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2025

Variabilité climatique et stratégies d’adaptation des riziculteurs de la Basse-Casamance (Sénégal)

Climate variability and adaptation strategies of rice farmers in Basse-Casamance (Senegal)
Alexandre Badiane, Tidiane Sané, Marie-Christine Cormier-Salem, Marie Hélène Téning Faye et Mamadou Thior

Résumés

Depuis plusieurs décennies, l’Afrique de l’Ouest connaît une perturbation des conditions climatiques marquée par une irrégularité des précipitations et une augmentation significative des températures avec des répercussions négatives sur les moyens d’existence des populations rurales. En Basse-Casamance, la riziculture traditionnelle, base du patrimoine lignager et au fondement de l’identité diola, traverse une crise exacerbée par le changement climatique. Ce travail analyse les impacts de la variabilité climatique et les stratégies d’adaptation des riziculteurs de la Basse-Casamance. La méthode combine les outils de la géographie environnementale et sociale, à savoir le traitement et l’analyse des données climatiques, les enquêtes par questionnaire et guide d’entretien et les séances d’observation directe et participante. L’analyse des données pluviométriques et de températures a permis d’observer un retour à des conditions plus humides depuis le début du XXIe siècle, avec une forte variabilité spatio-temporelle des précipitations et une augmentation significative des températures moyennes en Basse-Casamance. Il résulte des enquêtes que les riziculteurs comptent sur leurs savoirs et savoir-faire pour s’adapter à la variabilité climatique, les politiques publiques étant souvent en déphasage avec les réalités locales. Aujourd’hui, les riches connaissances et compétences de ces riziculteurs sont de plus en plus menacées par les changements globaux limitant ainsi leur capacité d’adaptation. Ainsi, ce travail vise à contribuer au débat scientifique sur les savoirs, pratiques et innovations des communautés locales et s’interroge sur l’opérationnalité de la transition agroécologique dans ce contexte.

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Texte intégral

Ce travail a été réalisé grâce aux soutiens financiers et matériels du Service de Coopération et d'Action Culturelle (SCAC) de l’Ambassade de France au Sénégal, du Ministère de l’Enseignement Supérieur de la Recherche et de l’Innovation du Sénégal (MESRI) et de l’UMR 208 PALOC (IRD, MNHN, CNRS) « Patrimoines locaux, environnement et globalisation » de Paris, que nous remercions. Nous exprimons nos remerciements aux riziculteurs et personnes ressources de la Basse-Casamance auprès de qui nous avons collecté les données d’enquête.

Introduction

1Le monde entier subit actuellement d’importants changements, notamment les modifi­cations des paramètres climatiques. Les modifications les plus perceptibles concernent les températures à travers le réchauffement global et les manifestations de canicule et les précipitations dont la variabilité se traduit par l’augmentation de phénomènes météorologiques extrêmes, telles la sécheresse, les fortes précipitations et les inondations (Calame, 2016 ; IPCC, 2019 ; Olivier, 2021 ; Sagna et al., 2015). Agir face à l’urgence climatique est un défi majeur actuel, que doit relever l’ensemble des habitants de la planète.

2En Afrique de l’Ouest, la variabilité climatique a été un sujet récurrent de préoccupation pour les populations et d’intérêt pour une communauté scientifique diversifiée, réunissant notamment climatologues, dynamiciens de l’atmosphère, hydrologues et écologues (Balme et al., 2006). Dans cette région, l’agriculture pluviale représente près de 93 % des terres cultivées avec une population rurale fortement dépendante de cette activité (Sultan et al., 2015). Les impacts de la variabilité climatique sont de plus en plus manifestes dans cette région où la pauvreté endémique augmente le risque de gravité des catastrophes naturelles et limite les possibilités d’adaptation des agriculteurs (Sultan et al., 2021). L’irrégularité des précipitations et l’augmentation des températures constatées depuis plusieurs décennies impactent la production agricole et menacent la sécurité alimentaire des populations qui en dépendent (Alemu et al., 2019). Cette variabilité climatique n’épargne pas la Basse-Casamance où le secteur de la riziculture traverse une crise multiforme, rendant vulnérables les populations locales (Badiane et al., 2019 ; Sané et al., 2018).

  • 1 Un changement transformateur est défini comme une réorganisation fondamentale à l’échelle du systèm (...)

3Face au changement climatique qui apparaît inéluctable, l’atténuation et l’adaptation deviennent une urgence et doivent être abordées de manière complémentaire et mises en œuvre à plusieurs échelles, de l’international au local (Locatelli, 2010). Cela a conduit le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique pour la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) à inciter le monde vers un « changement transformateur1» de nos modes de vie en faveur de la planète (Schmeller, 2024). Aujourd’hui, le secteur de l’agriculture doit non seulement s’adapter aux aléas climatiques mais aussi contribuer à l’atténuation du changement climatique. Sa fonction ne se limite plus à la simple production des aliments pour nourrir la population mondiale en pleine croissance, mais elle doit désormais participer à la préservation de la biodiversité, à l’atténuation du changement climatique (Sartre, 2016 ; Calame, 2016) et au renforcement de la capacité de stockage de carbone organique des sols (IPBES, 2018; IPCC, 2019a). Dès lors, des alternatives agricoles comme l’agroécologie suscitent un engouement fort pour répondre aux grands défis actuels (Olivier, 2021).

4La question de l’adaptation des petits producteurs à l’échelle locale sera abordée dans cet article à travers l’exemple des riziculteurs traditionnels de la Basse-Casamance. Dans cette région où la riziculture traditionnelle traverse une crise multiforme liée à la variabilité climatique, aux dynamiques démographiques et à la baisse de la main-d’œuvre, mais aussi les conflits politiques et les effets économiques de la globalisation, les populations sont de plus en plus vulnérables et leur sécurité alimentaire est plus que jamais menacée. Face à la variabilité climatique et au recul de l’activité rizicole notés dans cette région, il devient important de mener une réflexion sur l’adaptation des riziculteurs de la Basse-Casamance et de l’articuler avec les politiques de la transition agroécologique au Sénégal. Ainsi, après avoir caractérisé la variabilité climatique, à travers l’analyse des données pluviométriques et des températures, nous analysons la perception paysanne de l’impact de la variabilité climatique dans le secteur de la riziculture et enfin, les stratégies d’adaptation mises en œuvre par les riziculteurs.

Présentation de la zone d’étude

5Située à l’extrémité sud-ouest du Sénégal, la Basse-Casamance correspond à la région administrative de Ziguinchor découpée en trois départements : Ziguinchor, Bignona et Oussouye (figure 1). Cette région couvre une superficie totale de 7339 km² avec une densité de 75 habitants/km² et constitue une des régions les plus riches du Sénégal en matière de potentialités agricoles, forestières et hydrologiques. Cette région doit sa singularité à la pluviométrie, dont la moyenne annuelle à la station de Ziguinchor s’élève à environ 1500 mm, et également à ses habitants et à son histoire, notamment sa longue résistance à toute pénétration étrangère et la prégnance des rites animistes (Pélissier, 1966, Journet, 1993, Cormier-Salem, 1999). La riziculture domine les paysages et définit le calendrier des activités. Le riz est la base de l’alimentation et a des valeurs culturelles mais aussi cultuels. Le vieux riz rouge est ainsi conservé précieusement dans les greniers pour les cérémonies d’initiation.

Figure 1 : Carte de localisation de la Basse-Casamance

Figure 1 : Carte de localisation de la Basse-Casamance

Matériel et méthode

6La méthode combine les outils de la géographie environnementale et sociale (Blanchard et al., 2021), à savoir le traitement et l’analyse des données climatiques, les enquêtes par questionnaire et guide d’entretien, et les séances d’observation directe et participante, permettant d’approcher au plus près le vécu et la parole des acteurs. Cette démarche est justifiée par un besoin de croiser les données climatologiques et les données d’enquête de terrain, notamment la perception des riziculteurs de la Basse-Casamance, pour mieux analyser la variabilité climatique, ses impacts ainsi que les stratégies d’adaptation développées dans le secteur de la riziculture.

