militaires allemands ; de l’autre, lutter contre les éléments « hostiles à l’Allemagne », comme les communistes, la Résistance, les citoyens juifs. Pour l’échange d’informations, la Geheime Feldpolizei collabore avec l’Abwehr. Dans la pratique, les enquêtes sur des Belges – tant Juifs que non-Juifs – aboutissent très vite à une coopération entre la Feldgendarmerie, la Geheime Feldpolizei et la Sipo-SD. En outre, il existe un service de police administrative, la Polizei, qui relève du Verwaltungsstab d’Eggert Reeder.

  • 5 Albert De Jonghe, “De strijd Himmler-Reeder en de benoeming van een HSSPF te Brussel. Eerste deel : (...)

5Au cours de la première année de l’Occupation, l’administration militaire est soumise à la concurrence de la police SS allemande, composée de représentants du Reichssicherheitshauptamt (RSHA)5. Début juillet 1940, le SS-Sturmbannführer Kriminal-Direktor Franz Straub, sculpteur de formation, arrive à Bruxelles avec un groupe d’environ 20 agents Sipo-SD. Le groupe est officiellement connu sous le nom de Sonderkommando Geheime Feldpolizei (GFP). Bien que les agents portent l’uniforme GFP, le groupe Staub appartient en fait à la Sipo-SD et est en contact avec le RSHA.

6Le 27 juillet 1940, le chef du Reichssicherheitsheithauptamt Reinhard Heydrich se rend à Bruxelles pour l’inauguration officielle de la centrale Sipo-SD, installée après l’approbation de l’Oberkommando des Heeres (OKH), le commandement en chef des forces de terre allemandes. Le Reichsführer-SS et chef de la police Heinrich Himmler nomme un seul représentant pour la Belgique et la France. La fonction de Beauftragte des Chefs der Sipo und des Sicherhetsdiensts für Belgien und Frankreich est remplie par le SS-Brigadeführer dr. Max Thomas, un psychiatre. Thomas dispose de deux Dienststellen (sièges), un à Paris et l’autre à Bruxelles. Celui de Bruxelles est, comme l’administration militaire, également compétent pour le nord de la France (Nord et Pas-de-Calais). À partir de décembre 1941, les Dienststellen de Bruxelles et Paris se développeront indépendamment l’un de l’autre et seront directement soumis au Reichssicherheitshaumptamt.

7La Sipo-SD, composée de membres de la Kripo, du SD et de la Gestapo, doit, en Belgique occupée, « assurer l’ordre politique du national-socialisme allemand. » Comme dans l’Allemagne nazie, l’unité comporte six Abteilungen (sections), elles-mêmes subdivisées en domaines et services. Les sections I et II se chargent, en principe, de l’administration. En Belgique, par contre, la section II s’occupe avant tout de la persécution des Juifs et des enquêtes relatives aux activités de la franc-maçonnerie et des « Églises ». L’organigramme de la Sipo-SD en Belgique se présente au départ comme suit :

  1. Section I : Administration.

  2. Section II : Affaires juives, franc-maçonnerie et ecclésiastiques.

  3. Section III (Sicherheitsdienst) : Espionnage ; par la suite, elle s’occupera aussi des réfractaires au travail organisé militairement.

  4. Section IV (Gestapo) : Agitation communiste et socialiste. Agitation des mouvements de droite et libéraux. Étrangers : passeports – rapatriement en Belgique – recensement des étrangers vivant en Belgique. Fichier général.

  5. Section V (Kripo) : Affaires criminelles, c’est-à-dire vols, recherches d’évadés, etc. Fraude.

  6. Section VI : Nationalité et espionnage commercial.

8Les arrestations et les rafles organisées par la Sipo-SD se déroulent généralement la nuit et sont en principe menées par section. En pratique, cela aboutit souvent à une coopération avec des membres d’une autre section. Pendant les actions de grande envergure, au cours desquelles un groupe entier de résistants est arrêté, sont aussi engagées, à côté de tous les membres de la Sipo-SD, la Geheime Feldpolizei et la Feldgendarmerie. Cette collaboration est également mise en place pour des rafles de Juifs. La Sipo-SD est tristement célèbre pour ses « interrogatoires renforcés » et les mauvais traitements, physiques et psychologiques. On reviendra sur cet aspect dans le chapitre concernant les procès d’après-guerre et les témoignages.

La SIPO-SD à Bruxelles

9Le premier chef du poste de Bruxelles est le SS-Sturmbannführer (major) und Oberregierungsrat Karl Hasselbacher, un docteur en droit. Après sa mort le 13 septembre 1940 dans un accident de voiture, il est remplacé par le SS-Sturmbannführer und Oberregierungsrat Constantin Canaris, lui aussi docteur en droit et historien. En novembre 1941, lui succède le SS-Sturmbannführer und Oberregierungsrat Ernst Ehlers, un médecin qui en 1940 faisait partie du staff des Einsatzgruppen B opérant en Biélorussie. Début 1944, Canaris reprend la direction du poste.

10Au total, durant toute l’Occupation, au moins 550 Allemands travaillent pour la Sipo-SD de Bruxelles. Ils sont au minimum 127 dans les sections I et II, 64 dans la section III, 216 dans la section IV, 61 dans la section V et 25 dans la section VI. Pour au moins 25 Allemands, la justice d’après-guerre n’a pu découvrir dans quelle section ils avaient précisément servi. De ces chiffres, il apparaît clairement que la section IV (Gestapo) est la plus fournie en personnel et que, par conséquent, elle était alors considérée comme très importante.

