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AccueilNuméros37-38In MemoriamMarc Bessin (1965–2023)

In Memoriam

Marc Bessin (1965–2023)

Jens Thoemmes et Jean-Marc Ramos

Notes de la rédaction

Avec une profonde tristesse, nous déplorons le décès de Marc Bessin survenu en septembre 2023. En sa qualité de directeur adjoint et membre du comité de rédaction de la revue Temporalités, il nous a soutenus pendant de longues années par sa bienveillance et son engagement constant. Cette perte résonne douloureusement, survenant seulement quelques mois après le départ de notre chère collègue Béate Collet, elle aussi membre du comité de rédaction, en avril 2023.

Texte intégral

1Marc Bessin a marqué de son empreinte l’épopée de la revue Temporalités, en étant l’un des membres fondateurs en 2004.

Un parcours de recherche axé sur les temporalités

2Ayant intégré le CNRS en 1995 à l’âge de 30 ans, Marc a dédié son doctorat à l’institution biographique et a effectué diverses recherches en médico-social. Il a réalisé une enquête socio-ethnographique minutieuse sur les soins carcéraux et a poursuivi au CNRS deux axes majeurs de recherche : l’un focalisé sur les temporalités et catégories d’âge, l’autre sur les prises en charge médico-sociales. Ces deux axes dessinent en réalité deux facettes d’une sociologie de la présence sociale. La primauté du terrain a guidé sa démarche, l’amenant à des immersions profondes pour rassembler des données ethnographiques et mener des entretiens. Il s’est aussi appuyé sur des méthodes quantitatives. Sa réflexion sur les temporalités des engagements, qu’ils soient professionnels ou familiaux, converge vers la notion de présence sociale. Ce concept se rapporte à la flexibilité temporelle, une perspective qu’il avait lancée pendant ses études doctorales. Il a également examiné les temporalités des interventions altruistes, observées durant ses recherches. Ces actions altruistes touchent à l’accompagnement et à la responsabilisation croissante de chaque individu face à son propre parcours. La sociologie du genre fut essentielle pour lui, lui offrant une vision renouvelée du temps social à travers un prisme genré, tout en incorporant des aspects moraux pour décrypter la dimension genrée des interventions socio-sanitaires. Les théories du care et de la reconnaissance lient les questions d’âge et de genre à celles de la protection sociale et de ses méthodes d’intervention. Les évolutions temporelles de la société entraînent une modification des mécanismes de régulation, basée sur la proximité, l’urgence et également l’émotion. Elles révèlent la nature émotionnelle des temporalités sociales, un aspect sur lequel il a toujours jugé nécessaire de se pencher, en particulier à partir des dimensions kairologiques (de Kairos, le temps opportun).

Une présence constante et un pilier de la revue Temporalités

3Les sujets de ses travaux doctoraux, qui se concentraient sur le rôle du service militaire dans la socialisation et sur la justice des mineurs, étaient profondément ancrés dans la sociologie de la jeunesse. Cependant, sa fascination pour l’analyse temporelle de l’institution biographique, visant à comprendre les évolutions contemporaines de l’insertion des jeunes et des politiques liées aux âges, l’a poussé à insérer cette sociologie dans un cadre analytique plus large, à savoir l’approche du parcours de vie (life course approach). Durant les années 1990, il a croisé le chemin de William Grossin, éditeur du bulletin Temporalistes, crée en 1984. Par la suite, il s’est rapproché de Giovanni Gasparini qui organisait régulièrement au milieu des années 1990 un séminaire international sur les temps sociaux dans la prestigieuse Maison Suger de Paris. Marc y a contribué activement, en animant aux côtés de notre collègue de l’université de Milan, des échanges très stimulants entre spécialistes des temporalités venus de plusieurs pays et issus de diverses disciplines (sociologues, historiens, politistes, philosophes et psychologues). C’est dans ce cadre propice aux débats interdisciplinaires, alors qu’à cette époque les travaux sur les temporalités étaient relativement périphériques dans le monde des sciences sociales, qu’a été conçu le projet d’une revue scientifique internationale qui devait prendre la succession du bulletin des Temporalistes. De cette volonté commune à laquelle Marc a largement participé allait naître quelques années plus tard, sous la direction de Claude Dubar, la revue Temporalités.

4Dès ses débuts comme chargé de recherche au CNRS dans le Groupe de Recherche sur la Socialisation à Lyon II, Marc Bessin a entrepris des travaux qui ont trouvé une résonance particulière en sociologie des politiques sociales et de la jeunesse. Le succès de sa thèse a ensuite infusé dans d’autres domaines de la sociologie. Son œuvre a contribué aux recherches sur les temporalités autour des notions de flexibilité temporelle, d’érosion des seuils, de bifurcations et déstandardisation du parcours de vie. Durant une vingtaine d’années, Marc Bessin a été un acteur majeur de la revue Temporalités, par sa participation active au comité, ses publications, ses coordinations, et sa bienveillance dans les échanges. En lui, nous perdons un compagnon de route inestimable, un ami et un collègue précieux.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Jens Thoemmes et Jean-Marc Ramos, « Marc Bessin (1965–2023) »Temporalités [En ligne], 37-38 | 2023, mis en ligne le 26 octobre 2023, consulté le 25 juin 2025. URL : http://journals.openedition.org/temporalites/11596 ; DOI : https://doi.org/10.4000/temporalites.11596

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Auteurs

Jens Thoemmes

Certop, UMR 5044, thoemmes@univ-tlse2.fr

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Jean-Marc Ramos

Certop, UMR 5044, jean-marc.ramos@univ-montp3.fr

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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