Données climatiques

7Les données climatiques (pluviométrie et température) utilisées dans ce travail proviennent de l’Agence Nationale de l’Aviation Civile et de la Météorologie du Sénégal (ANACIM). Pour une meilleure analyse de la variabilité pluviométrique à l’échelle de la Basse-Casamance, nous avons travaillé avec une série pluviométrique allant de 1951 à 2022 sur les trois principales stations de la région : Ziguinchor, Bignona et Oussouye. S’agissant des données de température, les moyennes annuelles ont été utilisées sur une série allant de 1951 à 2022 pour la station de Ziguinchor, représentative de la région.

8Le traitement des données pluviométriques est basé sur le calcul des Indices Standardisés des précipitations (ISP). L’ISP est un indice simple qui est adopté en 2009 par l’Organisation Mondiale de la Météorologie (OMM) comme un instrument mondial pour mesurer les sécheresses météorologiques (Faye et al., 2017 ; Jouilil et al., 2013). Il permet de comparer des séries différentes, de synthétiser l’information et de visualiser l’évolution des séries sur une longue période (Balme et al., 2006). Cet indice traduit un excédent ou un déficit pluviométrique pour l’année considérée par rapport à la période de référence (1951-2022). Il met également en évidence l’intensité du déficit ou de l’excès pluviométrique (Niang et al., 2008). Il s’exprime sous la formule suivante proposée par Balme et al. (2006) : ISP = (Pi – Pmoy) / σ où Pi = Pluie de l’année i ; Pmoy= pluie moyenne de la série ; σ = écart-type de la série.

9Pour une analyse fine des résultats sur les indices standardisés des précipitations, la classification de McKee et al. (1993) a été appliquée. À travers cette classification, suivant les valeurs de l’ISP, McKee et al. (1993) ont défini les critères pour un "événement de sécheresse" pour toutes les échelles de temps. Un événement de sécheresse se produit chaque fois que l’ISP est continuellement négatif et que sa valeur atteint une intensité de -1 ou moins et se termine lorsque l’ISP devient positif (tableau 1).

Tableau 1 : Classification des séquences de sécheresse en fonction de l’ISP

Valeurs de l’ISP

Séquences de sécheresses

Valeurs de l’ISP

Séquences humides

0,00 <ISP <-0,99

Légèrement sèche

0,00 <ISP <0,99

Légèrement humide

-1,00 <ISP <-1,49

Modérément sèche

1,00 <ISP <1,49

Modérément humide

-1,50 <ISP <-1,99

Sévèrement sèche

1,50 <ISP <1,99

Sévèrement humide

ISP <-2,00

Extrêmement sèche

2,00 <ISP

Extrêmement humide

McKee et al., 1993.

10Pour les températures, nous avons travaillé avec les données de la station de Ziguinchor, la principale station de la région. Les températures moyennes annuelles (T° m) ont été d’abord calculées sur Excel 2020 selon la formule mathématique suivante proposée par Sagna et al. (2015): T° m = T° x + T° n/2.

11où T°m = température moyenne ; T°x = température maximale et T°n = température minimale.

12À partir des températures moyennes obtenues, nous avons déterminé les anomalies par rapport à la normale 1961-1990 selon la méthode de calcul des écarts suivante (Sagna et al., 2015) : Écart °C = T° m – Normale 1961-1990.

Les enquêtes de terrain

13Les enquêtes de terrain ont été réalisées dans quatorze villages de la Basse-Casamance. Le choix des villages est fondé sur la présence des vallées et l’importance des activités rizicoles, la diversité des activités qu’on y relève et la proximité des terroirs aux réseaux hydrographiques. Ce choix est représentatif, en ce sens qu’il garantit une meilleure répartition de l’enquête sur l’ensemble des départements de la Basse-Casamance. Ainsi, deux outils de collecte ont principalement été utilisés pour les enquêtes de terrain : le questionnaire et le guide d’entretien.

14Les enquêtes par questionnaire ont été réalisées auprès de 250 ménages agricoles, répartis dans 14 terroirs rizicoles de la Basse-Casamance (tableau 2). Pour distribuer notre échantillon sur l’ensemble des 14 villages, nous avons adopté l’échantillonnage par quota en calculant le nombre de ménages à interroger dans chaque village selon la formule suivante proposée par (Diatta et al., 2010) : nm = (Nm / N) x n.

15Où nm = nombre de ménages enquêtés par village ; Nm = nombre de ménages par village ; N = population cible (2865) et n = taille de l’échantillon (250).

Tableau 2 : Présentation de l’échantillon de l’enquête (nombre de ménages interrogés)

Villages

Nombre de ménages (Nm)

Nombre de Ménages interrogés (nm)

Niaguis

438

38

Adéane

587

51

Enampore

116

10

Kamobeul

107

9

Boukitingho

123

10

Mlomp Kadjifolong

204

18

Mlomp Haer

89

8

Affiniam

335

29

Affiniam bouteum

80

7

Coubalan

203

18

Djilacoune

138

12

Hathioune

97

9

Djiguinoume

77

7

Kabadio

271

24

Total

2 865

250

ANSD, 2013 ; traitement Badiane, 2022.

16Généralement réservé aux personnes-ressources (Robert-Muller, 1923), le guide d’entretien apporte une base d’informations qualitatives dans le cadre d’une étude. Il peut être associé à d’autres outils de collecte de données, tels que le questionnaire, pour compléter les informations qualitatives dans le but d’approfondir l’analyse des données obtenues (Morange et al., 2016). C’est justement dans ce cadre complémentaire que nous avons recouru au guide d’entretien pour approfondir les résultats du questionnaire et des données climatiques. Le type d’entretien semi-directif (semi-dirigé), étant le dispositif le plus utilisé dans la recherche (Royer et al., 2009), a été adopté. Il est également important de mentionner que les entretiens se sont déroulés, soit en français ou en langues locales (diola ou mandingue) selon la convenance de notre interlocuteur. Ainsi, 32 personnes ressources ont été interviewées, dont 8 agents des structures d’encadrement agricoles, 2 responsables des organisations paysannes, 2 élus locaux, 20 riziculteurs, principalement des chefs de villages et responsables des comités de vallées et de digues anti-sel. Les enquêtes ont été un moment important de partage et de collecte de données qualitatives basées sur les échanges, l’observation directe et participante, la prise de photos. Par partage, nous faisons référence aux séjours prolongés sur le terrain accueillis dans la maison de différentes familles « tutrices », aux repas partagés avec ces riziculteurs, à notre implication dans les travaux rizicoles, au cours desquels d’importantes informations ont été obtenues à partir de conversations libres ou davantage structurées.

17Après l’étape de l’élaboration du questionnaire et de la collecte de données, le dépouillement, le traitement et l’analyse des données ont été faits sur le logiciel Sphinx. Les entretiens réalisés sur le terrain ont été transcrits sur un fichier Word avant d’être analysés. Le croisement de ces données a permis de mieux comprendre et d’analyser les impacts de la variabilité climatique sur la riziculture ainsi que les stratégies d’adaptation des riziculteurs de la Basse-Casamance.