11Outre les Allemands, des collaborateurs belges font également partie du personnel de la Sipo-SD. Il existe ainsi un Wachzug (Corps de garde) de la Sipo-SD, qui, en plus d’Allemands, est constitué en grande partie de SS flamands, comme l’Anversois Lode Van Kol. Au total, 25 Allemands au moins font partie du Corps de garde au cours de l’Occupation. Les membres allemands et flamands du Corps de garde de Bruxelles sont aussi utilisés comme gardiens à la caserne Dossin à Malines (d’où les Juifs sont déportés) et à Breendonk. Par la suite, des SS flamands servent également dans le FLAK Flugabwehrkanone (canons antiaériens), dont des canons sont installés au-dessus des bâtiments de la Sipo-SD. Parmi eux, l’Anversois Frans Verbert.

  • 6 Sandra Maes, De Duitse militaire contraspionage in bezet België tijdens de Tweede Wereldoorlog. V-m (...)

12Des collaborateurs sont aussi liés aux différentes sections de la Sipo-SD comme traducteurs-interprètes et membres de la SS. Ce sont, pour la plupart, des Flamands, comme l’antisémite anversois Emiel Francken et Frans Van Hul. Enfin, il y a encore des V-Männer, des « hommes de confiance » qui travaillent pour la Sipo-SD. Parmi eux figurent Prosper De Zitter de Flandre-Occidentale6 et l’Anversois Emiel Van Thielen (alias Max Günther).

  • 7 Voir aussi Lieven Saerens, Rachel, Jacob, Paul et les autres. Une histoire des Juifs à Bruxelles, B (...)

13Mais il y a aussi pas mal de dénonciateurs juifs, comme Icek Glogowski (« Le Gros Jacques »)7. Si « Le Gros Jacques » parle encore aujourd’hui à l’imagination dans les milieux concernés, il n’est pas le seul Juif à dénoncer ses coreligionnaires. On les compte à l’époque par dizaines, il s’agit souvent de réfugiés allemands des années 1930.

  • 8 Guido Provoost, Ward Hermans, Anvers, Rockox, 1977, p. 153.

14Le quartier général de la Sipo-SD de Bruxelles est d’abord établi à l’Hôtel des Croisades à la Gare du Nord, puis à l’avenue des Tilleuls (à Uccle, dans la maison d’un sénateur qui a décampé), un peu plus tard avenue Ernestine n° 2 (à Ixelles), il déménage rapidement avenue Louise8. À cette dernière adresse, la Sipo-SD occupe les bâtiments portant les numéros 372, 453 et 510. Les services des sections I et II sont au départ logés aux numéros 453 et 510. Le n° 453 (Résidence Belvédère) héberge aussi à l’origine la section IV, tandis qu’au n° 510 sont également établis pendant toute l’Occupation la section V et une partie du parc automobile. Un autre parking de la Sipo-SD se situe au n° 518 de la même avenue. Toujours dans l’avenue Louise, sont hébergés pendant toute l’Occupation au n° 372 la section III, ainsi sans doute que le Corps de garde.

Iceck Glogowski, alias « Le Gros Jacques »

Iceck Glogowski, alias « Le Gros Jacques »

© Auditorat général

15Outre la Sipo-SD, d’autres services de la SS allemande sont installés avenue Louise. Ainsi, depuis le 1er avril 1942, est établi au n° 412 le poste Jungclaus, dirigé par le Höhere SS-und Polizeiführer Richard Jungclaus. Il dispose de la direction effective de toutes les organisations politiques et paramilitaires de la SS, entre autres les SS-Vlaanderen, et la Duitsch-Vlaamsche Arbeidsgemeenschap (DeVlag), (le siège de Rex est également établi à la même adresse à partir de 1944). Il est en même temps responsable du recrutement pour les Waffen-SS (combattants sur le front de l’Est, et collaborateurs militaires belges).

Le 347 de l’avenue Louise

16Le 20 janvier 1943 a lieu le fameux raid du pilote belge de la RAF Jean de Selys Longchamps sur le quartier général de la Sipo-SD, au numéro 453 de l’avenue Louise. Après avoir mitraillé le bâtiment, il jette deux bombes de 250 kilos sur ce dernier, détruisant une partie des archives de la Sipo-SD. Cinq membres de la Sipo-SD meurent dans l’attaque. Parmi eux, le chef de la section II, Alfred Thomas. Il y a aussi quatre blessés graves.

  • 9 Archives générales du Royaume (dépôt Cuvelier) : Dommages de guerre, Dossier 20.28.739, Georges Fle (...)

17Suite au raid, ce bâtiment est perdu pour la Sipo-SD qui occupe à partir de février-mars 1943 le bâtiment du 347 de l’avenue Louise. Les habitants d’origine, parmi lesquels d’ailleurs plusieurs personnes d’origine juive ou ayant des ancêtres juifs, sont « par ordre de l’Ortskommandantur [sic = Oberfeldkommandantur, LS] » (le représentant local, bruxellois, de l’administration militaire) obligés, le 3 février 1943, de quitter l’immeuble endéans 48 heures. Les déménageurs sont imposés par l’autorité allemande9.

  • 10 Archives de la Ville de Bruxelles : Dossier réquisition allemande ; n° 4663.

