2Cette étude s’inscrit dans une perspective d’histoire globale et transnationale dans le but de dépasser le compartimentage national et disciplinaire avec des analyses à différentes échelles, afin d’illustrer des phénomènes d’interrelations et d’interdépendances. L’adoption de cette perspective historique permet d’insister sur les tiers, les acteurs et les outils qui rendent possibles les interactions. Trois entrées sont explorées : la première a trait aux lieux (lieux de vie, de travail, de projets) et renvoie à une géographie de l’architecte et de l’architecture en posant la question de la topographie des lieux d’Adolf Loos ; la seconde prend acte des circulations nombreuses qui caractérisent cette période et qui constituent une autre lecture des mises en lien que pratique Loos ; enfin, lieux et circulations s’inscrivent dans des réseaux avec des familles et des hiérarchies d’acteurs dont le dessin permet de comprendre l’insertion transnationale de Loos.

3À partir de l’hypothèse selon laquelle 1918 constituerait une brisure dans la carrière de Loos, le travail souligne à la fois les ruptures et les continuités de sa carrière après-guerre. Ni biographie selon une structure chronologique, ni approche selon les différentes facettes de l’architecte, la thèse propose une topographie biographique autour de l’habiter en tant que marqueur professionnel et individuel qui articule les différentes facettes de l’architecte : le Loos architecte et professeur, théoricien et publiciste, cosmopolite et citadin ou encore acteur de la communauté artistique.

4Un triple décentrement de regard est ainsi proposé : un décentrement temporel avec le choix de l’après-guerre moins étudié ; un décentrement spatial afin d’extraire Loos des seuls espaces et contextes nationaux pour l’inscrire dans une géographie européenne et internationale ; et un décentrement thématique afin de proposer une synthèse des différentes facettes de Loos autour d’une culture de l’habiter. À partir de documents d’archives dispersés et pour certains inédits conservés en Autriche, en France, en Italie, en République Tchèque ou encore en Suède, la thèse construit une géographie de l'architecte appuyée sur des cartes et schémas et analyse les espaces dans lesquels Loos évolue. Ces espaces, à la fois géographiques et immatériels, mettent en lumière la manière dont Loos et ses cercles créent et habitent ces différents espaces, soit leurs stratégies d’appropriation des lieux. La thèse, structurée en trois parties, interroge à travers une approche multiscalaire, l’espace médiatique que Loos se constitue et qu’il alimente durant toute sa carrière tant par des mots que des postures ; l’ “espace conçu” tel qu’imaginé par Loos et ses élèves dans leurs travaux en tant qu’architectes et l’ “espace vécu” qui renvoie à leurs habitudes et à leurs images de la ville ; et enfin, l’espace des interactions qui figure une cartographie des réseaux autour de Loos (commanditaires, médiateurs, amis, famille, etc.) avec quelques personnages majeurs dans le processus de transmission.