Résultats

La variabilité pluviométrique en Basse-Casamance

18Les pluies représentent l’élément climatique fondamental, qui conditionne les différentes activités agricoles, surtout en Afrique de l’Ouest. Sa variabilité entraîne souvent une modification des systèmes culturaux, une perturbation des calendriers agricoles et du système économique et social (Djohy et al., 2015). À l’image des autres régions de l’Afrique de l’Ouest, la Basse-Casamance est également confrontée, depuis plusieurs décennies, à une série de perturbations du régime pluviométrique, ayant des conséquences sur les écosystèmes fragiles et en particulier sur les activités rizicoles. L’un des plus grands événements climatiques ayant traversé cette région, reste la longue sécheresse des années 1970 à 1990 où une baisse généralisée des précipitations a été notée dans toutes les régions du Sahel (Descroix et al., 2015 ; Lamb, 1982 ). Depuis la fin du dernier millénaire, l’Afrique de l’Ouest connaît un retour des conditions pluviométriques plus humides (Bodian, 2014 ; Descroix et al., 2013 et 2015). Malgré ce retour des pluies, qui s’exprime par des moyennes annuelles plus relevées, la perturbation du régime pluviométrique persiste encore en Basse-Casamance. Aujourd’hui, l’irrégularité pluviométrique (fluctuation interannuelle des pluies, installation tardive de la saison des pluies, retrait précoce, longues séquences sèches au cours de la saison…) préoccupe les riziculteurs et perturbe les calendriers agricoles. Ainsi, l’analyse de l’évolution interannuelle des indices standardisés des précipitations a permis d’observer les irrégularités pluviométriques entre les différentes années de la série 1951-2022 au niveau des trois stations étudiées (Ziguinchor, Bignona et Oussouye).

L’analyse de l’évolution interannuelle des indices standardisés des précipitations

19La figure 2 montre l’évolution des ISP au niveau des stations de Ziguinchor, Bignona et Oussouye, de 1951 à 2022. On note une importante variabilité des précipitations, essentiellement marquée par une alternance de périodes humides (excédentaires) et de périodes sèches (déficitaires) ou encore d’années humides et d’années sèches au niveau des trois stations. Après le très long épisode sec (1968-1995), très étendu (plus de 6 millions de km² très touchés) et très prononcé (de 10 à 40 % de diminution des précipitations suivant les lieux) qu’a connu l’Afrique de l’Ouest, on assiste à une reprise de la pluviométrie (Descroix et al., 2015). Cette reprise, généralement constatée vers la fin du XXe et début du XXIe siècle, ne s’est pas manifestée en même temps dans les différentes régions de l’Afrique de l’Ouest. Elle est avérée dès 1993 dans le bassin du Niger (Descroix et al., 2013), dès 1998 au Sénégal (Bodian, 2014 ; Sagna et al., 2015) et durant la décennie 2001-2010 pour les postes sahéliens (Descroix et al., 2015).

20En Basse-Casamance, le retour à des conditions plus humides, après la longue sècheresse, est principalement observé en 1999 dans les stations de Ziguinchor et de Bignona, et en 1997 à la station de Oussouye comme en attestent les ISP qui sont relativement bien humides à Ziguinchor (1,88) et légèrement humides à Oussouye et à Bignona (figure 2). Malgré ce retour, les précipitations annuelles restent, d’une manière générale, inférieures à celle d’avant sécheresse, à l’exception de l’année 2020 extrêmement humide à Ziguinchor, avec un ISP de 2,21, et à Oussouye (2,14), et un ISP relativement humide à la station de Bignona (figure 2). Par ailleurs, il est important de noter la forte variabilité interannuelle des précipitations depuis 1999 jusqu’en 2022 sur l’ensemble des stations analysées. Seule la station de Ziguinchor a connu un retour des précipitations plus ou moins régulier avec 58,3 % d’années excédentaires et 41,7 % d’années déficitaires. De courtes périodes sèches, pouvant dépasser trois années successives, sont également observées après les années de retour au niveau des stations d’Oussouye (2002 - 2007 et 2016-2019) et de Bignona (2001- 2005 et 2016-2019). Il s’y ajoute une alternance entre année sèche et année humide, plus remarquable au niveau de la station de Bignona (figure 2).

Figure 2 : Variation temporelle des ISP à Ziguinchor (a), Oussouye (b) et Bignona (c) de 1951-2022

Figure 2 : Variation temporelle des ISP à Ziguinchor (a), Oussouye (b) et Bignona (c) de 1951-2022

ANACIM, 2022 ; traitement Badiane, 2024.

21L’ensemble de ces résultats est en accord avec les travaux de Ali et al. (2008) sur la zone sahélienne, Descroix et al. (2015) en Afrique de l’Ouest, Ozer et al. (2009) au Niger, Mendes & Fragoso, (2024) en Guinée-Bissau, Bodian (2014) et Sagna et al. (2015) au Sénégal, Sané (2017) et Mballo et al. (2019) en Casamance. Ces travaux ont respectivement confirmé le retour à des conditions plus humides dans les régions étudiées vers le début du XXIe siècle. Ce retour est certes une réalité, mais il doit être nuancé au vu de la forte variabilité interannuelle constatée au niveau des stations de Ziguinchor, Bignona et Oussouye. Ce n’est surtout pas la moyenne pluviométrique annuelle qui intéresse le plus les riziculteurs de la Basse-Casamance, mais plutôt la régularité des précipitations dans le temps et dans l’espace.

Le réchauffement climatique en Basse-Casamance

22Le réchauffement climatique est, pour les scientifiques, sans équivoque et a de plus en plus d’incidences sur les secteurs d’activités (IPCC, 2019). Selon les prévisions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’augmentation de la température moyenne à la surface du globe, d’ici 2100, va se situer entre 1 °C et 6 °C (IPCC, 2013). Cette augmentation se rapproche de 5 °C, d’ici 2100, pour la région de l’Afrique de l’Ouest (IPCC, 2013), et de 4 °C pour le Sénégal, d’ici 2050 ( USAID, 2014). L’ensemble de ces projections correspond à différents scénarios d’émission de gaz à effet de serre, et à des estimations du réchauffement pour ces scénarios d’émission modérées (Kandel, 2019). Aujourd’hui, on observe les manifestations du réchauffement climatique dans toutes les régions du monde avec des conséquences variables d’une région à une autre. C’est surtout le cas au Sénégal où Sagna et al. (2015) ont montré l’adéquation entre les projections du GIEC (2013) pour la région de l’Afrique de l’Ouest et les températures moyennes observées au Sénégal entre 1950 et 2014. L’une des conséquences principalement observées dans le secteur de l’agriculture est la baisse des rendements (Bellia, 2003 ; Djohy et al., 2015 ; Mballo et al., 2019 ; Sagna et al., 2015).

23En Basse-Casamance, le secteur de la riziculture, en plus des irrégularités pluviométriques, souffre de la variation des températures dont les conséquences les plus perceptibles sont : l’assèchement précoce des vallées, le stress hydrique constaté sur le riz avant maturation, la baisse des rendements. En nous inspirant des travaux de Sagna et al. (2015) réalisés à l’échelle du Sénégal, nous analysons l’évolution des températures en Basse-Casamance, tout en intégrant les données récentes disponibles (1951-2022).

L’analyse de l’évolution des températures moyennes annuelles entre 1951 et 2022

24L’analyse des températures moyennes annuelles par rapport à la normale 1961-1990 montre une nette augmentation entre 1951 et 2022. Cela se traduit par les écarts dont la tendance générale est à la hausse avec d’importantes variations notées entre les années (figure 3). Avec un écart thermique de 2,94 °C, l’année 2016 est la plus chaude de la série 1951-2022. Ainsi, l’analyse de la figure 4 laisse apparaître deux grandes périodes : 1951-1978 et 1979-2022.