18La réquisition effective commence le 6 février 1943. Ce jour-là, les habitants du 347 de l’avenue Louise font faire par l’expert Servais une description des lieux de tous les partants de cet immeuble à appartements. C’est une donnée importante : ces descriptions permettent, après la guerre, de réaliser un inventaire minutieux des dégâts occasionnés par la Sipo-SD et des transformations subies dans les caves. Apparemment la Sipo-SD a emménagé définitivement dans l’immeuble situé au 347 de l’avenue Louise le 15 février 194310. Cela a sans doute encore pris quelques semaines pour transformer les caves en cellules.

19Dorénavant l’organigramme de la Sipo-SD se présente comme suit :

  1. Section I : Organisation, Affaires de personnel, budgétaires et économiques (sous la direction du SS-Hauptsturmführer Hofmeister).

  2. Section II : Appointements, frais de voyage ; Caisse ; Logements, besoins du service, habillement, avoirs saisis, etc. ; Ravitaillement ; T.S.F. ; Télégraphie et Téléphonie ; Service de roulage et d’armement (sous la direction du SS-Obersturmführer Lüdtke).

  3. Section III : Vie publique (Droit, Constitution, Législation, Administration, etc. ; Vie nationale et santé publique ; Vie intellectuelle ; Économie nationale ; Secrétariat), sous la direction du SS-Sturmbannführer Humnitzsch.

  4. Section IV Gestapo : Recherche et répression des adversaires (Communisme et marxisme, falsifications de passeports, propagande ennemie et Police belge ; Église et sectes politiques ; Franc-maçonnerie ; Juifs ; Affaires d’émigrés et d’étrangers, passages clandestins de la frontière et falsification de passeports et laissez-passer s’y rapportant ; Répression d’organismes de résistance et de bandes ; Fichiers, Dossiers, Détention préventive et affaires de Légion étrangère ; Secrétariat) sous la direction du SS-Sturmbannführer Franz Straub.

  5. Section V : Répression de crimes (Affaires générales de Police criminelle ; Commerce clandestin ; Service de recherches ; Service d’identification ; Laboratoire de criminologie ; Secrétariat) sous la direction du SS-Hauptsturmführer Reiner.

  6. Section VI : Affaires de renseignements sous la direction du SS-Obersturmführer Laurenz.

20Au 347 de l’avenue Louise sont hébergés (au minimum) les services suivants :

  • Section I

  • Section IV (Gestapo)

  • Section VI

21Les plus petites sections I et VI s’installent probablement au 1er étage.

453 avenue Louise à Bruxelles

453 avenue Louise à Bruxelles

© Georges Boschloos / Fondation Auschwitz

22Au 2e étage se fixe la section IV B. celle-ci se compose de trois sous-sections :

  • Section IV B 1 : Églises et sectes politiques, sous la direction du SS-Obersturmführer Gerhard Seeck.

    • 11 Fritz Erdmann (Reppersdorf bei Jauer, 23.3.1900-Duisburg, 20.5.1955).

    Section IV B 2 : Franc-maçonnerie, sous la direction du SS-Hauptsturmführer Fritz Erdmann11.

  • Section IV B 3 : Juifs, sous la direction du SS-Hauptsturmführer Felix Weidmann.

23Aux 3e et 4e étages s’établit la section IV E (Fichiers, Dossiers, Détention préventive et affaires de Légion étrangère), sous la direction du SS-Obersturmführer Wilhelm Debus. C’est là aussi, semble-t-il, que se situe le bureau du chef de la Gestapo, Franz Straub.

24Aux 5e et 6e étages prend place la section IV D (Répression d’organismes de résistance et de bandes) sous la direction du SS-Hauptsturmführer Heinz Volkmann.

Plan des caves du 347-349 de l’avenue Louise

Plan des caves du 347-349 de l’avenue Louise

© Archives générales du Royaume

25Les 7e, 8e et 9e étages sont investis par la section IV A (Communisme et marxisme, falsifications de passeports, propagande ennemie et Police belge).

26Aux 7e et 8e étages est aussi installée la Commission spéciale, qui était auparavant établie rue de l’Aurore. Elle a été mise sur pied par Franz Straub, le chef de la section IV (Gestapo) etaétécrééepour rendre plus efficace la coopération de la Sipo-SD avec la Geheime Feldpolizei en cas d’attentats commis contre la Wehrmacht.

27Le 10e étage est occupé par la section IV C (il est possible qu’elle occupe aussi une partie du 9e étage) : Affaires d’émigrés et d’étrangers, passages clandestins de la frontière et falsification de passeports et laisser-passer s’y rapportant.

28À l’arrivée des Alliés, le 2 septembre 1944, la Sipo-SD abandonne le bâtiment du 347 de l’avenue Louise. Sur l’accotement du Jardin du Roi situé à proximité, ils fusillent encore un prisonnier. Après la Libération, un quartier général britannique y est installé pendant un certain temps, plus précisément du 16 septembre 1944 au 7 décembre 1946.

Après-guerre : la poursuite par l’auditorat général de la Section IV de la SIPO-SD

29Les procès belges contre des criminels de guerre allemands ne commencent que fort tard : il faut les identifier, les localiser et les faire extrader, ce qui prend énormément de temps. De plus c’est en 1947 seulement que la Belgique se dote d’une loi autorisant les tribunaux militaires à juger des crimes de guerre commis par des étrangers.