25La première période (1951-1978) est globalement caractérisée par des températures moyennes plus faibles que la normale 1961-1990 avec un écart de -0,3 °C. Cette période est à cheval entre les années d’avant sécheresse (1951-1967) où les températures annuelles étaient globalement plus faibles que la normale, et les années de sécheresse (1969-1978), surtout marquées par une légère augmentation des températures, dont le maximum a été atteint en 1973 (écart de 0,3 °C). La hausse des températures intervient donc au moment où les précipitations sont déficitaires. S’agissant de la deuxième période (1979-2022), elle est caractérisée par une augmentation des températures annuelles, relativement plus importante que la normale, avec 2016 comme année la plus chaude (2,94 °C) et 1986 comme année la moins chaude de la période (0,1 °C). Cette période débute au cœur de la sécheresse (1979-1996), avec des températures qui dépassent la normale, mais variable d’une année à l’autre. Les plus fortes températures de la série sont surtout observées après la grande sécheresse où des écarts thermiques compris entre 0,5 °C et 2,9 °C ont été notés. Entre 1997 et 2022, seules cinq années présentent un écart inférieur à 1 °C (1999, 2001, 2003, 2007 et 2022).

Figure 3 : Évolution des écarts à la normale (1961-1990) des températures moyennes annuelles à Ziguinchor de 1951 à 2022

Figure 3 : Évolution des écarts à la normale (1961-1990) des températures moyennes annuelles à Ziguinchor de 1951 à 2022

ANACIM, 2022, traitement Badiane, 2024.

26Ces résultats sont en adéquation avec les projections du GIEC pour les régions de l’Afrique de l’Ouest (IPCC, 2013) et de l’USAID pour le Sénégal (USAID, 2014). Ils corroborent également les résultats de Sagna et al. (2015) qui ont observé une augmentation de plus de 1°C au Sénégal entre 1950 et 2014, de Djohy et al. (2015) avec une augmentation de 2,4 °C au nord du Benin entre 1965 et 2012. Ainsi, le plus grand écart thermique, par rapport à la normale 1961-1990, observé à l’échelle de la Basse-Casamance, représente le double de celui observé au Sénégal par Sagna et al. (2015), justifiant ainsi un réchauffement des températures plus prononcé à l’échelle de la Basse-Casamance par rapport à la moyenne nationale.

La perception paysanne de la variabilité climatique en Basse-Casamance

27Les riziculteurs de la Basse-Casamance ont une bonne connaissance du climat et de sa variabilité à l’échelle des terroirs. Cette connaissance est issue d’une longue expérience dans la riziculture, l’observation de leur milieu biophysique et du comportement pluviométrique au fil des années. Le tableau 3présente les résultats des enquêtes sur la perception paysanne de la variabilité climatique dans les terroirs selon les tranches d’âges. Ainsi, 89,2 % des riziculteurs interrogés perçoivent la variabilité climatique à travers les irrégularités des précipitations, 39,6 % ont parlé d’augmentation des températures et 18,4 % ont évoqué l’élévation du niveau de la mer (tableau 3).

28Lors des entretiens semi-directifs, la question pluviométrique a surtout été mise en avant par les riziculteurs interrogés. Certains évoquent la courte durée de la saison des pluies, liée au démarrage tardif (fin juillet ou parfois début août) et à la fin précoce de la saison (fin septembre ou début octobre), et d’autres parlent d’un décalage de la saison des pluies. Si le premier cas semble être plus fréquent en Basse-Casamance, le deuxième cas n’est pas à exclure. La situation pluviométrique de l’année 2019 en est une illustration où les déficits notés en début de saison ont été légèrement compensés vers la fin, avec un mois d’octobre relativement pluvieux.

Tableau 3 : Perception des riziculteurs de la variabilité climatique en Basse-Casamance

Âge des répondants

Irrégularité pluviométrique

Augmentation des températures

Élévation du niveau de la mer

15 à 20 ans

0,0 %

100 %

0,0 %

21 à 30 ans

90,6 %

53,1 %

12,5 %

31 à 40 ans

77,1 %

37,5 %

0,0 %

41 à 50 ans

92,5 %

35,9 %

17,0 %

51 à 60 ans

95,0 %

36,7 %

23,3 %

60+

91,1 %

39,3 %

21,4 %

TOTAL

89,2 %

39,6 %

18,4 %

29Selon les tranches d’âges, on note que les personnes âgées (51 à plus de 60 ans) sont celles qui soutiennent le plus l’idée d’une irrégularité pluviométrique, de l’augmentation des températures et de l’élévation du niveau de la mer. La plupart d’entre elles ont vécu la période d’avant sécheresse ainsi que les différents aléas climatiques qui ont perturbé la région de la Basse-Casamance. Cette connaissance a également été retrouvée chez les jeunes (21 à 30 ans et 31 à 40 ans), surtout liée à une transmission des savoirs par les plus anciens. Ainsi, à la suite des précédents travaux réalisés au sein des communautés locales des pays du Sud (Agossou et al., 2012; Cormier-Salem, 2015; Janicot et al., 2015), nos résultats d’enquête montrent que les riziculteurs de la Basse-Casamance ont une bonne lecture des phénomènes climatiques essentiellement fondée sur leur savoir. La perception paysanne de la variabilité climatique en Basse-Casamance corrobore ainsi les résultats climatologiques précédemment analysés, notamment la hausse des températures et l’irrégularité des précipitations.

La perception paysanne de l’impact de la variabilité climatique

30Le tableau 4 montre les résultats des enquêtes de la perception des riziculteurs de la Basse-Casamance des impacts de la variabilité climatique sur la riziculture. Le bouleversement des calendriers des opérations agricoles (33,3 %), la baisse des rendements (31,9 %), la perte de terres rizicoles (22,7 %) et l’assèchement précoce des vallées (36 %), sont perçus par les riziculteurs comme les principaux effets de la variabilité climatique sur la riziculture à l’échelle de leurs terroirs (tableau 4).

Tableau 4 : Perceptions paysannes des impacts de la variabilité climatique en Basse-asamance

Impact de la variabilité climatique

Nombre de citations

Fréquences

Bouleversement du calendrier agricole

245

33,3 %

Baisse des rendements

235

31,9 %

Perte de terres rizicoles (par intrusion des eaux salées)

167

22,7 %

Assèchement précoce des vallées rizicoles

89

12,1 %

Total

736

100 %

31Cette perception des riziculteurs confirme les projections du GIEC qui indique que le réchauffement futur prévu aura de graves répercussions sur la production agricole dans le monde, notamment la baisse des rendements (IPCC, 2019). Aujourd’hui, les travaux réalisés au Sahel (Sultan et al., 2015), au Benin (Djohy et al., 2015), au Burkina Faso (Ouedraogo, 2012), en Haute-Casamance (Mballo et al., 2019), ont également conclu à une baisse des rendements agricoles liée à la variabilité climatique. Sultan et al., (2015) notent une perte de rendement de 19 % à l’ouest du Sahel ; Ouedraogo (2012) montre une baisse des revenus agricoles de 3,6 % pour une augmentation de la température à hauteur de 1 °C.

L’impact de la variabilité climatique sur les vallées rizicoles

32La forte variabilité des précipitations et des températures, observée en Basse-Casamance, a également eu de grandes répercussions sur les vallées rizicoles. Les superficies des rizières exploitées diminuent progressivement dans la majeure partie des terroirs de la Basse-Casamance. Les visites réalisées sur le terrain ont permis d’observer la présence de nombreuses vallées rizicoles envahies par le sel et abandonnées par les populations. Les raisons évoquées par ces dernières sont relatives à l’intrusion des eaux salées dans les parcelles rizicoles et la baisse de la pluviométrie. C’est le cas des vallées rizicoles abandonnées de Djiguinoume et de Niaguis, où les riziculteurs empruntent ou encore louent des parcelles accessibles dans les villages voisins pour pratiquer la riziculture. Retenons également l’exemple du village d’Adéane, où les rizières situées près du fleuve subissent l’influence des eaux salées pendant les marées hautes et finissent par être abandonnées (photo 1). Selon Sonko (riziculteur et responsable de digue anti-sel à Adéane) : « Lorsque la pluviométrie était abondante, nous cultivions jusqu’au bord de la mangrove. Mais aujourd’hui, l’avancée du fleuve a récupéré une bonne partie de nos parcelles situées au bord du fleuve, et la pluviométrie n’est plus comme avant pour permettre un bon dessalement de ces rizières ». Cette affirmation fait état du recul considérable de la riziculture de mangrove dans ce terroir, et qui est d’ailleurs confirmé par les travaux de Badiane (2022).