30Selon le dossier judiciaire d’après-guerre de l’auditorat général, les méthodes utilisées par la Sipo-SD enfreignent clairement « les lois et pratiques de la guerre ». Les « traitements et méthodes » utilisés sont « criminels ». Pour questionner les prisonniers, on va jusqu’à l’« interrogatoire renforcé », ce qui est un euphémisme pour ne pas parler de torture. Au minimum, les détenus sont soumis à des coups et à des blessures lors de l’« interrogatoire ».

31Par ailleurs, une enquête est ouverte au sujet des activités de la Sipo-SD de Bruxelles, enquête appelée officieusement « l’affaire Sipo-Bruxelles ». Comme c’est le cas par exemple pour Anvers, l’enquête se limite finalement à la section IV de la Sipo-SD, la Gestapo, « cette police si tristement célèbre », et tout spécialement la section IV A. La toute grosse majorité des 543 membres allemands de la Sipo-SD de Bruxelles dont la justice connaît les noms appartient à la section IV. En fin de compte, la justice ouvre une enquête sur 66 d’entre eux. Dix sont condamnés, dont le chef de la Sipo-SD de Bruxelles Constantin Canaris. Un autre chef, Ernst Ehlers, parvient à échapper à la justice et le premier chef de la Sipo-SD de Bruxelles, Karl Hasselbacher, décède au début de la guerre. Sept des condamnés ont exercé leur activité au 347 de l’avenue Louise. Outre le chef de la section IV, Franz Straub, cela concerne le Kriminal angestelte-Chauffeur Helmut Vits, le Kriminal Sekretar Emiel Spaete, le Kriminal Angestelte Henrich Cuypers et le Kriminal Sekretar Walter Altenhof, Wilhelm Krumkamp (IV D), Max Boden (IV B), Otto Siegburg (IV B et IV C) et Philipp Schmitt. Dans les faits, tous seront déjà libérés vers 1951.

32Élément non moins important : la justice militaire ne peut poursuivre les membres de la Sipo-SD que pour des faits qui « tombent sous l’application de l’un ou l’autre article de notre Code pénal national. » C’est pourquoi « les membres de la Sipo-SD ne sont poursuivis que pour les conséquences induites par leurs méthodes ; pour les coups et blessures occasionnés par les interrogatoires renforcés. » Cela ne signifie pas que l’auditorat général ne travaille pas de manière approfondie. Il recherche consciencieusement les témoignages des anciens prisonniers de la section IV : d’une part, les membres de la Résistance, et d’autre part, les Juifs. Pour chaque groupe, un modèle de questionnaire est établi où l’avenue Louise est explicitement évoquée et l’arrêté(e) doit préciser la nature et les conséquences des sévices subis. Le questionnaire est envoyé aux commissaires de police et aux commandants de gendarmerie de tout le pays.

  • 12 Auditorat général : Dossier Otto Siegburg.

33Des quelques milliers de témoignages recueillis par la justice d’après-guerre, il apparaît incontestablement que les caves du 347 de l’avenue Louise ont été transformées en cellules et qu’elles ont régulièrement été le cadre de tortures. Certains prisonniers en sont même morts. Ainsi, le 24 juin 1949, un ancien collaborateur de la Kripo, le Belge Antoine Deaumerie (Ostende, 20 mai 1913) explique à J. Warnant (substitut de l’auditeur militaire) qu’« un Israélite est mort dans les caves de la Gestapo avenue Louise n° 347 en juin 1943. » (auditorat général : Dossiers Sipo-SD de Bruxelles, carton 12) Il s’agit ici plus précisément du Juif Hilel Erner, 43 ans au moment des faits, arrêté par l’Allemand Otto Siegburg de la section juive (section IV B). Erner est tellement maltraité par Siegburg qu’il décède de ses blessures dans la cave peu de temps après avoir été roué de coups12.

34Un partisan, Emile Meerlandt, ne survit pas, début avril 1944, à son interrogatoire au 9e étage. La Sipo-SD affirme qu’il s’est suicidé en sautant par la fenêtre. Le rapport d’expertise médicale d’après-guerre aboutit cependant à une autre conclusion :

Il nous paraît difficile d’accepter l’affirmation de la police allemande selon laquelle Meerlandt aurait sauté du 9e étage, soit d’une hauteur d’environ 40 mètres. Les fractures du crâne, les fractures du bras gauche et des deux avant-bras peuvent naturellement être la conséquence d’une chute. Ce qui nous paraît anormal, c’est qu’une chute d’une telle hauteur n’ait pas provoqué de fracture des côtes, de la colonne vertébrale, du bassin ou des membres inférieurs. On ne peut pas exclure que Meerlandt ait été la victime de violences graves dont les fractures du crâne et des membres supérieurs auraient pu être la conséquence.
(Rapport autopsie Meerlandt par les docteurs Marcel Heger et Paul Enderlée, requis par l’auditorat militaire le 27 avril 1949, et le 22 juin 1949).

35Mentionnons aussi l’arrestation, au printemps 1943, des chefs des Partisans Armés, qui sont ensuite amenés dans le bâtiment de la Gestapo à Bruxelles, 347 avenue Louise. Dans l’exposé des faits tel qu’il est établi après-guerre par le substitut de l’auditeur militaire de Bruxelles, il est indiqué :

  • 13 Auditorat militaire auprès du Conseil de guerre permanent de Bruxelles. Exposé des faits dans l’aff (...)