33De nombreux travaux réalisés en Casamance ont montré les impacts de la grande sécheresse des années 1970 sur les écosystèmes de mangrove (Cormier-Salem, 1999; Marius & Lucas, 1982), les écoulements (Olivry, 1987; Olivry & Dacosta, 1984), les sols (Montoroi, 1991; Brunet, 1988; Mougenot et al., 1990). À la suite de ces travaux, les études réalisées dans les estuaires de la Basse-Casamance et du Sine-Saloum montrent une importante variation des taux de salinité en fonction des conditions pluviométriques (Badiane et al., 2019 ;Sané et al., 2018; Descroix et al., 2020). Nos travaux d’enquête montrent que, malgré le retour des précipitations constaté en Basse-Casamance depuis le début des années 2000, la dégradation des terres par salinisation et acidification s’est amplifiée dans de nombreux villages situés à proximité des cours d’eau. Les impacts de la variabilité climatique sur la dynamique des espaces rizicoles sont aujourd’hui aggravés par le problème de disponibilité de la main-d’œuvre pour la réfection des digues anti-sel.

Photo 1 : Vue aérienne de la vallée rizicole d’Adéane

Photo 1 : Vue aérienne de la vallée rizicole d’Adéane

Google earth, Juillet 2022, traitement Badiane, 2022.

Les impacts de la variabilité climatique sur le calendrier des activités agricoles

34Le calendrier des activités agricoles détermine le positionnement dans le temps des différentes activités agricoles, de même que les opérations culturales. Il permet d’identifier l’ensemble des activités agricoles pratiquées dans une zone donnée ainsi que la fourchette de temps définie pour chaque opération culturale.

  • 2 Principal instrument aratoire utilisé à la main par les riziculteurs diola pour labourer la terre e (...)

35En Basse-Casamance, les riziculteurs n’ont souvent pas accès à l’information climatique pour une meilleure planification agricole au cours de l’année, ce qui rend difficile la définition préalable de calendriers agricoles. Ce manque d’information climatique limite la capacité d’anticipation des riziculteurs face au retard pluviométrique et à la fin précoce de la saison des pluies. Dans leurs pratiques habituelles, les riziculteurs se basent sur l’importance des quantités de pluies reçues et leurs régularités pour démarrer les opérations de mise en valeur rizicole. Par exemple, dans le cadre de la mise en place des pépinières de riz, ou encore du semis direct, les riziculteurs attendent que le sol soit suffisamment humide et praticable avec le kajendu2 pour démarrer les activités de labour. Ils se basent également sur l’observation des périodes pluvieuses (enchainement des pluies au cours de la saison) pour semer. Le tableau 5 ci-après présente le calendrier des opérations agricoles défini par les riziculteurs de la Basse-Casamance durant la campagne agricole 2019 et 2020. Ce tableau illustre les modifications apportées par les rizicultures sur le calendrier agricole au cours des deux saisons pluviométriques successives dont l’une est déficitaire (2019) et l’autre excédentaire (2020).

36Ainsi, le calendrier cultural de l’année 2020 est considéré par les riziculteurs comme une référence lorsque les conditions pluviométriques sont favorables. Avec un total pluviométrique de 2041,9 mm à la station de Ziguinchor, l’année 2020 est la plus pluvieuse de la série 1951-2022. Elle reflète la situation pluviométrique d’avant sécheresse et totalise cinq (5) mois humides (juin, juillet, août, septembre et octobre) avec un maximum pluviométrique de 836,7 mm obtenu au mois d’août. Les quantités pluviométriques obtenues en juin (109,6 mm) et en juillet (379,4 mm) ont suffisamment arrosé les parcelles, permettant ainsi le début des cultures de plateau (riz pluvial, arachide, riz, mil et maïs) et la mise en place des pépinières de riz. Contrairement à l’année 2020, l’année 2019 totalise quatre mois pluvieux (juillet, août, septembre et octobre) avec un maximum pluviométrique relativement faible (420 mm) obtenu en août. Les totaux pluviométriques obtenus au mois de juin sont jugés insuffisants par les riziculteurs pour le démarrage des activités. Les observations effectuées sur le terrain en 2019 ont également permis de constater une irrégularité inter-journalière des précipitations avec des pauses pluviométriques en début de saison pouvant aller jusqu’à plus d’une semaine. Ainsi, la plupart des paysans ayant semé au mois de juillet 2019 (lors des premières pluies) ont perdu leurs semences en raison de l’arrêt temporaire des pluies observé entre juin et juillet. Les fortes températures, notées durant cette période (34 °C), ont occasionné la mortalité de certains jeunes plants, obligeant ainsi les paysans à semer à nouveau ou encore à abandonner leurs champs.

37Selon les enquêtes, le retard pluviométrique, combiné à la courte durée de la saison des pluies et la variabilité inter-journalière, ont entraîné soit un raccourcissement du calendrier des opérations culturales, soit un léger décalage. Dans le cas de la riziculture pluviale, les opérations de labour et semis qui se font, en temps normal, au mois de juillet, ont eu lieu en août lors de la saison 2019 (tableau 5). Il en est de même pour les opérations de récolte qui se sont prolongées jusqu’en novembre, au lieu d’octobre. Ces mêmes modifications ont été observées dans le cas de la riziculture inondée où les pépinières de riz ont été semées avec un grand retard (août). Cela a eu des répercussions sur les périodes de labour et de repiquage.

38Les travaux réalisés au Benin (Djohy et al., 2015 ; Sognon et al., 2020) et au Sénégal (Badiane, 2022), montrent que le retard pluviométrique entraîne souvent une modification du calendrier des opérations culturales. Cela est confirmé par nos travaux qui montrent que les calendriers culturaux sont définis par les paysans en fonction des conditions pluviométriques et sont donc variables d’une année sur l’autre.

Tableau 5 : Calendrier des principales opérations agricoles entre 2019 et 2020

Tableau 5 : Calendrier des principales opérations agricoles entre 2019 et 2020

Les stratégies d’adaptation des riziculteurs face à la variabilité climatique

39Face au changement climatique, l’atténuation et l’adaptation constituent les approches prédominantes et fortement recommandées pour diminuer la vulnérabilité des populations (Janicot et al., 2015). La définition des politiques d’adaptation et d’atténuation au changement climatique est plus que jamais une urgence exprimée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique pour la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES). Ces derniers parlent même de changement transformateur de nos modes de vie pour préserver la planète (Schmeller, 2024 ; IPCC, 2019 ; IPBES, 2018).

40Aujourd’hui, les petits exploitants agricoles, à l’image des riziculteurs de la Basse-Casamance, doivent s’adapter au changement climatique pour éviter l’aggravation de l’insécurité alimentaire dans les années à venir. Dans cette région, les riziculteurs remettent à l’ordre du jour les stratégies jadis développées pour s’adapter à la sécheresse des années 1970 (construction de digues anti-sel, utilisation de la matière organique, diversification des activités agricoles et non agricoles), auxquelles s’ajoutent les stratégies innovantes proposées par le secteur privé et étatique (figure 4). Parmi ces innovations, il convient de noter l’introduction des variétés certifiées, la pratique du Système de Riziculture Intensive, la construction d’ouvrage sur les digues anti-sel, l’introduction de la mécanisation. Toutefois, la diffusion de ces innovations, qu’elles soient techniques, économiques ou institutionnelles, suscite un ensemble d’interrogations sur l’efficacité des stratégies développées, mais aussi sur la durabilité de ces innovations dans un contexte de changement climatique et de transition agroécologique.

41Les enquêtes de terrain révèlent un ensemble de contraintes auxquelles les riziculteurs de la Basse-Casamance ont tenté d’apporter des réponses pour s’adapter. L’irrégularité pluviométrique, la salinisation et l’acidification des terres rizicoles et la baisse de la main-d’œuvre agricole sont citées par les riziculteurs comme les principales contraintes de la riziculture traditionnelle en Basse-Casamance (figure 4).

Figure 4 : Contraintes rizicoles et stratégies d’adaptation mises en œuvre par les riziculteurs de Basse-Casamance

Figure 4 : Contraintes rizicoles et stratégies d’adaptation mises en œuvre par les riziculteurs de Basse-Casamance

Enquête Badiane, 2022.

  • 3 Le système de riziculture intensive (SRI) est un système « agroécologique » né au Madagascar, conçu (...)

42Pour faire face aux irrégularités pluviométriques, surtout au cours des années marquées par une installation tardive des précipitations, de nombreux riziculteurs privilégient le semis direct au niveau des rizières peu profondes à la place du repiquage (photo 2 b) et l’utilisation des variétés à cycle court ou intermédiaire à la place des variétés à cycle long plus exigeantes en eau. D’autres s’intéressent à l’expérimentation du Système de Riziculture Intensive3 dans les rizières de pentes (photo 2 c) avec l’utilisation des variétés certifiées, fournies par les projets et programmes de recherche. La diversification des activités agricoles et non agricoles, telles que l’arboriculture fruitière (photo 3 b), le maraîchage de contre-saison, la commercialisation des fruits (photo 3 a), la migration, sont autant de stratégies développées par les riziculteurs et constituent de véritables sources de revenus pour les ménages agricoles. Ces revenus servent également à financer les travaux rizicoles, à travers le paiement de la main-d’œuvre.

Photo 2 : Labour à plat avec motoculteur (a) et pratique de semis direct (b) dans une parcelle rizicole à Coubalan ; repiquage du riz selon le système de Riziculture Intensive (SRI) à Tobor (c) ; sélection participative des variétés de riz avec les rizicultrices à Djébélor (d)

Photo 2 : Labour à plat avec motoculteur (a) et pratique de semis direct (b) dans une parcelle rizicole à Coubalan ; repiquage du riz selon le système de Riziculture Intensive (SRI) à Tobor (c) ; sélection participative des variétés de riz avec les rizicultrices à Djébélor (d)

Badiane, juillet 2021 (a, b et c) ; octobre, 2021 (d).

Photo 3 : Stratégie de diversification des activités agricoles en Basse-Casamance : commercialisation des fruits par les femmes à Bignona (a), exploitation de l’anacarde par les familles à Adéane (b)

Photo 3 : Stratégie de diversification des activités agricoles en Basse-Casamance : commercialisation des fruits par les femmes à Bignona (a), exploitation de l’anacarde par les familles à Adéane (b)

Badiane, mai 2021 (a et b).

Les stratégies d’aménagement hydroagricole

43La volonté de l’État du Sénégal de développer le secteur de l’agriculture, de la riziculture en particulier, ne date pas d’aujourd’hui. Cette volonté s’est traduite par la réalisation de plusieurs aménagements hydroagricoles en Basse-Casamance, dont les plus remarquables sont le barrage d’Affiniam (photo 4 a) construit sur le marigot de Bignona entre 1980-1982, et celui de Guidel construit entre 1984-1988 dans la commune de Niaguis. De nombreux autres aménagements, comme les mini-barrages munis d’ouvrage pour la gestion de l’eau, ont été construits dans de nombreux terroirs rizicoles de la Basse-Casamance (photo 4 b). Le but de ces aménagements est de lutter contre la remontée de la langue salée dans les parcelles rizicoles, d’accroître les surfaces cultivables et d’améliorer leur productivité. Ces aménagements devaient aussi permettre aux riziculteurs de mieux s’adapter aux contraintes climatiques. Cependant, les grands aménagements réalisés (barrages d’Affiniam et de Guidel) ont connu d’importants échecs liés à l’inachèvement des ouvrages et des aménagements secondaires initialement prévus, avec des effets directs sur la régression des écosystèmes de mangrove et la dégradation des rizières situées autour et en amont des barrages. Selon les populations locales, l’échec de ces aménagements est en grande partie lié à la non-prise en compte de leur savoir dans le processus de prise de décision.

44Depuis quelques années, des innovations, prenant en compte les savoirs et savoir-faire paysans, sont de plus en plus notées dans certains terroirs. Prenons l’exemple du terroir de Boukitingho, où les populations locales, après avoir exprimé leurs besoins auprès du Programme Régional de Renforcement de la Résilience à l’Insécurité Alimentaire et Nutritionnelle au Sahel (P2RS), ont bénéficié de la construction d’une digue anti-sel en latérite sur une longueur de 1,39 km, accompagnée d’ouvrages pour l’évacuation des eaux pluviales (photo 4 b). Cet aménagement a permis de récupérer plus de 70 hectares de rizières, désormais mises en valeur.

Photo 4 : Barrages hydroagricoles de Affiniam (a) ; construction d’ouvrage évacuateur de crue sur une digue anti-sel à Boukintingho (b)

Photo 4 : Barrages hydroagricoles de Affiniam (a) ; construction d’ouvrage évacuateur de crue sur une digue anti-sel à Boukintingho (b)

Badiane, juillet 2019 (a et b).

Les stratégies agroécologiques en Basse-Casamance

45En Basse-Casamance, les pratiques des riziculteurs observées sur le terrain : aménagement traditionnel, combinaison entre agriculture-élevage (photo 5 a), usage de la matière organique, sélection et gestion des semences paysannes, pratique de l’agroforesterie (photo 5 b), diversification des cultures et des activités non agricoles et le recyclage de la biomasse végétale, sont au cœur des systèmes rizicoles agroécologiques de cette région.

Photo 5 : Troupeau de vaches conduit dans les rizières de Boukitingho (a) ; riz semé sous les palmiers à huile à Djibélor (b)

Photo 5 : Troupeau de vaches conduit dans les rizières de Boukitingho (a) ; riz semé sous les palmiers à huile à Djibélor (b)

Badiane, juin 2022 (a) ; Août 2022 (b).

46La figure 5 montre une étroite relation entre les principes de l’agroécologie définis par Altiéri (1995) et les pratiques des riziculteurs de la Basse-Casamance identifiées lors des enquêtes de terrain. Les pratiques traditionnelles comme l’utilisation de la matière organique (n°2), la combinaison agriculture et élevage (n°4), la pratique de l’agroforesterie (n°5) et la réutilisation de la biomasse (paille de riz) dans les parcelles rizicoles correspondent au principe n°2 de l’agroécologie, notamment « la gestion de la matière organique du sol et la stimulation de son activité biotique » (figure 5). Ces pratiques, très anciennes chez les riziculteurs de Basse-Casamance, permettent alors de maintenir la fertilité et la durabilité des sols, mais aussi de renforcer la capacité de stockage de carbone organique du sol (Malou et al., 2021). Elles sont aujourd’hui promues par l’agroécologie pour remplacer les intrants chimiques et limiter les impacts de l’agriculture sur le climat.

47En outre, le principe n°4 sur la « diversification des espèces et des variétés génétiques cultivées dans le temps et dans l’espace », promu par l’agroécologie, est également loin d’être nouveau en Basse-Casamance. Dans cette région, les riziculteurs pratiquent une diversification des cultures (riziculture, maraîchage de contre-saison, arboriculture fruitière, autres cultures de plateau, etc.) et des activités non agricoles comme la pêche, l’artisanat, la cueillette des huîtres, etc. (figure 5). Cette diversification est essentielle en agroécologie en ce sens qu’elle permet d’améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition tout en conservant, en protégeant et en mettant en valeur les ressources naturelles (FAO, 2018).