Pour ce qui a trait aux mauvais traitements subis dans le cadre de cette affaire, il convient d’attirer particulièrement l’attention sur le fait que les femmes, qui, dans cette affaire, avaient été soumises à des tortures, sont restées pendant des jours et même des semaines enfermées dans les caves de la Sipo dans des conditions indescriptibles. Ce n’est que lorsque les traces de violence avaient en partie disparu qu’elles furent transportées à la prison de Saint-Gilles. […] Messieurs Devoitille, Jospa et Vandeville ont contracté une incapacité de travail permanente. La bronchite chronique et l’asthme de la témoin Korn Adèle trouvent leur origine dans l’enfermement dans des cellules froides et manquant d’hygiène d’une femme qui auparavant avait été rouée de coups sur tout son corps13.

36La prison de Saint-Gilles constituait selon toute vraisemblance une solution de rechange quand les cellules de la Sipo-SD du 347 de l’avenue Louise étaient remplies. Ce même exposé des faits ne laisse planer aucun doute sur le fait que durant toute l’Occupation la Gestapo a appliqué l’« interrogatoire renforcé » dans ses locaux (et donc aussi au 347 de l’avenue Louise). À ce sujet, il est notamment écrit dans l’exposé des faits que :

  • 14 Ibid., p. 12.

de limites [à l’interrogatoire renforcé], il n’en était pas question et encore moins de l’intervention d’un médecin dans les cas graves. Il n’est que trop évident que seul comptait le but : la destruction de la Résistance et pour y arriver, tous les moyens devaient être utilisés14.

  • 15 Auditorat général : Dossiers Sipo-SD de Bruxelles, carton 18.

37Nous disposons également de la déclaration d’après-guerre de Denise Caenen, qui affirme avoir été membre des Milices patriotiques du Front de l’indépendance. Dans les bureaux de la Gestapo, déclare-t-elle, « j’ai subi divers mauvais traitements, à savoir : J’ai perdu toutes mes dents suite aux coups reçus. J’ai en outre été frappée avec une matraque sur tout le corps. Ces mauvais traitements ont duré de manière ininterrompue pendant trois jours. » Caenen est transférée le 15 juin 1944 au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück, en Allemagne. « Du fait de ma captivité et des mauvais traitements subis, j’ai obtenu une invalidité de 50 %. » Le 23 avril 1945, elle est libérée de Ravensbrück et rapatriée vers la Suède. Le 26 juin 1945, elle est ramenée en Belgique15.

38La Juive Juda Rozenberg, elle aussi, a « subi des sévices, c’est-à-dire des coups de poing » (Ibid.). Ernest Abel, un négociant en laine juif, témoigne de la brutalité de Fritz Erdmann, chef de la section juive :

Erdmann m’a frappé au front et au cuir chevelu, me provoquant une blessure à sang coulant, il m’a aussi porté plusieurs coups de fouet. […] J’étais battu jusqu’à évanouissement.

39George Beigne, arrêté dans la région bruxelloise dans la nuit du 15 au 16 mai 1944, est interrogé à plusieurs reprises au 347 de l’avenue Louise :

J’ai été battu à coups de matraque au point que durant quinze jours j’ai dû m’étendre sur le ventre pour pouvoir dormir. Un moment donné au cours de ces interrogatoires, les Allemands m’ont enfoncé la tête dans un bassin plein d’eau jusqu’à ce que je perde connaissance. Lors de mon dernier interrogatoire j’ai été suspendu les bras derrière le dos et battu dans cette position.

40Le 15 avril 1944, l’instituteur de 28 ans Lodewijk Verheyen est arrêté à Buizingen (Halle). Il est immédiatement emmené au 347 de l’avenue Louise, où il est interrogé dans la chambre 111, « bourré de coups et frappé sur mes parties intimes. » La Juive Rachele François, arrêtée le 13 avril 1944 près du rond-point du boulevard du Souverain à Auderghem, est interrogée au 9e étage et raconte : « [Un homme] avait mis sa veste sur ma figure pour sans doute étouffer mes cris. J’ai été rouée de coups au point que je ne savais plus m’asseoir. »

41Ces mauvais traitements laissent des traces dans les caves du 347 de l’avenue Louise, comme le signale Nelly Pardons : « Je puis vous dire qu’on m’a obligée le jour de mon arrestation à nettoyer les cellules à l’avenue Louise. À cette occasion, j’ai remarqué que dans plusieurs cellules il y avait du sang sur les murs. »

Les demandes de dédommagement et les inscriptions dans les caves

42Que les caves aient effectivement été transformées en cellules ressort également de manière évidente des dossiers « Dommages de guerre » introduits après-guerre auprès du ministère concerné (Ministère des Travaux publics et de la Reconstruction) par les habitants et/ou propriétaires du 347 de l’avenue Louise. Tous les dossiers n’ont pas été conservés en entier, mais du fichier tel qu’il a pu être retrouvé aux Archives générales du Royaume, rue du Houblon à Bruxelles (dépôt Cuvelier), il apparaît que tous les habitants du 347 de l’avenue Louise ont introduit après la guerre une demande de dédommagement. Des géomètres experts immobiliers ont, en principe, dressé un procès-verbal d’état des lieux détaillé. Les dégâts imputables aux Allemands y sont consciencieusement décrits. Une description des caves y est aussi chaque fois donnée.