48Entre autres pratiques, il convient de retenir le recyclage de la biomasse végétale qui est fréquent dans la riziculture traditionnelle en Basse-Casamance. Une partie de cette biomasse est généralement laissée dans les parcelles rizicoles après la récolte pour fertiliser les terres, et surtout pour rehausser le niveau du pH dans les parcelles avec un taux d’acidité élevé. La paille de riz est également utilisée dans le maraîchage pour la couverture du sol et des pépinières contre les fortes températures.

49Ainsi, les différentes pratiques des riziculteurs de la Basse-Casamance décrites sont en phase avec les principes de l’agroécologie définis par Altieri (1995). À notre avis, ces pratiques traditionnelles peuvent donc être considérées comme agroécologiques. Toutefois, si le savoir agroécologique est ancien, le concept, tel qu’on l’entend aujourd’hui, est relativement nouveau (Olivier, 2021). L’agroécologie ne se résume pas qu’aux simples pratiques, mais plutôt à l’ensemble de l’agrosystème et au système alimentaire (Calame, 2016).

Figure 5 : Vue d’ensemble des liens entre les cinq principes de l’agroécologie (Altiérie, 1995) et les pratiques des riziculteurs de la Basse-Casamance

Figure 5 : Vue d’ensemble des liens entre les cinq principes de l’agroécologie (Altiérie, 1995) et les pratiques des riziculteurs de la Basse-Casamance

Enquête Badiane, 2022

L’analyse de l’efficacité des stratégies développées dans le secteur de la riziculture

50D’une manière générale, les stratégies mises en place tant par les riziculteurs que par l’État n’ont pas encore permis de répondre de façon efficace aux besoins des populations ni de favoriser le développement de la riziculture. Cette activité est de plus en plus abandonnée dans certains terroirs situés sur tout le long du fleuve Casamance, suite à l’état avancé de la dégradation des rizières en grande partie liée à la salinisation et à l’acidification. Les grands aménagements hydroagricoles, réalisés en Basse-Casamance, avaient suscité de grands espoirs du côté de la population. Malheureusement, ces aménagements ont connu d’importants échecs avec des conséquences sur la dégradation de la mangrove (Tendeng et al., 2016) et la perte des terres rizicoles. Parallèlement, les stratégies locales, comme la construction de digues anti-sel et le transport de la matière organique dans les parcelles, ne se font plus de manière régulière, voir même ont disparu dans certains terroirs, en raison de la baisse de la main-d’œuvre en Basse-Casamance.

51Aujourd’hui, le secteur de la riziculture traditionnelle intègre des innovations, notamment l’introduction timide de la mécanisation (tracteurs, motoculteurs), de nouvelles variétés certifiées de riz, l’expérimentation du Système de Riziculture Intensive (SRI). Certaines de ces innovations s’inscrivent dans la politique agricole du Sénégal définie dans le plan Sénégal émergent (PSE) et sont portées au niveau local par les structures de l’État en collaboration avec les organisations paysannes. Ces innovations introduites ont permis aux paysans, qui en bénéficient, d’améliorer les rendements et d’augmenter la production rizicole, mais aussi de limiter les effets des irrégularités pluviométriques à travers l’anticipation des labours et l’utilisation des variétés à cycle court et intermédiaire.

52Il est clair que les innovations apportées donnent des résultats satisfaisants sur les rendements rizicoles, mais elles ne font pas l’objet d’unanimité chez les riziculteurs surtout du point de vue écologique et économique. Il se pose alors la question d’acceptation de ces innovations qui, parfois, ne tiennent pas compte des réalités socioculturelles au niveau local. Nos travaux de terrain ont permis de constater que ces innovations sont essentiellement concentrées dans les départements de Bignona et de Ziguinchor. Cela est surtout lié à la multiplication des interventions des structures d’encadrement agricoles dans ces terroirs et à la présence des organisations paysannes qui sensibilisent, accompagnent et forment les riziculteurs sur les pratiques rizicoles basées sur l’utilisation des semences certifiées, l’expérimentation du SRI, etc. Dans cette zone de la Basse-Casamance, le besoin d’innover dans les pratiques rizicoles est de plus en plus ressenti chez les riziculteurs qui font face à une importante baisse de la main-d’œuvre et à l’irrégularité des précipitations au fil des années.

53Cependant, si les innovations apportées semblent avoir du succès chez les riziculteurs qui en bénéficient, elles se heurtent à des réalités physiques (problème d’accessibilité et d’adaptation des engins dans les rizières profondes) et socioculturelles dans certaines zones comme le département de Oussouye et une partie de Ziguinchor. Dans ces terroirs, les paysans sont très attachés aux semences locales (pour des raisons culturelles et cultuelles) qu’ils conservent eux-mêmes et qu’ils échangent entre eux en cas de besoins sans avoir recours à l’argent. La confiance que ces riziculteurs ont de leur système agroécologique alliant riziculture, élevage et usage de la matière organique, explique parfois le rejet des paquets technologiques proposés par les structures d’encadrement agricoles. En plus, ces riziculteurs n’ignorent pas les impacts écologiques de l’utilisation des engrais chimiques dont l’épuisement des sols et la baisse de fertilité. Il s’y ajoute la question économique liée au coût d’accès à ces innovations (achat d’engrais et de semences, location de tracteur ou de motoculteur). Certains riziculteurs perçoivent l’introduction des semences certifiées et des engrais chimiques comme une menace à leurs savoirs et savoir-faire (gestion des semences, gestion de la fertilité des sols), et craignent une dépendance vis-à-vis de ces innovations dont le coût n’est pas accessible à tous. Cela pose également la question de la durabilité et de la pérennité des innovations dans le secteur de la riziculture en Basse-Casamance.

54Des travaux réalisés en Afrique de l’Ouest, notamment au Mali (Sissoko et al., 2008), au Burkina Faso (Olivier, 2021), montrent également la réticence de certains paysans dans l’adoption des innovations basées sur l’utilisation des semences certifiées et des intrants chimiques. La faible prise en compte des qualités propres aux variétés locales par les programmes d'amélioration des plantes explique le rejet des nouveaux cultivars par les paysans (Sissoko et al., 2008). Il est fréquent dans le discours des agents d’encadrement agricoles que l’échec des innovations, en particulier des aménagements hydroagricoles, est lié à la « négligence des paysans » qui n’entretiennent pas les digues et ouvrages construits dans leurs terroirs en Basse-Casamance. De tels discours, remettant en cause les capacités des paysans à innover et à s’adapter aux différentes innovations qui leur sont proposées, ne se basent sur aucun fondement scientifique et manquent de considération vis-à-vis des savoirs et savoir-faire des paysans. D’ailleurs, Dupré (1991) précise que ce discours commun aux développeurs masque soit des impossibilités concrètes de mettre en œuvre les nouvelles techniques, soit un très faible intérêt économique des changements proposés aux paysans et cela parce que leurs priorités et leurs besoins ne sont pas identifiés.

55Dans les pays du Sud, les populations n’ont pas attendu les décisions d’experts pour commencer à ajuster leurs stratégies de subsistance aux changements qu’elles sont en mesure de percevoir et d’anticiper (Janicot et al., 2015). C’est le cas en Basse-Casamance où les riziculteurs diola se sont habitués depuis fort longtemps aux variations des conditions climatiques et ont toujours su développer des stratégies pour s’adapter, (Cormier-Salem, 1985, 1989, 1992). Aujourd’hui, l’innovation du secteur de la riziculture traditionnelle en Basse-Casamance est, selon les riziculteurs, une nécessité pour développer la riziculture. Mais cela doit passer par l’implication des populations locales et la prise en compte de leur savoir et savoir-faire dans les processus de prise de décision.