43Mentionnons ainsi le dossier de Jacques Levy-Morelle (propriétaire des appartements des 5e et 6e étages), établi par A. Edouard Adam et Fernand Coenraet, « tous deux géomètres experts immobiliers, légalement admis et assermentés par-devant le Tribunal de Première Instance séant à Bruxelles. » Il porte comme titre « Procès-verbal d’État de Lieu [Bruxelles, le 3 et jours suivants mars 1946] – Dégradations allemandes ». Dans leur introduction, les experts renvoient à l’état des lieux dressé au moment de la prise de possession du bâtiment par les Allemands le 6 février 1943. Les pages 35 à 37 du rapport de 1946 fournissent une description détaillée de la situation des caves appartenant au 6e étage :

Première cave : elle se trouve la première à front de rue et vers le n° 345.
Dimensions 4,90 m x 3,00 x 3,00.
424. Le badigeon à la chaux recouvrant le plafond, les murs et les caveaux est fortement souillé et poussiéreux.
425. La porte à claire-voie séparant la cave a été enlevée.
[…]
427. Elle a été garnie de chaque côté d’une tôle métallique.
428. Le panneau supérieur de cette porte a été découpé pour permettre la pose d’un judas.
[…]
431. La peinture de la porte est complètement dégradée par la pose des tôles et d’inscriptions diverses.
Note : Le pavement de cette cave est fortement souillé. Cette cave a servi comme cachot.

Deuxième cave (contigüe à la précédente) 4,90 m x 1,60 x 3,00.
432. Le badigeon du plafond et des murs est fortement souillé et dégradé par des inscriptions.
433. La porte de cette cave a été également recouverte en partie d’une tôle métallique sur ses deux faces.
434. Le panneau supérieur de cette porte a été découpé pour permettre la pose d’un judas. Note : Le pavement de cette cave est fortement souillé. Elle a servi de cachot.

44Pour la cave appartenant au 5e étage, la description est presque identique. Le dossier d’Anne De Backer (4e étage) est tout aussi explicite et mentionne le badigeon des caves « fortement souillé et rempli d’inscriptions. »

45Cinquante ans plus tard, lors d’une après-midi d’octobre 1994, le cinéaste et historien André Dartevelle redécouvre les inscriptions. Cette découverte débouche en 1996 sur la publication Avenue Louise n° 347. Dans les caves de la Gestapo. In de kelders van de Gestapo, un ouvrage publié par le Centre de recherches et d’études historiques de la Seconde Guerre mondiale (l’actuel CegeSoma) et rédigé tant par Dartevelle que par l’historienne Isabelle Ponteville. Trente photos des inscriptions visibles dans les caves de l’avenue Louise sont publiées dans le livre. Selon les auteurs :

Les inscriptions sont incisées dans la couche de chaux et non dans la brique, à l’aide de petits instruments métalliques, pointes de plumes, épingles, attaches cousues dans les vêtements, parfois avec l’ongle, ce qui les rend maladroites. Les détenus qui ont laissé une trace de leur passage ont parfois écrit leur message ou leur nom dans le bas du mur ce qui indique leur position assise ou couchée à même le sol. La plupart des graffitis ont été réalisés à hauteur d’yeux, debout. Plus rarement le bras tendu (p. 42).

46En 2011, Sarah Timperman, archiviste à la Fondation Auschwitz, retrouve fortuitement dans les archives du Musée royal de l’Armée (Bruxelles) les photos des inscriptions dans les caves du 347 de l’avenue Louise et des caves en général prises au moment de la Libération en septembre 1944 par les soldats canadiens. Son collègue, l’historien de l’art Daniel Weyssow, présente ces photos lors de la journée d’étude Les caves de la Gestapo. Reconnaissance et conservation organisée le 21 octobre 2011 par la Fondation Auschwitz.

Messages écrits par les prisonniers sur le mur d’une cellule au 347

Messages écrits par les prisonniers sur le mur d’une cellule au 347

© Collection Musée royal de l’Armée – Bruxelles, D.1.66.70 (7064).

47Enfin, à la demande du Conseil de Copropriété de l’immeuble Queen situé au 347 de l’avenue Louise, une visite des caves est organisée le 1er juin 2015 pour constater de visu l’existence ou non de graffitis sur les murs des caves de l’immeuble. Sont présents lors de cette visite, outre l’auteur de ces lignes et son collègue Fabrice Maerten, Roland Cracco, un des propriétaires de l’immeuble, Stéphane Nopère, le conseil juridique de la Copropriété, et plusieurs personnes travaillant pour la Direction des Monuments et Sites de l’Administration de l’Aménagement du territoire et du logement, du Ministère de la Région de Bruxelles-Capitale, notamment Harry Lelièvre.

48Lors de cette visite, 24 caves sur 26 sont accessibles. Si aucune inscription n’est visible dans les locaux techniques, dans les couloirs, et dans certaines caves individuelles, des graffiti datant avec quasi-certitude de la période 1943-1944 sont repérés (parfois facilement, parfois difficilement), avec l’aide des délégués de la Direction des Monuments et Sites, dans 9 caves individuelles.

Inscriptions au 453 avenue Louise

Inscriptions au 453 avenue Louise

© Daniel Weyssow / Fondation Auschwitz

Conclusion

49Après le bombardement de Jean de Selys Longchamps des locaux Sipo-SD au 453 de l’avenue Louise, le service s’installe dans les appartements du 347. Les caves de l’immeuble seront bientôt transformées en cellules où les détenus, des résistants et des Juifs, sont frappés à sang et torturés, comme le soulignent de nombreux témoignages récoltés dans l’immédiat après-guerre dans le cadre de l’enquête judiciaire contre les membres allemands de la Sipo-SD de Bruxelles. Pour résister à cette inhumanité, de nombreux détenus ont laissé des inscriptions sur les murs, les plafonds et les portes des caves. Certaines sont encore visibles en 2015 ; d’autres pourraient être retrouvées sous le badigeon. Il ne fait dès lors aucun doute pour nous que ces caves constituent un important « site » historique qu’il convient de préserver en mémoire des événements tragiques qui s’y sont déroulés entre février-mars 1943 et septembre 1944.