Conclusion

56À l’image des autres régions de l’Afrique de l’Ouest, la Basse-Casamance connaît une variabilité climatique marquée par une forte irrégularité des précipitations et une augmentation significative des températures moyennes. Ces changements, bien perçus par les riziculteurs de la Basse-Casamance, ont des impacts sur les activités rizicoles et menacent la sécurité alimentaire des populations qui en dépendent. Les stratégies jusqu’ici développées par les riziculteurs (construction des digues anti-sel, gestion de la fertilité des sols…) ou encore par les projets et programmes (aménagement hydroagricoles, introduction timide de la mécanisation) sont insuffisantes pour développer le secteur de la riziculture et permettre une meilleure adaptation des riziculteurs face aux changements à venir. Le niveau de vulnérabilité des populations de la Basse-Casamance n’a cessé d’augmenter ces dernières années, suite aux différentes crises internationales (Covid-19, guerres en Ukraine et en Palestine) dont les conséquences sont très importantes sur l’augmentation du prix des denrées de première nécessité.

57Dans ce contexte marqué par de nombreuses incertitudes liées aux crises climatique, économique, sociale et politique dans le monde, réduire la forte dépendance alimentaire du Sénégal, à travers la valorisation du secteur agricole, est un grand défi qui permettra de limiter la vulnérabilité des populations. Le secteur de la riziculture en Basse-Casamance, avec son important potentiel, doit contribuer à l’atteinte de la sécurité alimentaire. Des innovations adaptées y sont nécessaires, mais selon les voies nouvelles promues par l’agroécologie.

58Dès lors, la transition agroécologique doit permettre de relancer le secteur de la riziculture afin de relever les défis de la sécurité alimentaire, de l’emploi des jeunes, tout en respectant l’environnement et le climat. Cela passe par une prise en compte et un renouvellement des savoirs et pratiques de ces riziculteurs dans la recherche scientifique (co-construction des savoirs académiques et non-académiques), leur participation aux projets et initiatives agroécologiques au niveau local, mais aussi leur accompagnement en faveur des pratiques innovantes en agroécologie. Toutefois, les différentes crises constatées, dans un monde globalisé ou interconnecté, relancent le débat entre vision productiviste pour nourrir le monde et vision agroécologique pour préserver la santé de la planète et des humains. Les scientifiques se doivent d’éclairer les politiques pour qu’ils prennent les décisions à long terme à même de respecter la planète tout en luttant contre la faim et la pauvreté dans le monde.

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Bibliographie

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Ali, A., Lebel, T. et Amani, A. (2008). Signification et usage de l’indice pluviométrique au Sahel. Sécheresse, 19(4), pp. 227‑235.

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Notes

1 Un changement transformateur est défini comme une réorganisation fondamentale à l’échelle du système tenant compte des facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris les paradigmes, les objectifs et les valeurs.

2 Principal instrument aratoire utilisé à la main par les riziculteurs diola pour labourer la terre et construire des digues anti-sel et des diguettes

3 Le système de riziculture intensive (SRI) est un système « agroécologique » né au Madagascar, conçu au niveau local avec les paysans, et qui préconise une innovation technique basée sur le repiquage en ligne de jeunes plants de riz compris entre 8 à 15 jours, avec de faibles densités de repiquage et une gestion adaptée de l’eau.

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Table des illustrations

Titre Figure 1 : Carte de localisation de la Basse-Casamance
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-1.png
Fichier image/png, 208k
Titre Figure 2 : Variation temporelle des ISP à Ziguinchor (a), Oussouye (b) et Bignona (c) de 1951-2022
Légende ANACIM, 2022 ; traitement Badiane, 2024.
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-2.png
Fichier image/png, 54k
Titre Figure 3 : Évolution des écarts à la normale (1961-1990) des températures moyennes annuelles à Ziguinchor de 1951 à 2022
Légende ANACIM, 2022, traitement Badiane, 2024.
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-3.png
Fichier image/png, 38k
Titre Photo 1 : Vue aérienne de la vallée rizicole d’Adéane
Crédits Google earth, Juillet 2022, traitement Badiane, 2022.
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-4.png
Fichier image/png, 1,1M
Titre Tableau 5 : Calendrier des principales opérations agricoles entre 2019 et 2020
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-5.png
Fichier image/png, 43k
Titre Figure 4 : Contraintes rizicoles et stratégies d’adaptation mises en œuvre par les riziculteurs de Basse-Casamance
Légende Enquête Badiane, 2022.
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-6.png
Fichier image/png, 271k
Titre Photo 2 : Labour à plat avec motoculteur (a) et pratique de semis direct (b) dans une parcelle rizicole à Coubalan ; repiquage du riz selon le système de Riziculture Intensive (SRI) à Tobor (c) ; sélection participative des variétés de riz avec les rizicultrices à Djébélor (d)
Légende Badiane, juillet 2021 (a, b et c) ; octobre, 2021 (d).
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-7.png
Fichier image/png, 548k
Titre Photo 3 : Stratégie de diversification des activités agricoles en Basse-Casamance : commercialisation des fruits par les femmes à Bignona (a), exploitation de l’anacarde par les familles à Adéane (b)
Légende Badiane, mai 2021 (a et b).
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-8.png
Fichier image/png, 370k
Titre Photo 4 : Barrages hydroagricoles de Affiniam (a) ; construction d’ouvrage évacuateur de crue sur une digue anti-sel à Boukintingho (b)
Légende Badiane, juillet 2019 (a et b).
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-9.png
Fichier image/png, 291k
Titre Photo 5 : Troupeau de vaches conduit dans les rizières de Boukitingho (a) ; riz semé sous les palmiers à huile à Djibélor (b)
Légende Badiane, juin 2022 (a) ; Août 2022 (b).
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-10.png
Fichier image/png, 315k
Titre Figure 5 : Vue d’ensemble des liens entre les cinq principes de l’agroécologie (Altiérie, 1995) et les pratiques des riziculteurs de la Basse-Casamance
Crédits Enquête Badiane, 2022
URL http://journals.openedition.org/vertigo/docannexe/image/48251/img-11.png
Fichier image/png, 78k
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Pour citer cet article

Référence électronique

Alexandre Badiane, Tidiane Sané, Marie-Christine Cormier-Salem, Marie Hélène Téning Faye et Mamadou Thior, « Variabilité climatique et stratégies d’adaptation des riziculteurs de la Basse-Casamance (Sénégal) »VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [En ligne], Regards / Terrain, mis en ligne le 21 mars 2025, consulté le 29 avril 2025. URL : http://journals.openedition.org/vertigo/48251 ; DOI : https://doi.org/10.4000/13k6r

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Auteurs

Alexandre Badiane

Postdoctorant, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), chercheur associé à l’UMR 208 PALOC « Patrimoines locaux, environnement et globalisation », IRD/MNHN/CNRS, Paris, France, adresse courriel : a.badiane785@zig.univ.sn

Tidiane Sané

Enseignant chercheur, Département de Géographie, Laboratoire de Géomatique et d’Environnement, Université Assane Seck de Ziguinchor (Sénégal) ; chercheur associé à l’UMR 208 PALOC « Patrimoines locaux, environnement et globalisation », IRD/MNHN/ CNRS, Paris, France, adresse courriel : tsane@univ-zig.sn

Marie-Christine Cormier-Salem

Directrice de recherche de classe exceptionnelle, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), UMR 208 PALOC « Patrimoines locaux, environnement et globalisation », IRD/MNHN/CNRS, Paris, France, adresse courriel : marie.cormier@ird.fr

Marie Hélène Téning Faye

Doctorante, Laboratoire de Géomatique et d’Environnement, Université Assane Seck de Ziguinchor, Sénégal, adresse courriel : m.faye2014278@zig.univ.sn

Mamadou Thior

Enseignant chercheur, Département de géographie, Laboratoire de géographie humaine, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Sénégal, adresse courriel : mamadou6.thior@ucad.edu.sn

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Droits d’auteur

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