50En janvier 2016 les caves sont enfin classées.

51Le siège de la Sipo-SD à Anvers au Della Faillelaan (août 1940-octobre 1943) existe toujours. En 1967 on y installe le siège de l’évêché d’Anvers, la villa appartient désormais à une personne privée. D’après le défunt Willy Van Puyvelde, ancien commissaire de police à Boechout et enquêteur fervent, les caves seraient encore intactes et couvertes d’inscriptions. N’est-il pas temps d’envisager de classer aussi ce lieu de mémoire ?

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Bibliographie

Sources

Archives Générales du Royaume (Dépôt Cuvelier)

Auditorat général : Dossiers Sipo-SD de Bruxelles (Straub et consorts : Vits, spaete, Cuypers, Altenhof). 28 cartons.

Auditorat général : Dossier Felix Weidmann (chef de la section juive de la section IV. Ce dossier contient aussi des PV relatifs au chef de la Sipo-SD de Bruxelles Ernst Ehlers et à d’autres chefs de la section juive comme Kurt Asche et Fritz Erdmann). 1 carton.

Auditorat général : Dossier Emiel Francken (interprète de la section IV). 1 carton.

Auditorat général : Dossier Reggie Claeys (interprète de la section IV). 1 carton.

Auditorat général : Dossier Otto Siegburg (section IV). 1 carton.

Dommages de Guerre : Dossiers n° s 20.28.739 (Georges Fleurix) ; 20.77.252 (J. Levy-Morelle) ; 20.89.621 (Mme Lucien Niguet) ; 20.89.623 (Guillaume Wallenborn) ; 20.89.625 (Entreprises Edouard François) ; 20.89.627 (veuve Houtman) ; 20.89.629 (veuve Emile Souweine-Cohen) ; 20.89.631 (Mary Partaes) ; 20.89.633 (Charles Semal) ; 20.89.635 (Mme Jules De Backer) ; 20.89.637 et 23.39.418-23.39.424 (J. Levy-Morelle) ; 23.39.455-23.39.457 (veuve Lucien Niguet).

Archives Service des Victimes de la Guerre

« Fichier des Juifs » (établi par la Sipo-SD de Bruxelles).

Dossiers Sipo-SD (n° Tr. 202.411 – R. 497).

Archives CegeSoma

Procès Constantin Canaris (chef de la Sipo-SD de Bruxelles : AA 278). 55 cartons.

Archives Pierre Beeckmans : a) Fiches des Juifs inscrits par l’Association des Juifs en Belgique (Avenue Louise : AA 1314, n° 396/36) b) Dossiers Bureau voor Ras-en Sibbekundige Opzoekingen / Bureau des Études raciques et généalogiques (« mariages mixtes » : AA 1314, n° s 362-368).

Fichier d’alarme de l’Oberfeldkommandantur Brussel : fiches des services allemands à Bruxelles (AA 500). 1 fichier.

Dossier d’enquête Isabelle Ponteville : Avenue Louise, n° 347. 1 boîte d’archives.

Auditorat militaire auprès du Conseil de guerre permanent de Bruxelles. Exposé des faits dans l’affaire Straub – Vits – Spaete –Cuypers et Altenhof, [1951] : AA 310.

Archives de la Ville de Bruxelles

Plan des caves Avenue Louise (n° 737.45.74).

Dossier réquisition allemande : Avenue Louise, n° 347, n° 4663. Remarque : en 1996, Isabelle Ponteville a encore pu consulter tout le dossier. Actuellement, on ne retrouve plus que les fiches des propriétaires de l’immeuble du 347 de l’avenue Louise, avec renvoi vers le dossier.

Dossier réquisition alliée : Avenue Louise, n° 347, n° 4663.

Publications

[Bloch, Alain]. [Biographie Henri Levy-Morelle], s.d. (non publié).

Dartevelle, André & Ponteville Isabelle (1996) : Avenue Louise n° 347 Louiszalaan. Dans les caves de la Gestapo. In de kelders van de Gestapo, Bruxelles, CEGES, 1996.

Gerhard, Paul & Mallmann, Klaus-Michael (Hrsg.) (2000) : Die Gestapo im zweiten Weltkrieg. “Heimatfront” und besetztes Europa, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft.

Saerens, Lieven (2007) : « La politique antijuive de l’Allemagne nazie (1933-1945) », in Rudi Van Doorslaer (dir.), Emmanuel Debruyne, Frank Seberechts, Nico Wouters, avec la participation de Lieven Saerens, La Belgique docile. Les autorités belges et la persécution des Juifs en Belgique durant la Seconde Guerre mondiale, Bruxelles, CEGES, p. 21-46.

Saerens, Lieven (2014) : Rachel, Jacob, Paul et les autres. Une histoire des Juifs à Bruxelles, Bruxelles, Mardaga.

Steinberg, Maxime & Schram, Laurence (2009) : e.a, Mechlen – Auschwitz 1942-1944, 4 volumes, Malines/ Bruxelles, VUBPRESS.

Weyssow, Daniel (2008) : « Le siège de la Gestapo à Bruxelles. Un non-lieu de mémoire », Questions de communication, série actes, n° 5, p. 195-203 (Actes du colloque « Qualifier des lieux de détention et de massacre » des 8 au 10 novembre 2007).

Weyssow, Daniel (dir.) (2014) : Les caves de la Gestapo. Reconnaissance et conservation, Paris, Kimé.

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Notes

1 Les dossiers contiennent beaucoup d’informations de l’époque sur l’Endlösung voir Lieven Saerens, Rachel, Jacob, Paul et les autres. Une histoire des Juifs à Bruxelles, Bruxelles, Mardaga, 2014, p. 99 ; Ahlrich Meyer, Das wissen um Auschwitz, Paderborn, Ferdinand Schöningh, 2010, p. 95-151.

2 Shlomo Aronson, Reinhard Heinrich und die Frühgeschichte von Gestapo und SD, Stuttgart, Deutsche Verlags-Anstalt, 1971, p. 37-38 - 55-63 ; Edouard Husson, Heydrich et la solution finale, Paris, Perrin, 2008, p. 30-41 ; Peter Longerich, Heinrich Himmler. Biographie, München, Pantheon Verlag, 2008.

3 Alexander von Falkenhausen, Mémoires d’outre guerre. Comment j’ai gouverné la Belgique, Bruxelles, Lucien de Meyer, 1974.

4 Wolfram Weber, Die innere Sicherheit im besetzten Belgien und Nordfrankreich. 1940-1944, Düsseldorf, Droste Verlag, 1978 ; Werner Warmbrunn, The German occupation of Belgium. 1940-1944, New York, Peter Lang Publishing, 1993.

5 Albert De Jonghe, “De strijd Himmler-Reeder en de benoeming van een HSSPF te Brussel. Eerste deel : de Sicherheitspolizei in België”, in Bijdragen tot de Geschiedenis van de Tweede Wereldoorlog, 1974, nr. 3, p. 23-29, 45, 57.

6 Sandra Maes, De Duitse militaire contraspionage in bezet België tijdens de Tweede Wereldoorlog. V-man Prosper Dezitter en zijn groep, licverh, KU Leuven, 1997 ; Gabriël Verbeke, De gewetenloze spion. Prosper Dezitter, de nummer 1 van de Duitse contraspionnage, 1940-1944, De Klaproos, Koksijde, 1998.

7 Voir aussi Lieven Saerens, Rachel, Jacob, Paul et les autres. Une histoire des Juifs à Bruxelles, Bruxelles, Mardaga, 2014 ; Ahlrich Meyer, « Heinrich Rotter. Un “collaborateur juif” sous l’occupation nazie », Les Cahiers de la Mémoire Contemporaine, n° 12, 2016, p. 277-282 ; Auditoraat-Generaal : Dossiers Sipo-SD Brussel, Kaft 21, Alfabetische lijst Joodse indicateurs.

8 Guido Provoost, Ward Hermans, Anvers, Rockox, 1977, p. 153.

9 Archives générales du Royaume (dépôt Cuvelier) : Dommages de guerre, Dossier 20.28.739, Georges Fleurix.

10 Archives de la Ville de Bruxelles : Dossier réquisition allemande ; n° 4663.

11 Fritz Erdmann (Reppersdorf bei Jauer, 23.3.1900-Duisburg, 20.5.1955).

12 Auditorat général : Dossier Otto Siegburg.

13 Auditorat militaire auprès du Conseil de guerre permanent de Bruxelles. Exposé des faits dans l’affaire Straub – Vits – Spaete – Cuypers et Altenhof, [1951] : CegeSoma : AA 310, p. 19-20.

14 Ibid., p. 12.

15 Auditorat général : Dossiers Sipo-SD de Bruxelles, carton 18.

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Table des illustrations

Titre Iceck Glogowski, alias « Le Gros Jacques »
Crédits © Auditorat général
URL http://journals.openedition.org/temoigner/docannexe/image/6584/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 27k
Titre 453 avenue Louise à Bruxelles
Crédits © Georges Boschloos / Fondation Auschwitz
URL http://journals.openedition.org/temoigner/docannexe/image/6584/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 440k
Titre Plan des caves du 347-349 de l’avenue Louise
Crédits © Archives générales du Royaume
URL http://journals.openedition.org/temoigner/docannexe/image/6584/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 159k
Titre Messages écrits par les prisonniers sur le mur d’une cellule au 347
Crédits © Collection Musée royal de l’Armée – Bruxelles, D.1.66.70 (7064).
URL http://journals.openedition.org/temoigner/docannexe/image/6584/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 314k
Titre Inscriptions au 453 avenue Louise
Crédits © Daniel Weyssow / Fondation Auschwitz
URL http://journals.openedition.org/temoigner/docannexe/image/6584/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 232k
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Pour citer cet article

Référence papier

Lieven Saerens, « La SIPO-SD de Bruxelles au 347 de l’avenue Louise »Témoigner. Entre histoire et mémoire, 125 | 2017, 132-145.

Référence électronique

Lieven Saerens, « La SIPO-SD de Bruxelles au 347 de l’avenue Louise »Témoigner. Entre histoire et mémoire [En ligne], 125 | 2017, mis en ligne le 24 décembre 2021, consulté le 21 mai 2025. URL : http://journals.openedition.org/temoigner/6584 ; DOI : https://doi.org/10.4000/temoigner.6584

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Droits d’auteur

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